«Dieu vit parmi nous, parlons-lui des problèmes de notre temps»
Le Pape a exhorté les fidèles à entrer dans l’intimité avec le Seigneur : « Devant la crèche, parlons-lui de nos événements concrets. Invitons-le dans nos sombres écuries intérieures. » » Invitation à ne pas avoir peur : « Si votre cœur semble trop désordonné ou pollué par le mal, ne vous enfermez pas. »
Au Vatican et en Italie, où l’Épiphanie sera célébrée le jeudi 6 janvier, les textes lus dans les messes d’aujourd’hui sont ceux du 2e dimanche de Noël.
PAPE FRANÇOIS
ANGÉLUS
Place Saint-Pierre
dimanche 2 janvier 2022
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Chers frères et sœurs, bonjour!
L’Évangile de la liturgie d’aujourd’hui nous offre une belle phrase, que nous prions toujours à l’Angélus et qui seule révèle le sens de Noël : « Le Verbe s’est fait chair et a habité parmi nous » (Jn 1, 14). Ces mots, si on y pense, contiennent un paradoxe. Ils rassemblent deux réalités opposées : la Parole et la chair.
La « Parole » indique que Jésus est le Verbe éternel du Père, Verbe infini, qui a toujours existé, avant toute chose créée; « chair » indique plutôt notre réalité, une réalité créée, fragile, limitée, mortelle. Avant Jésus, il y avait deux mondes séparés : le Ciel opposé à la terre, l’infini opposé au fini, l’esprit opposé à la matière.
Et il y a une autre opposition dans le Prologue de l’Évangile de Jean, un autre binôme : lumière et ténèbres (cf. v. 5). Jésus est la lumière de Dieu qui est entré dans les ténèbres du monde. Lumière et ténèbres. Dieu est lumière : en lui il n’y a pas d’opacité ; en nous, cependant, il y a beaucoup de ténèbres.
Maintenant, avec Jésus, la lumière et les ténèbres se rencontrent : la sainteté et la culpabilité, la grâce et le péché. Jésus, l’incarnation de Jésus est précisément le lieu de la rencontre, de la rencontre entre Dieu et les hommes, la rencontre entre la grâce et le péché.
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Que veut annoncer l’Évangile avec ces polarités ? Chose splendide : la manière d’agir de Dieu Face à notre fragilité, le Seigneur ne se retient pas. Il ne demeure pas dans son éternité bienheureuse et dans sa lumière infinie, mais s’approche, se fait chair, descend dans les ténèbres, habite des terres qui lui sont étrangères. Et pourquoi ce Dieu fait-il ? Pourquoi descend-il vers nous ?
Il le fait parce qu’il ne se résigne pas au fait qu’on puisse se perdre en s’éloignant de lui, loin de l’éternité, loin de la lumière. Voici l’œuvre de Dieu : venir parmi nous. Si on se considère indigne, ça ne l’arrête pas, il vient. Si nous le refusons, il ne se lasse pas de nous chercher. Si nous ne sommes pas prêts et disposés à l’accueillir, il préfère quand même venir.
Et si on lui ferme la porte au nez, il attend. C’est le Bon Pasteur lui-même. Est-ce la plus belle image du Bon Pasteur ? Le Verbe fait chair pour partager notre vie. Jésus est le Bon Pasteur qui vient nous chercher là où nous sommes : dans nos problèmes, dans notre misère. Il y vient.
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Chers frères et sœurs, nous gardons souvent nos distances avec Dieu parce que nous pensons que nous ne sommes pas dignes de lui pour d’autres raisons. Et c’est vrai. Mais Noël nous invite à voir les choses de son point de vue. Dieu désire s’incarner. Si votre cœur semble trop pollué par le mal, il semble désordonné, s’il vous plaît, ne vous fermez pas, n’ayez pas peur : Il vient.
Pensez à l’étable de Bethléem. Jésus est né là-bas, dans cette pauvreté, pour vous dire qu’il n’a certainement pas peur de visiter votre cœur, de vivre une vie minable. C’est le mot : vivre. Vivre est le verbe que l’Évangile utilise aujourd’hui pour signifier cette réalité : il exprime un partage total, une grande intimité. Et ce Dieu le veut : il veut vivre avec nous, il veut vivre en nous, ne pas rester loin.
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Et je me demande, vous et tout le monde : voulons-nous faire de la place pour cela ? En mots, oui; personne ne dira : « Je ne veux pas » ; Oui. Mais concrètement ? Peut-être y a-t-il des aspects de la vie que nous gardons pour nous-mêmes, des aspects exclusifs, ou des endroits intérieurs où nous avons peur que l’Évangile n’entre, où nous ne voulons pas mettre Dieu au milieu.
Aujourd’hui je vous invite au concret. Quelles sont les choses intérieures que je crois que Dieu n’aime pas ? Quel est l’espace que je ne garde que pour moi et je ne veux pas que Dieu vienne là ? Chacun de nous est concret et nous y répondons.
« Oui, oui, je voudrais que Jésus vienne, mais cela ne le touche pas ; et ce non, et ce… ». Chacun a son propre péché – appelons-le par son nom – et Il n’a pas peur de nos péchés : Il est venu nous guérir. Qu’il le voie au moins, qu’il voie le péché. Nous sommes courageux, nous disons : « Seigneur, je suis dans cette situation, je ne veux pas changer. Mais vous, s’il vous plaît, n’allez pas trop loin ». Belle prière, celle-ci. Soyons honnêtes aujourd’hui.
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En ces jours de Noël, cela nous fera du bien d’y accueillir le Seigneur. Comme, comment? Par exemple, en s’arrêtant devant la crèche, parce qu’elle montre Jésus venant habiter toute notre vie concrète, ordinaire, où tout ne va pas bien, il y a beaucoup de problèmes – certains à cause de nous, d’autres à cause des autres – et Jésus vient.
On y voit les bergers qui travaillent dur, Hérode menaçant les innocents, une grande pauvreté… Mais au milieu de tout cela, au milieu de tant de problèmes – et aussi au milieu de nos problèmes – il y a Dieu, là est Dieu qui veut vivre avec nous. Et il attend que nous lui présentions nos situations, ce que nous vivons. Alors, devant la crèche, parlons à Jésus de nos événements concrets.
Invitons-le officiellement dans notre vie, surtout dans les zones sombres : « Regarde, Seigneur, il n’y a pas de lumière là-bas, il n’y a pas d’électricité, mais s’il te plaît ne touche pas, car je n’ai pas envie de quitter cette situation ». Parlez clairement, concrètement.
Les zones sombres, nos « écuries intérieures » : chacun de nous en possède. Et racontons-lui aussi sans crainte les problèmes sociaux, les problèmes ecclésiaux de notre temps ; problèmes personnels, même les pires : Dieu aime vivre dans notre étable.
Que la Mère de Dieu, en qui le Verbe s’est fait chair, nous aide à cultiver une plus grande intimité avec le Seigneur.
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Après l’Angélus
Chers frères et sœurs,
Je vous salue tous chaleureusement, fidèles de Rome et pèlerins d’Italie et d’autres pays : je vois des drapeaux polonais, brésilien, uruguayen, argentin, paraguayen, colombien, vénézuélien : bienvenue à tous ! Je salue les familles, les associations, les groupes paroissiaux, en particulier ceux de Postioma et Porcellengo, dans le diocèse de Trévise, ainsi que les adolescents de la Fédération Regnum Christi et les enfants de l’Immaculée Conception.
En ce premier dimanche de l’année, je renouvelle tous les vœux de paix et de bien dans le Seigneur. Dans les moments heureux et tristes, confions-nous à Lui, qui est notre force et notre espérance. Et n’oubliez pas : nous invitons le Seigneur à venir en nous, à venir à notre réalité, si laide qu’elle soit, comme une étable : « Seigneur, je ne voudrais pas que tu entres, mais regarde-la, reste près ». Faisons-le.
Je vous souhaite un bon dimanche et un bon déjeuner. Et n’oubliez pas de prier pour moi. Au revoir!
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