Frères et sœurs, nous commençons aujourd’hui une nouvelle série de catéchèses sur le « cœur » de l’Église, à savoir l’Eucharistie. Nous ne pouvons pas oublier le grand nombre de chrétiens qui, dans l’histoire, ont résisté jusqu’à la mort pour vivre ce Sacrement et qui, aujourd’hui encore, risquent leur vie pour la Messe dominicale.
C’est un témoignage qui nous interpelle tous sur ce que signifie pour chacun de nous de participer au Sacrifice de la Messe et de nous approcher de la Table du Seigneur.
Le Concile Vatican II, sous la conduite de l’Esprit Saint, a voulu que les chrétiens comprennent mieux la grandeur de la foi et la beauté de la rencontre avec le Christ, à travers un renouveau approprié de la Liturgie et une nécessaire formation liturgique des fidèles.
C’est le but de ce cycle de catéchèses. Ainsi, l’Eucharistie est une véritable théophanie, un évènement merveilleux dans lequel Jésus Christ, notre vie, se rend présent. Il est vraiment important de redécouvrir ce qui est essentiel. Nous avons tous besoin, comme saint Thomas, de « toucher » Dieu pour pouvoir le reconnaître et croire en lui.
En rejoignant cette exigence humaine, les Sacrements, et l’Eucharistie en particulier, sont les signes de l’amour de Dieu, les voies privilégiées pour le rencontrer. Que la Vierge Marie nous accompagne sur ce chemin.
A travers ce nouveau cycle de catéchèses, que le Seigneur nous aide à redécouvrir la valeur et la signification de la Sainte Messe, pour vivre toujours plus pleinement notre relation avec Lui. Que Dieu vous bénisse !
La parabole des invités à la noce et du grand festin
Dans l’Évangile de ce jour (Lc 14,15-24), Jésus est interpellé par un homme qui s’exclame: «Heureux celui qui participera au repas dans le royaume de Dieu!» Le Seigneur lui répond alors par une parabole, conseillant à qui organise un repas d’inviter ceux qui ne peuvent donner de contrepartie.
Dans cette parabole, un homme donne un grand dîner et y invite beaucoup de gens. Mais les premiers invités refusent d’y aller car ils se désintéressent du dîner, des gens, de l’invitation du Seigneur : ils sont pris par leurs propres intérêts, plus grands que l’invitation. Certains évoquent des paires de bœufs à essayer, un champ à aller voir, un mariage récent.
Ils se demandent ce qu’ils ont à y gagner. Ils sont «affairés», attachés à leurs intérêts au point d’un «esclavage de l’Esprit», c’est-à-dire d’être «incapables de comprendre la gratuité de l’invitation».
«Si on ne comprend pas la gratuité de l’invitation de Dieu, alors on ne comprend rien. L’initiative de Dieu est toujours gratuite. Mais pour aller à ce banquet, combien faut-il payer? Mais le billet d’entrée est d’être malade, d’être pauvre, d’être pécheur! Voilà ce qui te laisse passer, voilà le billet d’entrée: être dans le besoin, que ce soit un besoin corporel ou un besoin de l’âme. Mais pour la guérison, avoir besoin d’amour».
Accueillir la gratuité «sans limite» de Dieu
Il y a donc deux sortes de comportements. D’un côté celui de Dieu, qui ne fait rien payer et dit ensuite aux serviteurs de faire venir des pauvres, des estropiés, des bons et des méchants. Il s’agit d’une gratuité «sans limites», Dieu «reçoit tout le monde».
D’un autre côté, il y a l’attitude des premiers invités, qui à l’inverse ne comprennent pas la gratuité. Ils sont comme le frère ainé de la parabole du fils prodigue, qui ne veut pas aller au banquet organisé par son père pour son frère qui était parti: il ne comprend pas.
«’Mais il a dépensé tout l’argent, il a dépensé l’héritage en vices, en péchés, et toi tu lui organises une fête ?» Celui-ci ne comprend pas la gratuité du salut, pense que le salut et le fruit du ‘je paye et tu me sauves’. Je paye avec ça, je paye avec ça, je paye avec ça… Non : le salut est gratuit! Et si tu n’entres pas dans cette dynamique de la gratuité, tu n’as rien compris. Le salut est un don de Dieu auquel on répond par un autre don, le don de mon cœur.»
«Le salut ne s’achète pas»
Le Seigneur «ne demande rien en échange»: «juste de l’amour, de la fidélité, tout comme lui est amour et fidèle»,«le salut ne s’achète pas». «Heureux celui qui participera au repas dans le royaume de Dieu» : voilà le salut. À l’inverse, quand on leur parle de dons, ils pensent tout de suite à la «contrepartie» : «je vais faire ça», et lui, ensuite, «en une autre occasion, il me le rendra».
Ceux qui ne sont pas prêts à venir au banquet, «se sentent en sécurité», «sauvés par leurs propres moyens, loin du banquet».«Ils ont perdu le sens de la gratuité, le sens de l’amour. Ils ont perdu une chose plus grande et plus belle encore et c’est très mauvais: ils ont perdu la capacité de se sentir aimer.»
«Et quand tu perds, non pas la capacité d’aimer, qui se récupère, mais la capacité de te sentir aimé, il n’y a plus d’espérances, tu as tout perdu. Cela fait penser à ce qui est écrit sur la porte de l’enfer de Dante: ‘Laissez l’espérance’, tu as tout perdu»
Prions le Seigneur pour qu’il nous garde de perdre la capacité de se sentir aimés.
Lors de la messe célébrée ce lundi 6 novembre 2017, en la chapelle de la maison Sainte-Marthe au Vatican, le Pape François a développé une réflexion sur «les dons gratuits de Dieu et son appel sans repentance» en prenant appui sur la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains. Quand Dieu nous fait un don, ce don est irrévocable : il ne nous le donne pas aujourd’hui pour nous l’ôter demain.
Quand Dieu appelle, cet appel perdure toute la vie. Les dons et les appels du Seigneur à son peuple dans l’histoire du Salut sont au nombre de trois: «le don de l’élection, de la promesse et de l’alliance». «Tous sont irrévocables», car le Seigneur est fidèle. Ce fut ainsi pour Abraham et il en est de même pour nous.
«Chacun d’entre nous est un élu, un élu de Dieu. Et chacun de nous fait des alliances avec le Seigneur. Chacun de nous peut les faire, peut ne pas les faire, chacun de nous est libre. Mais c’est un fait. Et cela comporte aussi une question: comment est-ce que je ressens l’élection, est-ce que je me sens chrétien par hasard ? Comment est-ce que je vis la promesse, une promesse de Salut dans mon cheminement, et comment suis-je fidèle à l’alliance ? Comment Lui est-il fidèle ?»
Ainsi, face à la «fidélité même» qui est Dieu, il ne nous reste plus qu’à nous interroger : Sentons-nous Sa «caresse», sentons-nous qu’Il «prend soin» de nous, sentons-nous qu’«Il nous cherche» quand nous nous éloignons ? L’apôtre Paul revient à «quatre reprises» sur les paroles «désobéissance» et «miséricorde». Là où l’une est présente, l’autre l’est également.
«Cela signifie que dans le cheminement de l’élection, vers la promesse et l’alliance il y aura des péchés, il y aura la désobéissance, mais face à cette désobéissance, il y a toujours la miséricorde. C’est comme la dynamique de notre cheminement vers la maturité : il y a toujours de la miséricorde, car le Seigneur est fidèle, Il ne révoque jamais ses dons parce que face à nos faiblesses, à nos péchés il y a toujours la miséricorde, et quand Paul parvient à cette réflexion, il fait un pas de plus: non pas dans l’explication, mais dans l’adoration».
Adoration et louange silencieuse donc, face à ce «mystère de la désobéissance et de la miséricorde qui nous rend libres», et face à «cette beauté des dons irrévocables que sont l’élection, la promesse et l’alliance». Réfléchissons à «notre élection, à la promesse faite par le Seigneur, à la façon dont nous vivons l’alliance avec Lui», mais aussi à la façon dont nous nous laissons imprégner de Sa miséricorde.