Tous les articles par P. Jean-Daniel Planchot

Messe à Bogota : constructeurs de la paix, promoteurs de la vie

Au lendemain de son arrivée, et au terme d’une journée très dense, le Pape a présidé une célébration eucharistique pour la paix et la justice en présence de 1,1 million de fidèles réunis dans le parc Simon Bolivar, le plus grand de la capitale colombienne, là même où Jean-Paul II avait célébré une messe lors de sa visite apostolique en 1986. Cette messe était un appel à la paix et à se réconcilier.

Le Pape François avait intitulé son homélie « constructeurs de la paix, promoteurs de la vie » et a fait le souhait que se dispersent les ténèbres qui planent sur la Colombie, celles notamment  «de la soif de vengeance et de la haine qui tache de sang humain les mains de ceux qui se rendent justice eux-mêmes».

Homélie en intégralité du Pape François lors de la messe au parc Simon Bolivar, à Bogotà (page 2)

cyclone Irma et séisme au Mexique

Au troisième jour de son voyage en Colombie, le Pape a conclu la messe à Villavicencio par une pensée adressée aux victimes du séisme au Mexique et de l’ouragan Irma sur les Caraïbes.

«En ce moment, je désire manifester ma proximité spirituelle à tous ceux qui souffrent des conséquences du tremblement de terre qui a frappé le Mexique la nuit dernière, en provoquant des morts et d’importants dégâts matériels. J’assure de ma prière pour ceux qui ont perdu la vie et pour leurs familles.»

«En outre, je suis de près le développement de l’ouragan Irma qui est en train de frapper les Caraïbes, laissant derrière lui de nombreuses victimes et d’importants dégâts matériels, tout en causant aussi des milliers de déplacés. Je les porte dans mon cœur et je prie pour eux. Je vous demande de vous unir à ces intentions, et, s’il vous plait, n’oubliez pas de prier pour moi», at-t-il demandé à la foule rassemblée à Villavicencio.

Le séisme au Mexique, d’une très forte magnitude de 8,2 sur l’échelle de Richter, aurait fait une trentaine de morts, selon un bilan très provisoire fourni par des autorités locales. Plus à l’ouest, autre catastrophe naturelle de grande ampleur avec l’ouragan Irma se dirige vers la Floride après avoir frappé une partie des Caraïbes. Au moins neuf décès ont été recensés dans les Antilles françaises.

Avant de quitter le parc où il avait célébré la messe, le Pape a salué une petite délégation d’une dizaine de personnes venues avec leur évêque de la ville de Mocoa, frappée en avril dernier par des inondations qui avaient fait plus de 250 morts et 400 blessés.

aux évêques de Colombie : œuvrer pour la réconciliation

Le Pape François a rencontré ce jeudi 7 septembre au palais épiscopal de Bogotà la quasi-totalité des 130 évêques de Colombie, auxquels il a délivré une invitation vigoureuse à œuvrer pour la paix et pour l’unité du pays.

Manifestant une grande proximité et de l’affection pour ces évêques dont beaucoup sont ses amis personnels, le Pape les a invités à se lever frontalement contre les plaies qui minent cette nation, notamment la violence, la corruption et le narcotrafic.

«Je viens annoncer le Christ et parcourir en son nom un itinéraire de paix et de réconciliation». le Pape a rendu hommage à la beauté de cette nation,  qui se dérobe «à ceux qui se présentent comme des étrangers avides de s’en accaparer, et en revanche, s’offre généreusement à celui qui touche son cœur par la douceur du pèlerin».

«La Colombie a besoin de votre regard (…) pour la soutenir dans le courage du premier pas vers la paix définitive, la réconciliation, vers le renoncement à la violence comme méthode, vers la suppression des inégalités qui sont la racine de nombreuses souffrances, la renonciation au chemin facile mais sans issue de la corruption, la patiente et persévérante consolidation de la ‘‘res publica’’ qui demande l’éradication de la misère et de l’inégalité.»

«Vous connaissez comme peu de personnes la déformation du visage de ce pays ; vous êtes les gardiens des pièces fondamentales qui l’unifient, malgré ses lacérations.» «À travers vos lèvres de pasteurs légitimes du Christ, tels que vous êtes, la Colombie a le droit d’être interpellée par la vérité de Dieu, qui répète sans cesse : ‘Où est ton frère ?’ » (Gn 4, 9)

C’est une interrogation, qui ne peut être tue, même quand celui qui l’écoute ne peut que baisser le regard, confus, et balbutier sa propre honte de l’avoir vendu, peut-être au prix d’une dose de stupéfiant ou d’une idée équivoque de raison d’État, peut-être à cause de la fausse conscience que la fin justifie les moyens.

Prendre soin des familles, des jeunes et des consacrés

«Je pense aux familles colombiennes, à la défense de la vie depuis le sein maternel jusqu’à sa fin naturelle, au fléau de la violence et de l’alcoolisme touchant souvent les foyers, à la fragilité du lien matrimonial et à l’absence des parents avec ses conséquences tragiques d’insécurité et qui font des orphelins».

Le Pape a évoqué aussi les «nombreux jeunes menacés par le vide de l’âme et entraînés dans la fuite de la drogue, dans le style d’une vie facile, dans la tentation de la subversion».

Les jeunes «aiment se sentir aimés». «Ils se méfient de ceux qui les sous-estiment, ils demandent une cohérence limpide et espèrent être impliqués. Recevez-les, par conséquent, avec le cœur du Christ et ouvrez-leur des espaces dans la vie de vos Églises. Ne prenez part à aucune négociation qui brade leurs espérances. N’ayez pas peur de hausser sereinement la voix pour rappeler à tous qu’une société qui se laisse séduire par le mirage du narcotrafic s’introduit elle-même dans cette métastase morale qui mercantilise l’enfer et sème partout la corruption et, en même temps, engraisse les paradis fiscaux.»

Le Pape a invité  les évêques  à être des pères pour leurs prêtres, et à prendre soin des personnes consacrées qui «constituent la gifle kérygmatique à toute la mondanité et sont appelés à brûler toute vague de valeurs mondaines dans le feu des béatitudes vécues sans glose et dans l’abaissement total de soi dans le service».

Défendre l’Amazonie

Le Pape les a enfin invités à prendre soin de l’Amazonie, en prenant notamment la défense des peuples indigènes. «Je me demande si nous sommes encore capables d’apprendre d’eux la sacralité de la vie, le respect de la nature, la conscience du fait qu’à elle seule la raison instrumentale n’est pas suffisante pour combler le vide de l’homme et répondre à ses inquiétudes les plus chargées d’interrogations.»

Il a conclu en évoquant une anecdote personnelle : «J’ai entendu que dans certaines langues locales amazoniennes, pour se référer au mot ‘‘ami’’, on utilise l’expression ‘‘mon autre bras’’. Soyez par conséquent l’autre bras de l’Amazonie. La Colombie ne peut l’amputer sans être mutilée dans son visage et dans son âme. »

Discours intégral du Pape aux évêques de Colombie (page 2)