L’annonce de la mort de la Vierge Marie (détail) Duccio (1260-1319) musée de Sienne
La prière de toute l’Église, la prière toujours écoutée avec un amour infini donne à Dieu toute gloire. Elle est première, Marie, à savoir parfaitement comment nous devons prier, parce qu’elle a vu et compris d’abord le modèle unique de toute prière.
Qui a connu comme elle le secret de la vie intérieure ? Par-dessus toute la science des saints, elle possède l’intelligence de nos relations avec Dieu, la sagesse de l’Esprit de Jésus.
Mais Marie ne nous apporte pas seulement le témoignage du Fils de Dieu. Elle nous éclaire par son témoignage de Mère de Dieu. Car sa prière est celle de l’Immaculée en face du Père trois fois saint. Elle a fait l’expérience de tout ce qu’il y a de plus élevé dans cet échange d’amour avec la Trinité qu’elle veut nous apprendre, cette splendeur d’amour qui illumine et qui embrase son coeur.
Ce qui nous séduit, c’est son âme, remplie du Saint-Esprit où la Trinité habite, non pas comme dans les membres pécheurs de l’Église, mais dans un lieu immaculé de la création, où sont constamment versés des fleuves de grâces et de béatitudes ; son âme les reçoit dans des abîmes insondables qui sont aux yeux de Jésus des océans en comparaison de ces cavernes mythiques des puissances humaines.
Marie sait prier toujours comme Fille pure du Père, comme Épouse élue du Verbe, comme Mère, plus aimante que toutes les mères, d’un Fils divin conçu du Saint-Esprit. Et cet Esprit lui-même, comme il avait formé Jésus en son sein, continue à la combler de cette connaissance amoureuse de Dieu qui la tient humblement dans l’adoration et la reconnaissance. Il la comble de ses tendresses de maternité divine ; il forme lui-même en son coeur toutes les pensées, tous les désirs, tous les sentiments de sa prière, avec une abondance d’effusion aussi semblable que possible à celle qui s’épanche éternellement entre le Père et le Fils. ■
Chers frères et sœurs, la lumière de la naissance du Seigneur illumine toujours les ténèbres qui couvrent souvent notre monde et nos cœurs. Mais d’où vient Jésus, celui qui est né à Bethléem ?
Les quatre évangiles disent qu’il vient totalement du Père. Conçu du Saint Esprit, né de la Vierge Marie, Jésus est « Dieu-parmi-nous ». Notre credo affirme qu’il est le Fils Unique de Dieu ; Dieu, né de Dieu ; Lumière, née de la lumière ; vrai Dieu, né du vrai Dieu. Il est de la même nature que le Père. Notre profession de foi parle aussi d’une action des trois Personnes divines qui se réalise en Marie, humble femme d’un village inconnu. En elle s’accomplit mystérieusement une nouvelle création.
Avec l’Incarnation de son Fils, Dieu donne vie à un nouveau commencement de l’humanité. La foi apporte en chacun de nous une nouveauté si forte qu’elle produit une nouvelle naissance, grâce au baptême. Quand nous nous ouvrons à l’action de Dieu, comme Marie, notre vie acquiert un nouveau sens et un nouveau visage, celui d’enfants de Dieu, le Père. Par son oui, Marie devient la nouvelle arche de l’alliance, la demeure de Celui que l’univers ne peut pas contenir.
En ce temps de Noël, nous célébrons un grand mystère bouleversant : par l’action de l’Esprit Saint, le Fils de Dieu s’est incarné dans le sein de la Vierge Marie. Cette annonce nous apporte espérance et joie : Dieu agit en nous et fait toujours des merveilles, malgré nos faiblesses et nos incapacités. Sa grâce est notre force !
* * *
Au début de cette année, renouvelons notre foi en la présence et en l’action de Dieu dans nos vies et dans notre histoire. Ouvrons-lui grandement les portes de nos cœurs et de nos maisons pour qu’il y établisse sa demeure. Il est un Père aimant qui ne nous abandonne jamais. Bonne Année à tous !
Mais comment « la mère de mon Seigneur » (comme disait votre vieille cousine Élisabeth) pourrait-elle être absente de ma vie ?
Mais d’abord, laissez-moi régler un petit, tout petit point de protocole.
Je n’ai pas de difficulté à dire « tu » à Dieu :
il est tellement au-dessus de tout pronom personnel,
le silence seul l’exprime.
Mais à vous, Marie, je ne me décide pas à vous dire « tu ».
Pourquoi ? Je ne sais.
Mais un « vous » si plein de toutes les tendresses humaines,
si riche de toutes mes admirations.
J’aime vous regarder dans votre humanité quotidienne,
jeune fille et femme, inconnue de tous, mère attentive, épouse soigneuse,
vraie fille d’Israël qui
« assise dans sa maison aussi bien que marchant sur la route, couchée aussi bien que debout »
redit la prière la plus chère à la piété de votre race :
« Dieu notre Dieu est le seul : Tu aimeras ton Dieu de tout toute ton âme et de tout ton pouvoir. » (Dt 6, 5)
Femme semblable à toutes les femmes, Dieu vous donne d’être là toujours disponible quand le cœur demande « Où es-tu ? »
Mais j’aime aussi vous voir
telle que les peintres et les sculpteurs de tous les siècles vous représentent,
Marie couronnée au tympan des cathédrales, la femme aux douze étoiles,
la Vierge des icônes au manteau de pourpre royale
et du retable de l’Agneau Mystique, si jeune.
Avec votre poète Claudel, j’aime vous dire :
« Souveraine des Anges, Reine des Docteurs…
ne quittez pas ce vêtement de gloire
ces franges d’or qui ne sont autres
que les rayons de votre gloire qui vient de l’intérieur. »
Mais avec Thérèse de l’Enfant Jésus s’exprimant sans mots superflus je m’émerveille :
« Elle est plus mère que reine. »
Oui, tout le reste est fioritures
devant les trois mots : « Mère de Dieu ».
Ils sont le fil qui de siècle en siècle
relie en un seul tissu toute la Tradition de l’Église.
« Mère de mon Seigneur », disait Élisabeth.
« L’enfant avec Marie sa mère », écrit saint Matthieu.
«Né d’une femme », ajoute saint Paul.
« Marie Theotokos », c’est-à-dire « Mère de Dieu », crieront les habitants d’Éphèse, en l’an 431, quand le Concile eut affirmé le dogme.
«Né de la Vierge Marie », chante le Credo. Car Jésus n’est véritablement homme que si vous êtes véritablement sa mère.
Le réalisme du Verbe de Dieu fait chair va jusque là.
« Jésus ayant aimé les siens jusqu’à l’extrême », dit saint Jean pour signifier la Passion, mais ce « jusqu’à l’extrême» était vrai dès le jour où Dieu a pris corps en vous, dès votre oui à l’ange.
« Mère de Dieu », ces trois mots,
je n’aurai jamais trop d’heures de silence pour les contempler.
Comme ces plantes du désert qui attendent des jours, des années peut-être, une pluie pour germer,
il nous faut les redire jusqu’à ce que votre fils les féconde en nous.
Tous les âges s’étonnent !
« Celui que le cosmos chante et ne peut contenir,
en votre sein, il est présent »,
« Vierge mère, fille de votre fils,
humble et haute plus qu’aucune créature. »
Que dirai-je de plus ?
Ceci, qui pour moi est souverainement essentiel :
« Femme, voilà ton fils,
Fils, voilà ta mère »,
ces ultimes paroles que me dit Jésus en croix aujourd’hui à moi sont dites.
Déjà réalisées à l’instant de l’Annonciation, Marie, avez-vous pressenti, alors, que «le Fils du Très-Haut », « le Fils de Dieu »,
celui dont « le règne n’aura pas de fin» était à ce point lié à l’humanité,
Vous, nourrie des Écritures ?
Et c’est pourquoi avec de nouveau la Tradition entière,
ajoutant ma voix à la multitude qui accomplit votre prophétie :
« Oui, désormais tous les âges me diront bienheureuse »
(et nul ne vous connaissait alors),
je redis sans me lasser la prière des pécheurs et des saints :
« Sainte Marie, Mère de Dieu,
priez pour nous, pauvres pécheurs, maintenant et à l’heure de notre mort. »
Marie, je vous ai priée avant même de croire à votre Fils « au cas où… »