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entretien avec les journalistes du vol papal

Cité du Vatican, 20 janvier 2015.

Comme à l’accoutumé, dans l’avion le ramenant des Philippines à Rome, le Pape a rencontré hier les journalistes l’accompagnant durant le voyage apostolique. A une première question, il a répondu avoir été ému par tant de « gestes venus du cœur », des manifestations de foi, d’enthousiasme et de confiance dans l’avenir, des sourires sincères malgré les grandes difficultés dans lesquelles se trouve le peuple philippin. Emu aussi d’avoir vu tant d’enfants handicapés et de petits enfants qu’on lui tendait, le Saint-Père a dit admirer l’amour des parents pour leur progéniture, un peuple qui sait souffrir et se résigner au malheur sans perde ni la joie ni l’espérance.

A qui l’a ensuite interrogé sur ses prochains voyages, il a signalé qu’il espérait de se rendre en Centre-Afrique et en Ouganda, même si le projet avait été retardé par l’épidémie Ebola. Par ailleurs, il a confirmé sa venue à Philadelphie pour la Rencontre mondiale des familles, suivie d’une visite à Washington et à New York où il prendra la parole au siège des Nations-Unies. Le déplacement en Californie, désiré en vue de la canonisation de Junipero Serra, est trop compliqué. En 2016, il espère se rendre en Équateur, en Bolivie et au Paraguay.

Revenant sur ce qu’il avait dit le 15 janvier à propos de la liberté religieuse et de la liberté d’expression, et la polémique qui en a découlé, il a déclaré: « En théorie on ne devrait pas faire ce qui n’est pas bon. Nous disons en théorie ce que dit l’Évangile », en l’occurrence répondre à l’insulte « en tendant l’autre joue. Nous sommes en théorie tous d’accord. Mais nous sommes humains… Je ne peux insulter et provoquer sans cesse l’autre, au risque qu’elle enrage et réponde de manière incorrecte. C’est humain et c’est pour cela que la liberté d’expression doit tenir compte de la nature humaine. Il faut donc être prudent… La prudence est une vertu qui règle les rapports humains ».

Pour ce qui est du fléau de la corruption, qui est une plaie favorisée par la multiplication des chefs et sous chefs en tout genre, le Pape a insisté sur le fait qu’elle vole les gens: « Les personnes corrompues qui font des affaires avec des responsables corrompus volent le peuple », la société. Elle existe aussi au sein de l’Église, où elle est le fait de pécheurs. Il y a des cas de personnes ou de services corrompus dans l’Église… Il faut demander pardon pour ces catholiques qui scandalisent tout le monde. La corruption est aussi une plaie pour l’Église, à côté de tant de personnes saines, de pécheurs non corrompus ».

Puis on l’a interrogé sur le problème auquel sont affrontées les Philippines, une croissance démographique énorme qui engendre une plus grande pauvreté. Quelle est aujourd’hui la position de l’Eglise sur la procréation et la contraception: Les démographes estiment qu’il « est important de maintenir le taux de trois enfants par famille. Sous ce taux, en Italie par exemple, il ne devrait plus y avoir en 2024 assez de renouvellement pour garantir les retraites. Pour maintenir la population et éviter l’effondrement démographique, l’Église continue de prôner une paternité responsable… Non, pour être de bons catholiques, il ne suffit pas de faire comme les lapins… Il existe de multiples moyens licites pour éviter cela… Pour les plus pauvres, l’enfant constitue une richesse…et beaucoup d’entre eux manquent en cela de prudence.

La paternité responsable et nécessaire même si on doit saluer la générosité de parents qui voient en tout fils un trésor ». A propos enfin de ce qu’il a dit de la nécessité d’apprendre à pleurer, le Saint-Père a dit que « le trop bien être et une mauvaise compréhension des valeurs, l’endurcissement face à l’injustice et la culture du rebut font perdre aux gens cette capacité de pleurer. Or c’est une grâce qu’il faut demander… Nous tous mais surtout les chrétiens installés dans le confort devons demander cette grâce: Il faut pleurer sur les injustices comme sur les péchés. Il faut apprendre à pleurer. Pleurer permet d’appréhender de nouvelles réalités ou de nouvelles dimensions de la réalité ».

Unité – troisième jour DÉNONCIATION II

Je n’ai pas de mari (Jn 4, 17)

2 R17, 24-34 La Samarie fut conquise par l’Assyrie
Ps 139, 1-12 Seigneur, tu m’as scruté et tu me connais
Rm 7, 1-4 Vous avez été mis à mort à l’égard de la loi, par le corps du Christ
Jn 4, 16-19 Je n’ai pas de mari

La Samaritaine répond à Jésus : « Je n’ai pas de mari”. La conversation porte maintenant sur la vie matrimoniale de cette femme. Il y a comme un glissement dans le contenu de leur conversation qui passe de l’eau à son mari. « Va, appelle ton mari et reviens ici » (Jn 4, 16) mais Jésus sait que la femme a eu cinq maris et que l’homme avec lequel elle vit maintenant n’est pas son mari.

Dans quelle situation se trouve cette femme ? Ces maris ont-ils demandé le divorce ? Était-elle veuve ? Avait-elle des enfants ? En lisant ce passage, ces questions viennent naturellement à l’esprit. Quoi qu’il en soit, il semble que Jésus soit intéressé par une toute autre dimension de l’existence de cette femme : il constate quelle est sa vie mais reste accueillant à son égard, de manière à ce que la rencontre véritable puisse advenir. Jésus n’insiste pas sur une interprétation moralisatrice de sa réponse mais paraît vouloir la mener au-delà. Et de fait, la femme finit par changer d’attitude envers Jésus.

Les obstacles que pouvaient constituer leurs différences culturelles et religieuses passent à l’arrière plan et laissent place à quelque chose de bien plus important : une rencontre établie dans la confiance. À cet instant même, Jésus, par son attitude, nous offre la possibilité de nous ouvrir à de nouveaux horizons et de nous interroger davantage : émergent alors des questions venant défier les attitudes de dénigrement et de marginalisation des femmes, des questions sur les différences qui restent un obstacle sur le chemin de l’unité, cette unité que nous cherchons et pour laquelle nous prions.

Questions
1. Dans nos communautés, existe-t-il des situations qui font scandale à nos yeux ?
2. Quels sont la place et le rôle des femmes dans nos Églises ?
3. Que peuvent faire nos Églises pour prévenir et vaincre la violence dont sont victimes les femmes et les jeunes filles ?

Prière
Ô Toi qui es au-delà de tout, peut-on te désigner autrement ?
Quelle parole peut te chanter, toi qu’aucun vocable
ne saurait désigner nommément ?
Comment l’esprit te verrait-il, ô toi qui ne peux être perçu
par aucun esprit intelligent ?
Tu es seul innommable, toi qui as créé tout ce que la parole saisit.
Tu es seul inconnaissable, toi qui as créé tout ce que la connaissance saisit.
Toutes choses parlantes ou non parlantes disent ta gloire,
les désirs de tous, les songes de tous gravitent autour de toi
et les prières de tous sont autour de toi.
Tout l’univers qui a l’intelligence de ton Être te chante un hymne de silence,
Sois-nous propice, ô toi qu’on ne peut désigner autrement
et qui es au-delà de tout !

Attribué à Saint GRÉGOIRE DE NAZIANCE

Unité – deuxième jour DÉNONCIATION I

Fatigué du chemin, Jésus était assis au bord du puits (Jn 4, 6)

Gn 29, 1-14 Jacob et Rachel près du puits
Ps 137 Comment chanter un chant du Seigneur en terre étrangère ?
1 Co 1, 10-18 Chacun de vous parle ainsi :
« Moi, j’appartiens à Paul » ; l’autre : « Moi à Apollos »
Jn 4, 5-6 Jésus était fatigué du chemin

Avant sa rencontre avec la Samaritaine, Jésus était allé en Judée. Les Pharisiens disaient de lui qu’il avait baptisé plus de disciples que Jean le Baptiste. Ces rumeurs pourraient avoir causé quelque tension désagréable. Peut-être est-ce aussi la raison pour laquelle Jésus se remet en route.

Arrivé au puits et fatigué par le voyage, il décide de s’arrêter. Cette fatigue pourrait également être due aux bruits qui circulaient sur son compte. Alors qu’il se repose, une femme samaritaine s’approche du puits pour y puiser de l’eau. Cette rencontre a lieu au puits de Jacob : un lieu symbolique dans la vie et la spiritualité du peuple biblique.

Le dialogue qui s’instaure entre la Samaritaine et Jésus porte sur le lieu où adorer. « Est-ce sur cette montagne ou à Jérusalem ? » demande la Samaritaine. Jésus répond : « Ni sur cette montagne, ni à Jérusalem… Les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; tels sont, en effet, les adorateurs que cherche le Père » (Jn 4, 21-24).

Il arrive encore qu’au lieu de la recherche commune de l’unité, ce soient la compétition et les disputes qui caractérisent les relations entre les Églises. Au Brésil, c’est ce à quoi on a assisté ces dernières années. Certaines communautés célèbrent leurs vertus et, pour attirer de nouveaux membres, vantent les avantages que peuvent en retirer leurs fidèles. Certaines vont même jusqu’à penser que plus leur Église est grande et puissante et le nombre de leurs membres est élevé, plus elles sont proches de Dieu, allant même jusqu’à se présenter comme les seuls vrais adorateurs, ce qui n’a pas manqué de provoquer des violences et un manque de respect vis-à-vis des autres religions et traditions chrétiennes. Ce genre de marketing compétitif engendre à la fois la méfiance entre les Églises et une perte de crédibilité de l’ensemble des chrétiens dans la société. Quand la compétition augmente, c’est « l’autre » communauté qui devient l’ennemi à combattre.

Qui sont les vrais adorateurs ? Les vrais adorateurs ne permettent pas que la logique de la compétition – qui est le meilleur, qui est le pire ? – viennent contaminer la foi. Nous avons besoin de « puits » sur lesquels nous pencher, où nous reposer et nous affranchir des disputes, de la compétition et de la violence, nous avons besoin de lieux où apprendre que les vrais adorateurs adorent « en Esprit et en Vérité ».

Questions
1. Quels sont les principaux motifs de compétition entre nos Églises ?
2. Sommes-nous en mesure de trouver un « puits » commun sur lequel nous pencher et nous reposer de nos disputes et manies de compétition ?

Prière
Dieu de miséricorde,
bien souvent nos Églises finissent par choisir la logique de la compétition.
Pardonne-nous, notre orgueil est péché.
Nous sommes las de ce besoin d’être les premiers.
Laisse-nous reposer près du puits.
Désaltère-nous avec l’eau de l’unité qui jaillit de notre prière commune.
Que ton Esprit qui plana sur les eaux du chaos nous donne l’unité
au sein de notre diversité.
Amen.