Tous les articles par P. Jean-Daniel Planchot

L’Église n’est pas une douane, ses portes sont ouvertes à tous

Premier rendez-vous de son étape à Medellin: le Pape François a présidé la messe, ce samedi 9 septembre 2017, à l’aéroport Enrique Olaya Herrera de la deuxième ville de Colombie.

C’est en présence de centaines de milliers de fidèles, qui l’ont accueilli avec un enthousiasme débordant malgré la pluie, que le Pape a célébré la mémoire liturgique de saint Pierre Claver (1580-1654), prêtre jésuite catalan, missionnaire auprès des esclaves africains.

Le Pape a centré son homélie sur «la vie chrétienne comme disciple», un style de vie qui suppose d’aller à l’essentiel, de se renouveler et de s’engager. Reprenant l’évangile lu deux jours plus tôt à Bogota, le Saint-Père explique que le chemin sur lequel se sont engagés les premiers disciples, puis les douze, a nécessité  «beaucoup d’efforts de purification», tout en les mettant «face aux lépreux, aux paralytiques, aux pécheurs».

Faire l’expérience «vivante» de Dieu et de son amour

«Ces réalités demandaient beaucoup plus qu’une recette, une norme établie.» les disciples ont dû rompre avec des pratiques plus proches de celles des pharisiens, des docteurs «paralysés par une interprétation et une pratique rigoristes de la loi», que de celles de Jésus. Cette manière de faire du Christ, qui doit se traduire dans notre vie de disciple, en trois attitudes.

«Aller à l’essentiel, en profondeur, à ce qui compte et qui a de la valeur pour la vie». La relation avec Dieu ne peut être ni «un attachement froid à des normes et à des lois», ni «un accomplissement de certains actes extérieurs qui ne nous conduisent pas à un changement réel de vie», ni une simple «habitude, parce que nous avons un certificat de baptême». 

Cette relation doit partir d’une «expérience vivante de Dieu et de son amour», «un mouvement continuel vers le Christ», «un apprentissage permanent par l’écoute de sa Parole». Cette parole, qui «s’impose à nous dans les besoins concrets de nos frères».

«Pondérer ce qui est normatif quand est en jeu la marche à la suite de Jésus»

Deuxième attitude: se renouveler, se laisser «secouer» par l’Esprit comme les docteurs de la loi l’ont été par Jésus. Attention, préviens le Pape: «on ne se renouvelle pas selon son caprice» mais «en restant solidement fondé dans la foi». «Le renouvellement suppose le sacrifice et le courage, non pas pour se considérer comme les meilleurs ou les plus propres, mais pour mieux répondre à l’appel du Seigneur.»

Car le Christ nous appelle «à pondérer ce qui est normatif quand est en jeu la marche à la suite de Jésus; quand ses plaies ouvertes, son cri de faim et de soif de justice nous interpellent et nous imposent des réponses nouvelles.»

«L’Église n’est pas à nous, elle est à Dieu»

«Ils sont nombreux ceux qui ont faim, faim de Dieu, faim de dignité parce qu’ils ont été dépouillés.» «Mes frères, l’Église n’est pas une douane. Elle a besoin de portes ouvertes, parce que le cœur de Dieu n’est pas seulement ouvert, mais est percé de l’amour qui s’est fait douleur.»

Les chrétiens n’ont pas continuellement à lever la bannière «passage interdit» car «l’Église n’est pas à nous, elle est à Dieu» et Dieu a appelé tous les hommes. «Tous». Loin d’empêcher cette rencontre, nous devons la favoriser, suivant l’appel du Christ à donner à nourrir nos frères (Mt 14, 16).

Le Pape conclut en invitant l’Église colombienne «à s’engager avec plus d’audace dans la formation de disciples missionnaires», comme l’ y invitait le document d’Apareceda: «des disciples qui sachent voir, juger et agir».

intégralité de l’homélie prononcée par le Pape François (page 2)

Frédéric Ozanam

Aujourd’hui l’Église fait mémoire de OzanamFrédéric Ozanam (1813-1853) – béatifié au cours des JMJ (Journées Mondiales de la Jeunesse) de Paris, le 22 août 1997 par Jean-Paul II – qui a mis toute son intelligence au service de la Foi. Il a participé au débat de son époque sur la question sociale. C’est un modèle chrétien pour notre temps.

Après avoir fondé, à 20 ans, la société Saint-Vincent-de-Paul, ce laïc père de famille a manifesté, sa vie durant, une foi ardente et une charité inventive au service des plus pauvres. (Martyrologe romain)

D’origine lyonnaise, Ozanam vient très jeune à Paris pour faire carrière dans l’enseignement. Il n’entend pas seulement affirmer sa foi dans ses paroles et ses écrits, il veut la mettre en œuvre auprès des déshérités.

Homme d’une érudition et d’une piété remarquables, il mit sa science éminente au service de la défense et de la propagation de la foi, montra aux pauvres une charité assidue dans la Société de Saint-Vincent de Paul et, père exemplaire, fit de sa famille une église domestique.

Son père était médecin à Milan et ancien officier de cavalerie dans les armées napoléoniennes. En 1815, quand la ville repassa sous domination autrichienne, la famille Ozanam rentra en France, où Frédéric fit ses études de droit. Il était alors logé par Ampère. C’est alors que ses opinions politiques se dirigèrent vers une conception républicaine de la politique, car il fut très marqué par la révolte des ouvriers tisserands, les Canuts à Lyon. Sa vie s’orienta vers l’aide aux plus démunis.

Il décida, en avril 1833, avec des amis parisiens de fonder une petite société vouée au soulagement des pauvres, qui prit le nom de Conférence de la charité. La conférence se plaça sous le patronage de saint Vincent de Paul. Il fut alors aidé dans sa tâche par la bienheureuse Rosalie Rendu, des Filles de la Charité.

En 1839, Obéissant à l’une des plus chères traditions de la piété lyonnaise, il fit décider que la Société se mettrait également sous la protection de la Vierge Marie et célébrerait l’une de ses fêtes (l’Immaculée Conception). Il obtint son doctorat ès lettres, puis l’agrégation pour devenir professeur de littérature comparée à la Sorbonne.

En 1841, il se maria et eut une fille. Il s’engagea en politique, se présentant aux élections législatives de 1848.  Peu après, il fut atteint par la maladie et mourut à Marseille en 1853.

Messe à Villavicencio: laisser entrer la lumière de l’Évangile

Pour cette deuxième journée sur place, ce vendredi 8 septembre, le Pape va quitter Bogota pour se rendre à Villavicencio, à une centaine de kilomètres au sud.

C’est là qu’il célèbrera la messe de béatification de deux serviteurs de Dieu, l’évêque d’Arauca, Mgr Jesús Emilio Jaramillo, tué en 1989 par la guérilla de l’ELN, ainsi que le prêtre diocésain Pedro María Ramírez Ramo, assassiné en 1948 après des émeutes dans le pays. Deux visages récents qui montrent les blessures de l’Église colombienne. (suite page 2)

L’autre temps fort de cette journée sera cette grande rencontre de prière pour la réconciliation nationale dans le parc  Las Maloca de Villavicencio. Le Pape devrait notamment rencontrer 4000 victimes du conflit et 500 anciens combattants des guérillas et des paramilitaires. Une journée qui s’achèvera par un moment de recueillement au pied de la croix de la réconciliation, dans un autre parc de la ville.

Le Pape a rejoint la ville de Villavicencio, située à 94 km au sud de Bogotà, la capitale colombienne. Elle se trouve à 460m d’altitude, dans une zone très humide et chaude, après les 15 degrés ressentis dans la capitale.

Sur l’immense terrain de Catama à la sortie de la ville, au pied des montagnes et aux portes de l’Amazonie, le Pape a présidé une célébration eucharistique en présence de centaines de milliers de fidèles, dont de très nombreux indigènes venus de toute la région.

Le Pape François a même troqué sa calotte contre un chapeau Colomb et endossé un collier indigène. Il s’est également vu remettre une lance avant la messe. Cette célébration est toute particulière puisque deux serviteurs de Dieu ont été béatifiés.

 Les portraits des deux nouveaux bienheureux ont été, tour à tour, dévoilés de chaque côté de l’autel, au terme du rite de béatification. On a découvert le visage de Mgr Jaramillo. L’autre visage est celui du père Ramírez Ramo, jeune curé d’Armero. Ces deux martyrs des temps modernes sont le signe visible des blessures de l’Eglise colombienne. Ils sont «l’expression d’un peuple qui veut sortir du bourbier de la violence et de la rancœur».

Dans ce contexte, «comment faire entrer de la lumière ? Quels sont les chemins de réconciliation ?» «Comme Marie (dont on célèbre la naissance ce vendredi), il faut dire oui à l’histoire dans sa totalité ; comme Joseph, il faut laisser de côté les passions et les orgueils ; comme Jésus, il faut prendre sur nous, assumer, embrasser cette histoire» qui est la nôtre. Le Pape invite à remplir nos histoires pleines de péché, de violence et de désaccord, de la lumière de l’Évangile. (suite page 3)

Enfin, cette rencontre avec les habitants de Villavicencio, capitale du département du Meta, lui a offert l’occasion de revenir sur la nécessité de protéger la Création. Face à de nombreux habitants de l’Amazonie, le Pape a appelé à protéger la nature contre «nos passions possessives» et «notre volonté de domination».

Il a rappelé que «la violence qu’il se trouve dans le cœur humain se manifeste aussi à travers les symptômes de maladie que nous observons dans le sol, l’air et les êtres vivants». Ainsi, la protection de la Création s’inscrit dans le processus de réconciliation, dans lequel le pays est engagé.