Pâques

La bénédiction du cierge pascal dans le rite romain ancien

Le symbole du cierge pascal apparaît au IVe s. en Italie pour répondre au besoin humain du symbole, c’est-à-dire le besoin de voir quelque chose (un symbole) qui renvoie à l’invisible (la réalité symbolisée). En effet, dans le cas de la liturgie pascale, on ressent le besoin de voir le symbole du cierge pascal pour signifier la présence du Christ ressuscité, Lumière du monde !

Certes, il y a d’autres symboles du Christ ressuscité, l’eucharistie, p.ex., mais ici le cierge pascal révèle la victoire de la lumière sur les ténèbres. Aucun symbole ne peut révéler tout l’être divin, il en faut plusieurs, ceux-ci sont complémentaires. Au VIIe s. le symbole du cierge est répandu dans toute l’Europe.

Nous retrouvons cette symbolique dans le Deus mundi conditor, prière de bénédiction du cierge:

Ô Dieu, créateur de l’univers, auteur de la lumière, bâtisseur des étoiles: ô Dieu, qui as inondé d’une splendeur merveilleuse le monde gisant dans les ténèbres: ô Dieu, dont la puissance ineffable a fait jaillir la clarté sur toutes choses: nous t’invoquons dans tes œuvres, et, en la veillée de cette nuit très sainte, nous présentons à ta majesté suprême, avec nos supplications, le cierge que tu nous as donné. Ce cierge, nous te l’offrons en hommage de profonde piété: il n’a pas été fait à l’aide d’une graisse animale impure, ni souillé par une onction profane, ni allumé par un feu sacrilège: mais, constitué de cire, d’huile et de papyrus, il a été embrasé en l’honneur de ton nom.

Pourra-t-on jamais, en effet, célébrer avec assez de joie le profond mystère et l’insondable secret de cette nuit? Dans ce miracle de la résurrection du Seigneur, les profondes ténèbres furent détrônées par la clarté du jour, et la mort, jadis condamnée à la nuit éternelle, fut frappée de stupeur en se voyant traînée captive dans la splendeur d’une aveuglante clarté, au milieu du cortège triomphal du Seigneur. Ce qui, par la ténébreuse témérité du premier homme, avait été condamné à la servitude du péché est maintenant inondé de la splendeur de la liberté par le miracle de cette nuit.

Pénétrés donc par l’ardeur du Saint-Esprit d’un profond respect pour cette fête, ainsi que l’exige l’humaine dévotion, nous te présentons, ô Dieu, ces paisibles flambeaux aux flammes éclatantes, et, tandis que nous accomplissons ce rite avec une foi ardente, s’élève en même temps la profonde louange de tes créatures. Il faut se rappeler, en effet, que c’est par la lumière d’une flamme que la puissance de Dieu daigna se manifester à Möise: c’est une flamme également qui montra par sa salutaire clarté la route au peuple sortant de la terre de servitude: c’est une flamme, enfin, qui conserva en vie par ses douces caresses les trois enfants jetés dans la fournaise sur l’ordre du tyran. De même en effet que l’horreur des ténèbres est chassée à la faveur de cette lumière enveloppante, de même le fardeau des péchés se dissipe lorsque resplendit la puissance de ta majesté.

Admirant donc l’origine de la substance de ce cierge, nous nous devons aussi de célébrer la naissance des abeilles. Oui, les abeilles sont frugales dans leur nourriture et très chastes dans leur enfantement. Elles façonnent de cire et emplissent de miel des cellules, que tout l’art magistral de l’humaine sagesse ne saurait égaler. Elles recueillent de leurs pattes le suc des fleurs, sans nullement les léser. Elles produisent leur progéniture non selon la manière ordinaire, mais bien par la bouche, formant ainsi des essaims, selon l’admirable exemple du Christ sortant de la bouche de son Père. Chez elles, la virginité est féconde sans enfantement, ce que le Seigneur a lui-même daigné imiter parfaitement, lui qui, aimant la virginité, a voulu néanmoins avoir une mère charnelle.

Tels sont donc, Seigneur, les présents que nous apportons avec respect auprès de tes autels sacrés, te présentant ainsi une offrande que la religion chrétienne considère comme parfaitement agréable à tes yeux.

Le cierge pascal est offert par la communauté car le Christ Ressuscité est l’Unique Offrande digne du Père. C’est le Père qui nous a donné le Fils mais aussi Dieu qui nous a donné ce cierge… tout vient de Lui, même nos propres offrandes !

La matière du cierge et sa provenance est d’une grande importance. La cire ne vient pas de la graisse animale impure, elle vient de la production de l’abeille, symbole de la Parole, de l’huile qui sert aussi à l’onction et du papyrus qui renvoie aussi au support de la Parole. Les abeilles sont admirées pour leur sagesse et récoltent le suc des fleurs sans les léser.

Il y aurait beaucoup à dire ici sur le travail de l’homme qui détruit la nature, il n’a pas la sagesse de l’abeille: profiter de la nature sans la détruire ! La production de leur progéniture par la bouche est le symbole du Verbe incarné qui sort de la bouche du Père. Elles symbolisent aussi la Vierge Marie, la fécondité de sa virginité.

La flamme du cierge est enveloppante, elle inonde le peuple et se pose sur elle pour éclairer les visages humains et la création. Nous avons déjà tous fait cette expérience. La petitesse d’une flamme sur le cierge pascal peut sembler ridicule et pourtant, elle dissipe les ténèbres, la nuit est irrémédiablement vaincue lorsqu’il y a la moindre lumière.

D’autre part, chacun peut allumer son cierge au cierge pascal sans que la lumière de celui-ci diminue, c’est le miracle du ressuscité. C’est le déjà et le pas encore de la Gloire symbolisés. Nous sommes habités du Ressuscité mais il faut encore le laisser rayonner dans nos vies ! La colonne de feu qui ouvrait la marche des Hébreux au désert rayonnait aussi sur les visages du Peuple de Dieu.

Avec le Christ, la cire qui coule le long du cierge symbolise la fécondité du Ressuscité qui féconde son Épouse, l’Église, c’est la sève de la Vie nouvelle, du Printemps de Dieu. C’est la Lumière du Ressuscité qui la répand !

d’après http://liturgie.isuisse.com/cierge%20pascal.html