Message du cardinal André Vingt-Trois…

… aux catholiques de Paris
suite aux attentats de cette semaine

Paris, le 10 janvier 2015

Notre pays, notre ville de Paris en particulier, ont été cette semaine le théâtre d’actes de violence et de barbarie inouïes. Depuis de nombreuses années pour nous, la guerre, la mort, c’était toujours ailleurs même si, pendant ce temps, des soldats français étaient engagés en différents pays pour essayer d’apporter un peu de paix. Certains l’ont payé de leur vie.

Mais la mort violente s’est invitée brusquement chez nous. En France, et bien au-delà de nos frontières, tous sont en état de choc. La majeure partie de nos concitoyens ont vécu cette situation comme un appel à redécouvrir un certain nombre de valeurs fondamentales de notre République comme la liberté de religion ou la liberté d’opinion. Les rassemblements spontanés de ces derniers jours ont été marqués par un grand recueillement, sans manifestation de haine ni de violence. La tristesse du deuil et la conviction que nous avons ensemble quelque chose à défendre unissent les Français.

Une caricature, même de mauvais goût, une critique même gravement injuste, ne peuvent être mises sur le même plan qu’un meurtre. La liberté de la presse est, quel qu’en soit le coût, le signe d’une société mûre. Que des hommes nés dans notre pays, nos concitoyens, puissent penser que la seule réponse juste à une moquerie ou une insulte soit la mort de leurs auteurs place notre société devant de graves interrogations. Que des Français juifs paient encore une fois un tribut aux troubles qui agitent notre communauté nationale redouble encore leur gravité. Nous rendons hommage aussi aux policiers morts en exerçant jusqu’au bout leur fonction.

J’invite les catholiques de Paris à prier le Seigneur pour les victimes des terroristes, pour leurs conjoints, pour leurs enfants et leurs familles. Prions aussi pour notre pays : que la modération, la tempérance et la maîtrise dont tous ont fait preuve jusqu’à présent se confirment dans les semaines et les mois qui viennent ; que personne ne se laisse aller à l’affolement ou à la haine ; que nul ne se laisse aller à la facilité d’identifier quelques fanatiques avec une religion tout entière. Et prions aussi pour les terroristes qui découvrent la vérité du jugement de Dieu. Demandons la grâce d’être des artisans de paix. Il ne faut jamais désespérer de la paix, si on construit la justice.

+ André cardinal VINGT-TROIS, Archevêque de Paris

Seul l’Esprit Saint rend notre cœur docile…

… à Dieu et sa liberté

09-01-2015 source : Radio Vatican

Seul l’Esprit Saint rend notre cœur docile à Dieu et à la liberté. C’est en résumé le thème développé par le Pape François dans son homélie de la messe célébrée ce vendredi matin en la chapelle de la Maison Saint Marthe au Vatican. Les douleurs de la vie peuvent enfermer une personne, alors que l’amour la rend libre. Une séance de yoga ne pourra jamais enseigner à un cœur de « ressentir » que nous sommes fils de Dieu, ni un cours de spiritualité zen rendre plus libre d’aimer. Ce pouvoir n’appartient qu’à l’Esprit Saint.

Le Pape François a pris l’Évangile du jour, selon Saint Marc, celui qui vient après la multiplication des pains et dans lequel les Disciples sont épouvantés de voir Jésus marcher vers eux sur l’eau, et qui se termine par une considération sur le pourquoi de tant de frayeur : les apôtres n’avaient pas compris le miracle de la multiplication des pains parce que « leur cœur était endurci ». Et un cœur peut être de pierre pour de nombreuses raisons, notamment à cause d’expériences douloureuses. « Et un autre motif qui durcit le cœur, c’est la fermeture sur soi-même. » « Créer un monde en soi-même, fermé. En soi-même, dans sa communauté ou dans sa paroisse, mais toujours une fermeture. Et la fermeture peut venir de tant de choses : l’orgueil, la suffisance, penser que je suis meilleur que les autres, la vanité. Nous avons l’homme miroir et la femme miroir qui sont enfermés sur eux-mêmes pour sans cesse se regarder eux-mêmes. Des narcissiques religieux, non ? mais qui ont le cœur dur, parce qu’ils sont fermés sur eux, ils ne sont pas ouverts. Et ils cherchent à se défendre avec ces murs qu’ils construisent autour d’eux. »

« Il y a aussi ceux qui se barricadent derrière la loi, en s’agrippant à la lettre à ce qu’établissent les commandements. Et là, ce qui endurcit le cœur c’est un problème de manque d’assurance. Et celui qui cherche la solidité dans l’article pur et dure de la loi, certes qu’il se sent en sécurité, mais comme un homme ou une femme dans la cellule d’une prison derrière les barreaux : il s’agit d’une sécurité sans liberté ». C’est-à-dire l’opposé de ce que Jésus est venu nous apporter, la liberté. Alors « qui nous enseigne à aimer ? Qui nous libère de cette dureté ?» « Seulement l’Esprit Saint. » « Seul l’Esprit Saint est capable d’écraser, de rompre cette dureté du cœur et de rendre ce cœur… tendre ? Non, ce mot ne me plaît pas, mais docile, docile au Seigneur. Docile à la liberté de l’amour. »

Que le Seigneur change le cœur…

… des personnes cruelles

08-01-2015 source : L’Osservatore Romano

C’est à l’intention des victimes du cruel attentat terroriste qui a eu lieu à Paris que le Pape François a célébré, dans la matinée du jeudi 8 janvier, la Messe dans la chapelle de la Maison Sainte-Marthe. Il l’a dit lui-même au début de la célébration, manifestant toute sa douleur pour cet acte vil et féroce, exprimant une proximité particulière aux familles des personnes qui ont été tuées ou blessées, afin que le cœur de ceux qui ont commis l’attentat puisse changer. «L’attentat d’hier à Paris nous fait penser à tant de cruauté, de cruauté humaine; à tant de terrorisme, aussi bien au terrorisme isolé, qu’au terrorisme d’État. Mais de quelle cruauté l’homme est-il capable! Prions au cours de cette Messe pour les victimes de cette cruauté. Si nombreuses! Et demandons aussi pour les personnes cruelles, afin que le Seigneur change leur cœur».

Ces jours-ci, a ensuite fait remarquer le Pape dans son homélie, «la parole clé dans la liturgie est “manifestation”: le Fils de Dieu s’est manifesté en la fête de l’Épiphanie aux païens, quand l’Esprit Saint descend sur Lui; pendant les noces de Cana, quand il accomplit le miracle de l’eau en vin».

«Ce sont les trois signes que la liturgie apporte en ces jours pour nous parler de la manifestation de Dieu: Dieu se fait connaître». Mais «la question est la suivante: comment pouvons-nous connaître Dieu?». Et ainsi, nous nous trouvons immédiatement devant cette question — a affirmé le Pape François en se référant à la première lecture d’aujourd’hui (1 Jean 4, 7-10).

A cette question, «une première réponse serait: «je peux connaître Dieu avec la raison». En effet, «avec mon intelligence, en raisonnant, en regardant les choses du monde, on peut d’abord comprendre qu’il y a un Dieu et on peut comprendre l’existence de Dieu dans certaines traces de la personnalité de Dieu». Mais «cela est insuffisant pour connaître Dieu», dans la mesure où «Dieu ne se connaît complètement que dans la rencontre avec Lui et, pour cette rencontre, l’intelligence seule ne suffit pas, il faut quelque chose de plus: la raison t’aide à aller jusqu’à un certain point, ensuite elle t’accompagne plus avant».

Dans sa lettre, «Jean dit clairement ce qu’est Dieu: Dieu est amour». Donc «ce n’est que sur la route de l’amour que tu peux connaitre Dieu». Assurément, «un amour raisonnable, accompagné par la raison, mais de l’amour». A ce point, peut-être pourrait-on se demander : «Mais comment puis-je aimer ce que je connais pas?». La réponse est claire: «Aime ceux qui sont proches de toi». Telle «est précisément la doctrine de deux commandements: le plus important est aimer Dieu, car Il est amour». Le deuxième, en revanche, «est aimer son prochain mais, pour arriver au premier, nous devons monter par les escaliers du second». En un mot, «à travers l’amour du prochain nous arrivons à connaître Dieu, qui est amour» et «ce n’est qu’en aimant raisonnablement, mais en aimant, que nous pouvons arriver à cet amour».

«En faisant ce que Jésus nous a enseigné sur l’amour pour notre prochain, nous arrivons, — degré après degré — à l’amour de Dieu, à la connaissance de Dieu qui est amour».

L’apôtre Jean, dans sa lettre, «va un peu plus loin» quand il affirme «en cela se trouve l’amour», c’est-à-dire que «ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, mais Lui qui nous a aimés le premier: Dieu nous précède dans l’amour». En effet, «quand je rencontre Dieu dans la prière, je sens que Dieu m’aimait avant que je ne commence à la chercher». Oui, «Il est toujours le premier, Il nous attend, Il nous appelle». Et «quand nous arrivons, Il est là!».

C’est dans le même sillage que se situe également l’épisode présenté par le passage de l’Évangile de Marc (6, 34-44 ) proposé par la liturgie. Aujourd’hui aussi il y a «beaucoup de personnes désorientées dans nos villes, dans nos pays: tant de personnes». Quand «Jésus a vu ces personnes désorientées, il s’est ému: il a commencé à leur enseigner la doctrine, les choses de Dieu et les gens l’entendaient, l’écoutaient bien, car le Seigneur parlait bien, parlait au cœur».

Ensuite, raconte Marc dans son Évangile, Jésus s’étant rendu compte que ces cinq mille personnes n’avaient même pas mangé, demanda à ses disciples de s’en occuper. C’est donc le Christ qui, «le premier, va à la rencontre des personnes». «Pour connaître ce Dieu qui est amour nous devons monter par l’escalier de l’amour pour notre prochain, par les œuvres de charité, par les œuvres de miséricorde que le Seigneur nous a enseignées».

Le Pape a précisément conclu par la prière «que le Seigneur, en ces jours où l’Église nous fait penser à la manifestation de Dieu, nous donne la grâce de Le connaître par la voie de l’amour».

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