le zèle apostolique du croyant. 2.  Jésus, modèle de l’annonce

Catéchèse. La passion pour l’évangélisation :
le zèle apostolique du croyant.
2.  Jésus, modèle de l’annonce

Dans le cycle de catéchèse sur la passion évangélisatrice et le zèle apostolique, lancé la semaine dernière, le Pape François réfléchit sur Jésus et sur son cœur qui ne laisse personne « se pas s’en sortir » : le chrétien imite les sentiments du Père pour témoigner de son amour qui n’oublie personne.

LE PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Salle Paul VI
mercredi 18 janvier 2023

Résumé

Chers frères et sœurs,

Nous avons lancé mercredi dernier un nouveau cycle de catéchèses sur la passion de l’évangélisation, sur le zèle apostolique qui doit animer l’Église et tout chrétien. Aujourd’hui nous portons nos regards sur le modèle suprême de l’annonce: Jésus, défini par saint Jean le «Verbe de Dieu».

Le Verbe, c’est-à-dire la Parole, met en avant la relation car la parole sert à transmettre, à communiquer Dieu aux hommes et à communiquer avec Dieu. En effet, nous voyons dans l’Évangile cette profonde intimité de Jésus avec le Père dans la prière, en des lieux retirés, où il vit cette relation qui le lie au Père dans l’Esprit.

Jésus est le Bon Pasteur qu’il décrit dans la parabole que nous avons entendue. Il donne sa vie pour ses brebis. Ce n’était donc pas pour lui seulement un travail, mais un vrai mode de vie parce son cœur est réellement un cœur pastoral.

Pour résumer en un mot l’action de l’Église, on utilise souvent le terme «pastoral», alors pour évaluer notre pastorale, il convient de la comparer à celle de Jésus, le modèle par excellence, qui souffre et qui risque pour ceux qui ne reconnaissent pas la beauté de son amour. C’est cela le zèle de Dieu.

Je salue cordialement les pèlerins de langue française présents aujourd’hui, en particulier le groupe de fidèles, venu de la République Démocratique du Congo, un pays que j’irai visiter à la fin du mois et que je recommande à votre prière!

Prions Dieu de nous faire un cœur pastoral qui souffre et qui risque pour témoigner. Non seulement c’est un honneur, mais c’est aussi un devoir d’apporter la Parole de Dieu à ceux qui nous sont confiés comme à ceux que nous rencontrons dans la vie de tous les jours. Dieu vous bénisse, vous et tous ceux qui vous sont proches!

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Catéchèse

La passion pour l’évangélisation : le zèle apostolique du croyant. 2.  Jésus, modèle de l’annonce

Chers frères et sœurs, bonjour et bienvenue à tous !

Mercredi dernier, nous avons commencé un cycle de catéchèse sur la passion d’évangéliser, c’est-à-dire sur le zèle apostolique qui doit animer l’Église et chaque chrétien. Aujourd’hui, nous regardons le modèle indépassable de l’annonce : Jésus, que l’Évangile du jour de Noël appelle « Parole de Dieu » (cf. Jn 1, 1).

Le fait qu’il soit la Parole, c’est-à-dire la Parole, nous montre un aspect essentiel de Jésus : il est toujours en relation, sortant, jamais isolé, toujours en relation, sortant ; la parole, en effet, existe pour être transmise, communiquée. C’est ainsi qu’est Jésus, la Parole éternelle du Père qui nous est adressée, qui nous est communiquée.

Le Christ non seulement a les paroles de la vie, mais il fait de sa vie une Parole, un message : c’est-à-dire qu’il vit toujours tourné vers le Père et vers nous. Regardant toujours le Père qui l’a envoyé et nous regardant à qui il a été envoyé.

En effet, si l’on regarde ses journées, décrites dans les Évangiles, on voit que l’intimité avec le Père, la prière, vient en premier, pour laquelle Jésus se lève tôt, quand il fait encore noir, et va dans des lieux déserts pour prier (voir Mc 1, 35 ; Lc 4, 42) pour parler avec le Père. Toutes les décisions et tous les choix les plus importants sont faits après avoir prié (cf. Lc 6, 12 ; 9, 18).

C’est précisément dans cette relation, dans la prière qui le lie au Père dans l’Esprit, que Jésus découvre le sens de son être homme, de son existence dans le monde parce qu’il est en mission pour nous, envoyé par le Père vers nous.

A cet égard, le premier geste public qu’il fait après les années de sa vie cachée à Nazareth est intéressant. Jésus ne fait pas un grand prodige, il n’envoie pas un message efficace, mais se mêle aux gens qui sont allés se faire baptiser par Jean. Ainsi nous offre-t-il la clé de son action dans le monde : se dépenser pour les pécheurs, se solidariser avec nous sans distances, dans un partage total de la vie.

En effet, parlant de sa mission, il dira qu’il n’est pas venu « pour être servi, mais pour servir et donner sa vie» (Mc 10, 45). Chaque jour, après la prière, Jésus consacre toute sa journée à l’annonce du Royaume de Dieu et la dédie aux hommes, en particulier aux plus pauvres et aux plus faibles, aux pécheurs et aux malades (cf. Mc 1, 32-39).

C’est-à-dire que Jésus est en contact avec le Père dans la prière et ensuite est en contact avec tout le monde pour la mission, pour la catéchèse, pour enseigner le chemin vers le Royaume de Dieu.

*

Or, si nous voulons représenter son style de vie par une image, nous n’avons aucune difficulté à la trouver : Jésus lui-même nous l’offre, nous l’avons entendu, se parlant de lui-même comme du Bon Pasteur, celui qui – dit-il – « donne sa vie pour les brebis » (Jn 10, 11), c’est Jésus.

En effet, être berger n’était pas qu’un travail, qui demandait du temps et beaucoup d’engagement ; c’était un vrai mode de vie : vingt-quatre heures sur vingt-quatre, vivre avec le troupeau, l’accompagner au pâturage, dormir parmi les moutons, s’occuper des plus faibles. Autrement dit, Jésus ne fait rien pour nous, mais donne tout, donne sa vie pour nous. Son cœur est pastoral (voir Ez 34:15). Il nous guide tous.

En effet, pour résumer l’action de l’Église en un mot, le terme même de « pastorale » est souvent utilisé. Et pour évaluer notre pastorale, nous devons confronter le modèle, confronter Jésus, Jésus le Bon Pasteur. Tout d’abord, nous pouvons nous demander : l’imitons-nous en buvant aux sources de la prière, afin que notre cœur soit en harmonie avec le sien ?

L’intimité avec lui est, comme le suggère le beau volume de Dom Chautard, « l’âme de tout apostolat ». Jésus lui-même l’a dit clairement à ses disciples : « En dehors de moi, vous ne pouvez rien faire » (Jn 15, 5). Si vous êtes avec Jésus, vous découvrez que son cœur pastoral bat toujours pour ceux qui sont perdus, perdus, très loin. C’est le notre?

Combien de fois notre attitude envers les personnes un peu difficiles ou qui sont un peu difficiles s’exprime en ces mots : « Mais c’est son problème, laissez-le se débrouiller… ». Mais Jésus n’a jamais dit cela, jamais, mais est toujours allé à la rencontre de tous les pécheurs marginalisés. Il a été accusé de cela, d’être avec les pécheurs, parce qu’il leur a apporté le salut de Dieu.

*

Nous avons entendu la parabole de la brebis perdue, contenue dans le chapitre 15 de l’Évangile de Luc (cf. vv. 4-7). Jésus parle aussi de la pièce perdue et du fils prodigue. Si nous voulons former le zèle apostolique, il faut toujours garder à l’esprit le chapitre 15 de Luc. Lisez-le souvent, là nous pouvons comprendre ce qu’est le zèle apostolique.

On y découvre que Dieu ne contemple pas l’enclos de ses brebis ni même ne les menace pour qu’elles ne partent pas. Au contraire, si quelqu’un sort et se perd, il ne l’abandonne pas, mais le cherche. Il ne dit pas : « Elle est partie, sa faute, son affaire ! »

Le cœur pastoral réagit d’une autre manière : Le cœur pastoral réagit différemment : le cœur pastoral souffre, le cœur pastoral risque. Il souffre : oui, Dieu souffre pour ceux qui partent et, tout en le pleurant, il l’aime encore plus. Le Seigneur souffre quand nous nous éloignons de son cœur. Il souffre pour ceux qui ne connaissent pas la beauté de son amour et la chaleur de son étreinte.

Mais, en réponse à cette souffrance, il ne se retire pas, mais risque : il laisse les quatre-vingt-dix-neuf moutons qui sont sains et saufs et s’aventure pour le seul manquant, faisant ainsi quelque chose de risqué et même d’irrationnel, mais conforme à son cœur pastoral, qui lui manque ceux qui sont partis. La nostalgie de ceux qui sont partis est continue en Jésus.

Et quand on apprend que quelqu’un a quitté l’Église, que dire ? « Que tout soit arrangé ». Non, Jésus nous enseigne la nostalgie de ceux qui sont partis ; Jésus n’a pas de colère ni de ressentiment, mais une nostalgie irréductible pour nous. Jésus nous manque et c’est le zèle de Dieu.

*

Et je me demande : avons-nous des sentiments similaires ? Nous pouvons voir ceux qui ont quitté le troupeau comme des adversaires ou des ennemis. « Et ça? – Non, il est parti ailleurs, il a perdu la foi, l’enfer l’attend… », et nous sommes calmes.

Les rencontrer à l’école, au travail, dans les rues de la ville, pourquoi ne pas penser plutôt que nous avons une bonne occasion de leur témoigner la joie d’un Père qui les aime et qui ne les a jamais oubliés ? Pas pour faire du prosélytisme, non ! Mais que la Parole du Père l’atteigne, pour marcher ensemble.

Évangéliser n’est pas faire du prosélytisme : le prosélytisme est une chose païenne, ce n’est pas religieux ou évangélique. Il y a une bonne parole pour ceux qui ont quitté le troupeau et pour l’apporter, nous avons l’honneur et le fardeau d’être ceux qui disent cette parole. Parce que la Parole, Jésus, nous le demande, approcher toujours tout le monde, avec un cœur ouvert, parce qu’Il est ainsi.

Peut-être avons-nous suivi et aimé Jésus pendant longtemps et ne nous sommes-nous jamais demandé si nous partagions ses sentiments, si nous souffrions et risquions en harmonie avec le cœur de Jésus, avec ce cœur pastoral, proche du cœur pastoral de Jésus !

J’ai dit qu’il ne s’agit pas de faire du prosélytisme pour que d’autres soient « des nôtres », non, ce n’est pas chrétien : il s’agit d’aimer pour qu’ils soient des enfants heureux de Dieu. grâce d’un cœur pastoral, ouvert, qui se place près de tous, pour porter le message du Seigneur et aussi pour ressentir la nostalgie du Christ pour tous.

Car, sans cet amour qui souffre et qui risque, notre vie ne va pas bien : si nous, chrétiens, n’avons pas cet amour qui souffre et qui risque, nous risquons de ne nous nourrir que de nous-mêmes. Les bergers qui sont bergers d’eux-mêmes, au lieu d’être bergers du troupeau, sont des peigneurs de moutons « exquis ». Nous ne devons pas être les bergers de nous-mêmes, mais les bergers de tous.

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Enfin, comme d’habitude, mes pensées vont aux jeunes, aux malades, aux personnes âgées et aux jeunes mariés.

Au début de la « Semaine de prière pour l’unité des chrétiens », j’invite chacun de vous à prier et à travailler pour qu’entre tous les croyants dans le Christ s’affirme de plus en plus le chemin vers la pleine communion, et en même temps je vous encourage à engagez-vous, avec dévouement et dans tous les milieux de vie, à être des bâtisseurs de réconciliation et de paix.

Et n’oublions pas de prier pour l’Ukraine tourmentée, qui a tant besoin de proximité, de réconfort et surtout de paix. Samedi dernier, une nouvelle attaque au missile a fait de nombreuses victimes civiles, dont des enfants. Je partage la douleur atroce des membres de la famille. Les images et les témoignages de cet épisode tragique sont un appel fort à toutes les consciences. Vous ne pouvez pas rester indifférent !

Ma bénédiction à tous.


Copyright © Dicastero per la Comunicazione – Libreria Editrice Vaticana

Texte traduit et présenté par l’Association de la Médaille Miraculeuse

Semaine de prière pour l’unité des chrétiens – 1er JOUR

Semaine de prière pour l’unité des chrétiens – 1er JOUR

Apprendre à faire ce qui est juste

semaine unité des chrétiens
semaine de prière pour l’ unité des chrétiens

Lectures

Isaïe 1,12-18
Apprenez à faire le bien, recherchez la justice, mettez au pas l’exacteur,
faites droit à l’orphelin, prenez la défense de la veuve.

Lc 10,25-36
Il dit à Jésus : « Et qui est mon prochain ? »

Réflexion

Selon Isaïe, Dieu veut que la tribu de Juda ne se contente pas de pratiquer la justice, mais qu’elle adopte le principe de toujours faire ce qui est juste. Dieu ne veut pas seulement que nous nous occupions des orphelins et des veuves, mais que nous fassions ce qui est juste et bon pour eux et pour toute personne mise en marge par la société.

En hébreu, « bon » se dit « yaw-tab ». Ce mot signifie être heureux, joyeux, agréable, bien faire, faire quelque chose de beau.

Être chrétien signifie être un disciple. Tous les chrétiens se rassemblent pour écouter la Parole de Dieu, apprenant ensemble ce que signifie faire le bien et qui a besoin de cette solidarité.

Alors que la société est de plus en plus indifférente aux besoins des autres, nous, les enfants de Dieu, devons apprendre à prendre fait et cause pour nos frères et sœurs opprimés en interpellant ceux qui sont au pouvoir et, quand cela est nécessaire, en défendant leur cause afin qu’ils puissent vivre en paix et dans la justice. Si nous le faisons, nous ferons toujours ce qui est juste !

Notre engagement à éradiquer le racisme et à guérir de ce péché exige que nous soyons prêts et disposés à instaurer des liens avec nos sœurs et frères chrétiens.

Unité des chrétiens

Un homme de loi demande à Jésus : « Et qui est mon prochain ? » La réponse de Jésus nous appelle à voir au-delà des divisions de la religion, de la tribu ou de la nationalité pour reconnaître notre prochain dans le besoin. Les chrétiens également doivent regarder au-delà de ces barrières et des divisions au sein de la famille chrétienne pour reconnaître et aimer leurs frères et sœurs en Christ.

Défi

Qui sont les personnes marginalisées ou opprimées dans votre société ? Comment les Églises pourraient-elles marcher avec ces frères et sœurs, répondre à leurs besoins et parler en leur nom ?

Prière

Seigneur, tu as appelé ton peuple de l’esclavage à la liberté, Donne-nous la force et le courage de chercher ceux qui ont besoin de justice. Fais que nous voyions ce besoin et sachions offrir notre aide, et par ton Esprit Saint, rassemble-nous dans l’unique troupeau de Jésus Christ, notre berger. Amen

Texte conjointement préparé par le Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens
et la Commission Foi et Constitution du Conseil œcuménique des Églises

Apprenez à faire le bien, recherchez la justice

Apprenez à faire le bien, recherchez la justice (Isaïe 1,17)

semaine unité des chrétiens
semaine unité des chrétiens

«Quand vous venez vous présenter devant moi, qui vous demande de fouler mes parvis ? Cessez d’apporter de vaines offrandes : la fumée, je l’ai en horreur ! Néoménie, sabbat, convocation d’assemblée… je n’en puis plus des forfaits et des fêtes. Vos néoménies et vos solennités, je les déteste, elles me sont un fardeau, je suis las de les supporter.
Quand vous étendez les mains, je me voile les yeux, vous avez beau multiplier les prières, je n’écoute pas : vos mains sont pleines de sang. Lavez-vous, purifiez-vous. Ôtez de ma vue vos actions mauvaises, cessez de faire le mal.
Apprenez à faire le bien, recherchez la justice, mettez au pas l’exacteur, faites droit à l’orphelin, prenez la défense de la veuve. Venez et discutons, dit le Seigneur. Si vos péchés sont comme l’écarlate, ils deviendront blancs comme la neige. S’ils sont rouges comme le vermillon, ils deviendront comme de la laine.»

Isaïe 1,12-18 – La Bible – Traduction œcuménique – TOB

Introduction

Isaïe vécut et prophétisa en Juda au cours du VIIIe siècle av. J.-C. et fut un contemporain d’Amos, de Michée et d’Osée. Cette période de grande expansion économique et de stabilité politique pour Israël et la tribu de Juda, due à la faiblesse des « superpuissances » de l’époque, l’Égypte et l’Assyrie, touchait à sa fin. Toutefois, c’était aussi une époque où l’injustice, l’iniquité et les inégalités étaient fort répandues dans les deux royaumes.

En ce temps-là, la religion prospérait également en tant qu’expression rituelle et formelle de la croyance en Dieu, concentrée sur les offrandes et les sacrifices au Temple. Elle était présidée par les prêtres, qui bénéficiaient également des largesses des riches et des puissants.

En raison de la proximité physique et des relations existant entre le palais royal et le Temple, le pouvoir et l’influence étaient presque entièrement entre les mains du roi et des prêtres, dont aucun, pendant une grande partie de cette période historique, ne prenait la défense des victimes de l’oppression et des injustices.

À cette époque – et du reste, comme cela fut fréquent tout au long des siècles, les riches et ceux qui faisaient de nombreuses offrandes étaient considérés comme bons et bénis de Dieu, tandis que les pauvres qui ne pouvaient offrir de sacrifices étaient tenus pour mauvais et maudits de Dieu. Les indigents étaient souvent dénigrés pour leur incapacité matérielle à participer pleinement au culte du Temple.

C’est dans ce contexte que s’exprime Isaïe, en tentant d’éveiller la conscience du peuple de Juda face à la réalité de sa situation. Au lieu d’honorer la religiosité de l’époque comme une bénédiction, Isaïe la voit comme une plaie qui suppure et comme un sacrilège devant le Tout-Puissant. L’injustice et l’inégalité ont conduit à la fragmentation et à la désunion.

Ses prophéties dénoncent les structures politiques, sociales et religieuses et l’hypocrisie qui consiste à offrir des sacrifices tout en opprimant les pauvres. Il s’élève vigoureusement contre les dirigeants corrompus et prend position en faveur des défavorisés, Dieu étant pour lui l’unique source de la droiture et de la justice.

Le groupe de travail désigné par le Conseil des Églises du Minnesota a choisi ce verset du premier chapitre du prophète Isaïe comme texte central de la Semaine de prière : « Apprenez à faire le bien, recherchez la justice, mettez au pas l’exacteur, faites droit à l’orphelin, prenez la défense de la veuve » (1,17).

Isaïe enseigne que Dieu exige de nous tous droiture et justice, à tout moment et dans tous les domaines de la vie. Notre monde actuel reflète à bien des égards les défis de la division qu’Isaïe a affrontés au cours de sa prédication.

La justice, la droiture et l’unité proviennent de l’amour profond de Dieu pour chacun d’entre nous, et sont au cœur-même de l’essence divine et de la manière dont le Seigneur attend que nous nous comportions les uns envers les autres. Sa volonté de créer une humanité nouvelle « de toutes nations, tribus, peuples et langues » (Ap 7,9) nous appelle à la paix et à l’unité qu’il a toujours voulues pour la création.

Le langage du prophète à l’égard de la religiosité de l’époque est féroce : « Cessez d’apporter de vaines offrandes : la fumée, je l’ai en horreur… Quand vous étendez les mains, je me voile les yeux » (v. 13, 15).

Après avoir prononcé ces condamnations cinglantes, mettant en évidence ce qui ne va pas, Isaïe présente le remède à ces iniquités. Il ordonne au peuple de Dieu de se laver, de se purifier, d’ôter de sa vue leurs actions mauvaises, de cesser de faire le mal (cf. v. 16).

Aujourd’hui, la séparation et l’oppression continuent d’être manifestes lorsqu’un seul groupe ou une seule classe sociale se voit accorder des privilèges par rapport aux autres. Toutes les croyances ou pratiques qui distinguent ou placent une « race »1 au-dessus d’une autre commettent clairement le péché du racisme.

Lorsqu’ils s’accompagnent ou sont renforcés par un pouvoir non équilibré, les préjugés raciaux ne se limitent pas aux relations individuelles mais atteignent les structures mêmes de la société – ce qui conduit à une perpétuation systémique du racisme.

Celui-ci a injustement profité à certains, y compris aux Églises, et en a accablé et exclu d’autres, simplement en raison de la couleur de leur peau et de ce qui, au plan culturel, est lié à la perception de la « race ».

Comme certains religieux étaient si farouchement dénoncés par les prophètes de la Bible, des chrétiens ont été ou continuent d’être complices en soutenant ou perpétuant les préjugés et l’oppression, et en fomentant la division.

L’histoire montre qu’au lieu de reconnaître la dignité de tout être humain créé à l’image de Dieu et à sa ressemblance, les chrétiens se sont trop souvent retrouvés impliqués dans des systèmes reposant sur le péché tels que l’esclavage, la colonisation, la ségrégation et l’apartheid, qui ont privé d’autres personnes de leur dignité pour de faux motifs de race.

De même, au sein des Églises, les chrétiens n’ont pas reconnu la dignité de tous les baptisés et ont déprécié la dignité de leurs frères et sœurs en Christ sur la base d’une prétendue différence raciale.

Rappelons les mémorables paroles du Révérend Dr Martin Luther King Jr : « C’est l’une des tragédies de notre nation, l’une des tragédies honteuses, qu’à onze heures le dimanche sonne une des heures où la ségrégation est la plus forte, une heure qui est sans doute celle de la plus forte ségrégation pour l’Amérique chrétienne ».

Cette déclaration met en évidence les intersections entre la désunion des chrétiens et la désunion de l’humanité. Toute division s’enracine dans le péché, c’est-à-dire dans des attitudes et des actions qui vont à l’encontre de l’unité que Dieu désire pour l’ensemble de sa création.

Le racisme fait tragiquement partie du péché qui a séparé les chrétiens les uns des autres, les obligeant à célébrer leur culte à des heures différentes et dans des édifices distincts et, dans certains cas, il a conduit les communautés chrétiennes à se diviser.

Malheureusement, peu de choses ont changé depuis l’époque de la déclaration de Martin Luther King. Le culte de onze heures – moment où se retrouvent le plus grand nombre de fidèles le dimanche – souvent ne manifeste pas l’unité chrétienne mais au contraire la division, qui suit des critères de race, de statut social ainsi que d’appartenance à une confession.

Comme le proclame Isaïe, cette hypocrisie parmi les croyants est une offense à Dieu : « Vous avez beau multiplier les prières, je n’écoute pas : vos mains sont pleines de sang » (v. 15).

Apprendre à faire le bien

Dans le passage de l’Écriture choisi pour la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens 2023, le prophète Ésaïe nous montre comment guérir ces maux.

Apprendre à faire le bien exige de décider de s’engager dans une réflexion sur soi. La Semaine de prière est le moment idéal pour que les chrétiens reconnaissent que les divisions entre nos Églises

1. Il existe une seule race, la race humaine. Cependant, il nous faut reconnaître que le mythe de la race est à l’origine du racisme. La race n’a rien de biologique. C’est une élaboration sociale divisant l’humanité sur la base de caractères physiques.

Même ce terme n’est pas employé dans de nombreuses parties du monde, il est important de reconnaître qu’il a été utilisé comme instrument de division et d’oppression de groupes humains et nos confessions ne peuvent être séparées des divisions au sein de la famille humaine tout entière. Prier ensemble pour l’unité des chrétiens nous permet de réfléchir à ce qui nous unit et de nous engager à lutter contre l’oppression et la division au sein de l’humanité.

Le prophète Michée rappelle que Dieu nous a dit ce qui est bon et ce qu’il exige de nous : “Rien d’autre que respecter le droit, aimer la fidélité et [s]’appliquer à marcher avec [s]on Dieu” (Michée 6,8).

Se comporter avec justice signifie que nous respectons toutes les personnes. La justice exige d’agir de manière véritablement équitable afin de remédier aux préjugés du passé fondés sur la « race », le genre, la religion et le statut socio-économique. Marcher humblement avec Dieu implique repentance, réparation et enfin réconciliation.

Dieu attend de nous que nous assumions ensemble la responsabilité d’agir en faveur d’un monde équitable pour tous les enfants de Dieu. L’unité des chrétiens devrait être un signe et un avant-goût de l’unité réconciliée de la création tout entière. Cependant, la division des chrétiens affaiblit la force de ce signe et contribue à renforcer la division au lieu d’apporter la guérison aux déchirures du monde, ce qui est la mission de l’Église.

Rechercher la justice

Ésaïe conseille aux habitants de Juda de rechercher la justice (v. 17), ce qui équivaut à reconnaître l’existence de l’injustice et de l’oppression dans leur société. Il implore le peuple de Juda de renverser ce status quo.

Rechercher la justice nous oblige à faire face à ceux qui font du mal aux autres. Ce n’est pas une tâche facile et qui peut parfois mener à des conflits, mais Jésus nous assure que défendre la justice face à l’oppression conduit au Royaume des cieux. « Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice : le Royaume des cieux est à eux » (Mt 5,10).

Dans de nombreuses régions du monde, les Églises doivent reconnaître qu’elles se sont conformées aux normes sociétales et ont gardé le silence ou activement été complices de l’injustice raciale. Les préjugés raciaux ont été l’une des causes de la division des chrétiens qui a déchiré le Corps du Christ.

Des idéologies toxiques, telles que la suprématie blanche et la doctrine de la découverte2, ont causé beaucoup de tort, en particulier en Amérique du Nord et dans les pays du monde entier colonisés au cours des siècles par les puissances européennes blanches. En tant que chrétiens, nous devons être prêts à bouleverser les structures source d’oppression et à plaider pour la justice.

L’année au cours de laquelle le groupe de rédaction du Minnesota a préparé les textes pour la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens a été marquée par le mal et la dévastation de l’oppression sous les formes les plus diverses dans le monde entier.

Cette souffrance a été considérablement amplifiée dans de nombreuses régions, notamment dans le Sud du monde, par la pandémie de COVID-19, où la simple subsistance était presque impossible pour beaucoup, et où une aide concrète était presque totalement absente.

L’auteur de l’Ecclésiaste semblait parler de la situation actuelle : « Je vois toutes les oppressions qui se pratiquent sous le soleil. Regardez les pleurs des opprimés : ils n’ont pas de consolateur ; la force est du côté des oppresseurs : ils n’ont pas de consolateur. » (Qo 4,1).

L’oppression nuit à l’ensemble de la race humaine. Il ne peut y avoir d’unité sans justice. Lorsque nous prions pour l’unité des chrétiens, nous devons reconnaître l’oppression actuelle et générationnelle et être résolus à nous repentir de ces péchés. Nous pouvons faire nôtre l’injonction d’Ésaïe de nous laver, nous purifier car nos mains sont pleines de sang (cf. v. 15, 16).

2. La doctrine de la découverte, issue d’une bulle papale émise par le Pape Alexandre VI (4 mai 1493), s’est répandue dans le monde entier et a profité aux Églises de différentes manières vis-à-vis des descendants des peuples indigènes et des esclaves. Elle justifiait la saisie des terres des peuples indigènes du fait que les puissances colonisatrices avaient « découvert » ces terres.

Secourir les opprimés

La Bible nous enseigne que nous ne pouvons séparer notre relation avec le Christ de notre attitude envers l’ensemble du peuple de Dieu, en particulier envers ceux qui sont considérés comme « les plus petits » (Mt 25,40).

Notre engagement les uns envers les autres exige que nous nous impliquions dans la mishpat, mot hébreu qui signifie ‘justice réparatrice’, en défendant ceux dont la voix n’a pas été entendue, en démantelant les structures qui créent et entretiennent l’injustice, et en en construisant de nouvelles promouvant et garantissant que chacun reçoive un traitement équitable et ait accès aux droits qui lui sont dus.

Ce travail doit s’étendre, au-delà de nos amis, de notre famille et de nos communautés, à l’ensemble de l’humanité. Les chrétiens sont appelés à aller en mission vers les autres et à écouter les cris de tous ceux qui souffrent, afin de mieux comprendre leurs souffrances et leurs traumatismes et d’y trouver une réponse.

Le Révérend Dr Martin Luther King Jr a souvent rappelé qu’« une émeute est le langage de ceux qui ne sont pas entendus ». Lorsque des protestations et des troubles ont lieu dans la population, c’est souvent parce que les voix des révoltés ne sont pas entendues.

Si les Églises élèvent leurs voix avec celles des opprimés, leur cri de justice et de libération sera amplifié. Nous servons et aimons Dieu et notre prochain en nous servant et en nous aimant les uns les autres dans l’unité.

Faire droit à l’orphelin, prendre la défense de la veuve

Aux côtés des étrangers, la Bible hébraïque réserve une place particulière aux veuves et aux orphelins qui comptent parmi les membres les plus vulnérables de la société. À l’époque d’Ésaïe où Juda traversait une période de grand succès économique, les orphelins et les veuves se trouvaient dans une situation désespérée car privés de protection et du droit de posséder des terres, et donc de la capacité de subvenir à leurs besoins.

Le prophète appelle la communauté, alors qu’elle se réjouit de sa prospérité, à ne pas manquer de défendre et de nourrir les plus pauvres et les plus faibles d’entre eux. Cet appel prophétique résonne encore à notre époque, alors que nous nous demandons : qui sont les personnes les plus vulnérables de notre société ?

Quelles sont les voix qui ne sont pas entendues dans nos communautés ? Qui n’est pas représenté autour de la table ? Pourquoi ? Quelles Églises et Communautés sont absentes de nos dialogues, de notre action commune et de notre prière pour l’unité des chrétiens ? Alors que nous prions ensemble au cours de cette Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, comment sommes-nous prêts à agir en ce qui concerne ces voix absentes ?

Conclusion

Ésaïe exhorte le peuple de Dieu de son temps à apprendre à faire ensemble le bien, à rechercher ensemble la justice, à secourir ensemble les opprimés, à faire droit à l’orphelin et à prendre la défense de la veuve ensemble. Le défi lancé par le prophète nous concerne également aujourd’hui.

Comment pouvons-nous vivre notre unité en tant que chrétiens afin d’apporter une réponse aux maux et injustices de notre temps ? Comment pouvons-nous engager le dialogue, accroître la sensibilisation, la compréhension et notre intuition par rapport aux expériences vécues par les uns et les autres ?

Ces prières et ces rencontres du cœur ont le pouvoir de nous transformer – individuellement et collectivement. Soyons ouverts à la présence de Dieu dans toutes nos rencontres, alors que nous cherchons à nous transformer, à démanteler les structures sources d’oppression et à guérir les péchés du racisme. Ensemble, engageons-nous dans la lutte pour la justice dans notre société. Nous appartenons tous au Christ.

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