mémoire de la mort de Jésus de Nazareth

Le Vendredi Saint est la journée du silence, du jeûne et de l’abstinence. C’est le jour où en signe de deuil, les cloches se taisent et où les prêtres ne célèbrent pas l’Eucharistie. Le Vendredi Saint, les Chrétiens se souviennent de la mise en Croix du Christ et de sa mort, en participant à la Liturgie de la Parole, à l’Adoration de la Croix et au rite de la Communion.

En la Basilique Saint-Pierre à Rome, le Pape François a présidé  la célébration de la Passion du Christ. Le Prédicateur de la Maison Pontificale, le père Cantalamessa, s’est demandé dans son homélie, «pourquoi donc, après 2000 ans, le monde fait encore mémoire de la mort de Jésus de Nazareth, comme si elle  s’était passée hier ?», soulignant que des nouvelles de mort violente sont désormais presque quotidienne, «comme celle des 38 Chrétiens tués en Égypte le dimanche des rameaux.»  La mort du Seigneur «a changé pour jamais le visage de la mort, en lui donnant un sens nouveau.»

«Si le Christ est en effet ressuscité d’entre les morts, son cœur l’est aussi ; celui-ci vit, comme tout le reste de son corps, dans une autre dimension, réelle, bien que mystique.» Après «le sacrifice de Jésus, palpite dans le monde un cœur de lumière». «Plus profond que toute la haine et la méchanceté humaine il y a l’amour et la bonté du Christ.» Un cœur de lumière qui s’oppose au cœur des ténèbres, «une expression pour décrire le comble de la méchanceté au sein de l’humanité.»

«Que représente la croix ?» Elle est le «Non» définitif et irréversible de Dieu à la violence, «à tout ce que nous appelons le mal». Et elle est en même temps le «Oui» tout aussi irréversible à l’amour, à la vérité, au bien. «Non» au péché, «Oui» au pécheur. «Non» à cette réalité parasite, fruit de nos passions et de l’envie du diable, et «Oui» à la créature de Dieu, qui conserve sa dignité.

«Elle est la proclamation vivante que la victoire finale n’appartient pas à ceux qui l’emportent sur les autres, mais à ceux qui l’emportent sur eux-mêmes ; non à ceux qui font souffrir, mais à ceux qui souffrent.»

Aujourd’hui, il y a une «fragmentation». «Il n’existe plus de points fixes, de valeurs indiscutables, plus de rocher dans la mer auquel s’agripper, ou contre lequel se heurter.»

«Le Christ n’est pas venu expliquer les choses, mais changer les personnes. En recevant l’Eucharistie, nous croyons fermement que ce cœur se met à battre aussi en nous. En regardant tout à l’heure la Croix, disons du plus profond de notre cœur, comme le publicain dans le Temple: ‘Mon Dieu, ai pitié de moi pécheur!‘ et nous aussi, comme lui, nous rentrerons chez nous justifiés.»

Au deuxième jour du Triduum Pascal, le Saint Père préside aussi le traditionnel Chemin de Croix au Pied du Colisée Romain. À la tombée de la nuit, le Saint Père rejoint le Colisée pour revivre les 14 stations évoquant les dernières heures de la vie terrestre de Jésus Christ. Des stations différentes cette année, spécialement orientées vers la présence féminine, le drame de la guerre, des réfugiés, des familles lacérées et des enfants abusés, comme l’a souhaité la bibliste Anne Marie Pelletier, qui a écrit les méditations du Chemin de Croix.

l’amour divin jusqu’à l’extrême

le Christ crucifié – chœur de la Chapelle Notre-Dame de la médaille miraculeuse

En ce vendredi Saint, jour où l’amour de Dieu va à l’extrême, cet extrait du philosophe Louis Lavelle nous permet d’entrevoir en filigrane le lien profond entre le Père, Dieu créateur, et le Fils, Dieu incarné, qui va en ce jour jusqu’à l’abandon de soi sur la croix par amour du Père et de ceux qu’il est venu aimer et sauver.

Il est vrai à la fois que l’amour nous arrache à nous-même et qu’il nous engendre à nous-même. L’âme n’habite pas dans le corps qu’elle anime, mais dans le lieu de son amour ; seulement ce lieu, l’âme ne le trouve qu’au plus profond d’elle-même. C’est pour cela que l’être que nous aimons tourne d’abord vers le centre de notre propre vie secrète toutes nos puissances d’attention et de désir.

Mais il faut bien aussi qu’en nous-même ce ne soit plus nous que nous recherchions, si l’amour est un abandon de soi…, si enfin l’être que nous aimons est toujours pour nous le guide prédestiné qui nous introduit dans un monde surnaturel.

Dieu embrasse tous les êtres. C’est lui qui leur donne le mouvement et la vie et c’est pourquoi on dit qu’il les aime. Il n’y a pas de différence pour lui entre les aimer et les créer. Mais l’amour des créatures vient de lui et doit remonter jusqu’à lui. Il suppose entre elles une séparation qu’il abolit.

Or, cette séparation et l’amour qu’elle rend possible n’ont lieu qu’entre des êtres de chair et c’est pour cela que l’amour du Dieu créateur ne parvient à se consommer que dans l’amour d’un Dieu incarné.

Louis Lavelle – La conscience de soi, pages 213-214.

messe en mémoire de la Cène du Seigneur dans la prison de Paliano

lavement des pieds par Duccio di Buoninsegna

Le Pape François a célébré ce jeudi Saint 13 avril 2017 la messe en mémoire de la Cène du Seigneur dans la prison de Paliano, en Italie centrale. Au cours de la célébration, il a lavé les pieds de douze prisonniers, dont trois femmes et un musulman qui sera baptisé en juin. Il les a invités, à l’image de Jésus, à eux aussi se mettre au service les uns des autres.

Reprenant l’Évangile du jour, le Pape François rappelle devant les prisonniers, dont deux condamnés à la perpétuité, que Jésus a aimé «jusqu’au bout», jusqu’à donner sa vie pour chacun. «Il est grand, il est bon et il nous aime comme nous sommes».

«Ce n’est pas facile parce que nous sommes tous pécheurs, nous avons des limites, des défauts»,  mais «oui, nous savons tous aimer» et Jésus est un modèle. Lui, qui était le «chef», Dieu, lave les pieds de ses disciples.

Le Pape rappelle alors cette ancienne tradition d’hospitalité, quand les esclaves lavaient les pieds des grands voyageurs. «Les esclaves!… Jésus inverse les rôles et le fait lui-même.» Ce geste ne manque pas d’interroger.

À l’époque du Christ, c’est Simon qui refuse dans un premier temps de se faire laver les pieds. Aujourd’hui, le Saint-Père relate la surprise que sa venue dans une prison a suscitée. «Celui qui semble le plus grand doit faire le travail d’un esclave.»

Mais comment pouvons-nous faire de même? «Je ne vous dis pas de vous laver les pieds mutuellement, ce serait une plaisanterie, non?», s’exclame le Pape devant les prisonniers. Mais il met en avant «le symbole» de se mettre au service les uns des autres, y compris à l’intérieur d’une prison et de semer de l’amour entre nous. «Parce que ça c’est de l’amour, c’est comme laver les pieds.»

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