MOIS DE SAINT JOSEPH – XXVIIIe JOUR

MOIS DE SAINT JOSEPH – XXVIIIe JOUR

Constance de saint Joseph.

SAINT FRANÇOIS DE SALES

Saint Joseph église Saint Joseph artisan Paris
Saint Joseph église Saint Joseph artisan Paris

« Il nous faut passer à la troisième propriété que je remarque être en la palme, qui est la vaillance, constance et force, vertus qui se sont trouvées en un degré fort éminent en notre saint. La palme a une force et une vaillance; et même une constance très- grande au-dessus de tous les autres arbres : aussi est-elle le premier de tous. La palme montre ses forces et sa constance en ce que plus elle est chargée, et plus elle monte en haut et devient plus-haute; ce qui est tout contraire non-seulement aux autres arbres, mais à toutes autres choses; car plus on est chargé, et plus l’on s’abaisse contre terre.

Mais la palme montre sa force et sa constance en ne se soumettant ni abaissant jamais pour aucune charge que l’on mette sur elle; car c’est son instinct de monter en haut, et par­tant elle le fait sans que l’on l’en puisse em­pêcher. Elle montre sa vaillance en ce que ses feuilles sont faites comme des épées, et semble en avoir autant pour batailler comme elle porte de feuilles.

C’est certes à très juste raison que saint Joseph est dit ressembler à la palme; car il fut toujours fort vaillant, constant et persévérant. Il y a beaucoup de différence entre la constance et la persévé­rance, la force et la vaillance. Nous appelons un homme constant, lequel se tient ferme et préparé à souffrir les assauts de ses ennemis, sans s’étonner ni perdre courage durant le combat; mais la persévérance regarde princi­palement un certain ennui intérieur qui nous arrive en la longueur de nos peines, qui est un ennemi aussi puissant que l’on en puisse rencontrer.

Or la persévérance fut que l’homme méprise cet ennemi, eu telle sorte qu’il en demeure victorieux par une conti­nuelle égalité et soumission à la volonté de Dieu. La force, c’est ce qui fait que l’homme résiste puissamment aux attaques de ses ennemis ; mais la vaillance est une vertu qui fait que l’on ne se tient pas seulement prêt pour combattre ni pour résister quand l’oc­casion s’en présente, mais que l’on attaque l’ennemi à l’heure même qu’il ne dit mot.

Or notre glorieux saint Joseph fut doué de toutes ces vertus, et les exerça merveilleuse­ment bien. Pour ce qui est de sa constance, combien, je vous prie, la fit-il paraître, lorsque voyant Notre-Dame enceinte, et ne sachant point comment cela se pouvait faire (mon Dieu ! quelle détresse, quel ennui, quelle peine d’esprit n’avait-il pas?); néanmoins il ne se plaint point, il n’en est point plus rude ni plus mal gracieux envers son épouse, il ne la maltraite point pour cela, demeurant aussi doux et aussi respectueux en son endroit qu’il soûlait être.

Mais quelle vaillance et quelle force ne témoigne pas la victoire qu’il remporta sur les deux plus grands ennemis de l’homme, le diable et le monde? et cela par la pratique exacte d’une très-parfaite humilité, comme nous avons remarqué en tout le cours de sa vie.

Le diable est tellement ennemi de l’humilité, parce que, manque de l’avoir, il fut déchassé du ciel et précipité aux enfers (comme si l’humilité pouvait mais de quoi il ne l’a pas voulu choisir pour compagne inséparable), qu’il n’y a invention ni artifice duquel il ne se serve pour faire déchoir l’homme de cette vertu, et d’autant plus qu’il sait que c’est une vertu qui le rend infiniment agréable à Dieu; si que nous pou­vons bien dire : Vaillant et fort est l’homme qui, comme saint Joseph, persévère en icelle, parce qu’il demeure tout ensemble vainqueur du diable et du monde, qui est rempli d’am­bition, de vanité et d’orgueil.

Quant à la persévérance contraire à cet en­nemi intérieur, qui est l’ennui qui nous sur­vient en la continuation des choses abjectes, humiliantes, pénibles, des mauvaises fortu­nes, s’il faut ainsi dire, ou bien ès divers ac­cidents qui nous arrivent ; oh I combien ce grand saint fut éprouvé de Dieu et des hom­mes même en son voyage !

L’ange lui com­mande de partir promptement et de mener Notre-Dame et son Fils très-cher en Égypte ; le voilà que soudain il part sans dire mot ; il ne s’enquiert pas: Où irai-je? quel chemin tiendrai-je? de quoi nous nourrirons-nous? qui nous y recevra? il part d’aventure avec ses outils sur son dos, afin de gagner sa pau­vre vie et celle de sa famille à la sueur de son visage.

Oh l combien cet ennui dont nous parlons le devait presser, vu mêmement que l’ange ne lui avait point dit le temps qu’il y devait être ; si qu’il ne pouvait s’éta­blir nulle demeure assurée, ne sachant quand l’ange lui commanderait de s’en retourner. Si saint Paul a tant admiré l’obéissance d’Abraham, lorsque Dieu lui commanda de sortir de sa terre, d’autant que Dieu ne lui dit pas de quel côté il irait, ni moins Abraham ne lui demanda pas : Seigneur, vous me dites que je sorte ; mais dites-moi donc si ce sera par la porte du midi ou du côté de la bise ;
ainsi il se mettait en chemin, et allait selon que l’esprit de Dieu le conduisait ; combien est admirable cette parfaite obéissance de saint Joseph I L’ange ne lui dit point jusqu’à quand il demeurerait en Égypte, et il ne s’en enquiert pas : il y demeura l’espace de cinq ans, comme la plupart croient, sans qu’il s’informât de son retour, s’assurant que celui qui avait commandé qu’il y allât, lui com­manderait derechef quand il s’en faudrait retourner ; à quoi il était toujours prêt d’o­béir.

Il était en une terre non-seulement étran­gère, mais ennemie des Israélites ; d’autant que les Égyptiens se ressentaient encore de quoi ils les avaient quittés, et avaient été cause qu’une grande partie des Égyptiens avaient été submergés, lorsqu’ils les poursui­vaient.

Je vous laisse à penser quel désir de­vait avoir saint Joseph de s’en retourner, à cause des continuelles craintes qu’il pouvait avoir envers les Égyptiens. L’ennui de ne sa­voir quand il en sortirait, devait sans doute grandement affliger et tourmenter son pau­vre cœur! néanmoins il demeure toujours lui-même, toujours doux, tranquille et per­sévérant en sa soumission au bon plaisir de Dieu, auquel il se laissait pleinement conduire : car, comme il était juste, il avait tou­jours sa volonté ajustée, jointe et conforme à celle de Dieu.

Être juste, n’est autre chose qu’être parfaitement uni à la volonté de Dieu, et y être toujours conforme en toutes sortes d’événements, soit prospères, ou adverses. Que saint Joseph ait été en toutes occasions toujours parfaitement soumis à la divine vo­lonté, nul n’en peut douter : et ne le voyez- vous pas? Regardez comment l’ange le tourne à toutes mains : il lui dit qu’il faut aller en Égypte, il y va ; il commande qu’il revienne, il s’en revient ; Dieu veut qu’il soit toujours pauvre, qui est une des plus puissantes épreuves qu’il nous puisse faire, et il s’y sou­met amoureusement, et non pas pour un temps, car ce fut toute sa vie ; mais de quelle pauvreté? d’une pauvreté méprisée, rejetée et nécessiteuse.

La pauvreté volontaire dont les religieux font profession est fort aimable, d’autant qu’elle n’empêche pas qu’ils ne re­çoivent et prennent les choses qui leur se­ront nécessaires, défendant et les privant seulement des superfluités; mais la pauvreté de saint Joseph, de Notre-Seigneur et de No­tre-Dame n’était pas telle : car, encore qu’elle fût volontaire, d’autant qu’ils l’aimaient chèrement, elle ne laissait pas pourtant d’être abjecte, rejetée, méprisée et nécessiteuse grandement;
car chacun tenait ce grand saint comme un pauvre charpentier, lequel sans doute ne pouvait pas tant faire, qu’il ne leur manquât plusieurs choses nécessaires, bien qu’il se peinât avec une affection non- pareille pour l’entretien de toute sa petite famille, après quoi il se soumettait très-humblement à la volonté de Dieu en la continuation de sa pauvreté et de son abjection, sans se laisser aucunement vaincre ni terrasser par l’ennui intérieur, lequel sans doute lui faisait maintes attaques.

Mais il demeurait toujours constant en la soumission, laquelle (comme toutes ses autres vertus) allait continuellement croissant et se perfectionnant ; ainsi que de Notre-Dame, laquelle gagnait chaque jour un surcroît de vertus et de per­fections qu’elle prenait en son Fils très- saint, lequel, ne pouvant croître en aucune chose, d’autant qu’il fut dès l’instant de sa conception tel qu’il est et sera éternellement, faisait que la sainte famille en laquelle il était, allait toujours croissant et avançant en perfection, Notre-Dame tirant sa perfection de sa divine bonté, et saint Joseph la rece­vant (comme nous avons déjà dit) par l’en­tremise de Notre-Dame.»

(Saint François de Sales, suite de l’entretien XIX)

La patience est la « vitamine essentielle » du chrétien

La patience est la « vitamine essentielle » du chrétien

Lors de l’audience générale, le Pape consacre la catéchèse à la vertu qui a pour racine l’amour avec lequel le Christ répond à la souffrance : il n’y a rien, aussi petit soit-il, tant qu’il est enduré pour l’amour de Dieu, qui passe sans récompense. de Dieu.

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Salle Paul VI
mercredi 27 mars 2024

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Catéchèse. Les vices et les vertus. 13. Patience

Chers frères et sœurs, bonjour !

Aujourd’hui, l’audience était prévue sur la place, mais à cause de la pluie, elle a été déplacée à l’intérieur. C’est vrai que vous serez un peu bondé, mais au moins on ne sera pas mouillé ! Merci pour votre patience.

Dimanche dernier, nous avons écouté le récit de la Passion du Seigneur. Aux souffrances qu’il subit, Jésus répond par une vertu qui, bien que ne faisant pas partie des vertus traditionnelles, est très importante : la vertu de patience. Il s’agit de l’endurance de ce que l’on souffre : ce n’est pas un hasard si la patience a la même racine que la passion.

Et précisément dans la Passion surgit la patience du Christ, qui avec douceur et douceur accepte d’être arrêté, giflé et injustement condamné ; devant Pilate, il ne récrimine pas ; endure les insultes, les crachats et la flagellation des soldats ; porte le poids de la croix ; il pardonne à ceux qui le clouent au bois et sur la croix il ne répond pas aux provocations, mais offre miséricorde.

C’est la patience de Jésus. Tout cela nous dit que la patience de Jésus ne consiste pas en une résistance stoïque à la souffrance, mais est le fruit d’un plus grand amour.

L’Apôtre Paul, dans ce qu’il appelle « l’Hymne à la charité » (voir 1 Co 13,4-7), lie étroitement l’amour et la patience. En effet, pour décrire la première qualité de la charité, il utilise un mot qui se traduit par «magnanime », « patient ». La charité est magnanime, elle est patiente.

Il exprime une conception surprenante, qui revient souvent dans la Bible : Dieu, face à notre infidélité, se montre « lent à la colère » (voir Exode 34,6 ; voir Nb 14,18) : au lieu d’exprimer son dégoût du mal, le péché de l’homme révèle lui-même pour être plus grand, prêt à chaque fois à recommencer avec une patience infinie.

Pour Paul, c’est le premier trait de l’amour de Dieu, qui offre le pardon face au péché. Mais pas seulement : c’est le premier trait de tout grand amour, qui sait répondre au mal par le bien, qui ne s’enferme pas dans la colère et le désespoir, mais persévère et relance. Une patience qui recommence.

C’est pourquoi à la racine de la patience il y a l’amour, comme le dit saint Augustin : « On est d’autant plus fort pour supporter n’importe quel mal que l’on est d’autant plus fort en soi que l’amour de Dieu est grand » (De patientia, XVII).

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On pourrait alors dire qu’il n’y a pas de meilleur témoignage de l’amour de Jésus que de rencontrer un chrétien patient. Mais pensons aussi au nombre de mères et de pères, d’ouvriers, de médecins et d’infirmières, de malades qui, chaque jour, dans la clandestinité, embellissent le monde avec une sainte patience !

Comme le dit l’Écriture, « la patience vaut mieux que la force d’un héros » (Pr 16,32). Cependant, il faut être honnête : nous manquons souvent de patience. Dans la vie de tous les jours, nous sommes tous impatients.

Nous en avons besoin comme d’une « vitamine essentielle » pour avancer, mais nous devenons instinctivement impatients et répondons au mal par le mal : il est difficile de rester calme, de contrôler ses instincts, de retenir les mauvaises réponses, de désamorcer les disputes et les conflits en famille, travail ou sur le lieu de travail.Communauté chrétienne.

La réponse vient immédiatement, nous ne sommes pas capables d’être patients.

Cependant, rappelons-nous que la patience n’est pas seulement une nécessité, c’est un appel : si le Christ est patient, le chrétien est appelé à l’être. Et cela nous oblige à aller à contre-courant de la mentalité largement répandue aujourd’hui, dans laquelle dominent la précipitation et le « tout maintenant » ; où, au lieu d’attendre que les situations mûrissent, les gens sont pressés, s’attendant à ce qu’elles changent instantanément.

N’oublions pas que la précipitation et l’impatience sont les ennemis de la vie spirituelle. Pourquoi ? Dieu est amour, et celui qui aime ne se fatigue pas, ne s’emporte pas, ne donne pas d’ultimatum, Dieu est patient, Dieu sait attendre.

Pensons à l’histoire du Père miséricordieux, qui attend son fils parti de la maison : il souffre patiemment, impatient seulement de l’embrasser dès qu’il le voit revenir (voir Luc 15, 21) ; ou pensons à la parabole du blé et de la mauvaise herbe, avec le Seigneur qui n’est pas pressé d’éradiquer le mal avant l’heure, pour que rien ne soit perdu (voir Mt 13, 29-30). La patience nous fait tout sauver.

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Mais, frères et sœurs, comment accroître la patience ? Étant, comme l’enseigne saint Paul, fruit de l’Esprit Saint (voir Ga 5, 22), il doit être demandé précisément à l’Esprit du Christ. Il nous donne la douce force de la patience – la patience est une force douce – parce que « le propre de la vertu chrétienne est non seulement de faire le bien, mais aussi de savoir tolérer le mal » (Saint Augustin, Discours, 46,13).

Surtout ces jours-ci, cela nous fera du bien de contempler le Crucifix pour assimiler sa patience. Un bon exercice est aussi celui d’amener à Lui les gens les plus ennuyeux, en demandant la grâce de mettre en pratique envers eux cette œuvre de miséricorde à la fois connue et ignorée : supporter patiemment les gens ennuyeux. Et ce n’est pas facile.

Réfléchissons à la question de savoir si nous faisons cela : supporter patiemment les gens ennuyeux. Nous commençons par demander de les regarder avec compassion, avec le regard de Dieu, en sachant distinguer leurs visages de leurs erreurs. Nous avons l’habitude de cataloguer les gens avec les erreurs qu’ils commettent. Non, ce n’est pas bon. Nous recherchons les gens pour leur visage, pour leur cœur et non pour leurs erreurs !

Enfin, pour cultiver la patience, vertu qui donne du souffle à la vie, il est bon d’élargir son regard.

Par exemple, en ne limitant pas le champ du monde à nos malheurs, comme nous y invite l’Imitation du Christ : «Il est donc nécessaire que vous vous souveniez des souffrances les plus graves des autres, que vous appreniez à supporter les vôtres. » , en rappelant que « vous ne savez pas qu’il existe quelque chose, aussi petit soit-il, pourvu qu’il soit enduré pour l’amour de Dieu, qui passe à Dieu sans récompense » (III, 19).

Et encore une fois, lorsque nous nous sentons en proie à l’épreuve, comme l’enseigne Job, il est bon de s’ouvrir avec espérance à la nouveauté de Dieu, dans la ferme confiance qu’il ne laissera pas nos attentes déçues. La patience, c’est savoir tolérer les maux.

Et ici aujourd’hui, dans cette audience, il y a deux personnes, deux pères : un Israélien et un Arabe. Tous deux ont perdu leurs filles dans cette guerre et tous deux sont amis. Ils ne regardent pas l’inimitié de la guerre, mais ils regardent l’amitié de deux hommes qui s’aiment et qui ont vécu la même crucifixion.

Pensons à ce très beau témoignage de ces deux personnes qui ont souffert chez leurs filles de la guerre en Terre Sainte. Chers frères, merci pour votre témoignage !

Salutations

Je salue cordialement les pèlerins de langue française. Que la contemplation de la Passion du Seigneur nous donne la force de persévérer humblement dans la foi malgré les épreuves de la vie. Que Dieu vous bénisse.

Dans le climat spirituel intense de la Semaine Sainte, je salue avec affection les jeunes, les malades, les personnes âgées et les jeunes mariés. J’invite chacun à vivre ces journées dans la prière, à s’ouvrir à la grâce du Christ Rédempteur, source de joie et de miséricorde.

Frères et sœurs, prions pour la paix. Que le Seigneur nous donne la paix dans l’Ukraine tourmentée et qui souffre énormément sous les bombardements ; aussi en Israël et en Palestine, que la paix règne en Terre Sainte. Que le Seigneur donne la paix à tous, comme cadeau de Pâques !

Ma bénédiction à tous.


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Texte traduit et présenté par l’Association de la Médaille Miraculeuse

Ressentir vivement ce que le Christ a souffert pour nous

Ressentir vivement ce que le Christ a souffert pour nous

MERCREDI (de la Semaine sainte) Is 50,4-9a – Mt 26,14-25

Le Christ a souffert pour vous, vous laissant un modèle afin que vous suiviez ses traces (1 P 2,21)

Sans un véritable amour pour le Christ, nous ne saurions être ses véritables disciples ; et nous ne saurions l’aimer si notre coeur n’est ému de gratitude envers lui ; et nous ne saurions ressentir dûment cette gratitude si nous ne res­sentons vivement ce qu’il a souffert pour nous.

En vérité, il nous semble impossible que quiconque puisse atteindre à l’amour du Christ s’il n’éprouve aucune détresse, aucune angoisse de cœur à la pensée des amères douleurs qu’il a souffertes, et ne ressent aucun remords d’y avoir contribué par ses péchés.

Je sais fort bien — et je souhaite, mes frères, de ne jamais l’oublier — que le sentiment, ici, ne suffit pas ; qu’il ne suffit pas de sentir, sans plus ; que d’éprouver de la douleur à la pensée des souffrances du Christ sans aller jusqu’à lui obéir, n’est pas véritable amour, mais moquerie.

Le véritable amour sent juste et agit juste ; mais de même que des sentiments chaleureux que n’accompagne point une conduite religieuse sont une sorte d’hypocrisie, de même une bonne conduite que n’accompagnent point de profonds sentiments est tout au plus une forme de religion très imparfaite…

Il est dit dans l’Apocalypse (1,7) : Voici qu’il vient sur les nuées ; et tout œil le verra, et ceux-là mêmes qui l’ont transpercé ; et tous les peuples de la terre se frapperont la poitrine à cause de lui. Un jour, mes frères, nous nous lèverons, chacun de nous se lèvera de sa tombe et verra Jésus Christ ; nous verrons celui qui fut suspendu à la croix, nous verrons ses blessures, nous verrons les plaies de ses mains, de ses pieds et de son côté.

Avons-nous le désir d’être de ceux qui gémiront et se lamenteront, ou de ceux qui se réjouiront ? Si nous ne voulons pas nous lamenter alors à sa vue, nous devons nous lamenter à pré­sent en pensant à lui.

Préparons-nous à rencontrer notre Dieu ; venons en sa présence aussi souvent qu’il se peut ; essayons de nous figurer que nous voyons sa croix, que nous le voyons sur cette croix ; alors approchons-nous de lui ; supplions-le de nous regarder comme il a regardé le bon larron et disons-lui : Seigneur, souviens-toi de moi quand tu viendras en ton Royaume (Le 23,42)…

C’est-à-dire : « Souviens-toi de moi, Seigneur, avec miséricorde ; ne te souviens pas de mes péchés, mais de ta propre croix ; souviens-toi de tes propres souffrances, souviens-toi que tu as souffert pour moi, pécheur ; souviens-toi au dernier jour que j’ai, durant ma vie, ressenti tes souffrances, que j’ai souffert sur ma croix à tes côtés. Souviens-toi alors de moi et fais-moi à présent souvenir de toi ».

Cardinal Newman 12 sermons sur le Christ, Egloff, Paris 1943, p. 145-146, 156-157.

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