Tous les articles par P. Jean-Daniel Planchot

Saint Joseph, une homélie inédite de Benoît XVI

Saint Joseph, une homélie inédite de Benoît XVI

Benoît XVI
Benoît XVI

Chers amis,

À côté de Marie, Mère du Seigneur, et de saint Jean-Baptiste, la liturgie nous présente aujourd’hui une troisième figure, qui est presque celle de l’Avent: saint Joseph. En méditant le texte de l’Évangile, nous pouvons voir, me semble-t-il, trois éléments constitutifs de cette vision.

Le premier et décisif est que saint Joseph est appelé «un homme juste». C’est pour l’Ancien Testament la plus haute caractérisation de celui qui vit vraiment selon la parole de Dieu, qui vit l’alliance avec Dieu.

Pour bien comprendre cela, nous devons réfléchir à la différence entre l’Ancien et le Nouveau Testament.

L’acte fondamental du chrétien est la rencontre avec Jésus, en Jésus avec la parole de Dieu, qui est Personne. En rencontrant Jésus, nous rencontrons la vérité, l’amour de Dieu, et ainsi la relation d’amitié devient amour, notre communion avec Dieu grandit, nous sommes vraiment croyants et devenons saints.

L’acte fondamental dans l’Ancien Testament est différent, car le Christ était encore à venir et il s’agissait donc, au mieux, d’aller à la rencontre du Christ, mais il ne s’agissait pas encore d’une véritable rencontre en tant que telle. La parole de Dieu dans l’Ancien Testament a essentiellement la forme de la loi – « Torah ».

Dieu guide, c’est le sens, Dieu nous montre le chemin. C’est un chemin d’éducation qui forme l’homme selon Dieu et lui permet de rencontrer le Christ. En ce sens, cette justice, cette vie selon la loi est un cheminement vers le Christ, une extension vers Lui; mais l’acte fondamental est l’observance de la Torah, de la loi, et donc le fait d’être «un juste».

*

Saint Joseph est un juste, exemplaire de l’Ancien Testament.

Mais il y a ici un danger et en même temps une promesse, une porte ouverte.

Le danger apparaît dans les discussions de Jésus avec les pharisiens et surtout dans les lettres de saint Paul. Le danger est que si la parole de Dieu est fondamentalement une loi, elle doit être considérée comme une somme de prescriptions et d’interdictions, un ensemble de règles, et l’attitude doit donc être d’observer les règles et d’être ainsi correct.

Mais si la religion est ainsi, c’est tout ce qu’elle est, la relation personnelle avec Dieu ne naît pas, et l’homme reste en lui-même, cherche à se perfectionner, à être parfait. Mais cela donne lieu à l’amertume, comme nous le voyons chez le deuxième fils de la parabole du fils prodigue, qui, après avoir tout observé, finit par être amer et même un peu envieux de son frère qui, comme il le pense, a eu la vie en abondance

. Tel est le danger: la simple observance de la loi devient impersonnelle, un simple acte, l’homme devient dur et même amer. À la fin, il ne peut plus aimer ce Dieu qui ne se présente qu’avec des règles et parfois même avec des menaces. Tel est le danger.

*

La promesse, au contraire, est la suivante: nous pouvons également voir ces prescriptions, non pas comme un simple code, un ensemble de règles, mais comme une expression de la volonté de Dieu, dans laquelle Dieu me parle, je lui parle. En entrant dans cette loi, j’entre en dialogue avec Dieu, j’apprends le visage de Dieu, je commence à voir Dieu, et ainsi je suis sur le chemin de la parole de Dieu en personne, du Christ.

Et un vrai juste comme saint Joseph est ainsi: pour lui, la loi n’est pas simplement l’observance de normes, mais elle se présente comme une parole d’amour, une invitation au dialogue, et la vie selon la parole consiste à entrer dans ce dialogue et à trouver derrière les règles et dans les règles l’amour de Dieu, à comprendre que toutes ces règles ne sont pas pour elles-mêmes, mais qu’elles sont des règles d’amour, qu’elles servent à ce que l’amour puisse grandir en moi.

C’est ainsi que l’on comprend qu’en fin de compte, toute loi n’est que l’amour de Dieu et du prochain. Ayant trouvé cela, on a observé toute la loi. Si quelqu’un vit dans ce dialogue avec Dieu, un dialogue d’amour dans lequel il cherche le visage de Dieu, dans lequel il cherche l’amour et fait comprendre que tout est dicté par l’amour, il est en route vers le Christ, il est un vrai juste.

Saint Joseph est un vrai juste, donc en lui l’Ancien Testament devient Nouveau, parce que dans les mots il cherche Dieu, la personne, il cherche son amour, et toute observance est une vie dans l’amour.

*

Nous le voyons dans l’exemple proposé par cet Évangile. Saint Joseph, fiancé à Marie, apprend qu’elle attend un enfant. Nous pouvons imaginer sa déception: il connaissait cette jeune fille et la profondeur de sa relation avec Dieu, sa beauté intérieure, l’extraordinaire pureté de son cœur; il voyait briller en elle l’amour de Dieu et l’amour de sa parole, de sa vérité, et voilà qu’il se trouve gravement déçu. Que faire?

Voici que la loi offre deux possibilités, dans lesquelles apparaissent les deux voies, celle dangereuse, fatale, et celle de la promesse. Il peut intenter une action en justice et ainsi exposer Marie à la honte, la détruire en tant que personne. Il peut le faire en privé avec une lettre de séparation.

Et saint Joseph, un homme vraiment juste, même s’il a beaucoup souffert, prend la décision d’emprunter ce chemin, qui est un chemin d’amour dans la justice, de justice dans l’amour, et saint Matthieu nous dit qu’il a lutté avec lui-même, en lui-même avec la parole.

Dans cette lutte, dans ce voyage pour comprendre la véritable volonté de Dieu, il a trouvé l’unité entre l’amour et la règle, entre la justice et l’amour, et c’est pourquoi, sur son chemin vers Jésus, il est ouvert à l’apparition de l’ange, ouvert au fait que Dieu lui donne la connaissance qu’il s’agit d’une œuvre de l’Esprit Saint.

*

Saint Hilaire de Poitiers, au IVe siècle, traitant de la crainte de Dieu, disait à la fin: «Toute notre crainte est placée dans l’amour», ce n’est qu’un aspect, une nuance de l’amour. Nous pouvons donc dire ici pour nous: toute la loi est placée dans l’amour, elle est une expression de l’amour et doit être accomplie en entrant dans la logique de l’amour.

Et ici, nous devons garder à l’esprit que, même pour nous chrétiens, il existe la même tentation, le même danger que dans l’Ancien Testament: même un chrétien peut en arriver à une attitude dans laquelle la religion chrétienne est perçue comme un ensemble de règles, d’interdictions et de normes positives, de prescriptions.

On peut arriver à l’idée qu’il ne s’agit que d’exécuter des prescriptions impersonnelles et donc de se perfectionner, mais cela vide l’arrière-plan personnel de la parole de Dieu et conduit à une certaine amertume et dureté de cœur. Dans l’histoire de l’Église, nous voyons cela dans le jansénisme.

Nous aussi, nous connaissons tous ce danger, nous savons tous personnellement qu’il nous faut toujours à nouveau surmonter ce danger et retrouver la Personne et, dans l’amour de la Personne, le chemin de la vie et la joie de la foi. Être juste, c’est trouver ce chemin, et nous sommes donc nous aussi toujours en route de l’Ancien Testament vers le Nouveau Testament, à la recherche de la Personne, du visage de Dieu dans le Christ.

C’est précisément ce qu’est l’Avent: sortir de la norme pure pour aller à la rencontre de l’amour, sortir de l’Ancien Testament qui devient Nouveau.

*

Tel est donc le premier élément fondamental de la figure de saint Joseph, telle qu’elle apparaît dans l’Évangile d’aujourd’hui. Quelques mots à présent sur les deuxième et troisième éléments.

Le deuxième: il voit l’ange en songe et entend son message. Cela présuppose une sensibilité intérieure pour Dieu, une capacité à percevoir la voix de Dieu, un don de discernement, capable de distinguer entre les songes qui sont des songes et une véritable rencontre avec Dieu.

Ce n’est que parce que saint Joseph était déjà en route vers la personne du Verbe, vers le Seigneur, vers le Sauveur, qu’il a pu discerner; Dieu a pu lui parler et il a compris: ce n’est pas un songe, c’est la vérité, c’est l’apparition de son ange. C’est ainsi qu’il pouvait discerner et décider.

Cette sensibilité à Dieu, cette capacité à percevoir que Dieu me parle, cette capacité de discernement est aussi importante pour nous. Bien sûr, Dieu ne nous parle pas normalement comme il a parlé à Joseph par l’intermédiaire de l’ange, mais il a aussi ses manières de nous parler.

Ce sont des gestes de tendresse de Dieu, que nous devons percevoir pour trouver la joie et la consolation, ce sont des paroles d’invitation, d’amour, voire de demande dans la rencontre avec des personnes qui souffrent, qui ont besoin de ma parole ou de mon geste concret, d’un acte. Ici, nous devons être sensibles, connaître la voix de Dieu, comprendre que c’est maintenant que Dieu me parle et y répondre.

*

Nous arrivons ainsi au troisième point: la réponse de saint Joseph à la parole de l’ange est la foi, puis l’obéissance, accomplie. La foi: il a compris que c’était vraiment la voix de Dieu, que ce n’était pas un songe. La foi devient un fondement sur lequel agir, sur lequel vivre, c’est reconnaître que c’est la voix de Dieu, l’impératif de l’amour, qui me guide sur le chemin de la vie, et ensuite faire la volonté de Dieu.

Saint Joseph n’était pas un rêveur, bien que le songe ait été la porte par laquelle Dieu est entré dans sa vie. C’était un homme pratique et sobre, un homme de décision, capable d’organisation. Il n’a pas été facile de trouver à Bethléem, parce qu’il n’y avait pas de place dans les maisons, l’étable comme lieu discret et protégé et, malgré la pauvreté, digne de la naissance du Sauveur.

Organiser la fuite en Égypte, trouver un endroit où dormir chaque jour, vivre longtemps: cela exigeait un homme pratique, avec un sens de l’action, avec la capacité de répondre aux défis, de trouver des moyens de survivre. Et puis, à son retour, la décision de retourner à Nazareth, d’établir ici la patrie du Fils de Dieu, cela aussi montre qu’il était un homme pratique, qui, en tant que charpentier, vivait et rendait possible la vie de tous les jours.

*

Ainsi saint Joseph nous invite d’une part à ce cheminement intérieur dans la parole de Dieu, pour être toujours plus proches de la personne du Seigneur, mais en même temps il nous invite à une vie sobre, au travail, au service quotidien pour faire notre devoir dans la grande mosaïque de l’histoire.

Rendons grâce à Dieu pour la belle figure de saint Joseph. Prions: «Seigneur, aide-nous à être ouverts pour Toi, à trouver toujours plus ton visage, à T’aimer, à trouver l’amour dans la norme, à être enracinés, comblés dans l’amour. Ouvre-nous au don du discernement, à la capacité de t’écouter et à la sobriété de vivre selon ta volonté et dans notre vocation». Amen!

***

Le journal dominical allemand Welt am Sonntag, lié au quotidien Die Welt, a publié samedi 23 décembre la version allemande d’une des homélies prononcées par le Pape émérite lors des célébrations dominicales privées dans la chapelle du monastère Mater Ecclesiae après sa renonciation. En voici la version intégrale.

Le père Federico Lombardi, président de la Fondation Ratzinger, a expliqué qu’il existe une collection d’homélies «privées» de Benoît XVI, enregistrées et transcrites par les « Memores Domini », les femmes consacrées qui ont vécu avec lui. Le recueil contient plus de trente homélies, en italien, des années de son pontificat et plus d’une centaine des premières années après sa renonciation.

Le père Lombardi les publiera prochainement en un volume à la Librairie éditrice vaticane (LEV). L’homélie qui suit a été prononcée un quatrième dimanche de l’Avent, le 22 décembre 2013. Elle est consacrée à saint Joseph.

Joseph, gardien fidèle

Joseph, gardien fidèle

Saint Joseph, patron de la ville et du diocèse d’Itabuna
Saint Joseph, patron de la ville et du diocèse d’Itabuna

C’est une loi générale, dans la communication de grâces particulières à une créature raisonnable : lorsque la bonté divine choisit quelqu’un pour une grâce singulière ou pour un état sublime, elle lui donne tous les charismes nécessaires à sa personne ainsi qu’à sa fonction, et qui augmentent fortement sa beauté spirituelle.

Cela s’est tout à fait vérifié chez saint Joseph, père présumé de notre Seigneur Jésus Christ, et véritable époux de la Reine du monde et Souveraine des anges. Le Père éternel l’a choisi pour être le nourricier et le gardien fidèle de ses principaux trésors, c’est-à-dire de son Fils et de son épouse; fonction qu’il a remplie très fidèlement. C’est pourquoi le Seigneur a dit: Bon et fidèle serviteur, entre dans la joie de ton maître.

Si tu compares Joseph à tout le reste de d’Église du Christ, n’est-il pas l’homme particulièrement choisi, par lequel et sous le couvert duquel le Christ est entré dans le monde de façon régulière et honorable? Si donc toute la sainte Église est débitrice envers la Vierge Marie parce que c’est par elle qu’elle a pu recevoir le Christ, après elle, c’est à saint Joseph qu’elle doit une reconnaissance et un respect sans pareil.

Il est en effet la conclusion de l’Ancien Testament: c’est en lui que la dignité des patriarches et des prophètes reçoit le fruit promis. Lui seul a possédé en réalité ce que la bonté divine leur avait promis.

Certes, il ne faut pas en douter: l’intimité, le respect, la très haute dignité que le Christ pendant sa vie humaine portait à Joseph, comme un fils à l’égard de son père, il n’a pas renié tout cela au ciel, il l’a plutôt enrichi et achevé. Aussi le Seigneur ajoute-t-il bien; Entre dans la joie de ton maître.

Bien que la joie de l’éternelle béatitude entre dans le cœur, le Seigneur a préféré dire: Entre dans la joie de ton maître, pour faire comprendre mystérieusement que cette joie ne sera pas seulement en lui, mais qu’elle l’enveloppera et l’absorbera de tous côtés, qu’elle le submergera comme un abîme infini.

Souviens-toi de nous, bienheureux Joseph, intercède par le secours de ta prière auprès de ton Fils présumé; rends-nous propice également la bienheureuse Vierge, ton épouse, car elle est la mère de celui qui, avec le Père et le Saint-Esprit, vit et règne pour les siècles sans fin. Amen.

Sermon de Saint Bernardin de Sienne 

Prière

Notre Père

Dieu tout-puissant, à l’aube des temps nouveaux, tu as confié à saint Joseph la garde des mystères du salut; accorde maintenant à ton Église, toujours soutenue par sa prière, de veiller sur leur achèvement.

MOIS DE SAINT JOSEPH – XIXe JOUR

MOIS DE SAINT JOSEPH – XIXe JOUR

Saint Joseph à Nazareth, dans l’intérieur de la sainte famille

 

Jésus, après avoir été retrouvé dans le Temple par ses parents, retourna avec eux à Nazareth, et vécut auprès de Joseph jusqu’à la mort de ce saint homme.

Valentin Esprit FLÉCHIER (1632-1710)

Sainte famille à la maison et songe de saint Joseph église saint Joseph Angers 49
Sainte famille à la maison et songe de saint Joseph église saint Joseph Angers 49

« Que j’aime à me le représenter sous un toit rustique, et dans une étroite et pauvre maison, loin du bruit et du tumulte du monde, se sanctifiant par le travail, par la retraite et par la prière! Quel palais renferma jamais une si auguste famille? Que dans ce sombre et petit espace il se passe de grandes choses ! C’est là que se traçait le plan d’un monde nouveau, créé dans la justice et dans la sainteté de la vérité!
C’est là que commençaient à s’exécuter, dans le temps, les projets éternels de la miséricorde de Dieu sur les hommes ingrats et coupables. C’est là que se formaient les premiers modèles du culte spirituel et intérieur, qui s’allait établir, et que se jetaient les fondements d’un Évangile inconnu, qui devait être porté dans toutes les parties de la terre.

C’est là que Jésus-Christ, tout enfant qu’il était, faisait déjà l’office de médiateur et de pontife, comme dans un sanctuaire, offrait à Dieu un sacrifice de prières et de pénitences, qu’il traitait de notre salut avec son Père, et qu’il avançait l’œuvre de notre réconciliation, pendant que les hommes, occupés des biens de la terre et de leurs folles passions, semblaient courir à leur ruine.

C’est là, enfin, que Joseph et Marie admiraient les merveilles de Dieu, qu’ils voyaient croître l’objet de leur espérance et de leur amour, et qu’ils recueillaient dans leurs cœurs et ses actions et ses paroles. Ils recevaient son obéissance au dehors, et lui rendaient leurs adorations au dedans. Tous ces mystères se passaient dans cette humble mais vénérable retraite, sous les auspices de saint Joseph, et sous le sceau de la providence divine. »

(Fléchier, Panégyrique de saint Joseph)

II

SAINT ALPHONSE DE LIGUORI (1696-1787)

« Dans cette famille, la seule affaire était la gloire de Dieu; la seule pensée, Tunique désir, l’accomplissement de la volonté de Dieu; les seuls discours, l’amour que les hommes doivent à Dieu, et cet amour de Dieu pour les hommes, dont il leur a donné le témoignage suprême en leur envoyant son Fils, destiné à souffrir et à mourir dans un océan d’ignominies et de douleurs.

Oh! avec quels torrents de larmes Marie et Joseph, parfaitement instruits des divines Écritures, devaient-ils parler de la cruelle passion et de la mort de Jésus-Christ, en sa propre présence?
Avec quel attendrissement devaient-ils se dire l’un à l’autre, suivant la prédiction d’Isaïe, que leur bien-aimé serait l’homme des douleurs et des opprobres ;
que ses ennemis devaient le défigurer, jusqu’à ce que son beau visage cessât d’être reconnaissable; qu’ils devaient tellement le déchirer à coups de fouets, que son corps ressemblerait à celui d’un lépreux couvert de plaies ;
que leur fils chéri souffrirait tout avec patience, sans même ouvrir la bouche pour se plaindre de tant d’outrages, et se laisserait conduire comme un agneau à la mort ;
qu’enfin, attaché à un bois infâme, au milieu de deux larrons, il terminerait sa vie dans l’excès des tourments.

Quels sentiments de douleur et d’amour de tels entretiens devaient-ils exciter dans le cœur de Joseph ? »

(Saint Alphonse de Liguori, Méditations sur saint Joseph)

III

SAINT ALPHONSE DE LIGUORI

« Joseph resta donc, jusqu’à sa mort, le chef de cette famille, petite par le nombre, mais grande par les deux êtres privilégiés qu’elle contient : la Mère de Dieu et le Fils unique de Dieu, fait homme.

« Dans cette maison, Joseph commande, et le Fils de Dieu obéit. Cette sujétion de Jésus-Christ, dit Gerson, en nous prouvant l’humilité du Sauveur, nous révèle aussi la dignité de Joseph. Et quelle plus grande dignité, quelle plus grande élévation, continue le même auteur, que de commander à Celui qui commande à tous les rois?

« Josué jeta le monde entier dans l’admiration, quand il commanda au soleil de s’arrêter, pour lui laisser le temps de compléter sa victoire, et que le soleil obéit. Mais peut-on même établir un parallèle entre Josué, qui se voit obéi du soleil, créature inanimée, et Joseph, qui se voit obéi de Jésus-Christ, Fils du Dieu vivant?
Tant que Joseph vécut, c’est-à-dire pendant trente années, Jésus-Christ le respecta comme un père, lui fut soumis comme à un père.

« En sorte que, pendant ces trente années, l’occupation continuelle du Sauveur fut d’obéir à saint Joseph. Pendant tout ce temps-là, ce fut à Joseph de commander, comme étant le chef de la sainte famille, et à Jésus-Christ d’obéir, comme étant subordonné à ce Joseph qui lui avait été donné de Dieu pour lui servir de père.

« Ainsi toutes les actions de Jésus-Christ, ses démarches, ses repas, son sommeil, tout était réglé par Joseph; et d’ailleurs Jésus-Christ recevait et exécutait avec la plus respectueuse attention les ordres de ce bienheureux patriarche.

« D’après la révélation qui fut faite à sainte Brigitte, le Fils de Dieu était si obéissant, que lorsque Joseph lui disait: « Faites ceci, ou cela, il le faisait aussitôt.» Aussi Gerson nous représente-t-il Jésus-Christ, tantôt préparant le repas, tantôt nettoyant la vaisselle, tantôt allant chercher de l’eau à la fontaine, ou même balayant la maison.

« Cette humble soumission de Jésus-Christ fait connaître que la dignité de saint Joseph est supérieure à celle de tous les saints, excepté celle de la divine Mère. Ainsi, c’est avec raison qu’un savant auteur a dit : « Il a bien droit à être honoré des hommes, celui que le Roi des rois a voulu élever si haut. »

(Saint Alphonse de Liguori, Sermon sur saint Joseph)