EUCHARISTIE MÉDITÉE 13

EUCHARISTIE MÉDITÉE 13

L’Eucharistie source du dévouement sacerdotal.

Faites ceci en mémoire de moi. Luc, XXII, 10

Eucharistie- Motif sculpté sur porte d'église - Bruxelles
Eucharistie- Motif sculpté sur porte d’église – Bruxelles

13e Action de grâces –Union au cœur de Jésus dans l’Eucharistie.

Salut, cœur adorable de Jésus, source embrasée de charité, école d’abnégation, de dévouement, de sacrifice ! Prosterné devant vous, je vous adore et vous admire dans le silence de l’amour et du ravissement.

Ah ! c’est quand on vit de votre vie, ô bien-aimé Jésus, quand on respire auprès de votre cœur et qu’on sent les battements de ce cœur adorable répondre aux pulsations du sien, que l’on comprend les mystères ineffables de la charité ; car l’amour les explique tous, et cette science sublime d’aimer, qui peut renseigner aussi bien que le Dieu de l’Eucharistie?

Oui, Seigneur, c’est là surtout que vous êtes le Dieu d’amour ; là que cet amour va jusqu’à l’excès, qu’il s’épuise et qu’il dépasse toutes les bornes des plus ambitieux désirs ; là enfin qu’il atteint son dernier stade.

Ailleurs, ô mon Dieu, je contemple dans une muette adoration vos perfections infinies ; mon esprit étonné se perd dans cette contemplation, et je ne peux qu’adorer en silence une grandeur que je comprends à peine.

Si de votre divinité je passe à votre humanité sainte, j’admire et je bénis votre bonté, votre miséricorde ; mon cœur s’attache à vos pas, et ma bouche s’ouvre pour mêler ses louanges et ses bénédictions à celles des malades que vous guérissiez pendant votre vie mortelle, des aveugles auxquels vous rendiez la lumière, des sourds que vous faisiez entendre, des muets auxquels vous donniez une voix pour vous bénir ; je m’unis enfin à tous ceux qui devaient vous aimer.

Mais dans la communion, ô bien-aimé Sauveur, ces bienfaits me deviennent personnels ; ce sont mes yeux que vous ouvrez à une lumière mille fois préférable à celle de l’astre qui nous éclaire, c’est ma langue que vous déliez, c’est votre voix qui charme l’oreille de mon cœur, c’est la lèpre de mes infirmités spirituelles que vous guérissez par l’onction de votre grâce et par l’effusion du sang précieux dont vous m’inondez tout entier.

Là enfin, ô Jésus, vous êtes mien, vous êtes mon bien, mon héritage. Que puis-je encore demander et vouloir de plus au ciel et sur la terre, puisque je connais le Créateur des mondes, l’Être infini dont la vue et l’amour font l’éternelle félicité des cieux ?

Oh ! que l’âme qui s’unit à vous, ô mon Dieu, est heureuse ! Qu’elle s’élève facilement au-dessus des passagères souffrances de la terre et des courtes douleurs de l’éloignement, lorsque, perdue, abîmée en vous, elle ne voit plus que vous, elle ne sent plus que le bonheur de vous aimer, elle ne vit plus que de vous et pour vous !

Ô Jésus, Jésus,  qu’il fait bon vous aimer !… Qu’elle est douce, qu’elle est ineffable, cette pure jouissance de l’amour ! Comme mon cœur sent qu’il est fait pour elle, ou plutôt qu’il n’est fait que pour vous ! Oui, Seigneur, vous seul pouvez le remplir, ce pauvre cœur ; vous seul pouvez satisfaire son immense besoin d’aimer, combler tous ses désirs et lui donner le bonheur après lequel il soupire.

Parfois je m’étonne, ô mon Dieu, de pouvoir encore aimer d’autres que vous, de n’être pas insensible à tout après m’être rassasié des délices de votre amour ; mais aujourd’hui mon âme comprend ce mystère. Vous êtes amour, ô mon Dieu, et l’âme qui vous aime réellement devient amour aussi.

Notre cœur s’agrandit et s’élargit au contact du vôtre ; en se purifiant, il acquiert une immense capacité pour aimer ; il se dilate, et il éprouve, ce pauvre cœur, le besoin de verser cette surabondance d’affections sur tout ce qui l’entoure.

Et puis, aimer nos frères, n’est-ce pas encore vous aimer, Seigneur ? Toutes nos affections aimantes ne sont-elles pas autant de ruisseaux qui sortent de vous comme de leur source, et y retournent alors tout naturellement, sans avoir rien contracté de mauvais des affections humaines ?

Oui, aimer pour l’amour de vous, c’est encore vous aimer, ô Jésus ; faire du bien à celui qui souffre, le soulager dans ses souffrances, c’est vous soulager vous-même ; essuyer les larmes de celui qui pleure, c’est essuyer les vôtres ; donner à manger à celui qui a faim, à boire à celui qui a soif, c’est vous rassasier vous-même, c’est étancher votre soif, puisque vous vous substituez à celui qui souffre, et que vous tenez comme fait à vous-même ce que l’on fait pour le moindre des vôtres.

Quel puissant encouragement à la charité, au dévouement le plus absolu ! Quel bonheur pour le cœur qui vous aime, ô Jésus, qui déborde de reconnaissance et d’amour, de pouvoir rendre à celui auquel il doit tout don pour don, bienfait pour bienfait ; de pouvoir lui donner ses biens, son temps, ses services ; de pouvoir se donner soi-même, par le sacrifice et le dévouement, à celui qui souvent lui fait la riche aumône de lui-même!

Le don est inégal, il est vrai : en vous donnant à nous, Seigneur, vous nous donnez un Dieu ; l’homme, en se donnant à vous, vous donne bien peu de chose, mais ce peu est tout ce qu’il possède ; dans son indigence, il ne peut offrir davantage.

Ô Jésus, Jésus, que j’aime ; Jésus, ma vie, ma gloire, ma joie, mes délices, mon espérance, Jésus ! votre nom seul, ô bien-aimé, est une harmonie pour mon cœur ; il résume pour moi tous les bonheurs, toutes les tendresses de l’âme, toutes les appellations les plus douces. Ce nom me dit tout, il me console de tout ; car Jésus m’est toutes choses, il est mon Dieu, mon trésor, mon tout.

Ô Marie, vous qu’on appelle à si juste titre Mère du bel amour, puissante protectrice de l’Église, étendez votre main maternelle sur cette épouse de votre divin Fils; bénissez tous ceux qui travaillent à l’accroissement du règne de Jésus, tous ceux qui, dans le saint ministère, s’emploient au salut des âmes et au soulagement de toutes les misères humaines.

Obtenez du Seigneur qu’il multiplie le nombre des ouvriers, évangéliques, qu’il nous donne toujours des prêtres saints et selon son cœur, qu’il nous rende dociles à leurs avis, afin qu’en leur accordant un jour la récompense, de leur zèle, il puisse nous accorder à nous celle qu’il a promise à la docilité et à l’humilité du cœur. Ainsi soit-il.

Léonie Guillebaut

Le Seigneur est ma lumière et mon salut

Le Seigneur est ma lumière et mon salut

Psaume 26 le Seigneur est ma lumière et mon salut
Psaume 26 le Seigneur est ma lumière et mon salut

LecturePs 26 1-6

« si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ?
Qui pourra nous séparer de l’amour du Christ ? » Rm 8, 31-35

01 Le Seigneur est ma lumière et mon salut ;
de qui aurais-je crainte ? *
Le Seigneur est le rempart de ma vie ;
devant qui tremblerais-je ?

02 Si des méchants s’avancent contre moi pour me déchirer, +
ce sont eux, mes ennemis, mes adversaires, *
qui perdent pied et succombent.

03 Qu’une armée se déploie devant moi,
mon cœur  est sans crainte ; *
que la bataille s’engage contre moi,
je garde confiance.

04 J’ai demandé une chose au Seigneur,
la seule que je cherche : +
habiter la maison du Seigneur tous les jours de ma vie, *
pour admirer le Seigneur dans sa beauté
et m’attacher à son temple.

05 Oui, il me réserve un lieu sûr
au jour du malheur ; +
il me cache au plus secret de sa tente,
il m’élève sur le roc. *

06 Maintenant je relève la tête
devant mes ennemis.
J’irai célébrer dans sa tente le sacrifice d’ovation ; *
je chanterai, je fêterai le Seigneur.

(Suite) Écoute, Seigneur, je t’appelle ! *Pitié ! Réponds-moi ! Mon cœur m’a redit ta parole :« Cherchez ma face » * C’est ta face, Seigneur, que je cherche :ne me cache pas ta face. N’écarte pas ton serviteur avec colère : *tu restes mon secours. Ne me laisse pas, ne m’abandonne pas, Dieu, mon salut ! * Mon père et ma mère m’abandonnent ; le Seigneur me reçoit.

Enseigne-moi ton chemin, Seigneur,  *conduis-moi par des routes sûres, malgré ceux qui me guettent. Ne me livre pas à la merci de l’adversaire : contre moi se sont levés de faux témoins qui soufflent la violence. Mais j’en suis sûr, je verrai les bontés du Seigneur sur la terre des vivants. * « Espère le Seigneur, sois fort et prends courage ; espère le Seigneur. »

ORAISON :

Jésus, Verbe de Dieu, tu es la vraie lumière et le sauveur du monde : avec toi, de qui aurions-nous peur ? Jésus-Christ et Seigneur, tu es vainqueur de l’adversaire, le Père ne t’a pas abandonné : en toi, de qui aurions-nous peur ? Jésus, Fils bien-aimé, tu es le Rocher véritable, tu es la route sûre : prenant appui sur toi, de qui aurions-nous peur ?

Méditation du Saint Pape Jean-Paul II sur le Psaume

Chers Frères et Sœurs,

Notre parcours à travers la liturgie des Vêpres reprend aujourd’hui avec le Psaume 26. La première partie du Psaume, que nous méditons, est marquée d’une grande sérénité, fondée sur la confiance en Dieu dans l’adversité. La vie du croyant est souvent soumise aux tensions et aux contestations, parfois aussi au refus et même à la persécution.

Le fidèle est conscient que la cohérence de sa foi peut entraîner l’isolement et le conduire jusqu’au mépris et à l’hostilité, dans une société qui met en avant la promotion personnelle, le succès extérieur, la richesse, la jouissance effrénée. Mais il n’est pas seul et son cœur garde une surprenante paix intérieure. Il sait que le Seigneur lui donne la paix qui le protège du mal. La communion avec Dieu est source de sérénité, de joie et de tranquillité.

1. Le Psaume 26, la liturgie le divise en deux passages différents. Nous suivrons à présent la première partie de ce diptyque poétique et spirituel (cf. vv. 1-6) qui a pour toile de fond le temple de Sion, siège du culte d’Israël.

En effet, le Psalmiste parle explicitement de « maison de Yahvé », de « sanctuaire » (v. 4), de « refuge, demeure, maison » (cf. vv. 5-6). Dans l’original hébreu, ces termes indiquent d’ailleurs plus précisément le « tabernacle » et la « tente », c’est-à-dire le cœur même du temple, où le Seigneur se révèle à travers sa présence et sa parole.

On évoque également le « roc » de Sion (cf. v. 5), lieu sûr permettant de se réfugier, et l’on fait allusion à la célébration des sacrifices d’action de grâce (cf. v. 6).

Si la liturgie est donc l’atmosphère spirituelle dans laquelle baigne le Psaume, le fil conducteur de la prière est la confiance en Dieu, que ce soit dans les moments de joie ou dans les moments de peur.

2. La première partie du Psaume, que nous méditons à présent, est marquée par une grande sérénité, fondée sur la confiance en Dieu le jour sombre de l’assaut des méchants. Les images utilisées pour décrire ces adversaires, qui sont le signe du mal qui corrompt l’histoire, sont de deux types.

D’une part, il semble qu’il y ait l’image d’une chasse féroce:  les méchants sont comme des fauves qui avancent pour saisir leur proie et en arracher la chair, mais ils trébuchent et tombent (cf. v. 2). De l’autre côté, on trouve le symbole militaire d’un assaut accompli par une armée tout entière:  c’est une bataille qui éclate de façon impétueuse, semant la terreur et la mort (cf. v. 3).

La vie du croyant est souvent soumise à des tensions et à des contestations, parfois également à un refus, voire la persécution. Le comportement de l’homme juste dérange, parce qu’il retentit comme un avertissement à l’égard des violents et des pervers.

Les impies décrits par le Livre de la Sagesse le reconnaissent de façon tout à fait franche:  le juste « est devenu un blâme pour nos pensées, sa vue même nous est à charge; car son genre de vie ne ressemble pas aux autres, et ses sentiers sont tout différents » (Sg 2, 14-15).

3. Le fidèle est conscient que la cohérence crée un isolement et provoque même le mépris et l’hostilité dans une société qui choisit souvent comme bannière l’intérêt personnel, le succès extérieur, la richesse, la jouissance effrénée.

Toutefois, il n’est pas seul et son cœur conserve une paix intérieure surprenante, car – comme le dit la splendide « antienne » d’ouverture du Psaume – « Yahvé est ma lumière et mon salut, il est le rempart de la vie du juste » (cf. Ps 26, 1). Il répète sans cesse:  « De qui aurais-je crainte?… Devant qui tremblerais-je?… mon coeur est sans crainte… j’ai là ma confiance » (vv. 1.3).

Il nous semble presque entendre la voix de saint Paul qui proclame:  « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous? » (Rm 8, 31). Mais le calme intérieur, la force d’âme et la paix sont un don qui s’obtient en se réfugiant dans le temple, c’est-à-dire en ayant recours à la prière personnelle et communautaire.

4. L’orant, en effet, se confie à l’étreinte de Dieu et son rêve est exprimé également dans un autre Psaume (cf. 22, 6):  « Ma demeure est la maison de Yahvé en la longueur des jours ». Là il pourra « savourer la douceur de Yahvé » (Ps 26, 4), contempler et admirer le mystère divin, participer à la liturgie sacrificielle et élever ses louanges au Dieu libérateur (cf. v. 6).

Le Seigneur crée autour de son fidèle un horizon de paix, qui laisse à l’extérieur le fracas du mal. La communion avec Dieu est source de sérénité, de joie, de tranquillité; comme si l’on entrait dans une oasis de lumière et d’amour.

5. Pour terminer notre réflexion, écoutons à présent les paroles du moine Isaïe, d’origine syrienne, qui vécut dans le désert égyptien et qui mourut à Gaza vers 491. Dans son Asceticon, il applique notre Psaume à la prière qu’il faut prononcer face à la tentation:

« Si nous voyons les ennemis nous entourer de leur malice, c’est-à-dire de la paresse, que ce soit parce qu’ils affaiblissent notre âme dans le plaisir, ou parce que nous ne contenons pas notre colère contre notre prochain lorsqu’il agit contre son devoir.

Ou bien s’ils troublent nos yeux pour les conduire à la concupiscence, ou s’ils veulent nous conduire à goûter les plaisirs de la table, s’ils transforment en venin la parole du prochain, s’ils nous font mépriser la parole d’autrui, s’ils nous poussent à établir des différences entre nos frères en disant:  « Celui-ci est bon, celui-là est méchant »:  si, donc, toutes ces choses nous entourent, ne perdons pas courage, mais exclamons-nous plutôt comme David, d’un cœur ferme:  « Yahvé est le rempart de ma vie! » (Ps 26, 1) ».

AUDIENCES GÉNÉRALES Mercredis 21 et 28 avril 2004 


Copyright © Dicastero per la Comunicazione – Libreria Editrice Vaticana

EUCHARISTIE MÉDITÉE 12

EUCHARISTIE MÉDITÉE 12

Le Viatique.

Heureux ceux qui meurent dans le Seigneur. (Apoc 14, 13)

Eucharistie- Motif sculpté sur porte d'église - Bruxelles
Eucharistie- Motif sculpté sur porte d’église – Bruxelles

12e Action de grâces – Jésus dans l’Eucharistie console le mourant.

Soyez béni, ô Jésus, mon Sauveur et mon Dieu ; soyez béni, vous qui êtes pour moi le pain vivant, le pain divin de la vie éternelle, le gage précieux de la gloire et de l’immortalité.

Je vous adore en ce moment en moi, ô mon Dieu, comme la vie de mon âme, comme l’appui et le fondement de mes espérances, comme l’auteur de ma joie dans le temps, de mon bonheur dans l’éternité.

Uni à vous, ô mon Sauveur, que me fait la course rapide du temps ? que m’importe de voir mes jours aller se perdre un à un dans l’océan sans fond de l’éternité ?

Ah ! bien loin de me plaindre en voyant ma vie s’écouler avec la vitesse d’un fleuve que rien ne peut arrêter dans sa course, j’appelle avec toute l’ardeur de mes vœux le jour qui la verra finir, puisque ce jour mettra un terme, ô mon Dieu, au danger que je cours sans cesse ici-bas de vous offenser et de vous perdre pour jamais.

Déjà, ô mon Dieu, j’ai trop vécu pour vous offenser, trop peu, il est vrai, pour vous aimer ; mais hélas ! en vivant davantage, j’accumule mes dettes sans accroître mes mérites. Mon âme, renfermée dans sa prison d’argile, fait le mal qu’elle voudrait éviter, sans pouvoir accomplir le bien qu’elle désire pratiquer.

Captive, elle soupire après l’instant de la liberté ; elle vous désire, mon Dieu, vous, sa vie, son souverain bien, comme le cerf altéré désire l’eau des fontaines ; elle a soif de vous, soif de votre amour, et elle est impuissante à vous aimer ; elle vous cherche avec anxiété et ne vous trouve nulle part.

Ah ! qu’elle vienne donc, cette mort qui brisera les liens et la laissera libre d’aller pour jamais se perdre et s’abîmer dans votre sein !

Mais qu’ai-je dit, Seigneur ? Ah ! pardonnez cet élan, ces transports d’une ferveur indiscrète ; je rougis à vos pieds, j’ai honte de ma faiblesse, car, hélas ! j’ose ambitionner la récompense, j’ose même la demander sans l’avoir méritée. Semblable à un ouvrier fainéant qui demanderait son salaire avant la fin de sa journée de labeurs, moi je demande le ciel, et je n’ai rien fait encore pour le mériter.

J’appelle la mort, je l’invoque, comme si ma tâche était remplie, mon jour de travail achevé ; et cependant mes mains sont vides de bonnes œuvres, je suis l’indigence même, et je ne pensais pas que je n’avais rien à vous offrir pour apaiser votre justice, ô mon souverain Juge, si vous m’appeliez en cet instant .

Je n’ai rien fait, rien souffert pour vous ; ma vie vous offre bien des fautes et bien peu d’expiations. J’ai beaucoup péché, et j’ai peu pleuré ; je vous ai surtout trop peu aimé, et le ciel, je le sais, ne se donne qu’ à l’innocence conservée ou à l’innocence recouvrée par le laborieux baptême de la pénitence et des larmes.

Non, non, mon Dieu, je le comprends, je n’ai point encore assez souffert, assez soupiré loin de vous. Il est des larmes que mes yeux n’ont pas versées ; il reste quelques gouttes de fiel au fond de mon calice de douleur que mes lèvres n’ont pas encore goûtées.

Dussent-elles être les plus amères, je veux les répandre, ces larmes, m’enivrer de l’amertume de ces dernières douleurs ; heureux si, unies aux vôtres, ces courtes souffrances du temps désarment votre justice et m’assurent les joies de l’éternité.

Je ne vous demanderai plus, Seigneur, ni la vie ni la mort ; si vous prolongez mon exil, si vous augmentez le nombre de mes jours, si vous les multipliez jusqu’à la vieillesse la plus reculée, je me soumettrai sans murmure aux ordres de votre providence, j’accepterai cette douloureuse épreuve comme une juste expiation des fautes de ma jeunesse et de la longue inutilité de ma vie.

Je ne vous demanderai qu’un adoucissement, et cet adoucissement, votre amour ne me le refusera pas. C’est le don quotidien de vous-même dans l’Eucharistie; c’est vous que je veux posséder toujours dans le temps, ô Jésus, en attendant l’heure bénie qui m’assurera cette possession pour l’éternité.

Si, au contraire, il vous plait, Seigneur, d’abréger le cours de mon existence, j’accepterai la mort avec joie, avec résignation, sous quelque forme qu’il vous plaira de me renvoyer. J’unirai, ô Jésus, mes dernières souffrances aux douleurs de votre agonie, heureux d’honorer votre être éternel par l’acceptation volontaire de la déchéance du mien.

Je ne vous demande pas, ô mon Dieu, de voir à mon heure dernière des parents et des amis en larmes entourer mon lit de mort de leurs regrets et des témoignages d’une affectueuse tendresse ; je ne vous demande pas même qu’une main amie vienne essuyer mes dernières larmes et fermer mes yeux à la lumière du jour.

C’est vous, c’est encore vous, ô Jésus, que je désire et que je veux à cette heure suprême ; c’est vous, c’est votre Eucharistie qu’il me faudra alors comme il me la faut aujourd’hui. Que m’importe que tous me délaissent et m’abandonnent, pourvu que vous me restiez, pourvu que votre douce lumière, ô Soleil d’amour, vienne réjouir mes regards mourants ?

Que m’importe de n’emporter ni larmes ni regrets, pourvu qu’uni à vous par une fervente et dernière communion, je sente votre cœur répondre aux dernières palpitations du mien, et que mon âme, déjà perdue dans votre âme divine, passe du temps à l’éternité dans la douceur de ce dernier embrassement ?

O Marie, Vierge glorieuse et bénie, vous qui êtes morte consumée par les ardeurs de l’amour divin, vous pour qui la mort ne fut qu’un doux sommeil que dissipa bientôt le réveil de l’immortalité, oh ! priez pour nous, pauvres pécheurs, maintenant et à l’heure de notre mort.

N’abandonnez pas vos malheureux enfants à ce moment suprême, vous qu’on vit au pied de la croix de votre Fils expirant ; venez recevoir les derniers soupirs de ceux qui vous invoquent maintenant avec une si entière confiance. Souvenez-vous que pour vous la mort fut un triomphe, que pour nous elle ne soit une séparation!

Ayez pitié de tant de malheureux qui vous nomment leur mère et leur espérance, priez pour tous, assistez-les tous, et que votre maternelle protection s’étende jusque sur ces âmes qui vous méconnaissent, qui outragent votre Fils, et qui jusqu’à la fin refusent les avances de sa miséricorde et de son amour ; obtenez-leur ces grâces puissantes de conversion qui brisent les cœurs, qui les changent, et des pécheurs les plus endurcis font souvent les plus grands saints. Ainsi soit-il.

Léonie Guillebaut

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