
Introduisant la prière mariale qu’il a présidée place Saint-Pierre à Rome, le Pape François a médité sur l’Évangile du jour, les Béatitudes (Mt 5, 1-12a), en particulier sur la première béatitude : « Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des Cieux est à eux» (v. 4). La pauvreté en esprit est «sobriété», «capacité de goûter l’essentiel».
PAPE FRANÇOIS
ANGÉLUS
Place Saint Pierre
Dimanche, 29 janvier 2017
Chers frères et sœurs, bonjour !
La liturgie de ce dimanche nous conduit à méditer sur les Béatitudes (cf. Mt 5,1-12a), qui ouvrent le grand discours dit «de la montagne», la «Grande Charte» du Nouveau Testament. Jésus manifeste la volonté de Dieu de conduire les hommes vers le bonheur. Ce message était déjà présent dans la prédication des prophètes : Dieu est proche des pauvres et des opprimés, et les libère de ceux qui les maltraitent eux.
Mais dans sa prédication Jésus suit un chemin particulier: il commence par le mot «bienheureux», c’est-à-dire heureux; il poursuit avec l’indication de la condition pour l’être ; et il conclut en faisant une promesse. Le motif de la béatitude, c’est-à-dire du bonheur, ne réside pas dans la condition requise – «pauvres en esprit», «ceux qui pleurent», «ceux qui ont faim et soif de justice», «persécutés»… – mais dans la promesse qui la suit, à accueillir avec foi comme don de Dieu.
On part de la condition difficile, pour s’ouvrir au don de Dieu et accéder au monde nouveau, le «règne» annoncé par Jésus. Ce n’est pas un mécanisme automatique, mais un chemin de vie à la suite du Seigneur, sur lequel la réalité de malaise et d’affliction est vue dans une perspective nouvelle et expérimentée selon la conversion qui se met en œuvre. On n’est pas bienheureux si on n’est pas converti, en mesure d’apprécier et de vivre les dons de Dieu.
Je m’arrête sur la première béatitude: «Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux» (v. 4). Le pauvre en esprit est celui qui a assumé les sentiments et l’attitude de ces pauvres qui dans leur condition ne se révoltent pas, mais savent être humbles, dociles, disponibles à la grâce de Dieu.
Le bonheur des pauvres – des pauvres en esprit – a une double dimension : vis-à-vis des biens et vis-à-vis de Dieu. Concernant les biens, les biens matériels, cette pauvreté en esprit est sobriété: pas nécessairement renoncement, mais capacité de goûter l’essentiel, de partage ; capacité de renouveler chaque jour l’étonnement pour la bonté des choses, sans s’appesantir dans l’opacité de la consommation vorace.
Plus je possède, plus j’en veux ; plus je possède, plus j’en veux : c’est la consommation vorace. Et cela tue l’âme. Et l’homme ou la femme qui font cela, qui ont cette attitude, “plus j’ai, plus je veux”, ne sont pas heureux et n’atteindront pas le bonheur. A l’égard de Dieu, elle est louange et reconnaissance que le monde est bénédiction et qu’à son origine il y a l’amour créateur du Père.
Mais c’est aussi ouverture à Lui, docilité à sa seigneurie : c’est Lui, le Seigneur, c’est Lui le Grand, ce n’est pas moi qui suis grand parce que j’ai beaucoup de choses ! C’est Lui : Lui qui a voulu le monde pour tous les hommes et qui l’a voulu pour que les hommes soient heureux.
Le pauvre en esprit est le chrétien qui ne compte pas sur lui-même, sur les richesses matérielles, qui ne s’entête pas dans ses opinions, mais écoute avec respect et se remet volontiers aux décisions d’autrui. Si dans nos communautés il y avait plus de pauvres en esprit, il y aurait moins de divisions, de conflits et de polémiques !
L’humilité, comme la charité, est une vertu essentielle pour la coexistence dans les communautés chrétiennes. Les pauvres, en ce sens évangélique, ressortent comme ceux qui gardent la destination du Royaume des cieux éveillée, en faisant entrevoir qu’il est déjà en germe dans la communauté fraternelle, qui privilégie le partage sur la possession.
Je voudrais souligner cela : privilégier le partage sur la possession. Avoir toujours le cœur et les mains ouverts (le pape fait le geste), pas fermés (il fait le geste). Quand le cœur est fermé (geste), c’est un cœur étroit : il ne sait pas non plus comment aimer. Quand le cœur est ouvert (geste), il marche sur le chemin de l’amour.
Vierge Marie, modèle et prémices des pauvres en esprit car totalement docile à la volonté du Seigneur, aide-nous à nous abandonner à Dieu, riche en miséricorde, qui nous comble de ses dons, spécialement l’abondance de son pardon.
On célèbre aujourd’hui la Journée mondiale des malades de la lèpre. Cette maladie, bien qu’étant en régression, compte encore parmi les plus redoutées et touche les plus pauvres et les plus marginalisés. Il est important de lutter contre cette maladie, mais aussi contre les discriminations qu’elle entraîne. J’encourage ceux qui sont engagés dans l’assistance et dans la réinsertion sociale des personnes touchées par le mal de Hansen, pour lesquelles nous assurons de notre prière.
Je voudrais également renouveler ma proximité avec les populations de l’Italie centrale qui souffrent encore des conséquences du tremblement de terre et du mauvais temps. Que ne manque pas à ces frères et sœurs le soutien des institutions et de la solidarité commune. Et, s’il vous plaît, que tout type de bureaucratie ne les fassent pas attendre et souffrir encore !
A tous je souhaite un bon dimanche, je souhaite paix, humilité, partage dans vos familles. S’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi. Bon appétit et au-revoir !
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