Tous les articles par P. Jean-Daniel Planchot

le mystère de la création

1. « Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance» (Gn 1, 26).

«Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, il les créa homme et femme» (Gn 1, 27).

Michel-Ange-Buonarroti-La-Creation-De-L-Homme
Michel-Ange Buonarroti-La Creation de l ‘Homme (détail) Chapelle Sixtine

En cette Veillée pascale, la liturgie proclame le premier chapitre du Livre de la Genèse, qui évoque le mystère de la création et, en particulier, de la création de l’homme. Une fois encore notre attention se concentre sur le mystère de l’homme, qui se manifeste pleinement dans le Christ et par le Christ.

«Fiat lux», «faciamus hominem» [Que la lumière soit – Faisons l’homme] : ces paroles de la Genèse trouvent toute leur vérité, quand elles sont passées au creuset de la Pâque du Verbe (cf. Ps. 11 [12], 7). Pendant le calme du Samedi saint, dans le silence de la Parole, elles arrivent à la plénitude de leur signification : cette «lumière» est une lumière nouvelle, qui ne connaît pas de déclin; cet «homme» est «l’homme nouveau, créé saint et juste dans la vérité, à l’image de Dieu» (Ep 4, 24).

La nouvelle création se réalise dans la Pâque. Dans le mystère de la mort et de la résurrection du Christ tout est sauvé, et tout redevient parfaitement bon, selon le dessein originel de Dieu. Avant tout, l’homme, fils prodigue qui a dilapidé dans le péché le bien précieux de sa liberté, recouvre sa dignité perdue.

« Faciamus hominem ad imaginem et similitudinem nostram » [Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance]. Comme ces paroles résonnent vraies et profondes dans la nuit de Pâques ! Et quelle ineffable actualité elles revêtent pour l’homme de notre temps, si conscient de sa capacité à dominer l’univers, mais souvent si désorienté par rapport au sens authentique de son existence, dans laquelle il ne sait plus reconnaître les traces du Créateur ! …

4. « O vere beata nox ! » [Ô nuit de vrai bonheur !], chante l’Église dans la Louange pascale, se souvenant des grandes œuvres de Dieu accomplies dans l’Ancienne Alliance, durant l’exode des Israélites sortis d’Égypte. C’est l’annonce prophétique de l’exode du genre humain de l’esclavage de la mort à la vie nouvelle par la Pâque du Christ.

O vere beata nox ! [Ô nuit de vrai bonheur !], voulons-nous répéter avec l’hymne pascale, en contemplant le mystère universel de l’homme à la lumière de la résurrection du Christ. Au commencement Dieu l’a créé à son image et à sa ressemblance.

Par l’œuvre du Christ crucifié et ressuscité, cette ressemblance avec Dieu, ternie par le péché, a été restaurée et portée à son sommet. Et nous pouvons dire à la suite d’un auteur ancien : Homme, regarde-toi ! Reconnais ta dignité et ta vocation ! Le Christ, vainqueur de la mort en cette nuit très sainte, ouvre devant toi les portes de la vie et de l’immortalité.

Faisant écho à la proclamation du diacre dans le chant de l’annonce pascale, je redis avec joie : Annuntio vobis gaudium magnum : surrexit Dominus vere ! Surrexit hodie ! [Je vous annonce une grande joie : le Seigneur est vraiment ressuscité ! Aujourd’hui il est ressuscité !] Amen !

EXTRAITS DE L’HOMÉLIE DE SAINT- JEAN-PAUL II POUR LA VEILLÉE PASCALE du 11 AVRIL 1998

© Copyright – Libreria Editrice Vaticana

Les sept douleurs de Marie

Pieta de Michel-Ange - Basilique du Vatican
Pieta de Michel-Ange – Basilique du Vatican

En ces heures de la Passion, cette dévotion ancienne appelle à se tourner vers la Vierge Marie, unie à la souffrance de son Fils. Vendredi ou Samedi saint, des fidèles se réunissent dans leur église pour «tenir compagnie» à la Vierge Marie, restée seule après la mort de Jésus, pour contempler la Pietà, qui serre son Fils mort sur sa poi­trine et qui selon la tradition réunit en sa personne toute l’Église.

La prophétie de Siméon {Le 2,34-35)

«Je compatis, ô Mère affligée, à la douleur que vous causa le premier glaive qui vous a transpercée, quand Siméon, dans le Temple, vous représenta les tourments que les hommes devaient faire endurer à votre bien-aimé Jésus, et que vous connaissiez déjà par les divines Écritures, jusqu’à Le faire mourir sous vos yeux. » Saint Alphonse-Marie de Liguori

La fuite en Égypte (Mt 2,13)

«Par tant de peines que vous, Vierge délicate, avez endurées, avec votre petit Enfant exilé, dans ce long et pénible voyage, et dans votre séjour en Egypte, où étant inconnus et étrangers, vous avez vécu durant toutes ces années dans la pauvreté et le mépris, je vous prie ma bien-aimée Souveraine, de m’obtenir la grâce de souffrir avec patience dans votre compagnie, jusqu’à la mort, toutes les peines de cette misérable vie.» Saint Alphonse-Marie de Liguori

La disparition de Jésus au Temple (Le 2,41-51)

« Ô Mère affligée, priez pour nous, ô Mère délaissée, priez pour nous, ô Mère désolée, priez pour nous, ô Mère privée de votre Fils, priez pour nous…  » Litanies de Notre-Dame-des-Douleurs

Marie voit son fils chargé de la croix (Le 23,27-31)

« Vos yeux se rencontrèrent alors avec les siens, et vos regards mutuels devinrent autant de traits dont vous blessâtes réci­proquement vos cœurs amoureux. Je vous prie donc par cette grande douleur, de m’obtenir la grâce de vivre entièrement résigné à la volonté de mon Dieu, portant ma croix avec joie dans la compagnie de Jésus jusqu’au dernier soupir de ma vie. » Saint Alphonse-Marie de Liguori

Marie debout au pied de la croix (Jn 19,25-27)

« Elle était debout, la Mère, malgré sa douleur, en larmes, près de la croix, où son Fils était suspendu. Son âme gémissante, contristée et dolente, un glaive la transperça. Qu’elle était triste, anéantie, la femme entre toutes bénie, la Mère du Fils de Dieu I » Extrait du Stabat Mater, attribué au franciscain Jacopone da Todi.

La descente de la croix (Mt 27,57-59)

« Ô Vierge sacrée, votre peine a été la plus grande qu’une pure créature ait jamais endurée. Car toutes les cruautés que nous lisons que l’on a fait subir aux martyrs, ont été légères et comme rien en compa­raison de votre douleur. Elle a été si grande et si immense, qu’elle a crucifié toutes vos entrailles et a pénétré jusque dans les plus secrets replis de votre Cœur. » Saint Anselme de Canterbury

Jésus mis au tombeau (Jn 19,40-42)

« Vous vîtes entre vos bras votre Fils mort, non plus dans l’éclat de sa beauté, comme vous L’aviez autrefois reçu dans l’étable de Bethléem, mais ensanglanté, livide et tout déchiré des blessures qui avaient mis ses os à découvert. Vous écriant alors: mon Fils, en quel état l’amour T’a réduit! Et lorsqu’on Le porta au sépulcre, vous avez voulu encore L’accompagner, et L’y arranger de vos propres mains, jusqu’à ce qu’enfin, Lui disant le dernier adieu, vous y laissâtes votre cœur brûlant d’amour enseveli avec votre Fils. » Saint Alphonse-Marie de Liguori

VIVRE LE MYSTÈRE PASCAL

VIVRE LE MYSTÈRE PASCAL

Nous voici dans le temps du triduum pascal. Entrons davantage dans le temps liturgique : L’Association de la Médaille Miraculeuse nous aide à utiliser les conditions et les moyens qui sont ceux de tous les baptisés et donc spécialement ces jours saints avec la présence discrète de la Sainte Mère de Jésus.

Insérés dans notre diocèse, dans notre paroisse, membres de notre communauté chrétienne locale, nous y rencontrons le Christ dans sa Parole, dans les sacrements, dans la prière personnelle et communautaire. Ce temps nous est donné pour une écoute plus attentive de la Passion du Christ.

Le temps de la conversion

Le mercredi des Cendres nous proposait une existence sous le regard du Père qui voit dans le secret (Mt 6). Cette vie cachée nous apprend à laisser l’Esprit-Saint purifier notre cœur, nous convertir et nous conduire, à mourir à nous-mêmes pour que vive en nous le Christ.

Cette conversion se vit différemment selon les moments et les étapes de notre cheminement. Tantôt elle s’exprime par nos efforts concrets et persévérants pour transformer notre cœur et notre comportement conformément à l’Évangile. Tantôt elle est, surtout l’œuvre purifiante de l’Esprit. Toujours, elle exige une marche patiente dans l’obscurité de la foi.

Dans la pédagogie de la liturgie, nous sommes appelés à revivre ce cheminement, l’exode du peuple de Dieu, à accepter une « marche patiente » dans le désert, la solitude, pour passer avec le Christ dans la terre promise, à mourir avec lui pour vivre de sa vie, à renouveler la plongée dans la mort pour ressusciter avec lui et nous préparer ainsi à renouveler à Pâques nos promesses du baptême.

Vivre en baptisés

L’engagement dans une Association religieuse est une façon de vivre plus Intensément de la grâce baptismale. C’est la perception émerveillée et reconnaissante de ce dessein de Dieu que l’Association de la Médaille Miraculeuse nous invite à développer. Nous nous entraidons à prendre conscience plus vive que, par le baptême, Dieu nous a adoptés, qu’il nous partage sa propre vie.

Cet émerveillement est celui des chrétiens dans la nuit de Pâques, qui prennent mieux conscience de la grâce qui leur a été faite. Quant à nous, c’est un appel particulier et personnel que le Seigneur nous adresse pour que nous réitérions notre donation en vivant pleinement notre consécration baptismale.

Dans la nuit de Pâques nous réaffirmerons cet engagement : Incorporés au Christ, nous nous laissons entraîner dans la même dépendance radicale : nous ne nous appartenons plus, nous sommes à Dieu. C’est la situation créée par notre baptême.

Avec le Christ, oser nous livrer

Le Jeudi-Saint, l’Église nous propose de méditer le lavement des pieds : le Christ s’est fait serviteur. Nous méditons les textes de la Loi de Vie sur ce thème. Le Jeudi Saint, ce jour-là, l’Église célèbre aussi l’institution de l’Eucharistie : le Christ à la Cène livre son corps et II ajoute « Faites ceci en mémoire de moi ».

Qu’est-ce à dire, sinon que nous avons aussi, dans le même Esprit, à nous livrer, devenant un même corps avec Lui. Dans la gratuité de son amour, Dieu nous adresse un appel particulier et personnel à nous livrer totalement à lui, dans et par notre condition, dans le mouvement même qui a poussé le Christ à se livrer pour l’Église.

Le Christ, toujours vivant, nous veut ouverts et livrés de tout notre être à son Esprit. En communiant au Christ obéissant au Père et livré aux hommes jusqu’à mourir crucifié, nous sommes entraînés à nous offrir sans cesse à nouveau dans le même, amour.

Obéissant jusqu’à la mort de la croix

Le Vendredi Saint, la liturgie tourne nos regards vers la croix glorieuse, vers Jésus versant pour nous son sang. Catherine de Sienne a admirablement médité sur ce mystère. Ce mystère de l’amour passe aussi par la mort. Notre engagement ne nous protège pas de la solitude du cœur et du corps, de la tentation, de la souffrance et des problèmes de la vie que nous partageons avec tant de nos frères.

Ces difficultés sont pour nous une invitation à une vigilance accrue et à un appel à Dieu pour qui rien n’est impossible. Notre vigilance dans la prière est réponse à la parole de Jésus « Veillez et priez » pour que nous entrions dans ses sentiments à l’agonie, au Calvaire (Phil 2), car lui le premier a connu la solitude du cœur et du corps.

Jésus a connu l’ultime dénuement dans l’abandon du Calvaire. Nous désirons de tout notre être entrer dans le mystère de cette pauvreté. Nous aspirons à être suffisamment dépouillés de nous-mêmes par les voies que Dieu voudra.

Dans la connaissance progressive de nos limites et impuissances de toutes sortes, nous découvrons de plus en plus la joie de dépendre totalement de Dieu, d’avoir l’Esprit, à nous livrer, devenant un même corps avec Lui. Dans la gratuité de son amour, Dieu nous adresse un appel particulier et personnel à nous livrer totalement à lui, dans et par notre condition, dans le mouvement même qui a poussé le Christ à se livrer pour l’Église.

Le Christ, toujours vivant, nous veut ouvertes et livrées de tout notre être à son Esprit. En communiant.au Christ obéissant au Père et livré aux hommes jusqu’à mourir crucifié, nous sommes entraînés à nous offrir sans cesse à nouveau dans le même amour.

Dans la connaissance progressive de nos limites et impuissances de toutes sortes, nous découvrons de plus en plus la joie de dépendre totalement de Dieu, d’avoir tout à attendre de lui. Nous nous abandonnons avec confiance et reconnaissance entre ses mains.

En Église, la liturgie nous fait reprendre les mots ultimes du Christ, le Vendredi Saint, « Père, entre tes mains, je remets mon esprit », dans la conscience et de nos faiblesses et de la force de l’Esprit.

La joie du Ressuscité

Dieu nous a laissés dans les situations mêmes où nos frères rencontrent l’épreuve et la souffrance, pour nous mettre en solidarité avec eux et pour exprimer par notre vie la victoire du Ressuscité. Puissions-nous témoigner par-là que l’appel à la sainteté s’adresse à tous les hommes .

C’est dans la veillée pascale que les chrétiens célèbrent « la victoire du Ressuscité » et sont invités à en être les témoins : les récits d’apparition sont des envois en mission pour proclamer à tous que le Seigneur est vivant !

Conformes au Christ dans notre humanité, nous sommes heureuses d’être à l’image de celui qui est l’homme parfait, le premier-né de toute créature et d’une multitude de frères. Nous nous réjouissons que notre vie tout entière, régénérée dans le Christ, soit signe et annonce de Dieu et de son amour

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A travers ces quelques textes, puissions-nous découvrir notre enracinement liturgique, vivre plus Intensément le Carême et le tritium pascal, accepter humblement de mourir avec le Christ, dans la certitude que dans nos limites, nos faiblesses, notre mort offerte d’avance, nous expérimentons déjà la joie du Ressuscité dont nous sommes humblement ses témoins.