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Les jeunes Japonais invités à se mettre à l’écoute des autres

Les jeunes Japonais invités à se mettre à l’écoute des autres

Le Pape François a consacré un temps à la jeunesse, dans la cathédrale de Tokyo. Il a notamment insisté sur l’importance de lutter contre le harcèlement et de s’ouvrir aux autres. Non pas qu’est-ce que je possède? Mais avec qui je partage et « pour qui je vis« .

Avec cette question, le Pape François provoque les jeunes Japonais pour qu’ils ne vivent pas comme des « zombies » dans une société riche mais esclaves de la solitude. La forte invitation du pape, c’est d’apprendre à se donner et à accueillir ceux qui cherchent refuge dans le pays

Il a tout d’abord écouté trois témoignages, notamment celui d’une jeune enseignante, qui a souligné la difficulté des jeunes à se situer face à une pression compétitive et à une logique concurrentielle venant parfois des parents eux-mêmes ou des frères et sœurs.

Un immigré philippin, arrivé au Japon alors qu’il était scolarisé en primaire, a raconté avoir été victime de harcèlement à l’école et avoir pensé au suicide. Il a expliqué comment sa foi chrétienne et l’écoute des paroles de Jésus l’ont sauvé.

«Il faut un grand courage et de l’audace pour partager, comme vous l’avez fait, ce qu’on a dans le cœur, les a remercié le Pape. Je suis certain que vos voix ont été un écho de celles de beaucoup de vos compagnons ici présents. Merci ! Je sais que parmi vous il y a des jeunes d’autres nationalités dont certains cherchent un refuge. Apprenons à construire ensemble la société que nous voulons pour demain.» 

Lutter contre le harcèlement

Il s’est appuyé sur le témoignage de Leonardo pour remarquer que «de plus en plus les jeunes ont le courage de parler» des humiliations vécues dans leur enfance. «Autrefois on en parlait pas.» «Le plus cruel dans le harcèlement en milieu scolaire, c’est qu’il blesse notre esprit et notre auto-estime au moment où nous avons le plus besoin de force intérieure pour nous accepter nous-même et pouvoir faire face à de nouveaux défis dans la vie».

«Cependant, paradoxalement, ce sont ceux qui harcèlent qui sont les vrais faibles, parce qu’ils pensent qu’ils peuvent affirmer leur identité propre en faisant du mal aux autres.» «Nous devons tous nous unir contre cette culture de harcèlement et apprendre à dire : ça suffit !»

«Les grandes religions enseignent la tolérance, l’harmonie et la miséricorde ; elles n’enseignent pas la peur, la division ou le conflit. Jésus disait constamment à ses disciples de ne pas avoir peur. Pourquoi ? Parce que si nous aimons Dieu ainsi que nos frères et sœurs, cet amour chasse la crainte » (citation de l’Évangile selon saint Jean).

«Pour beaucoup d’entre nous, comme nous l’a si bien rappelé Leonardo, regarder la vie de Jésus nous permet de trouver la consolation, car Jésus savait lui-même ce que signifie être méprisé et rejeté, jusqu’au point d’être crucifié. Il savait également ce que c’est que d’être un étranger, un migrant, quelqu’un de ‘‘différent’’. Dans un certain sens, Jésus a été le plus ‘‘marginalisé’’, un marginalisé rempli de Vie à donner.»

«Le Seigneur a besoin de toi pour que tu puisses donner du courage à tant d’autres qui demandent aujourd’hui une main qui les aide à se relever.»

Le temps donné aux autres n’est jamais perdu

Il faut donc cultiver «une qualité très importante, mais dévaluée : la capacité d’apprendre à donner du temps aux autres, de les écouter, de partager avec eux, de les comprendre».

«Si nous ne donnons pas et ‘‘gagnons du temps’’ au dépens des personnes, nous le perdrons dans beaucoup de choses qui, en fin de compte, nous laissent vides et abrutis, nous constipent, comme on dirait dans mon pays.» «Un guide spirituel sage a dit une fois : prier, c’est d’abord être simplement là. Reste calme, crée de l’espace pour Dieu, laisse-toi regarder et il te remplira de sa paix.»

«Il est fréquent de constater qu’une personne, une communauté ou une société entière peuvent être très développées extérieurement, mais avoir une vie intérieure pauvre et rabougrie, ainsi qu’une âme et une vitalité éteinte. Tout les ennuie, elles ne rêvent plus, ne rient pas, ne jouent pas, ignorent le sens de l’admiration et de la surprise. Tels des zombies, leur cœur a cessé de battre en raison de l’incapacité à célébrer la vie avec les autres. Que de personnes dans le monde sont matériellement riches, mais vivent esclaves d’une solitude sans pareille. Je pense ici à la solitude que connaissent tant de personnes, jeunes et adultes, de nos sociétés prospères, mais souvent si anonymes. Mère Teresa, qui travaillait parmi les plus pauvres des pauvres, a dit une fois quelque chose de prophétique :’La solitude et le sentiment de ne pas être aimé sont la pauvreté la plus terrible’.»

Diffuser l’amitié vers les nouveaux arrivants

«À titre particulier, je vous demande d’étendre les bras de l’amitié et de recevoir ceux qui viennent, parfois après une grande souffrance, chercher refuge dans votre pays.» Le pays conserve l’un des plus faibles taux d’immigration au monde, mais commence à ouvrir ses frontières non par philanthropie, mais en raison du manque de main d’oeuvre.

Avec nous est présent un petit groupe de réfugiés ; votre accueil témoignera que pour beaucoup ils peuvent être des étrangers, mais que pour vous ils peuvent être considérés comme des frères et des sœurs. »

«Le Japon a besoin de vous, le monde a besoin de vous, éveillés et généreux, joyeux et enthousiastes, capables de construire une maison pour tous. Je prie pour que vous grandissiez en sagesse spirituelle et pour que vous découvriez dans cette vie le chemin du vrai bonheur.»

Le Pape et les victimes de la triple catastrophe de Fukushima

Le Pape et les victimes de la triple catastrophe de Fukushima:

l’indifférence vaincue par la compassion


À Tokyo, le troisième jour de son séjour au Japon, le pape François a rencontré les victimes du séisme, du tsunami et de l’accident nucléaire du 11 mars 2011, il a demandé de ne pas oublier les 50 000 sans-abri et de repenser l’utilisation de l’énergie nucléaire, choisissant «un style de vie humble et austère».

Le Pape François a rencontré ce lundi à Tokyo les victimes du ‘Triple désastre’, c’est-à-dire le séisme et le tsunami du 11 mars 2011 et l’accident à la centrale nucléaire de Fukushima.

Le Pape François, accueilli avec beaucoup de respect et une émotion palpable dans les regards malgré la pudeur traditionnelle des Japonais, a tout d’abord écouté trois témoignages.

La directrice d’une école maternelle a raconté comment la catastrophe a remis en question son existence, avec la perte d’une petite fille qui était scolarisée dans son établissement, ainsi que la destruction de sa propre maison. Elle a insisté sur le thème de la protection de la vie.

Un prêtre shintoïste survivant de la catastrophe de Fukushima, dont le temple se situait à 17 kilomètres de la centrale nucléaire, a ensuite délivré une réflexion sur l’harmonie entre les êtres humains et la nature. Dans une tonalité très proche de celle du Pape François, il a expliqué qu’il faut «entendre la voix de la terre».

Enfin, un jeune homme provenant d’une localité proche de Fukushima a raconté son évacuation, à huit ans, lors de la catastrophe. Il a raconté avoir voulu mourir tellement la situation avait été éprouvante. Son père, très déstabilisé par cet exode, est tombé malade physiquement et mentalement.

Il faudra plus d’une vie pour restaurer les terres et les forêts contaminées.» «Je ne veux pas qu’ils meurent en nous ayant menti, en ayant caché la vérité», a souligné cet adolescent, qui a confié prier pour que «ceux qui ont le pouvoir trouvent un autre chemin et puissent éliminer la menace des rayonnements du nucléaire». Le Pape l’a étreint et consolé au terme de son témoignage.

Poursuivre la mobilisation internationale

Le Pape François a ensuite pris la parole pour s’adresser à «tous ceux qui ont si terriblement souffert de la triple catastrophe – le tremblement de terre, le tsunami et l’accident nucléaire -, qui a touché non seulement les préfectures d’Iwate, de Miyagi et de Fukushima, mais aussi tout le Japon et ses habitants».

Il a invité à prier «pour les plus de 18.000 personnes qui ont perdu la vie, pour leurs familles et pour les disparus», avant de marquer un temps de silence.

Il a remercié «pour les efforts des gouvernements locaux, des organisations et des personnes qui travaillent dans la reconstruction des zones touchées par la catastrophe et pour aider les plus de 50.000 personnes évacuées qui vivent actuellement dans des logements temporaires, sans pouvoir même retourner chez elles».

Il a invité à poursuivre l’élan de mobilisation, y compris sur le plan international, en remarquant que «certains de ceux qui vivaient dans les zones touchées se sentent maintenant oubliés et un grand nombre doit faire face à de continuelles difficultés : terres et forêts contaminées ainsi que les effets à long terme de la radioactivité».

«Personne ne se “reconstruit” tout seul, personne ne peut recommencer tout seul. Il est indispensable de trouver une main amicale, une main fraternelle en mesure d’aider à relever non seulement la ville, mais aussi le regard et l’espérance.»  «Huit ans après la triple catastrophe, le Japon a montré comment un peuple peut s’unir dans la solidarité, avec patience, persévérance et endurance».

Une remise en question des paradigmes du système économique

En revenant sur les propos du prêtre shintoïiste, François a remarqué que les défis de l’humanité «ne peuvent pas être compris ni traités séparément : guerres, réfugiés, alimentation, disparités économiques et défis environnementaux», car en réalité tout est interconnecté.

«Le premier pas, je crois, outre la prise de décisions courageuses et importantes concernant l’exploitation des ressources naturelles, et en particulier concernant les futures sources d’énergie, c’est d’œuvrer et de tendre vers une culture en mesure de combattre l’indifférence», a-t-il dit en reprenant un axe central de son encyclique Laudato Si’.

Le Pape François est revenu également sur les leçons à tirer de la catastrophe de Fukushima. Après avoir dénoncé frontalement l’usage militaire de l’énergie nucléaire hier à Nagasaki et Hiroshima, François a indirectement dénoncé le nucléaire civil, en adressant son soutien à l’épiscopat japonais.

«Tant que les liens sociaux ne seront pas rétablis dans des communautés locales, et que les personnes n’auront pas retrouvé une vie sûre et stable, l’accident de Fukushima ne sera pas complètement surmonté. Ce qui implique, également, comme l’ont si bien signalé mes frères évêques du Japon, la préoccupation concernant la persistance de l’utilisation de l’énergie nucléaire ; et ils ont demandé la fermeture des centrales nucléaires.»

«Notre époque est tentée de faire du progrès technologique la mesure du progrès humain. Ce “paradigme technocratique” du progrès et du développement façonne la vie des personnes et le fonctionnement de la société et, souvent, conduit à un réductionnisme qui touche tous les milieux de nos sociétés. Par conséquent, il est important, en des moments comme celui-ci, de marquer une pause et de réfléchir sur qui nous sommes et, peut-être de manière plus critique, sur qui nous voulons être.»

Dépasser une vision du développement égoïste et à court terme

«En pensant à l’avenir de notre maison commune, nous devons nous rendre compte que nous ne pouvons pas prendre des décisions purement égoïstes, et que nous avons une grande responsabilité envers les générations futures. Dans cette perspective, il nous faut opter pour une forme de vie humble et austère qui prenne en compte les urgences que nous sommes appelés à affronter.»

«Célébrons et rendons grâce pour tous ceux qui, de manière simple, ont essayé d’alléger le fardeau des victimes. Que cette compassion soit le chemin qui permette à tous de trouver espérance, stabilité et sécurité pour l’avenir !», a-t-il conclu, avant d’invoquer les bénédictions divines sur l’assistance.

L’hommage du Pape aux saints martyrs du Japon

L’hommage du Pape aux saints martyrs du Japon

Après une première intervention consacrée à la bombe atomique, le Pape François s’est ensuite rendu sur la colline Nishizaka pour rendre hommage aux martyrs chrétiens du Japon. C’est en effet sur ce lieu que furent crucifiés saint Paul Miki et ses compagnons en 1597, avant d’autres martyrs.

«J’attendais avec impatience ce moment», a d’emblée confié le Pape François lors de son discours, qui précédait la récitation de l’Angélus. «Je viens en tant que pèlerin, prier, confirmer, et aussi être confirmé par la foi de ces frères qui par leur le témoignage et le don d’eux-mêmes nous indiquent le chemin.»

Cette colline est en effet un symbole pour les chrétiens du Japon, qui furent à partir de la fin du XVIe siècle ciblé par une politique de persécution religieuse particulièrement violente, récemment portée à la connaissance du grand public par le film de Martin Scorsese, Silence. 

En 1597, la crucifixion de Paul Miki, un séminariste jésuite japonais, avec 25 de ses compagnons, eut un impact important dans toute la chrétienté, jusqu’en Europe. Il furent béatifiés 30 ans plus tard, un délai exceptionnellement court pour l’époque, et furent canonisés en 1862. C’est un siècle plus tard, en 1962 donc, que fut érigé ce sanctuaire en leur mémoire.

«Plus que de mort, ce sanctuaire nous parle du triomphe de la vie. Saint Jean Paul II a perçu ce lieu non seulement comme le mont des martyrs, mais aussi comme une vraie Montagne des Béatitudes où nous pouvons toucher du doigt le témoignage d’hommes envahis par l’Esprit Saint, libres de tout égoïsme, de tout confort et de tout orgueil», a précisé François en citant son exhortation apostolique Gaudete et Exsultate. «En effet, ici, la lumière de l’Évangile a brillé dans l’amour qui a triomphé de la persécution et de l’épée.»

Un don de la vie qui doit nous interpeller aujourd’hui

«La lumière de la résurrection est aussi annoncée là où le sang des martyrs devient semence de la vie nouvelle que Jésus Christ veut offrir à nous tous. Leur témoignage nous confirme dans la foi et nous aide à renouveler le don de nous-mêmes ainsi que notre engagement à vivre en disciples missionnaires, qui savent œuvrer pour une culture capable de toujours protéger et défendre toute vie, à travers ce ‘‘martyre’’ du service quotidien et silencieux de chacun, spécialement à l’endroit des plus démunis.»

«Je viens devant ce monument des martyrs pour rencontrer ces saints hommes et femmes, et je voudrais le faire avec la modestie de ce jeune jésuite qui venait des ‘‘confins de la terre’’ et qui a trouvé, dans l’histoire des premiers missionnaires et martyrs japonais, une profonde source d’inspiration et de renouvellement», a expliqué le Pape, s’inscrivant dans les pas du père Pedro Arrupe, qui fut missionnaire au Japon et joua un rôle dans la construction de ce sanctuaire, avant de devenir général des jésuites.

L’exemple des martyrs actuels

«En ce lieu nous nous unissons également aux chrétiens qui en diverses parties du monde subissent et connaissent aujourd’hui le martyre à cause de la foi.»

«Les martyrs du XXIème siècle nous interpellent par leur témoignage afin que nous suivions avec courage la voie des béatitudes. Prions pour eux et avec eux, et élevons la voix pour que la liberté religieuse soit garantie pour tous, partout dans le monde, et élevons aussi la voix contre toute manipulation des religions, par les politiques d’intégrisme et de division, et par les systèmes de profit effrénés et par les tendances idéologiques haineuses, qui manipulent les actions et les destins des hommes», a dit le Pape, en citant la Déclaration sur la Fraternité humaine signée à Abou Dhabi en février dernier.

Il a enfin appelé à prier pour que les saints martyrs du Japon intercèdent pour leur pays «et pour toute l’Église, afin que son engagement éveille et garde vivante la joie de la mission».