Archives de catégorie : Méditation

sur un aspect de spiritualité : Christ, Vierge Marie, Église dans le monde…

MESSE EN LA FÊTE DE L’EXALTATION DE LA SAINTE CROIX

!VOYAGE APOSTOLIQUE DE SA SAINTETÉ FRANÇOIS AU KAZAKHSTAN
(13-15 SEPTEMBRE 2022)

MESSE EN LA FÊTE DE L’EXALTATION DE LA SAINTE CROIX

HOMELIE DU SAINT-PÈRE

Place de l’Expo, Noursoultan
Mercredi 14 septembre 20

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La croix est un gibet de mort, et pourtant, en ce jour de fête, nous célébrons l’exaltation de la Croix du Christ. C’est parce que sur ce bois, Jésus a pris sur lui notre péché et le mal du monde, et il les a vaincus par son amour. Voilà pourquoi nous la célébrons aujourd’hui. La Parole de Dieu que nous avons entendue nous le raconte, en opposant, d’une part, les serpents qui mordent et, d’autre part, le serpent qui sauve. Arrêtons-nous sur ces deux images.

Tout d’abord, les serpents qui mordent. Ils attaquent le peuple qui est tombé pour la énième fois dans le péché du murmure. Murmurer contre Dieu ce n’est pas seulement dire du mal et se plaindre de Lui ; cela signifie plus profondément, que, dans le cœur des Israélites, la confiance en Lui, en Sa promesse, a fait défaut.

Le peuple de Dieu, en effet, marche dans le désert vers la terre promise et accablé par la fatigue, il ne supporte pas le voyage (cf. Nb 21,4). Alors il se décourage, il perd espoir, et, à un certain moment, c’est comme s’il oublie la promesse du Seigneur : ils n’ont plus la force de croire que c’est Lui qui conduit leur voyage vers une terre riche et féconde.

Ce n’est pas une coïncidence si, alors que leur confiance en Dieu s’épuise, le peuple est mordu par des serpents qui tuent. Ceux-ci rappellent le premier serpent mentionné dans la Bible, dans le livre de la Genèse, le tentateur qui empoisonne le cœur de l’homme pour le faire douter de Dieu.

En effet, le diable, précisément sous la forme d’un serpent, séduit Adam et Ève, les trompe et les rend méfiants en les convainquant que Dieu n’est pas bon, mais qu’il est plutôt envieux de leur liberté et de leur bonheur.

A présent, dans le désert, les serpents reviennent, des « serpents brûlants » (v. 6) ; c’est dire que le péché des origines revient : les Israélites doutent de Dieu, ils ne lui font pas confiance, ils murmurent, se rebellent contre Celui qui leur a donné la vie et vont ainsi à leur mort. Voilà où mène la défiance du cœur !

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Chers frères et sœurs, cette première partie du récit nous demande de regarder de plus près les moments de notre histoire personnelle et communautaire où la confiance, dans le Seigneur et entre nous, a failli. Combien de fois, découragés et impatients, nous nous sommes desséchés dans nos déserts, perdant de vue le but du voyage !

Dans ce grand pays aussi, il existe un désert qui, tout en offrant un paysage splendide, nous parle de cette peine, de cette aridité que nous portons parfois dans notre cœur. Ce sont les moments de fatigue et d’épreuve, dans lesquels nous n’avons plus la force de regarder vers le haut, vers Dieu.

Ce sont les situations de la vie personnelle, ecclésiale et sociale dans lesquelles nous sommes mordus par le serpent de la méfiance qui nous injecte les poisons de la désillusion et du découragement, du pessimisme et de la résignation, en nous enfermant dans notre ego, en éteignant l’enthousiasme.

Mais dans l’histoire de cette terre, il y a eu d’autres morsures douloureuses : je pense aux serpents brûlants de la violence, de la persécution athée, à un parcours parfois troublé au cours duquel la liberté du peuple a été menacée et sa dignité blessée.

Il est bon que nous gardions le souvenir de ce que nous avons souffert : nous ne devons pas effacer de notre mémoire certaines obscurités, au risque de croire qu’elles appartiennent au passé et que le chemin du bien est tracé pour toujours.

Non, la paix n’est jamais acquise une fois pour toutes, elle doit être conquise chaque jour, tout comme la coexistence entre les différentes ethnies et traditions religieuses, le développement intégral et la justice sociale.

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Et pour que le Kazakhstan grandisse encore plus « dans la fraternité, le dialogue et la compréhension […] pour construire des ponts de solidarité et de coopération avec d’autres peuples, nations et cultures » (St Jean Paul II, Discours lors de la cérémonie d’accueil, 22 septembre 2001), l’engagement de tous est nécessaire. Avant tout, un acte de foi renouvelé envers le Seigneur est nécessaire : lever les yeux, regarder vers Lui et apprendre de son amour universel et crucifié.

Nous en arrivons ainsi à la deuxième image : le serpent qui sauve. Alors que le peuple meurt à cause des serpents brûlants, Dieu entend la prière d’intercession de Moïse et lui dit : « Fais-toi un serpent et dresse-le au sommet d’un mât ; celui qui sera mordu et qui le regardera restera en vie » (Nb 21,8).

En effet, « quand un serpent avait mordu quelqu’un, s’il regardait le serpent d’airain, il restait en vie » (v. 9). Nous pourrions toutefois nous demander pourquoi Dieu, au lieu de donner ces instructions pénibles à Moïse, n’a-t-il pas simplement détruit les serpents venimeux ? Cette manière de faire nous révèle sa façon d’agir face au mal, au péché et à la méfiance de l’humanité.

Alors comme maintenant, dans le grand combat spirituel qui anime l’histoire jusqu’à la fin, Dieu n’anéantit pas les bassesses que l’homme poursuit librement : les serpents venimeux ne disparaissent pas, ils sont toujours là, embusqués, ils peuvent toujours mordre. Qu’est-ce qui a changé alors, que fait Dieu ?

Jésus l’explique dans l’Évangile : « Comme Moïse a élevé le serpent dans le désert, il faut que le Fils de l’homme soit élevé, afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle » (Jn 3, 14-15). Voici le tournant : le serpent qui sauve est arrivé parmi nous: Jésus qui, élevé sur le bois de la croix, ne permet pas aux serpents venimeux qui nous assaillent de nous conduire à la mort.

Face à nos bassesses, Dieu nous donne une nouvelle hauteur : si nous gardons le regard tourné vers Jésus, les morsures du mal ne peuvent plus nous dominer, parce que, sur la croix, il a pris sur Lui le poison du péché et de la mort et en a anéanti le pouvoir destructeur.

C’est ce que le Père a fait face à propagation du mal dans le monde ; il nous a donné Jésus, qui s’est fait proche de nous d’une manière telle que nous n’aurions jamais pu l’imaginer : « Lui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a fait péché pour nous » (2 Co 5, 21).

Telle est l’infinie grandeur de la miséricorde divine : Jésus qui s’est « fait péché » pour nous, Jésus qui sur la croix s’est « fait serpent » – pourrions-nous dire – afin qu’en regardant vers Lui, nous puissions résister aux morsures empoisonnées des serpents mauvais qui nous assaillent.

Frères et sœurs, voici la route, la voie de notre salut, de notre renaissance et de notre résurrection : regarder Jésus crucifié. De cette hauteur, nous pouvons voir nos vies et l’histoire de nos peuples d’une manière nouvelle. Car de la Croix du Christ, nous apprenons l’amour, et non la haine ; nous apprenons la compassion, et non l’indifférence ; nous apprenons le pardon, et non la vengeance.

Les bras ouverts de Jésus sont l’étreinte de tendresse avec laquelle Dieu veut nous accueillir. Et ils nous montrent la fraternité que nous sommes appelés à vivre entre nous et avec tous.

Ils nous montrent le chemin, le chemin chrétien : non pas le chemin de l’imposition et de la contrainte, du pouvoir et de l’importance, jamais le chemin qui brandit la croix du Christ contre d’autres frères et sœurs pour lesquels il a donné sa vie ! La voie de Jésus, la voie du salut est autre : c’est la voie de l’amour humble, gratuit et universel, sans « si » et sans « mais ».

Oui, parce que sur le bois de la croix, le Christ a enlevé le poison du serpent du mal, et qu’être chrétien signifie vivre sans poisons : ne vous mordez pas, ne murmurez pas, n’accusez pas, ne bavardez pas, ne répandez pas d’œuvres mauvaises, ne polluez pas le monde avec le péché et la méfiance qui vient du Malin.

Frères et sœurs, nous renaissons du côté ouvert de Jésus sur la croix : qu’il n’y ait pas en nous de poison de mort (cf. Sg 1, 14). Prions plutôt pour que, par la grâce de Dieu, nous devenions de plus en plus chrétiens : témoins joyeux de la vie nouvelle, de l’amour et de la paix.

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Remerciements à la fin de la Messe

Merci, Mgr Peta, pour vos paroles, merci pour tous vos efforts déployés dans la préparation de cette célébration et de ma visite. À cet égard, je tiens à renouveler ma cordiale gratitude aux Autorités civiles et religieuses du pays.

Je vous salue tous, frères et sœurs, en particulier ceux qui sont venus d’autres pays d’Asie centrale, et de régions éloignées de cette terre sans limites. Je bénis de tout cœur les personnes âgées et les malades, les enfants et les jeunes.

Aujourd’hui, fête de l’Exaltation de la Sainte Croix, sentons-nous spirituellement unis au sanctuaire national de la Reine de la Paix, d’Oziornoje. Mgr Tomash a rappelé qu’il y a là une grande croix, sur laquelle est notamment écrit : « Au peuple du Kazakhstan merci » et « paix aux hommes ».

La gratitude envers le Seigneur pour le saint peuple de Dieu qui vit dans ce grand pays se combine avec la gratitude pour son engagement à promouvoir le dialogue, et se transforme en une invocation pour la paix, une paix dont notre monde a soif.

Je pense à tant de lieux marqués par la guerre, notamment à la chère Ukraine. Ne nous habituons pas à la guerre, ne nous résignons pas à son caractère inévitable. Allons au secours de ceux qui souffrent, et insistons pour que nous essayions réellement de parvenir à la paix.

Que faut-il de plus, combien de morts faut-il attendre avant que les affrontements ne cèdent le pas au dialogue pour le bien des personnes, des peuples et de l’humanité ? La seule issue est la paix et la seule voie pour y arriver est le dialogue. J’ai appris avec inquiétude que de nouveaux foyers de tension se sont allumés au cours de ces heures dans la région dans la région du Caucase.

Continuons à prier afin que, même dans ces territoires, la confrontation pacifique et la concorde l’emportent sur les querelles. Le monde apprenne à construire la paix, notamment en limitant la course aux armements et en convertissant les énormes dépenses de guerre en soutien concret aux populations. Merci à tous ceux qui y croient, merci à vous et à tous ceux qui sont des messagers de paix et d’unité !


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Dieu nous attend toujours à bras ouverts

Dieu nous attend toujours à bras ouverts

En s’adressant aux fidèles réunis ce dimanche place Saint-Pierre, le Pape François a commenté les paraboles de l’Évangile de Saint Luc centrées sur la miséricorde de Dieu. «Le Père nous demande d’être attentifs aux enfants qui lui manquent le plus.»

 

LE PAPE FRANÇOIS

ANGÉLUS

Place Saint-Pierre
dimanche 11 septembre 2022

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Chers frères et sœurs, bonjour !

L’Évangile de la liturgie d’aujourd’hui nous présente les trois paraboles de la miséricorde (cf. Lc 15, 4-32) ; on les appelle ainsi parce qu’ils manifestent le cœur miséricordieux de Dieu. Jésus leur dit de répondre au murmure des pharisiens et des scribes qui disent : « Cet homme accueille les pécheurs et mange avec eux » (v. 2). Ils étaient scandalisés parce que Jésus était parmi les pécheurs.

Si cela est religieusement scandaleux pour eux, Jésus, accueillant les pécheurs et mangeant avec eux, nous révèle que Dieu est ainsi : Dieu n’exclut personne, il désire tout le monde à son banquet, car il aime tout le monde comme des enfants, tout le monde, tout le monde exclus, tout le monde. Les trois paraboles résument donc le cœur de l’Évangile : Dieu est Père et il vient nous chercher chaque fois que nous sommes perdus.

En effet, les protagonistes des paraboles, qui représentent Dieu, sont un berger qui cherche la brebis perdue, une femme qui retrouve la pièce perdue et le père du fils prodigue. Arrêtons-nous sur un aspect commun à ces trois protagonistes.

Tous les trois, au fond, ont un aspect commun, que l’on pourrait définir ainsi : l’angoisse du manque – que le mouton te manque, que la pièce de monnaie te manque, que le fils te manque – ; l’agitation du manque, tous les trois dans ces paraboles sont agités parce qu’ils manquent de quelque chose.

Tous les trois, après tout, s’ils faisaient quelques calculs, ils pourraient être calmes : il manque un mouton au berger, mais il en a quatre-vingt-dix-neuf autres – « Qu’il soit perdu… » – ; la femme a une pièce de monnaie, mais elle en a neuf autres ; et le Père a aussi un autre fils, obéissant, à qui se dévouer : pourquoi penser à celui qui est parti mener une vie licencieuse ?

Au lieu de cela, dans leurs cœurs – du berger, de la femme et du père – il y a le souci de ce qui manque : la brebis, la pièce de monnaie, le fils qui est parti. Ceux qui aiment s’inquiètent pour ceux qui manquent, ils regrettent ceux qui sont absents, ils cherchent ceux qui sont perdus, ils attendent ceux qui sont partis. Parce qu’ils veulent que personne ne soit perdu.

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Frères et sœurs, ainsi est Dieu : il n’est pas « calme » si nous nous détournons de lui, il souffre, il tremble au plus profond ; et il se met en route pour venir nous chercher, jusqu’à ce qu’il nous ramène dans ses bras. Le Seigneur ne calcule pas les pertes et les risques, il a un cœur de père et de mère, et souffre du manque d’enfants bien-aimés.

« Mais pourquoi souffre-t-il si ce fils est un misérable, est-il parti ? Ça souffre, ça souffre. Dieu souffre de notre éloignement et, quand nous nous perdons, attend notre retour. Rappelons-nous : Dieu nous attend toujours à bras ouverts, quelle que soit la situation de vie dans laquelle nous sommes perdus. Comme le dit un psaume, il ne s’endort pas, il veille toujours sur nous (cf. 121,4-5).

Regardons-nous maintenant et demandons-nous : imitons-nous le Seigneur en cela, c’est-à-dire avons-nous l’inquiétude du manque ? Avons-nous la nostalgie de ceux qui sont absents, de ceux qui se sont éloignés de la vie chrétienne ? Portons-nous cette agitation intérieure, ou sommes-nous calmes et tranquilles entre nous ?

En d’autres termes, qui manque dans nos communautés, nous manque-t-il vraiment, ou faisons-nous semblant et nos cœurs ne sont-ils pas touchés ? Qui manque vraiment à ma vie ? Ou sommes-nous à l’aise les uns avec les autres, sereins et bienheureux dans nos groupes – « je vais dans un très bon groupe apostolique…»-, sans nourrir la compassion pour ceux qui sont loin ?

Il ne s’agit pas seulement d’être « ouvert aux autres », c’est l’Évangile ! Le berger de la parabole n’a pas dit: « J’ai déjà quatre-vingt-dix-neuf moutons, qui me fait aller chercher celui qui est perdu et perdre du temps? ». Au lieu de cela, il est allé. Réfléchissons donc à nos relations : est-ce que je prie pour ceux qui ne croient pas, pour ceux qui sont loin, pour ceux qui sont aigris ?

Attirons-nous les lointains par le style de Dieu, qui est proximité, compassion et tendresse ? Le Père nous demande d’être attentifs aux enfants qui lui manquent le plus. Pensons à certaines personnes que nous connaissons, qui sont à côté de nous et qui n’ont peut-être jamais entendu personne leur dire : « Vous savez ? Tu es important pour Dieu ».

« Mais je suis en situation irrégulière, j’ai fait telle mauvaise chose, telle autre chose… » – « Tu es important pour Dieu », dis-le, « tu ne le cherches pas mais il te cherche ».

Laissons-nous troubler – que nous soyons des hommes et des femmes au cœur inquiet – laissons-nous troubler par ces questions et prions Notre-Dame, une mère qui ne se lasse pas de nous chercher et de prendre soin de nous ses enfants.

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Après l’angélus

Chers frères et sœurs !

Après-demain, je partirai pour un voyage de trois jours au Kazakhstan, où je participerai au Congrès des chefs des religions mondiales et traditionnelles. Ce sera l’occasion de rencontrer de nombreux représentants religieux et de dialoguer comme des frères, animés par le désir commun de paix, paix dont notre monde a soif.

Je voudrais dès maintenant adresser un salut cordial aux participants, ainsi qu’aux Autorités, aux communautés chrétiennes et à toute la population de ce vaste pays. Je vous remercie pour le travail accompli, compte tenu de ma visite. Je demande à chacun d’accompagner ce pèlerinage de dialogue et de paix par la prière.

Nous continuons à prier pour le peuple ukrainien, afin que le Seigneur puisse lui apporter réconfort et espérance. Ces jours-ci, le Cardinal Krajewski, Préfet du Dicastère pour le Service de la Charité, est en Ukraine pour visiter diverses communautés et témoigner concrètement de la proximité du Pape et de l’Église.

En ce moment de prière, j’aime me souvenir de sœur Maria de Coppi, missionnaire combonienne, tuée à Chipene, au Mozambique, où elle a servi avec amour pendant près de soixante ans. Votre témoignage donne force et courage aux chrétiens et à tout le peuple mozambicain.

Je souhaite également adresser un salut particulier au cher peuple éthiopien, qui célèbre aujourd’hui son nouvel an traditionnel : je vous assure de ma prière et je souhaite à chaque famille et à toute la nation le cadeau de la paix et de la réconciliation.

Et maintenant je vous salue tous, Romains et pèlerins de divers pays : familles, groupes paroissiaux, associations. Je vous  souhaite un bon dimanche. S’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi. Bon déjeuner et au revoir !


Copyright © Dicastero per la Comunicazione – Libreria Editrice Vaticana

Texte traduit et présenté par l’Association de la Médaille Miraculeuse

discerner pour reconnaître les signes de Dieu

discerner pour reconnaître les signes de Dieu

Dans sa catéchèse du mercredi 7 septembre, de retour place Saint-Pierre de Rome, le Pape François a proposé une méditation sur le discernement au prisme d’un morceau de vie de saint Ignace de Loyola. Il s’est appuyé sur le fondateur de la Compagnie de Jésus pour expliquer le processus menant au discernement, du point de départ au point d’arrivée de nos pensées.

 

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 7 septembre 2022

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Catéchèse sur le discernement – 2. Un exemple: Ignace de Loyola

Chers frères et sœurs, bonjour !

Dans la poursuite de notre réflexion sur le discernement, – en ce moment nous parlerons chaque mercredi du discernement spirituel -, et pour cela la référence à un témoignage concret peut nous être utile.

L’un des exemples les plus instructifs nous est offert par saint Ignace de Loyola, avec un épisode décisif de sa vie. Ignace se trouve en convalescence chez lui après avoir été blessé au combat à une jambe. Pour chasser l’ennui, il demande quelque chose à lire. Il aimait les récits de chevalerie, mais malheureusement, on ne trouve que des vies de saints à la maison.

Il s’adapte un peu à contrecœur, mais au fil des lectures, il commence à découvrir un autre monde, un monde qui le conquiert et qui semble rivaliser avec celui des chevaliers. Il est fasciné par les figures de saint François et de saint Dominique et ressent le désir de les imiter.

Mais le monde chevaleresque continue également d’exercer sa fascination sur lui. Et ainsi il ressent en lui cette alternance de pensées, celles de la chevalerie et celles des saints, qui semblent équivalentes.

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Ignace, cependant, commence aussi à apercevoir des différences. Dans son Autobiographie – à la troisième personne – il écrit : « Penser aux choses du monde – et aux choses chevaleresques, cela se comprend – lui procurait beaucoup de plaisir, mais lorsque, par lassitude, il les abandonnait, il se sentait vide et déçu.

En revanche, aller à Jérusalem pieds nus, ne se nourrir que des herbes, pratiquer toutes les austérités reconnues comme habituelles aux saints, étaient des pensées qui non seulement le consolaient pendant qu’il s’y arrêtait, mais même après qu’il les avait abandonnées le laissaient satisfait et plein de joie » (n. 8) ; lui laissaient une trace de joie.

Dans cette expérience, nous pouvons noter deux aspects en particulier. Le premier est le temps : c’est-à-dire les pensées du monde sont attrayantes au début, mais elles perdent ensuite leur éclat et laissent vides, mécontents, ils te laissent comme ça, une chose vide.

Les pensées de Dieu, par contre, suscitent des résistances au début, – « Mais cette histoire ennuyeuse de saints, je ne vais pas la lire », mais lorsqu’elles sont acceptées, elles apportent une paix inconnue, qui dure aussi longtemps.

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Voici donc l’autre aspect : le point d’arrivée des pensées. Au début, la situation ne semble pas si claire. Il y a un développement du discernement : par exemple nous comprenons ce qui est bon pour nous non pas de manière abstraite, générale, mais dans le parcours de notre vie.

Dans les règles de discernement, fruit de cette expérience fondamentale, Ignace pose une prémisse importante, qui aide à comprendre un tel processus :

« À l’égard des personnes qui vont de péché mortel en péché mortel, la conduite ordinaire du démon est de leur proposer des plaisirs apparents, les tranquilliser en leur assurant que tout va bien, occupant leur imagination de jouissances et de voluptés sensuelles, afin de les retenir et de les plonger davantage dans leurs vices et dans leurs péchés. Le bon esprit, au contraire, agit en elles d’une manière opposée : il aiguillonne et mord leur conscience, en leur faisant sentir les reproches de la raison. » (Exercices spirituels, 314) ; Mais ce n’est pas bien.

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L’histoire qui précède celui qui discerne est indispensable car le discernement n’est pas une sorte d’oracle ou de fatalisme ou un objet de laboratoire, comme tirer au sort entre deux possibilités. Les grandes questions naissent lorsque nous avons déjà fait un bout de chemin dans la vie, et il faut revenir sur ce parcours pour comprendre ce que nous cherchons.

Si l’on fait un bout de chemin dans la vie, là : « Mais pourquoi je marche dans cette direction, qu’est-ce que je cherche ? », et là on effectue le discernement. Ignace, lorsqu’il s’est retrouvé blessé dans la maison de son père, ne pensait pas du tout à Dieu ou à la manière de réformer sa propre vie, non.

Il fait sa première expérience de Dieu en écoutant son propre cœur, qui lui montre un curieux renversement : des choses séduisantes à première vue le laissent déçu, et dans d’autres, moins brillantes, il ressent une paix qui dure dans le temps. Même nous vivons cette expérience, tant de fois nous commençons à penser une chose et nous restons là et puis nous sommes déçus.

Au lieu de cela, nous faisons une œuvre de charité, nous faisons une bonne chose et nous ressentons quelque chose du bonheur, une bonne pensée te parvient, de la joie, c’est notre propre expérience. Lui, Ignace, fait sa première expérience de Dieu, en écoutant son propre cœur, qui lui montre un curieux renversement.

C’est ce que nous devons apprendre : écouter son propre cœur : pour savoir ce qui se passe, quelle décision prendre, pour porter un jugement sur une situation, il faut écouter son propre cœur. Nous écoutons la télévision, la radio, le téléphone portable, nous sommes des maîtres de l’écoute, mais je te demande : sais-tu écouter ton cœur ?

T’arrêtes-tu pour dire : « Mais comment va mon cœur ? Est-il satisfait, est-il triste, cherche-t-il quelque chose ?”. Pour prendre de bonnes décisions, il faut écouter son propre cœur.

C’est pourquoi Ignace suggère de lire les vies des saints, car elles montrent de manière narrative et compréhensible le style de Dieu dans la vie de personnes pas si différentes de nous parce que les saints étaient de chair et de sang comme nous. Leurs actions parlent aux nôtres et nous aident à en comprendre le sens.

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Dans ce célèbre épisode des deux sentiments qu’éprouvait Ignace, l’un quand il lisait les choses des chevaliers et l’autre quand il lisait les vies des saints, nous pouvons reconnaître un autre aspect important du discernement, que nous avons déjà mentionné la dernière fois. Il y a un hasard apparent dans les événements de la vie : tout semble naître d’une banale mésaventure : il n’y avait pas de livres de chevaliers, seulement des vies de saints.

Une mésaventure qui constitue néanmoins un possible tournant. Ce n’est qu’après un certain temps qu’Ignace s’en rend compte et à ce point y consacrera toute son attention.

Écoutez bien : Dieu agit à travers des événements non programmés comme par hasard, mais par hasard cela m’est arrivé, par hasard j’ai rencontré cette personne, par hasard j’ai vu ce film, ce n’était pas prévu mais Dieu agit à travers des événements imprévisibles, et même dans les mésaventures :  » Mais je devais me promener et j’ai eu un problème aux pieds, je ne peux pas… « .

Un contretemps : que te dit Dieu ? Qu’est-ce que la vie te dit là ? Nous l’avons vu aussi dans un passage de l’Évangile de Matthieu : un homme labourant un champ tombe accidentellement sur un trésor enfoui. Une situation totalement inattendue. Mais ce qui est important, c’est qu’il le reconnaît comme l’aubaine de sa vie et qu’il décide en conséquence : il vend tout et achète ce champ (cf. 13,44).

Un conseil que je vous donne, soyez attentifs à l’inattendu. Celui qui dit : « mais ce hasard, je ne m’y attendais pas ». Là, c’est la vie qui vous parle, c’est le Seigneur qui vous parle, ou c’est le diable qui vous parle ? Quelqu’un. Mais il y a une chose à discerner, la façon dont je réagis aux choses inattendues.

Mais j’étais si calme à la maison et ‘poum, poum’, la belle-mère arrive et comment réagis-tu avec la belle-mère ? Est-ce l’amour ou quelque chose d’autre à l’intérieur ? Et fais le discernement. Je travaillais bien dans le bureau et un camarade vient me dire qu’il a besoin d’argent et comment as-tu réagi ? Voir ce qui se passe lorsque nous vivons des choses auxquelles nous ne nous attendons pas et là, nous apprenons à connaître notre cœur comme il se meut.

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Le discernement aide à reconnaître les signes par lesquels le Seigneur se fait rencontrer dans les situations imprévues, voire désagréables, comme cela fut pour Ignace la blessure à la jambe. De celles-ci peut naître une rencontre qui change la vie pour toujours comme le cas d’Ignace.

Quelque chose peut surgir qui t’amène à être meilleur sur le chemin ou pire je ne sais pas, mais rester attentif et le plus beau fil conducteur est donné par les imprévus :  » comment est-ce que je me comporte face à cela ? « . Que le Seigneur nous aide à écouter notre cœur et à voir quand c’est Lui qui agit et quand ce n’est pas Lui et que c’est autre chose.


Je salue cordialement les pèlerins de langue française, particulièrement les fidèles venus du Sénégal avec Mgr Paul Abel Mamba, évêque de Tambacounda.

Frères et sœurs, que notre prière quotidienne fasse de nous des contemplatifs dans l’action, des hommes et des femmes qui reconnaissent Dieu en toutes choses. Qu’elle affine l’oreille de notre cœur pour reconnaître la présence du Seigneur et pour découvrir peu à peu comment l’Esprit Saint nous conduit.

Que Dieu vous bénisse !


APPEL

Demain, nous célébrerons la fête de la Nativité de la Vierge Marie. Marie a fait l’expérience de la tendresse de Dieu en tant que fille, pleine de grâce, pour ensuite donner cette tendresse comme mère, à travers l’union à la mission de son Fils Jésus.

C’est pourquoi je veux aujourd’hui exprimer ma proximité à toutes les mères. De manière particulière aux mères qui ont des enfants souffrants : enfants malades, enfants marginalisés, enfants emprisonnés. Une prière spéciale pour les mères de jeunes détenus : afin que l’espérance ne se perde pas.

Malheureusement, dans les prisons, il y a beaucoup de gens qui mettent fin à leurs jours, parfois même des jeunes. L’amour d’une mère peut les préserver de ce danger. Que la Vierge console toutes les mères affligées par la souffrance de leurs enfants.


Résumé de la catéchèse du Saint-Père :

Frères et sœurs, nous poursuivons notre réflexion sur le discernement avec un témoignage concret, celui de l’épisode décisif de la vie de saint Ignace de Loyola. Ignace, blessé durant une bataille et en pleine convalescence, découvre dans la lecture de la vie des saints un autre monde qui le conquiert. Il est fasciné par les figures de saint François et de saint Dominique, et animé du désir de les imiter.

Cependant le monde de la chevalerie continue de l’émerveiller. Deux aspects ressortent dans l’expérience que fait Ignace : le temps et le point d’arrivée des pensées. Il y a un développement du discernement car les pensées de Dieu, contrairement aux pensées du monde, apportent une paix inconnue qui dure dans le temps.

L’histoire qui précède celui qui discerne est indispensable car le discernement n’est pas une sorte d’oracle ou de fatalisme. Les grandes questions naissent lorsque nous avons déjà fait un bout de chemin dans la vie. La lecture de la vie des saints montre de manière narrative et compréhensible le style de Dieu dans la vie des personnes qui ne sont pas très différentes de nous.

Il y a un autre aspect important du discernement : Dieu œuvre à travers des événements imprévisibles, et même dans les contretemps. Le discernement aide à reconnaître les signes par lesquels le Seigneur se fait rencontrer dans les situations imprévues, voire désagréables de la vie. De celles-ci peut naître une rencontre qui change la vie pour toujours.


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Texte traduit et présenté par l’Association de la Médaille Miraculeuse