Vierge Marie, avec toi nous chantons
les merveilles que fait pour nous le Seigneur.
Notre âme et notre esprit exultent de joie en Dieu le Sauveur,
car il a fait des merveilles.
Il pose son regard sur nos cœurs humiliés
et sa miséricorde se répand sur nos vies.
Il tourne vers Lui nos regards
et nous recrée à l’image de son Fils.
Il nous dépouille de nous-mêmes et nous comble de ses largesses.
Il rétablit avec nous son alliance,
fidèle à la promesse faite à nos pères
en faveur d’Abraham et de sa descendance à jamais.
SAMEDI (4e semaine de Carême) Jr 11,18-20 – Jn 7,40-53
Jamais homme n’a parlé comme cet homme ! (Jn 7,46)
Jamais homme n’a parlé comme cet homme !
Parmi toutes les grandes choses et les merveilles que l’on peut dire du Christ, il en est une qui dépasse absolument l’admiration dont est capable l’esprit humain ; et la fragilité de notre intelligence mortelle ne sait comment la comprendre ou l’imaginer.
C’est que la toute-puissance de la majesté divine, la Parole même du Père, la propre Sagesse de Dieu, en laquelle toutes choses ont été créées — les visibles comme les invisibles —, s’est laissé enfermer dans les limites de cet homme qui s’est manifesté en Judée.
Tel est l’objet de notre foi ; et il y a plus encore. Nous croyons que la Sagesse de Dieu est entrée dans le sein d’une femme, qu’elle est née dans les vagissements et les pleurs communs à tous les nourrissons.
Et nous avons appris qu’après cela le Christ a connu le trouble devant la mort au point de s’écrier : Mon âme est triste à en mourir (Mt 26,38), et qu’enfin il a été traîné à une mort honteuse entre toutes parmi les hommes, même si nous savons qu’il est ressuscité le troisième jour.
Nous rencontrons en lui des traits si humains qu’ils n’ont rien qui les distingue de notre commune faiblesse à nous mortels, et en même temps des traits si divins qu’ils ne peuvent convenir qu’à la souveraine et ineffable nature divine.
Devant cela, l’intelligence humaine, trop étroite, est frappée d’une telle admiration qu’elle ne sait à quoi s’en tenir ni quelle direction prendre. Sent-elle Dieu dans le Christ, elle le voit pourtant mourir. Le prend-elle pour un homme, voici qu’il revient d’entre les morts, avec son butin de victoire, après avoir détruit l’empire de la mort.
Aussi notre contemplation doit-elle s’exercer avec tant de révérence et de crainte qu’elle considère dans le même Jésus la vérité des deux natures, évitant d’attribuer à l’ineffable essence divine des choses qui sont indignes d’elle ou qui ne lui conviennent pas, mais évitant aussi de ne voir dans les événements de l’histoire que des apparences illusoires.
Vraiment, faire entendre de telles choses à des oreilles humaines, essayer de les exprimer par des mots dépasse largement nos forces, notre talent et notre langage. Je pense même que cela dépasse la mesure des apôtres. Bien plus, l’explication de ce mystère transcende probablement tout l’ordre des puissances célestes.
Origène Des Principes, livre II, ch. 6,2 : PG 11, 210-211. Traduction Orval.
Saint Joseph associé aux souffrances de Jésus-Christ
dans le retour d’Égypte.
I
Vitrail de saint Joseph – Église Saint-Sulpice – Le Bugue |DR
Pourquoi saint Joseph avait-il reçu l’ordre de conduire l’Enfant Jésus en Égypte de préférence à tout autre pays? Et quel dessein de la Providence avait-il servi par son obéissance à gagner, au prix de tant de fatigues, une terre aussi lointaine?
« Dieu, répond saint Chrysostome, s’était souvenu qu’il n’est pas toujours irrité. Après avoir envoyé de grands maux au peuple de Pharaon, il lui envoyait son Fils comme un signe de réconciliation. Les Égyptiens, persécuteurs de son peuple, devinrent contre le même peuple le refuge du Sauveur enfant. » (Sur saint Matthieu)
« Mystère de grâce, s’écrie saint Augustin , « Moïse leur a enlevé la lumière que le Christ leur rapporte; car il fuit pour illuminer, et non pour se cacher.» ( Sermon sur l’Épiphanie)
Mais ce don de Dieu devait rester ignoré du peuple qui le possédait. Une tradition, recueillie par saint Bonaventure, rapporte, il est vrai, qu’à l’arrivée de la sainte famille les idoles de l’Égypte furent ébranlées, et tombèrent sur le pavé de leurs temples. (Vie du Christ, ch. XII). Cette tradition est rapportée par Eusèbe et par plusieurs autres historiens.
Mais ce fut là un signe isolé et incompris de la présence du voyageur divin. L’Égypte ne le reconnut pas ou ne voulut pas le reconnaître; et saint Joseph, chargé de l’y conduire, n’avait pas reçu d’autre mission que de continuer à exercer sur lui « cette providence silencieuse et muette qui, par des précautions nécessaires, devait cacher les desseins de Dieu, jusqu’à ce que le temps de la révélation fût arrivé. » (Fléchier)
Aussi rien ne vint-il adoucir cet exil dont saint Joseph devait porter et conjurer les rigueurs. « Combien dut-il souffrir, s’écrie saint Alphonse de Liguori, pendant un séjour de sept années en Égypte, au milieu d’une nation idolâtre, barbare et inconnue î puisqu’il n’avait ni parents ni amis qui pussent l’assister. Aussi saint Bernard disait-il que, pour nourrir son épouse et ce divin Enfant, qui pourvoit à la nourriture de tous les hommes et de tous les animaux de la terre, le saint patriarche était contraint de travailler constamment.»
II
FLÉCHIER.— SAINT THOMAS D’AQUIN
« Et cependant saint Joseph ne s’informe jamais du temps qu’il doit passer en Égypte. Il prend aux malheureux une inquiète curiosité de savoir jusqu’où doit aller leur malheur. C’est une espèce de consolation de prévoir la fin de ses peines, et de trouver dans l’espérance de l’avenir de quoi soulager une affliction présente. Mais Joseph suit aveuglément les ordres dont il est chargé, et sans pénétrer dans l’avenir, sans craindre la longueur de son exil, il ne veut ni satisfaire sa curiosité, ni donner des bornes à sa patience. » (Fléchier)
« Enfin les temps sont accomplis, l’Ange apparaît encore à Joseph, et, comme toujours, pendant le sommeil de ce saint homme, ce qui exprime d’une manière mystique que ceux qui se reposent des soins terrestres et des affaires du siècle méritent de jouir des visions célestes. L’Ange lui dit donc : Levez-vous, et retournez dans la terre d’Israël; car ceux qui cherchaient la vie de l’Enfant sont morts.
« Et Joseph, se levant aussitôt, prit l’Enfant et sa mère, et vint dans la terre d’Israël. Quand il avait pris l’Enfant et sa mère pour les emmener en Égypte, remarque saint Thomas, c’était la nuit et dans les ténèbres ; mais quand il les ramena en Judée, l’Évangile ne parle plus de ténèbres; car les embûches des tyrans conviennent à la nuit, et la délivrance au jour. »(Saint Thomas, Chaîne d’or, ch. I, II, III.)
III
SAINT THOMAS. — SAINT LIGUORI. — FLÉCHIER
Cependant le pieux auteur qui s’est appliqué surtout à méditer les souffrances de Joseph durant ce voyage, dont la signification mystique a été souvent étudiée par les Pères de l’Église, le même auteur rappelle notre attention sur les circonstances qui rendirent pour les membres de la sainte famille le retour plus pénible encore que la fuite; « car Jésus étant alors âgé de sept ans environ, il était trop grand pour être porté sur les bras, et trop petit pour faire à pied un si long voyage. Aussi bien souvent cet aimable Enfant était obligé de s’arrêter, et de se coucher à terre par l’excès de la fatigue. » (Saint-Alphonse de Liguori)
Joseph a toujours gardé le silence durant les traverses de ce voyage. Quand il faut obéir et souffrir, il se tait, et l’Évangile se tait sur lui. On ne le voit sortir de l’effacement habituel où il demeure volontairement que dans les occasions où il est incertain des desseins de Dieu, et s’efforce de les connaître pour s’y conformer. C’est ainsi qu’en arrivant sur la terre d’Israël, il apprend qu’Archélaüs, fils d’Hérode, règne à la place de son père: il s’arrête, craignant d’exposer l’Enfant Jésus à retrouver dans ce jeune roi un nouveau persécuteur. «Il ne désobéit point ainsi aux instructions qu’il a reçues du Ciel,» remarque saint Thomas,
car l’Ange ne lui a pas indiqué dans quel lieu de la terre d’Israël il doit s’abriter. Un nouveau doute se présente à lui; il cherche seulement à s’éclairer, et bientôt un messager divin lui apporte la lumière. (Saint Thomas, op. cit.). » « II est averti en songe de s’établir à Nazareth. Et, avec la même promptitude qu’il a mise à obéir quand il a reçu l’ordre de partir pour l’Égypte, il reprend le chemin de la bourgade de Galilée, portant dans ses bras le trésor du monde, en portant Celui qui devait dire un jour : « Je suis la voie, la vérité et la Vie. » (Fléchier)