L’ENFANT NÉ DE MARIE

La Nativité Giotto - 1267-1337 - fresque église de l’Arena - Padoue
La Nativité Giotto – 1267-1337 – fresque église de l’Arena – Padoue

Tout être humain est unique, enclos en lui-même. Les contingences extérieures de sa naissance ou de son existence n’éclairent pas ce fond secret que seul Dieu pénètre avec la personne même.

Dans ce lien intime, il n’y a «ni Juif, ni Grec, ni homme libre, ni esclave» (Galates 3, 27-28). Pourtant quand on veut connaître un arbre, on regarde la terre qui enferme ses racines.

Considérons donc Marie, d’où est issu le Seigneur. La manière dont elle répond à la salutation de l’ange a quelque chose de remarquable. Une proposition extraordinaire lui est présentée : faire un saut dans la nuit en se fiant à Dieu. Marie le fait avec une grandeur simple et ignorée d’elle-même.

Ensuite son destin se façonne sur celui de son enfant : soupçon douloureux qui se pose entre elle et son fiancé Joseph ; voyage à Bethléem, où elle enfante dans la pauvreté ; fuite en Égypte et séjour inévitable à l’étranger, loin de la douce sécurité où elle avait jusque là vécu ; vie précaire et périlleuse, jusqu’à ce qu’elle rentre chez elle avec la permission de Dieu.

Et, quand à l’âge de douze ans, son fils reste au Temple et qu’elle le retrouve après l’avoir anxieusement cherché, pour la première fois elle semble comprendre que celui qui est entré dans sa vie est un divin étranger (Luc 2, 41-50).

Au reproche si normal : «Enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? Voici que ton père et moi, avec douleur, t’avons cherché !», le jeune Jésus répond : «Pourquoi m’avez-vous cherché ? Ne saviez-vous pas que je dois être dans la maison de mon Père ?»

Pour Marie alors se réalise la prophétie de Siméon : «Un glaive te transpercera le coeur» (Luc 2, 35). Le récit ajoute : «Ils ne comprirent pas la parole qu’il venait de leur adresser.»

Mais juste après, il y a ces mots : «Sa mère conserva ces paroles dans son cœur.» Elle ne les comprend pas, on nous le dit. Son esprit ne peut les sonder, mais en ses profondeurs son âme croyante les accueille, pareille à la terre s’ouvrant à une précieuse semence, à qui elle consent de se développer. ■

 

Jean-Daniel Planchot, cm