Frères et sœurs, de tout cœur, je remercie le Seigneur pour mon Voyage apostolique en Colombie. « Faisons le premier pas », en a été la devise, en référence au processus de réconciliation que la Colombie vit après un demi-siècle de conflit interne. J’ai voulu bénir l’effort de ce peuple et recevoir son témoignage qui est une richesse pour mon ministère et pour toute l’Église.
Il est évident que le Malin a voulu diviser ce peuple, pour détruire l’œuvre de Dieu. Mais il est tout aussi évident que l’amour du Christ, son infinie miséricorde est plus forte que le péché et la mort. Ainsi, la béatification de deux martyrs a rappelé que la paix est surtout fondée sur le sang de tant de témoins de l’amour, de la vérité, de la justice. « Miséricorde et vérité se rencontrent / Justice et paix s’embrassent » (Ps. 85,4).
Quand les chrétiens s’engagent jusqu’au bout sur le chemin de la suite du Christ, ils deviennent vraiment sel, lumière et levain dans le monde. C’est l’exemple donné par saint Pierre Claver, apôtre des esclaves, qui a montré la voie de la véritable révolution, évangélique et non pas idéologique, qui libère les personnes et la société de tous les esclavages, avec le Christ et grâce à Lui.
Alors, avec l’aide de Marie, que chaque colombien puisse faire le premier pas pour construire la paix dans l’amour, la justice et la vérité. Que la Vierge Marie nous aide, nous aussi, à faire chaque jour le premier pas pour construire ensemble la paix dans l’amour, la justice et la vérité. Que Dieu vous bénisse !
Au cinquième jour de son voyage en Colombie, dans la ville de Carthagène, lors de l’angélus dominical qu’il a présidé le 10 septembre 2017 devant l’église Saint-Pierre Claver de Carthagène, le Pape a affirmé : « Ce sont les pauvres, les humbles, qui contemplent la présence de Dieu ; c’est à eux que se révèle le mystère de l’amour de Dieu avec le plus de clarté. » Le pape a évoqué la situation du Venezuela, en concluant l’Angélus dominical.
Notre Dame de Chiquinquirá
Chers frères et sœurs,
Peu avant de rentrer dans cette église où sont conservées les reliques de saint Pierre Claver, j’ai béni les premières pierres de deux institutions destinées à offrir de l’assistance à des personnes dans de graves besoins et j’ai visité la maison de Madame Lorenza, où elle accueille chaque jour beaucoup de nos frères et sœurs pour leur donner de la nourriture et de l’affection.
Ces rencontres m’ont fait beaucoup de bien, parce que là, on peut voir comment l’amour de Dieu se rend concret, se rend quotidien.
Tous ensemble, nous prierons l’Angélus, en nous souvenant de l’Incarnation du Verbe. Et nous pensons à Marie, qui a conçu Jésus et lui a donné naissance. Nous la contemplons ce matin sous l’invocation de Notre Dame de Chiquinquirá.
Comme vous le savez, pendant longtemps, cette image a été abandonnée ; elle a perdu ses couleurs, elle était restée abîmée et trouée. Elle était traitée comme un morceau de vieux sac, utilisée sans aucun respect jusqu’à ce qu’on finisse par la jeter.
C’est alors qu’une femme simple, la première dévote de la Vierge de Chiquinquirá qui, selon la tradition s’appelait María Ramos, a vu en cette toile quelque chose de différent. Elle a eu le courage et la foi de placer cette image floue et détériorée en un lieu en vue, lui redonnant sa dignité perdue. Elle a su trouver et honorer Marie, qui tenait son Enfant dans les bras, précisément dans ce qui pour les autres était méprisable et inutile.
Ainsi, elle s’est faite le modèle de tous ceux qui, de diverses manières, cherchent à récupérer la dignité du frère abattu par la souffrance des blessures de la vie, de ceux qui ne se résignent pas et travaillent pour leur construire un logement digne, pour satisfaire leurs besoins urgents et, surtout, qui prient avec persévérance pour qu’ils puissent retrouver la splendeur d’enfants de Dieu qui leur a été arrachée.
Le Seigneur nous enseigne à travers l’exemple des humbles et de ceux qui ne comptent pas.
Oui il a concédé à María Ramos, une femme modeste, la grâce d’accueillir l’image de la Vierge dans la pauvreté de cette toile abîmée, oui il a accordé à Isabel, une femme indigène, et à son fils Miguel, le privilège d’être les premiers à voir ce tableau de la Vierge transformé et restauré.
Ils ont été les premiers à regarder avec des yeux simples ce morceau de toile totalement nouveau et à y voir la splendeur de la lumière divine qui transforme et renouvelle toute chose. Ce sont les pauvres, les humbles, qui contemplent la présence de Dieu ; c’est à eux que se révèle le mystère de l’amour de Dieu avec le plus de clarté.
Eux, les pauvres et les personnes simples, ont été les premiers à voir la Vierge de Chiquinquirá et sont devenus ses missionnaires, des annonciateurs de la beauté et de la sainteté de la Vierge.
Et dans cette église, nous prierons Marie, qui s’est désignée elle-même comme ‘‘l’esclave du Seigneur’’, et saint Pierre Claver l’‘‘esclave des noirs pour toujours’’, comme il s’est fait appeler dès le jour de sa profession solennelle.
Il attendait les navires qui arrivaient de l’Afrique au principal marché d’esclaves du Nouveau Monde. Bien des fois, il les attendait uniquement avec des gestes évangélisateurs, en raison de l’impossibilité de communiquer avec eux, à cause de la différence de langues.
Cependant, Pierre Claver savait que le langage de la charité et de la miséricorde était compris par tous. De fait, la charité aide à comprendre la vérité et la vérité réclame des gestes de charité. Quand il éprouvait de la répugnance envers eux, il baisait leurs plaies.
Austère et rempli de charité jusqu’à l’héroïsme, après avoir soulagé la solitude de centaines de milliers de personnes, il a passé les quatre dernières années de sa vie, malade et dans sa cellule, dans un état épouvantable d’abandon.
Effectivement, saint Pierre Claver a témoigné admirablement de la responsabilité et de l’intérêt que chacun d’entre nous doit avoir pour ses frères. Pour les autres, ce saint a été accusé injustement d’être indiscret par son zèle et a dû affronter de dures critiques ainsi qu’une opposition persistante de la part de ceux qui craignaient que son ministère n’entrave le commerce lucratif d’esclaves.
Cependant aujourd’hui, en Colombie et dans le monde, des millions de personnes sont vendues comme esclaves, ou bien mendient un peu d’humanité, un moment de tendresse, prennent la mer ou la route, parce qu’elles ont tout perdu, à commencer par leur dignité et leurs propres droits.
Notre Dame de Chiquinquirá et Pierre Claver nous invitent à travailler pour la dignité de tous nos frères, spécialement pour les pauvres et pour les personnes marginalisées par la société, pour ceux qui subissent la violence et la traite.
Tous, ils ont leur dignité et sont une image vivante de Dieu. Nous avons tous été créés à l’image et à la ressemblance de Dieu, et la Vierge nous tient tous dans ses bras comme des enfants chéris.
Adressons, à présent, notre prière à la Vierge Mère, pour qu’elle nous fasse découvrir, dans chacun des hommes et des femmes de notre temps, le visage de Dieu.
Angelus Domini…
Chers frères et sœurs,
De cet endroit, je voudrais assurer que je prie pour chacun des pays latino-américains, et de manière spéciale pour le Venezuela voisin. J’exprime ma proximité à chacun des fils et des filles de cette nation bien-aimée, ainsi qu’à ceux qui ont trouvé en cette terre colombienne un lieu d’accueil.
De cette ville, siège des droits humains, je lance un appel pour que tout genre de violence soit rejeté dans la vie politique et qu’on trouve une solution à la grave crise en cours et qui touche tout le monde, surtout les plus pauvres et les plus démunis de la société. Que la Très Sainte Vierge intercède pour tous les besoins du monde et de chacun de ses enfants.
Je salue tous ceux qui sont présents, venus de différentes localités, ainsi que ceux qui suivent cette visite par la radio et la télévision. À vous tous je souhaite un bon dimanche. S’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi.
Vous voulez la bénédiction?
[Tous: “Oui!”]
Que chacun de nous, avant de recevoir la bénédiction, pendant un instant de silence, place dans son cœur les noms des personnes que nous aimons le plus. Le nom des personnes qui nous aiment et les noms des personnes dont on sait qu’elles ne nous aiment pas.
Pour eux tous, et pour chacun, nous demandons la bénédiction. Pour tous. Que Dieu vous bénisse, le Père, le Fils et le Saint Esprit.
Premier rendez-vous de son étape à Medellin: le Pape François a présidé la messe, ce samedi 9 septembre 2017, à l’aéroport Enrique Olaya Herrera de la deuxième ville de Colombie.
C’est en présence de centaines de milliers de fidèles, qui l’ont accueilli avec un enthousiasme débordant malgré la pluie, que le Pape a célébré la mémoire liturgique de saint Pierre Claver (1580-1654), prêtre jésuite catalan, missionnaire auprès des esclaves africains.
Le Pape a centré son homélie sur «la vie chrétienne comme disciple», un style de vie qui suppose d’aller à l’essentiel, de se renouveler et de s’engager. Reprenant l’évangile lu deux jours plus tôt à Bogota, le Saint-Père explique que le chemin sur lequel se sont engagés les premiers disciples, puis les douze, a nécessité «beaucoup d’efforts de purification», tout en les mettant «face aux lépreux, aux paralytiques, aux pécheurs».
Faire l’expérience «vivante» de Dieu et de son amour
«Ces réalités demandaient beaucoup plus qu’une recette, une norme établie.» les disciples ont dû rompre avec des pratiques plus proches de celles des pharisiens, des docteurs «paralysés par une interprétation et une pratique rigoristes de la loi», que de celles de Jésus. Cette manière de faire du Christ, qui doit se traduire dans notre vie de disciple, en trois attitudes.
«Aller à l’essentiel, en profondeur, à ce qui compte et qui a de la valeur pour la vie». La relation avec Dieu ne peut être ni «un attachement froid à des normes et à des lois», ni «un accomplissement de certains actes extérieurs qui ne nous conduisent pas à un changement réel de vie», ni une simple «habitude, parce que nous avons un certificat de baptême».
Cette relation doit partir d’une «expérience vivante de Dieu et de son amour», «un mouvement continuel vers le Christ», «un apprentissage permanent par l’écoute de sa Parole». Cette parole, qui «s’impose à nous dans les besoins concrets de nos frères».
«Pondérer ce qui est normatif quand est en jeu la marche à la suite de Jésus»
Deuxième attitude: se renouveler, se laisser «secouer» par l’Esprit comme les docteurs de la loi l’ont été par Jésus. Attention, préviens le Pape: «on ne se renouvelle pas selon son caprice» mais «en restant solidement fondé dans la foi».«Le renouvellement suppose le sacrifice et le courage, non pas pour se considérer comme les meilleurs ou les plus propres, mais pour mieux répondre à l’appel du Seigneur.»
Car le Christ nous appelle «à pondérer ce qui est normatif quand est en jeu la marche à la suite de Jésus; quand ses plaies ouvertes, son cri de faim et de soif de justice nous interpellent et nous imposent des réponses nouvelles.»
«L’Église n’est pas à nous, elle est à Dieu»
«Ils sont nombreux ceux qui ont faim, faim de Dieu, faim de dignité parce qu’ils ont été dépouillés.»«Mes frères, l’Église n’est pas une douane. Elle a besoin de portes ouvertes, parce que le cœur de Dieu n’est pas seulement ouvert, mais est percé de l’amour qui s’est fait douleur.»
Les chrétiens n’ont pas continuellement à lever la bannière «passage interdit» car «l’Église n’est pas à nous, elle est à Dieu» et Dieu a appelé tous les hommes. «Tous». Loin d’empêcher cette rencontre, nous devons la favoriser, suivant l’appel du Christ à donner à nourrir nos frères (Mt 14, 16).
Le Pape conclut en invitant l’Église colombienne «à s’engager avec plus d’audace dans la formation de disciples missionnaires», comme l’ y invitait le document d’Apareceda: «des disciples qui sachent voir, juger et agir».
intégralité de l’homélie prononcée par le Pape François (page 2)