Tous les articles par P. Jean-Daniel Planchot

Obsèques du père Jacques Hamel

Un dernier hommage empreint de simplicité et de ferveur émue : les obsèques du père Jacques Hamel, 85 ans, assassiné alors qu’il célébrait la messe dans l’église paroissiale de Saint-Étienne-du-Rouvray, se sont tenues ce mardi après-midi, 2 août 2016, en la cathédrale de Rouen.

Obsèques présidées par Mgr Dominique Lebrun, archevêque de Rouen, en présence de Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur et des Cultes, de Laurent Fabius, ancien ministre des Affaires étrangères, des représentants des autorités locales et régionales, des membres des communautés juives et musulmanes, ainsi que des représentants de plusieurs Églises chrétiennes.

Plusieurs milliers de personnes, fidèles et anonymes, ont également fait le déplacement, afin d’accompagner le père Jacques dans la dernière étape de son pèlerinage terrestre.

Un simple cercueil en bois posé sur un tapis, entouré de cierges blancs,  recouvert de l’aube et de l’étole rouge du père Jacques, dans une splendide cathédrale gothique, remplie de prêtres, de fidèles et de simples anonymes. «Des funérailles comme il ne les aurait pas aimées, dans une église solennelle, sous les caméras», a déclaré Mgr Lebrun… «et, en même temps, des funérailles comme il les aurait aimées : ensemble, prêts à communier davantage, attentifs les uns aux autres, sans exclure personne».

Au début de la messe, un prêtre du diocèse de Rouen, la sœur et une de ses nièces du père Hamel se succèdent à l’ambon, pour rappeler, avec une indicible émotion, sa bonté, sa simplicité, sa vie donnée au service du partage, sa foi inébranlable.

«Le mal est un mystère», a affirmé Mgr Lebrun dans son homélie, «mais il n’a pas le dernier mot… Et la mort brutale, violente, du père Hamel convoque à un « oui franc », un « oui » pour la vie.» «Il ne s’agit pas d’excuser les assassins, ceux qui pactisent avec le diable, il s’agit d’affirmer avec Jésus que tout homme, toute femme, toute personne humaine peut changer son cœur avec sa grâce. Nous recevons ainsi la parole de Jésus qui peut sembler au-delà de nos forces aujourd’hui : « Eh bien ! moi, je vous le dis : Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent. »»

Et Mgr Lebrun a lancé une invitation à tous les baptisés présents dans la cathédrale : «nous vous invitons à visiter une église dans les jours qui viennent, pour dire votre refus de voir souiller un lieu saint, pour affirmer que la violence ne prendra pas le dessus dans votre cœur, pour en demander la grâce à Dieu ; nous vous invitons à déposer une bougie dans cette église, signe de résurrection, à vous y recueillir, à ouvrir votre cœur dans ce qu’il a de plus profond ; si vous le pouvez à prier, à supplier.»

Supplier le Seigneur d’accorder au monde la paix et la justice : tout ce pour quoi avait œuvré le père Hamel, le Serviteur fidèle de l’Évangile, qui est désormais entré dans la joie de son Maître.

À l’issue de la cérémonie, le père Hamel devait être inhumé «dans la plus stricte intimité familiale», dans un lieu tenu secret.

Homélie prononcée par Mgr Lebrun :->Lire la suite →

Ô Femme, grande est ta foi

Germain-Jean DROUAIS Le Christ et la CananéenneLa liturgie nous propose un exemple particulier de foi:  une femme cananéenne, qui demande à Jésus de guérir sa fille « fort malmenée par un démon ». Le Seigneur résiste à ses prières insistantes et semble ne pas céder, même lorsque ses disciples eux-mêmes intercèdent pour elle, comme le rapporte l’évangéliste Matthieu. À la fin, toutefois, devant la persévérance et l’humilité de cette inconnue, Jésus accepte : « Ô femme, grande est ta foi ! Qu’il t’advienne selon ton désir ! » (cf. Mt 15, 21-28).

« Ô Femme, grande est ta foi ! » Cette humble femme est indiquée par Jésus comme exemple de foi indomptée. Son insistance à invoquer l’intervention du Christ est pour nous un encouragement à ne jamais nous décourager, à ne pas désespérer, même lors des épreuves les plus dures de la vie. Le Seigneur ne ferme jamais les yeux face aux nécessités de ses fils et, s’il semble parfois insensible à leurs prières, c’est uniquement pour mettre à l’épreuve et raffermir leur foi. Tel est le témoignage des saints et tel est, en particulier, le témoignage des martyrs associés de façon plus étroite au sacrifice rédempteur du Christ. Au cours de ces  jours, nous en commémorons plusieurs : les Papes Pontien et Sixte II, le prêtre Hippolyte, le diacre Laurent et ses compagnons tués à Rome au début du christianisme. Nous rappelons, en outre, une martyre de notre temps, sainte Thérèse Bénédicte de La Croix, Édith Stein, co-patronne de l’Europe, morte dans un camp de concentration et un martyr de la charité, qui scella son témoignage d’amour au Christ dans le bunker de la faim d’Auschwitz : saint Maximilien Maria Kolbe, qui s’est sacrifié volontairement à la place d’un père de famille.

J’invite chaque baptisé à tourner le regard vers ces exemples resplendissants d’héroïsme évangélique. J’invoque sur tous leur protection et en particulier celle de sainte Thérèse Bénédicte de La Croix, qui passa plusieurs années de sa vie précisément dans le Carmel de Cologne. Que Marie veille sur chacun avec un amour maternel, la Reine des martyrs, que nous contemplerons dans sa glorieuse assomption au ciel.

BENOÎT XVI, ANGÉLUS, Castel Gandolfo, dimanche 14 août 2005, © Copyright – Libreria Editrice Vaticana

confiance, c’est moi, soyez sans crainte

Le Christ sauvant l'apôtre Pierre de la noyade, par Lorenzo Veneziano 1370L’Évangile d’aujourd’hui nous présente l’épisode de Jésus qui marche sur les eaux du lac (cf. Mt 14, 22-33). Après la multiplication des pains et des poissons, Il invite les disciples à monter sur la barque et à le devancer sur l’autre rive, tandis qu’il renvoie les foules, puis il se retire seul pour prier sur la montagne jusque tard dans la nuit. Entre temps, sur le lac se lève une forte tempête, et précisément au milieu de la tempête, Jésus rejoint la barque des disciples en marchant sur les eaux du lac. Lorsqu’ils le voient, les disciples prennent peur, croyant voir un fantôme, mais Il les tranquillise: «Ayez confiance, c’est moi, soyez sans crainte» (v. 27). Pierre, avec son élan typique, lui demande presque une preuve: «Seigneur, si c’est bien toi, donne-moi l’ordre de venir à toi sur les eaux»; et Jésus lui dit «Viens»! (vv. 28-29). Pierre descend de la barque et se met à marcher sur les eaux; mais le vent fort le frappe et il commence à couler. Alors il se met à crier: «Seigneur, sauve-moi!» (v. 30), et Jésus lui tend la main et le relève.

Ce récit est une belle icône de la foi de l’apôtre Pierre. Dans la voix de Jésus qui lui dit: «Viens!», il reconnaît l’écho de la première rencontre sur la rive de ce même lac, et immédiatement, une fois de plus, quitte la barque et va vers le Maître. Et il marche sur les eaux! La réponse confiante et prompte à l’appel du Seigneur fait accomplir des choses toujours extraordinaires. Mais Jésus lui-même nous a dit que nous sommes capables de faire des miracles avec notre foi, la foi en Lui, la foi en sa parole, la foi en sa voix. Au contraire, Pierre commence à couler au moment où il détache son regard de Jésus et se laisse emporter par les adversités qui l’entourent. Mais le Seigneur est toujours là, et lorsque Pierre l’invoque, Jésus le sauve du danger. Dans le personnage de Pierre, avec ses élans et ses faiblesses est décrite notre foi: toujours fragile et pauvre, inquiète et toutefois victorieuse, la foi du chrétien marche vers le Seigneur ressuscité, au milieu des tempêtes et des dangers du monde.

La scène finale aussi est très importante. «Et quand ils furent montés dans la barque, le vent tomba. Ceux qui étaient dans la barque se prosternèrent devant lui, en disant: “Vraiment, tu es Fils de Dieu!”» (vv. 32-33). Sur la barque, il y a tous les disciples, réunis par l’expérience de la faiblesse, du doute, de la peur, du «peu de foi». Mais lorsque Jésus remonte sur cette barque, le climat change immédiatement: tous se sentent unis dans la foi en Lui. Tous, petits et effrayés, deviennent grands au moment où ils tombent à genoux et reconnaissent dans leur maître le Fils de Dieu. Combien de fois nous arrive-t-il à nous aussi la même chose! Sans Jésus, loin de Jésus, nous avons peur et nous nous sentons inadéquats au point de penser ne pas réussir. Il manque la foi! Mais Jésus est toujours avec nous, sans doute caché, mais présent et prêt à nous soutenir.

Voilà une image concrète de l’Église: une barque qui doit affronter les tempêtes et qui semble parfois sur le point d’être renversée. Ce qui la sauve ne sont pas les qualités et le courage de ses hommes, mais la foi, qui permet de marcher également dans l’obscurité, dans les difficultés. La foi nous donne la certitude de la présence de Jésus toujours à nos côtés, de sa main qui nous prend pour nous soustraire au danger. Nous sommes tous sur cette barque, et là, nous nous sentons en sécurité en dépit de nos limites et de nos faiblesses. Nous sommes en sécurité surtout lorsque nous savons nous mettre à genoux et adorer Jésus, l’unique Seigneur de notre vie. A cela nous rappelle toujours notre Mère, la Vierge. Nous nous adressons à elle avec confiance.

PAPE FRANÇOIS ANGÉLUS, place Saint-Pierre, 10 août 2014