Messe du Pape au Timor oriental – l’appel à s’inspirer des petits

Messe du Pape au Timor oriental – l’appel à s’inspirer des petits

Drapeau du Timor oriental. Le triangle noir représente le sombre passé qu'il faut surmonter, le jaune rappelle les traces du colonialisme et le rouge symbolise la lutte pour la libération nationale. L'étoile est « la lumière qui nous guide », et sa couleur blanche est symbole de paix.
Drapeau du Timor oriental. Le triangle noir représente le sombre passé qu’il faut surmonter, le jaune rappelle les traces du colonialisme et le rouge symbolise la lutte pour la libération nationale. L’étoile est « la lumière qui nous guide », et sa couleur blanche est symbole de paix.

Environ 600 000 personnes étaient réunies pour assister à la messe présidée par le Pape François à quelques kilomètres de la capitale timoraise ce mardi 10 septembre. Dans son homélie, le Saint-Père a réfléchi sur le plus beau don de Dieu, le don de son fils Jésus à l’humanité, qui invite chacun à se faire petit au milieu des petits.

Sous une chaleur écrasante, à 16h30 heure locale, le Pape a présidé la célébration de l’Eucharistie, entouré par près de la moitié de la population est-timoraise réunie sur la place de Taci Tolu.

Reprenant la première lecture tirée du livre d’Isaïe, le Saint-Père a d’abord médité sur la promesse de ce prophète, la naissance d’un enfant. À l’époque d’Isaïe, a rappelé le Pape, Jérusalem était riche matériellement mais pauvre spirituellement.

Dressant un parallèle avec aujourd’hui, le Pape a expliqué que dans un monde «où il y a un grand besoin de conversion, de miséricorde et de guérison », ce ne sont ni les armes, ni les troupes ni l’argent, mais bien la naissance d’un enfant qui vient ouvrir «un avenir d’espérance et de joie »

Dieu se fait proche par un enfant

Ensuite, inspiré par l’Évangile de l’Annonciation lu au cours de la messe, dans lequel Marie apprend qu’elle va devenir la mère du Sauveur, le Saint-Père a évoqué la joie qui existe partout dans le monde lorsqu’un enfant nait. Une joie simple et universelle, qui cache un amour encore plus grand, celui de Dieu.

La proximité de Dieu passe par un enfant, Dieu se fait enfant, et ce n’est pas pour nous étonner ou nous émouvoir, mais pour nous ouvrir à l’amour du Père et nous laisser façonner par lui, pour qu’Il puisse guérir nos blessures, régler nos différends, mettre de l’ordre dans l’existence.

Se faire proche des petits

Dans un pays où 65% de la population a moins de 30 ans, cette image de Dieu qui se fait enfant a particulièrement intéressé le Pape. «La présence de tant de jeunesse et de tant d’enfants renouvelle constamment la fraîcheur, l’énergie, la joie et l’enthousiasme de votre peuple».

Une jeunesse source de joie donc, mais également un signe, car faire de la place aux petits, les accueillir, prendre soin d’eux, sont précisément les attitudes qui laissent de la place à Dieu pour qu’il agisse en nous.

À l’image de Marie, qui est restée toute sa vie petite et dans la discrétion, le Successeur de Pierre a encouragé les Est-Timorais à s’adapter au rythme des plus petits et de ne pas avoir peur de redimensionner les projets, non pas pour les diminuer, mais pour les rendre encore plus beaux par le don de nous-mêmes et l’accueil des autres.

«Car la vraie royauté est celle de celui qui donne sa vie par amour: comme Marie, mais aussi comme Jésus, qui sur la croix a tout donné, se faisant petit, sans défense, faible pour laisser place à chacun de nous dans le Royaume du Père».

Les symboles du Kaibauk et du Belak

Enfin, le Souverain pontife a évoqué deux bijoux traditionnels timorais, fabriqués en métal précieux et qui, pour lui, représente l’amour de Dieu.

D’abord le Kaibauk, qui symbolise les cornes du buffle et se place sur le front comme au sommet des maisons. «Il peut représenter la puissance de Dieu qui donne la vie», mais aussi, «il rappelle qu’avec la lumière de la Parole du Seigneur et la puissance de sa grâce, nous pouvons nous aussi coopérer par nos choix et nos actions au grand plan du salut».

Le second bijou est le Belak, qui se porte sur la poitrine, et évoque la paix et la tendresse maternelle. «Kaibauk et Belak, force et tendresse du Père et de la Mère: c’est ainsi que le Seigneur manifeste sa royauté, faite de charité et de miséricorde» a résumé François.

À l’issue de la messe, le Pape François a assuré de sa joie d’être au Timor et évoqué sa rencontre avec les enfants, marquée par leurs sourires. «Un peuple qui apprend à ses enfants à sourire est un peuple d’avenir».

Le Pape exhorte à diffuser le parfum de paix et de justice de l’Évangile

Le Pape exhorte à diffuser le parfum de paix et de justice de l’Évangile

Logo partiel Pape Timor oriental
Logo partiel Pape Timor oriental

Lors de la rencontre ce mardi matin en la cathédrale de Dili avec les évêques, les prêtres, les séminaristes, les religieux, les personnes consacrées et les catéchistes, le Pape François les a encouragés à être le parfum de Jésus. Il les a aussi mis en garde contre la tentation de l’orgueil et de l’argent, invitant à prendre soin du peuple.

C’est «au bout du monde» que se trouve le «centre de l’Évangile»: c’est par ce «paradoxe» que le Pape François, reprenant les mots du président de la conférence épiscopale est-timoraise, Mgr Amaral, souligne combien le Timor oriental est cher à son cœur. «Dans le cœur du Christ – nous le savons – les périphéries sont le centre».

Mais c’est à partir d’un épisode dans l’Évangile de Jean, celui de la visite de Jésus chez ses amis Lazare, Marie et Marthe, que le Pape tisse son discours aux trois évêques du pays, aux prêtres, aux séminaristes, aux religieux et religieuses, aux personnes consacrées et aux catéchistes. Marie oint les pieds de Jésus d’un parfum. Et c’est ce parfum, celui du Christ lui-même, que nous sommes appelés à garder et à répandre.

«Vous êtes le parfum du Christ», «nous avons été oints d’une huile d’allégresse», ce qui fait dire à saint Paul que «nous sommes pour Dieu la bonne odeur du Christ». «Comme un arbre de santal, toujours vert, fort, croissant et portant des fruits, vous êtes aussi des disciples missionnaires parfumés par l’Esprit Saint pour imprégner la vie de votre peuple».

Combattre la médiocrité et la mondanité

Ce parfum, il faut le garder «avec soin», précise le Pape, pour qu’il ne se fane pas et qu’il ne perde pas son odeur. Autrement dit, nous devons nous rappeler que «le parfum n’est pas pour nous-mêmes mais pour oindre les pieds du Christ, en annonçant l’Évangile et en servant les pauvres», et ne pas oublier d’être vigilant «car la médiocrité et la tiédeur spirituelle sont toujours à l’affût».

Le Pape François cite alors le cardinal De Lubac qui disait que «le pire qui peut arriver aux femmes et aux hommes d’Église est de tomber dans la mondanité, dans la mondanité spirituelle».

Le Pape dans la cathédrale de Dili

Invitant à regarder «avec gratitude» l’histoire qui nous a précédée, le Saint-Père préconise d’«attiser la flamme de la foi», en murissant dans la formation spirituelle, catéchétique et théologique, afin d’annoncer l’Évangile dans sa culture, et de la «purifier des formes archaïques et parfois superstitieuses».

«La prédication de la foi doit s’inculturer dans votre culture et votre culture doit être évangélisée. Cela vaut pour tous les peuples, pas seulement le vôtre. Si une Église est incapable d’inculturer la foi, incapable d’exprimer la foi dans les valeurs propres de cette terre, elle sera une Église éthicienne et sans fécondité».

Renouveler l’élan missionnaire

Gardien de ce parfum, il faut maintenant le répandre. Dans ce second point, le Pape cite cette fois l’Évangile de Marc qui précise que Marie brise le vase d’onguent en voulant oindre les pieds de Jésus. Nous aussi nous devons trouver le courage de «casser» le vase, de «briser la carapace qui nous enferme souvent sur nous-mêmes et de sortir d’une religiosité paresseuse, confortable, vécue uniquement pour un besoin personnel».

L’Église du Timor oriental a besoin «d’un nouvel élan dans l’évangélisation» pour que le parfum de l’Évangile soit celui de la «réconciliation et de paix après les années de souffrance de la guerre», soit un parfum «de compassion qui aidera les pauvres à se remettre sur pied et qui suscitera l’engagement de relever le niveau économique et social du pays», un parfum «de justice contre la corruption» qui peut entrer «dans nos communautés, dans nos paroisses».

Troisième mise en garde du Pape qui poursuit sa description du parfum de l’Évangile, qui «doit être répandu contre tout ce qui humilie, défigure et même détruit la vie humaine, contre ces fléaux qui produisent le vide intérieur et la souffrance, tels que l’alcoolisme, la violence et le manque de respect pour les femmes».

Le Pape interpelle alors directement les religieuses présentes qui doivent adresser le message que «les femmes sont ce qui est de plus important dans l’Église parce qu’elles prennent soin de ceux qui en ont le plus besoin». «Soyez les mères du peuple de Dieu».

Le ministère est un service

Les prêtres ne sont pas épargnés. «Vous venez du peuple, vous êtes nés de mères issues du peuple, vous avez grandi au sein du peuple, n’oubliez pas la culture du peuple que vous avez reçue. Vous n’êtes pas supérieurs. Cela ne doit pas vous faire sentir supérieurs aux gens, vous faire tomber dans la tentation de l’orgueil et du pouvoir».

«Le ministère est un service». «Et si certains d’entre vous ne se sentent pas serviteur du peuple, allez demander conseil à un prêtre sage pour qu’il vous aide à avoir cette dimension si importante». Ce sont les plus pauvres les plus favorisés et «jamais le prêtre ne doit profiter de son rôle, il doit toujours bénir, consoler, être un ministre de compassion et un signe de la miséricorde de Dieu».

Pour adoucir son message, à l’issue de son discours, François remercie les prêtres et les religieuses les plus âgés, nos modèles, conclut-il.

Le Pape parmi les enfants handicapés de Dili

Le Pape parmi les enfants handicapés de Dili

Logo Timor oriental
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François s’est rendu à l’école Irmãs Alma qui garantit soins et assistance aux enfants atteints de maladies graves. Le Souverain pontife a rencontré les religieuses et une cinquantaine d’enfants qui l’ont accueilli avec des chants et des cadeaux. François a encouragé l’amour envers les plus fragiles: «C’est le sacrement des pauvres»

Quand Jésus parle du Jugement dernier, il dit à certains: «Venez avec moi». «Mais il ne dit pas: “Venez avec moi parce que vous avez été baptisés, parce que vous avez été confirmés, parce que vous vous êtes mariés dans l’Église, parce qu’ils n’ont pas menti, parce qu’ils n’ont pas volé…”. Non! Il dit: “Venez avec moi parce que vous avez pris soin de moi. Tu as pris soin de moi”».

Le Pape exhorte à diffuser le parfum de paix et de justice de l’Évangile

Ce sont des pages arrachées à l’Évangile qui ont été vécues ce matin, 10 septembre, à Dili, au deuxième jour du voyage du Pape François au Timor oriental, dans la maison Irmãs Alma. Une structure faite de briques, de tapis rouges et de murs peints en blanc, où depuis des années les sœurs de l’Association des institutions missionnaires laïques, fondée dans les années 1960 en Indonésie, s’occupent d’enfants handicapés et gravement malades.

Pendant la visite d’une demi-heure du Souverain pontife, les sourires, dus à la spontanéité de la cinquantaine d’enfants présents (mais aussi des religieuses) qui se sont jetés au milieu de la salle ou en masse sur les genoux du Pape pour lui demander une bénédiction, ont alterné avec l’émotion, avec Silvano, sept ans, atteint d’une très grave maladie neuro-motrice, et les larmes, quand – en sortant de la structure – François a salué un par un des mères et des pères désespérés tenant dans leurs bras des enfants hydrocéphales ou souffrant d’un retard cognitif.

L’émotion des gens

Des pages d’Évangile faites chair avec un Pape ému devant une souffrance devant laquelle – comme il l’a dit à maintes reprises – il n’y a que des larmes et pas d’explications, mais en même temps souriant de voir l’émotion irrépressible d’une population avec une foi profonde qui ne regarde pas les cordons de sécurité ou les protocoles mais veut seulement avoir une bénédiction du Successeur de Pierre.

Aujourd’hui encore, comme hier à l’arrivée, le parcours de la Nonciature à l’école Irmãs Alma a été marqué par des cordons irrépressibles de personnes dans les rues qui, avec des cris, des drapeaux, des applaudissements, des larmes et des sauts de joie, ont salué le passage de la voiture papale.

L’impact a été fort à l’entrée de la maison, ornée de fleurs, d’un tapis rouge, d’une étendue de cadeaux, de chapelets, de statues de la Vierge de Fatima, avec une petite fille de moins de cinq ans, une phocomélique, qui, avec deux autres filles du même âge portant des vêtements traditionnels et une petite couronne, l’a accueilli et l’a honoré d’un tais, l’écharpe traditionnelle timoraise.

François l’a serrée contre lui et a déposé des chapelets et des bonbons dans sa ceinture, tandis qu’une religieuse, dans un geste d’attention comme il y en a tant dans la vie quotidienne de l’école Irmãs Alma, a ajusté son épaulette baissée. Le Pape s’est tourné alors vers ses collaborateurs: «Ne peut-on pas faire quelque chose pour elle? Peut-on l’opérer?» s’est-il demandé.

Le sacrement des pauvres

Ce sont des maladies incurables, en effet, celles dont souffrent la plupart de ces enfants, et il est rageant de voir qu’il n’a pas été possible d’intervenir sur des maladies curables pendant la grossesse, à cause de la pauvreté et de la rareté des moyens médicaux. Il ne reste plus que l’amour pour ces personnes complètement aveugles, autistes, handicapées, trisomiques.

«Un amour qui encourage, qui construit et qui fortifie,» «c’est ce que j’appelle “le sacrement des pauvres”.»

Des gestes d’attention

L’amour «est ce que vous trouvez ici: l’amour», a souligné le Souverain pontife dans son bref discours, précédé d’une salutation de la supérieure, soeur Gertrudis Bidi, à l’intérieur de la salle Saint-Vincent-de-Paul.

Un amour qui se traduit par de petits gestes, comme celui des religieuses qui calment un enfant qui a fondu en larmes au début de la réunion, ou qui prennent dans leurs bras des enfants moins petits qui se sont endormis. Ou encore les mains posées sur leur tête pour fixer leurs cheveux, la poursuite des enfants les plus vifs de la salle, l’apprentissage d’une chanson en italien avec la guitare à des petites filles qui n’ont pas la vue.

«Sans amour, cela ne peut pas être compris», dit le Pape. «Nous ne pouvons pas comprendre l’amour de Jésus si nous ne commençons pas à pratiquer l’amour. Partager la vie avec les plus nécessiteux est un programme, votre programme, c’est le programme de tout chrétien», insiste-t-il. Il remercie ensuite les religieuses et leurs collaborateurs pour ce qu’ils font et remercie également les filles, les garçons et les filles «qui nous donnent le témoignage de se laisser prendre en charge par Dieu».

«Ce sont eux qui nous enseignent comment nous devons nous laisser soigner par Dieu et non par de nombreuses idées, projets ou caprices. Laissons-nous prendre soin de Dieu. Et ils sont nos professeurs. Merci pour cela».

Le témoignage silencieux de Silvano

Quittant sa feuille des yeux, le Pape appelle Silvano, 7 ans, qui dort dans sa poussette, seule garantie de mobilité, au centre de la pièce. Le Pape François le touche, l’observe : «Je regarde cet enfant: comment s’appelle-t-il? Que nous apprend Silvano? Il nous apprend à prendre soin: en prenant soin de lui, nous apprenons à prendre soin. Et si on regarde son visage, il est calme, serein, dormant en paix. Et comme lui se laisse soigner, nous aussi devons apprendre à nous laisser soigner: nous laisser soigner par Dieu qui nous aime tant, nous laisser soigner par la Vierge, qui est notre Mère».


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