Saint Joseph rappelle que Dieu regarde les périphéries

Saint Joseph rappelle que Dieu regarde les périphéries

Après une série de catéchèses sur la lettre de Paul aux Galates, le Pape François a ouvert mercredi 17 novembre en salle Paul VI du Vatican un nouveau cycle dédié à la figure de saint Joseph, patron de l’Église universelle. Le Saint-Père a décrit Saint Joseph de Nazareth, en ces temps de crises, comme un soutien, un réconfort et un guide, dont l’exemple et le témoignage peuvent nous éclairer.

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Salle Paul VI
Mercredi 17 novembre 2021

__________________________________

Résumé de la catéchèse du Saint-Père :

Frères et sœurs,

le 8 décembre 1870, le Bienheureux Pie IX proclamait saint Joseph patron de l’Église universelle. A 150 ans de cet évènement, nous vivons une année spéciale dédiée à saint Joseph. En ce moment marqué par une crise mondiale, Joseph peut être un soutien, un réconfort et un guide. Le nom de Joseph en hébreu signifie “Que Dieu augmente, que Dieu fasse grandir”.

Il s’agit d’un souhait, d’une bénédiction fondée sur la confiance en la providence de Dieu. Ce nom révèle un aspect essentiel de la personnalité de Joseph de Nazareth, un homme plein de foi en Dieu, en sa providence. Bethléem et Nazareth jouent un rôle important dans la compréhension de sa figure.

Dans l’Ancien Testament, la ville de Bethléem est appelée “Maison du pain” qui renvoie au mystère eucharistique car Jésus est le pain vivant descendu du ciel. Le choix de Bethléem et Nazareth, deux villages de la périphérie, comme lieu de l’incarnation du Fils de Dieu, nous révèle que la périphérie et la marginalisation sont préférées par Dieu.

Dieu se manifeste dans les périphéries géographiques et existentielles. C’est pourquoi l’Église est appelée à annoncer la bonne nouvelle à partir des périphéries. Joseph nous rappelle de donner de l’importance à ce que les autres rejettent. Il est un maître de l’essentiel.

A tous les hommes et femmes qui vivent dans les périphéries géographiques les plus oubliées du monde ou qui vivent des situations de marginalisation existentielle, saint Joseph est le témoin et le protecteur vers qui il faut regarder.

Catéchèse sur saint Joseph – 1. Saint Joseph et le milieu dans lequel il a vécu

Chers frères et sœurs, bonjour !

Le 8 décembre 1870, le Bienheureux Pie IX proclama saint Joseph patron de l’Église universelle. A 150 ans de cet évènement, nous vivons une année spéciale dédiée à saint Joseph et dans la Lettre Apostolique Patris corde j’ai rassemblé quelques réflexions sur sa figure.

Jamais comme aujourd’hui, en ce temps marqué par une crise mondiale aux diverses composantes, Joseph peut être un soutien, un réconfort et un guide. C’est pourquoi j’ai décidé de lui consacrer une série de catéchèses qui, je l’espère, nous aideront davantage à nous laisser éclairer par son exemple et son témoignage. Durant quelques semaines, nous parlerons de saint Joseph.

*

Dans la Bible, il y a plus de dix personnages qui portent le nom de Joseph. Le plus important d’entre eux est le fils de Jacob et de Rachel, qui, à travers diverses péripéties, est passé du statut d’esclave à celui de deuxième personnage le plus important d’Égypte après Pharaon (cf. Gn 37-50). Le nom de Joseph en hébreu signifie “Que Dieu augmente, que Dieu fasse grandir”.

Il s’agit d’un souhait, d’une bénédiction fondée sur la confiance en la providence de Dieu et se référant particulièrement à la fécondité et à la croissance des enfants. En effet, ce nom même nous révèle un aspect essentiel de la personnalité de Joseph de Nazareth. C’est un homme plein de foi en Dieu, en sa providence : il croit en la providence de Dieu, il a foi en la providence de Dieu.

Toutes ses actions relatées dans l’Évangile, sont dictées par la certitude que Dieu « fait croître », que Dieu « augmente », que Dieu « ajoute », c’est-à-dire que Dieu poursuit son dessein de salut. Et en cela, Joseph de Nazareth ressemble beaucoup à Joseph d’Égypte.

*

Également, les principales références géographiques de Joseph : Bethléem et Nazareth jouent un rôle important dans la compréhension de sa figure.

Dans l’Ancien Testament, la ville de Bethléem est appelée Beth Lechem, c’est-à-dire « Maison du pain », ou encore Ephrata, en raison de la tribu installée sur ce territoire. En arabe, cependant, le nom signifie « Maison de la viande », probablement en raison du grand nombre de troupeaux de moutons et de chèvres dans la région.

Ce n’est pas par hasard, en effet, que lors de la naissance de Jésus, les bergers furent les premiers témoins de l’événement (cf. Lc 2, 8-20). À la lumière de l’histoire de Jésus, ces allusions au pain et à la viande renvoient au mystère Eucharistique : Jésus est le pain vivant descendu du ciel (cf. Jn 6,51). Il dira de lui-même : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle » (Jn 6,54).

*

Bethléem est mentionnée plusieurs fois dans la Bible, à partir du livre de la Genèse. Bethléem est également liée à l’histoire de Ruth et de Noémie, racontée dans le petit mais merveilleux livre de Ruth. Ruth a donné naissance à un fils appelé Obed, qui à son tour a donné naissance à Jessé, le père du roi David. Et c’est de la lignée de David qu’est issu Joseph, le père légal de Jésus.

Au sujet de Bethléem, ensuite le prophète Michée a prédit de grandes choses : « Et toi, Bethléem Éphrata, le plus petit des clans de Juda, c’est de toi que sortira pour moi celui qui doit gouverner Israël. » (Mi 5,1). L’évangéliste Matthieu reprendra cette prophétie en la reliant à l’histoire de Jésus comme son accomplissement évident.

*

En effet, le Fils de Dieu ne choisit pas Jérusalem comme lieu de son incarnation, mais Bethléem et Nazareth, deux villages périphériques, loin des clameurs de la chronique et du pouvoir de l’époque.

Pourtant, Jérusalem était la ville aimée du Seigneur (cf. Is 62, 1-12), la « ville sainte » (Dn 3, 28), choisie par Dieu pour y habiter (cf. Za 3, 2 ; Ps 132, 13). C’est là, en effet, qu’habitaient les maîtres de la Loi, les scribes et les pharisiens, les grands prêtres et les anciens du peuple (cf. Lc 2,46 ; Mt 15,1 ; Mc 3,22 ; Jn 1,19 ; Mt 26,3).

*

C’est pourquoi le choix de Bethléem et de Nazareth nous indique que la périphérie et la marginalité sont privilégiées par Dieu. Jésus n’est pas né à Jérusalem avec toute la cour… non : il est né dans une périphérie et il a passé sa vie, jusqu’à l’âge de 30 ans, dans cette périphérie, faisant le métier de charpentier, comme Joseph.

Pour Jésus, les périphéries et les marginalités sont privilégiées. Ne pas prendre au sérieux cette réalité revient à ne pas prendre au sérieux l’Évangile et l’œuvre de Dieu, qui continue à se manifester dans les périphéries géographiques et existentielles.

Le Seigneur agit toujours en secret dans les périphéries, même dans notre âme, dans les périphéries de l’âme, des sentiments, peut-être des sentiments dont nous avons honte ; mais le Seigneur est là pour nous aider à avancer. Le Seigneur continue à se manifester dans les périphéries, tant géographiques qu’existentielles.

En particulier, Jésus va à la recherche des pécheurs, entre dans leurs maisons, leur parle, les appelle à la conversion. Et on lui reproche aussi cela :  » Mais regardez, ce Maître – disent les docteurs de la loi – regardez ce Maître : il mange avec les pécheurs, il se salit, il va chercher ceux qui n’ont pas fait le mal mais qui l’ont subi : les malades, les affamés, les pauvres, les petits derniers.

Jésus va toujours vers les périphéries. Et cela doit nous donner une grande confiance, car le Seigneur connaît les périphéries de notre cœur, les périphéries de notre âme, les périphéries de notre société, de notre ville, de notre famille, c’est-à-dire cette partie un peu obscure que nous ne faisons pas voir, peut-être par honte.

Mais il va à la recherche également de ceux qui n’ont pas fait le mal mais qui l’ont subi : les malades, les affamés, les pauvres, les plus petits.

*

À cet égard, la société de l’époque n’est pas très différente de la nôtre. Aujourd’hui aussi, il y a un centre et une périphérie. Et l’Église sait qu’elle est appelée à annoncer la bonne nouvelle à partir des périphéries. Joseph, qui est un charpentier de Nazareth et qui a confiance dans le plan de Dieu pour sa jeune fiancée et pour lui-même, rappelle à l’Église de fixer son regard sur ce que le monde ignore délibérément.

Aujourd’hui, Joseph nous enseigne ceci :  » Ne pas regarder tant les choses que le monde loue, regarde les recoins, regarde les ombres, regarde les périphéries, ce que le monde ne veut pas « . Il rappelle à chacun d’entre nous de donner de l’importance à ce que les autres rejettent.

En ce sens, il est véritablement un maître de l’essentiel : il nous rappelle que ce qui est vraiment précieux n’attire pas notre attention, mais nécessite un discernement patient pour être découvert et valorisé. Découvrir ce qui a de la valeur.

Demandons-lui d’intercéder afin que toute l’Église retrouve cette clairvoyance, cette capacité de discerner et cette capacité d’évaluer l’essentiel. Repartons de Bethléem, repartons de Nazareth.

*

Aujourd’hui, je voudrais adresser un message à tous les hommes et les femmes qui vivent dans les périphéries géographiques les plus oubliées du monde ou qui connaissent des situations de marginalisation existentielle. Puissiez-vous trouver en saint Joseph le témoin et le protecteur vers lequel vous tourner. Nous pouvons nous adresser à lui avec cette prière, une prière « artisanale », mais qui sort du cœur :

Saint Joseph,
toi qui toujours as fait confiance à Dieu,
et as fait tes choix
guidé par sa providence
apprends-nous à ne pas tant compter sur nos projets
mais sur son dessein d’amour.
Toi qui viens des périphéries
aides-nous à convertir notre regard
et à préférer ce que le monde rejette et marginalise.
Réconforte ceux qui se sentent seuls
et soutiens ceux qui travaillent en silence
pour défendre la vie et la dignité humaine. Amen.


Salutations

Je suis heureux de saluer les pèlerins venus des pays francophones, particulièrement les Sœurs Filles du Cœur de Marie, les élus des Hauts de Seine avec l’Évêque de Nanterre et le groupe Alphabétisation et santé pour tous du Cameroun. Que saint Joseph, venu des périphéries, nous aide à convertir notre regard et à prendre soin des personnes rejetées et marginalisées dans la société. A vous tous, ma Bénédiction !

Je salue les pèlerins et visiteurs anglophones qui participent à l’audience d’aujourd’hui, en particulier les groupes des Pays-Bas, du Danemark et des États-Unis d’Amérique. En ce mois de novembre, prions pour nos proches décédés, et pour tous ceux qui sont morts, que le Seigneur dans sa miséricorde les accueille dans le Royaume des cieux. Sur vous tous et vos familles, j’invoque la joie et la paix du Christ. Que Dieu vous bénisse!

Chers frères et sœurs germanophones, toujours et dans tous les besoins de notre temps et de notre vie, nous pouvons nous tourner vers Saint Joseph. À son exemple, nous voulons faire entièrement confiance à Dieu et en même temps apporter notre contribution humble et obéissante au plan divin de salut.

Je salue cordialement les pèlerins hispanophones. Aujourd’hui, d’une manière particulière, je souhaite que mon message s’adresse à tous les hommes et femmes qui vivent dans les périphéries les plus oubliées et qui vivent des situations de marginalité. Que saint Joseph vous protège, n’oubliez pas de vous tourner vers lui en tout temps avec confiance et amour filial. Que Dieu te bénisse. Merci beaucoup.

Je salue cordialement les pèlerins lusophones. Je vous invite à demander l’intercession de saint Joseph afin que notre confiance dans les desseins aimants de la Divine Providence grandisse et que nous aimions davantage ceux que le monde rejette et laisse de côté. Que Dieu vous bénisse!

Je salue les fidèles arabophones. Nous demandons à saint Joseph, qui vient des banlieues, de nous aider à convertir notre regard et à préférer ce que le monde rejette et met en marge. Et vous qui vivez dans les périphéries géographiques les plus oubliées du monde ou qui vivez des situations de marginalisation existentielle, puissiez-vous trouver en Saint Joseph le témoin et le protecteur vers lequel vous tourner. Que le Seigneur vous bénisse tous et vous protège toujours de tout mal !

Je salue cordialement les pèlerins polonais. Saint Joseph, Gardien de l’Église, est un homme de foi profonde, courageux et humble. En cette période marquée par une crise mondiale et la perte des valeurs, invoquons-le pour nous apprendre à voir ce que le monde met en marge et rejette. Son intercession nous aide à être sensibles aux autres. Je vous bénis de tout cœur.

________________________________

APPELS

Demain, en Italie, la première journée nationale de prière pour les victimes et les survivants d’abus est célébrée, promue par la Conférence épiscopale. J’espère que cette initiative pourra être une occasion de réflexion, de sensibilisation et de prière pour soutenir les chemins de rétablissement humain et spirituel des victimes. C’est le devoir essentiel de ceux qui ont une certaine responsabilité éducative dans la famille, dans la paroisse, à l’école, dans les lieux récréatifs et sportifs, de protéger et de respecter les adolescents et les enfants qui leur sont confiés, car c’est précisément dans ces lieux que la plupart des abus se produisent.

* * *

Mes pensées vont aux travailleurs de Borgo Valbelluna et de la région, inquiets pour leur futur travail. Face à leurs problèmes lancinants, je me joins aux évêques et curés de la région pour leur exprimer ma proximité.

Je lance un appel du fond du cœur pour que dans cette situation, ainsi que dans d’autres situations similaires qui mettent de nombreuses familles en difficulté, la logique du profit ne prévale pas, mais celle du partage juste et solidaire. La personne et sa dignité doivent toujours être placées au centre de chaque problématique professionnelle ; quand le pain ne se gagne pas, la dignité se perd ! Nous devons beaucoup prier pour ces personnes.

__________________________________

Je souhaite une cordiale bienvenue aux pèlerins de langue italienne. En particulier, je salue les participants à la Conférence du Lien des Sanctuaires Nationaux, le groupe de la Policlinico San Matteo de Pavie et les fidèles de Sant’Elpidio a Mare. Je vous encourage à adhérer avec joie à la volonté de Dieu, en vous confiant à la protection maternelle de la Vierge Marie.

Enfin, comme d’habitude, mes pensées vont aux personnes âgées, aux malades, aux jeunes et aux jeunes mariés. La liturgie d’aujourd’hui commémore sainte Élisabeth de Hongrie, femme de foi et de charité ardente. Que l’exemple et l’intercession de cet illustre saint de la charité aident chacun de vous à vivre une vie vertueuse, en allant à la rencontre des pauvres et des nécessiteux avec un esprit ouvert.

Ma bénédiction à vous tous.


Copyright © Dicastero per la Comunicazione – Libreria Editrice Vaticana

Le cri des pauvres et de la terre

Le cri des pauvres et de la terre.

Fonder sa vie sur la Parole de Dieu, ce n’est donc pas sortir de l’histoire, c’est s’immerger dans les réalités terrestres pour les solidifier, les transformer avec amour, en leur imprimant le signe de l’éternité, le signe de Dieu, a rappelé le Pape François, et, après la prière mariale de l’Angélus,  les grands défis partagés par les personnes les plus fragiles et les urgences environnementales, lançant un appel aux grands de la terre à agir immédiatement.

PAPE FRANÇOIS

ANGÉLUS

Place Saint-Pierre
Dimanche 14 novembre 2021

_______________________________

Chers frères et sœurs, bonjour !

Le passage évangélique de la liturgie d’aujourd’hui s’ouvre sur une phrase de Jésus qui laisse stupéfait : « Le soleil s’obscurcira, la lune ne donnera plus sa lumière, les étoiles tomberont du ciel » (Mc 13, 24-25).

Mais comment, même le Seigneur commence à faire du catastrophisme ? Non, ce n’est certainement pas son intention. Il veut que nous comprenions que tout dans ce monde, tôt ou tard, passe. Même le soleil, la lune et les étoiles qui forment le « firmament » – un mot qui indique « fermeté », « stabilité » – sont destinés à passer.

*

À la fin, cependant, Jésus dit ce qui ne s’effondre pas : « Le ciel et la terre passeront – dit-il – mais mes paroles ne passeront pas » (v. 31). Les paroles du Seigneur ne passent pas. Il établit une distinction entre les avant-dernières choses, qui passent, et les dernières choses, qui restent.

C’est un message pour nous, pour nous guider dans nos choix de vie importants, pour nous guider sur ce qu’il vaut la peine d’investir dans la vie. A propos de ce qui est transitoire ou des paroles du Seigneur, qui restent pour toujours ? Évidemment à propos de ceux-ci. Mais ce n’est pas facile.

En effet, les choses qui tombent sous nos sens et nous donnent immédiatement satisfaction nous attirent, tandis que les paroles du Seigneur, bien que belles, dépassent l’immédiat et demandent de la patience. Nous sommes tentés de nous accrocher à ce que nous voyons et touchons et cela nous semble plus sûr.

C’est humain, c’est la tentation. Mais c’est une tromperie, car « le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront pas ». Alors voici l’invitation : ne construisez pas la vie sur le sable. Lorsque vous construisez une maison, vous creusez profondément et posez des fondations solides.

Seul un imbécile dirait que c’est de l’argent jeté pour quelque chose qui ne peut pas être vu. Le disciple fidèle, pour Jésus, est celui qui fonde la vie sur le roc, qui est sa Parole qui ne passe pas (cf. Mt 7, 24-27), sur la fermeté de la parole de Jésus : c’est le fondement de la vie que Jésus veut de nous, et cela ne passera pas.

*

Et maintenant la question – toujours, quand on lit la Parole de Dieu, on se pose des questions -, demandons-nous : quel est le centre, quel est le cœur battant de la Parole de Dieu ? Qu’est-ce qui, en somme, donne de la solidité à la vie et ne finira jamais ? nous dit saint Paul.

Le centre même, le cœur qui bat, celui qui donne la solidité, c’est la charité : « La charité ne finira jamais » (1 Co 13, 8), dit saint Paul, c’est-à-dire l’amour. Ceux qui font le bien investissent pour l’éternité.

Quand nous voyons une personne généreuse et serviable, douce, patiente, qui n’est pas envieuse, qui ne bavarde pas, ne se vante pas, ne se gonfle pas d’orgueil, ne manque pas de respect (cf. 1 Co 13, 4-7), c’est une personne qui construit le paradis sur terre.

Peut-être qu’il n’aura pas de visibilité, qu’il ne fera pas carrière, qu’il ne fera pas la une des journaux, mais ce qu’il fait ne sera pas perdu. Parce que le bien n’est jamais perdu, le bien reste pour toujours.

*

Et nous, frères et sœurs, demandons-nous : en quoi investissons-nous notre vie ? Sur des choses qui passent, comme l’argent, la réussite, l’apparence, le bien-être physique ? De ces choses, nous n’apporterons rien.

Sommes-nous attachés aux choses terrestres, comme si nous devions vivre ici pour toujours ? Tant que nous sommes jeunes, en bonne santé, tout va bien, mais quand vient le temps de partir, nous devons tout quitter.

La Parole de Dieu nous avertit aujourd’hui : la scène de ce monde passe. Et seul l’amour restera. Fonder sa vie sur la Parole de Dieu, ce n’est donc pas sortir de l’histoire, c’est s’immerger dans les réalités terrestres pour les solidifier, les transformer avec amour, en leur imprimant le signe de l’éternité, le signe de Dieu.

Quand je ne sais pas quoi faire, comment faire un choix définitif, un choix important, un choix qui implique l’amour de Jésus, que dois-je faire ? Avant de décider, imaginons-nous debout devant Jésus, comme à la fin de la vie, devant celui qui est amour.

Et en y pensant, en sa présence, au seuil de l’éternité, nous prenons la décision pour aujourd’hui. Il faut donc décider : toujours regarder l’éternité, regarder Jésus. Ce n’est peut-être pas le plus facile, ce n’est peut-être pas le plus immédiat, mais ce sera le bon, c’est sûr (cf. saint Ignace de Loyola, Exercices spirituels, 187).

Que Notre Dame nous aide à faire les choix importants de la vie comme elle l’a fait : selon l’amour, selon Dieu.

___________________________________

Après l’Angélus

Chers frères et sœurs,

nous célébrons aujourd’hui la V Journée mondiale des pauvres, née comme le fruit du Jubilé de la Miséricorde. Le thème de cette année est la parole de Jésus « Tu as toujours les pauvres avec toi » (14,7). Et c’est vrai : l’humanité progresse, se développe, mais les pauvres sont toujours avec nous, il y en a toujours, et le Christ est présent en eux, le Christ est présent dans les pauvres.

Avant-hier, à Assise, nous avons vécu un moment fort de témoignage et de prière, que je vous invite à reprendre, cela vous fera du bien. Et je suis reconnaissant pour les nombreuses initiatives de solidarité qui ont été organisées dans les diocèses et les paroisses du monde entier.

*

Le cri des pauvres, combiné au cri de la Terre, a retenti ces derniers jours lors du sommet des Nations Unies sur le changement climatique COP26, à Glasgow. J’encourage ceux qui ont des responsabilités politiques et économiques et agissent immédiatement avec courage et clairvoyance ; en même temps, j’invite toutes les personnes de bonne volonté à exercer une citoyenneté active pour le soin de la maison commune.

A cet effet, aujourd’hui, Journée mondiale des pauvres, les inscriptions sont ouvertes sur la plateforme Laudato si’, qui promeut l’écologie intégrale.

*

Aujourd’hui, c’est aussi la Journée mondiale du diabète, une maladie chronique qui touche de nombreuses personnes, notamment des jeunes et des enfants. Je prie pour eux tous et pour ceux qui partagent la fatigue au quotidien, ainsi que pour les agents de santé et les bénévoles qui les assistent.

Et maintenant, je vous salue tous, fidèles de Rome et pèlerins de divers pays. J’y vois tellement de drapeaux… Notamment ceux d’Espagne et de Pologne. Je salue le groupe scout de Palestrina et les fidèles de la paroisse de San Timoteo à Rome et de la paroisse de Bozzolo.

Je souhaite à tous un bon dimanche. Et s’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi. Bon déjeuner et au revoir !


Copyright © Dicastero per la Comunicazione – Libreria Editrice Vaticana

Texte traduit et présenté par l’Association de la Médaille Miraculeuse

Les douleurs d’aujourd’hui et l’espérance de demain

Les douleurs d’aujourd’hui et l’espérance de demain

Proximité, compassion et tendresse doivent guider l’attitude des chrétiens envers les pauvres. Deux jours après sa rencontre avec 500 pauvres à Assise, le Pape François a présidé ce matin la messe à la basilique Saint-Pierre à l’occasion de la 5e Journée mondiale des pauvres. Dans son homélie, il a relié «les souffrances d’aujourd’hui» et «l’espérance du lendemain», dans la perspective de la rencontre avec Jésus.

JOURNÉE MONDIALE DES PAUVRES

SAINTE MESSE

HOMÉLIE DU SAINT-PÈRE FRANÇOIS

Basilique Saint-Pierre
XXXIIIe dimanche du temps ordinaire, 14 novembre 2021

________________________________________________

Les images utilisées par Jésus, dans la première partie de l’Évangile d’aujourd’hui, laissent consterner : le soleil qui s’obscurcit, la lune qui n’éclaire plus, les étoiles qui tombent et les puissances du ciel bouleversées (cf. Mc 13, 24- 25).

Peu de temps après, cependant, le Seigneur nous ouvre à l’espérance : précisément dans ce moment de ténèbres totales, le Fils de l’homme viendra (cf. v. 26) ; et dans le présent nous pouvons déjà contempler les signes de sa venue, comme quand nous voyons un figuier qui commence à mettre ses feuilles parce que l’été est proche (cf. v. 28).

Cet évangile nous aide ainsi à lire l’histoire en saisissant deux aspects : les douleurs d’aujourd’hui et l’espérance de demain. D’une part, toutes les contradictions douloureuses dans lesquelles la réalité humaine reste plongée de tout temps sont évoquées ; d’autre part, il y a l’avenir du salut qui l’attend, c’est-à-dire la rencontre avec le Seigneur qui vient nous libérer de tout mal. Nous regardons ces deux aspects avec le regard de Jésus.

Le premier aspect : la douleur d’aujourd’hui. Nous sommes dans une histoire marquée par les tribulations, la violence, la souffrance et les injustices, en attendant une libération qui ne semble jamais venir. Ce sont surtout les pauvres, les maillons les plus fragiles de la chaîne, qui sont blessés, opprimés et parfois écrasés.

La Journée mondiale des pauvres, que nous célébrons, nous demande de ne pas nous détourner, de ne pas avoir peur de regarder de près la souffrance des plus faibles, pour qui l’Évangile d’aujourd’hui est très pertinent : le soleil de leur vie. obscurcie par la solitude, la lune de leurs attentes s’éteint ; les stars de leurs rêves sont tombées dans la résignation et c’est leur existence même qui est bouleversée.

Tout cela à cause de la misère à laquelle ils sont souvent contraints, victimes de l’injustice et de l’inégalité d’une société du jetable, qui court vite sans les voir et les abandonne sans scrupules à leur sort.

D’un autre côté, cependant, il y a le deuxième aspect : l’espoir de demain. Jésus veut nous ouvrir à l’espérance, nous arracher à l’angoisse et à la peur face à la douleur du monde. C’est pourquoi il affirme que, au moment où le soleil s’obscurcit et que tout semble tomber, il s’approche. Dans le gémissement de notre histoire douloureuse, il y a un avenir de salut qui commence à germer.

L’espoir de demain s’épanouit dans la douleur d’aujourd’hui. Oui, le salut de Dieu n’est pas seulement une promesse de l’au-delà, mais il grandit déjà dans notre histoire blessée – nous avons tous un cœur malade – il se fraie un chemin à travers les oppressions et les injustices du monde.

Au beau milieu du cri des pauvres, le Royaume de Dieu s’épanouit comme les tendres feuilles d’un arbre et conduit l’histoire au but, à la rencontre finale avec le Seigneur, le Roi de l’Univers qui nous libérera définitivement.

Demandons-nous à ce stade : qu’est-ce qui est exigé de nous chrétiens face à cette réalité ? Nous devons nourrir l’espoir de demain en guérissant la douleur d’aujourd’hui. Ils sont liés : si vous ne guérissez pas les douleurs d’aujourd’hui, vous n’aurez guère l’espoir de demain.

L’espérance qui vient de l’Évangile, en effet, ne consiste pas à attendre passivement que les choses s’améliorent demain, ce n’est pas possible, mais à concrétiser aujourd’hui la promesse de salut de Dieu, aujourd’hui, tous les jours.

L’espérance chrétienne n’est pas en effet l’optimisme bienheureux, au contraire, je dirais l’optimisme adolescent, de ceux qui espèrent que les choses vont changer et en attendant continuer à faire leur vie, mais c’est construire chaque jour, avec des gestes concrets, le Royaume d’amour, de justice et de fraternité que Jésus a inauguré.

L’espérance chrétienne, par exemple, n’a pas été semée par le Lévite et le prêtre qui sont passés devant cet homme blessé par des voleurs. Il a été semé par un étranger, par un Samaritain qui s’est arrêté et a fait le geste (cf. Lc 10, 30-35). Et aujourd’hui, c’est comme si l’Église nous disait : « Arrêtez et semez l’espérance dans la pauvreté. Approchez-vous des pauvres et semez l’espérance ».

L’espérance de cette personne, votre espérance et l’espérance de l’Église. Ceci nous est demandé : être, parmi les ruines quotidiennes du monde, d’infatigables bâtisseurs d’espérance ; être léger alors que le soleil s’assombrit ; être témoins de compassion tandis que la distraction règne autour ; être amoureux et attentifs dans l’indifférence généralisée.

Témoins de compassion. Nous ne pourrons jamais faire le bien sans passer par la compassion. Tout au plus ferons-nous de bonnes choses, mais qui ne touchent pas à la voie chrétienne parce qu’elles ne touchent pas le cœur. Ce qui nous fait toucher le cœur, c’est la compassion : on s’approche, on ressent de la compassion et on fait des gestes de tendresse. Juste le style de Dieu : proximité, compassion et tendresse. C’est ce qui nous est demandé aujourd’hui.

Récemment, je me suis rappelé ce qu’un évêque proche des pauvres et des pauvres d’esprit lui-même, Don Tonino Bello, répétait : « Nous ne pouvons pas nous limiter à l’espérance, nous devons organiser l’espérance».

Si notre espérance ne se traduit pas par des choix concrets et des gestes d’attention, de justice, de solidarité, de souci de la maison commune, les souffrances des pauvres ne peuvent être soulagées, l’économie du gaspillage qui les oblige à vivre en marge ne peut être convertie, leurs attentes ne pourra plus prospérer.

C’est à nous, surtout à nous chrétiens, d’organiser l’espérance – belle cette expression de Tonino Bello : organiser l’espérance -, de la traduire dans la vie concrète de chaque jour, dans les relations humaines, dans l’engagement social et politique.

Cela me fait penser au travail que font tant de chrétiens avec les œuvres de charité, l’œuvre de charité apostolique… Que faites-vous là-bas ? L’espoir s’organise. Tu ne donnes pas une pièce, non, l’espoir s’organise. C’est une dynamique que l’Église nous demande aujourd’hui.

Il y a une image de l’espérance que Jésus nous offre aujourd’hui. C’est simple et indicatif à la fois : c’est l’image des feuilles du figuier, qui poussent silencieusement, signalant que l’été est proche. Et ces feuilles apparaissent, souligne Jésus, lorsque le rameau devient tendre (cf. Mc 13, 28).

Frères, sœurs, voici le mot qui fait germer l’espérance dans le monde et soulage la douleur des pauvres : tendresse. La compassion qui vous conduit à la tendresse. A nous de surmonter la clôture, la rigidité intérieure, qui est la tentation d’aujourd’hui, des « restaurationnistes » qui veulent une Église tout ordonnée, toute rigide : ce n’est pas de l’Esprit Saint. Et nous devons surmonter cela, et faire germer l’espoir dans cette rigidité.

Et c’est aussi à nous de vaincre la tentation de ne traiter que nos problèmes, de nous attendrir face aux drames du monde, d’avoir pitié de la douleur. Comme les feuilles de l’arbre, nous sommes appelés à absorber la pollution qui nous entoure et à la transformer en bien : nous n’avons pas besoin de parler de problèmes, de discuter, de nous scandaliser – nous savons tous comment faire – ; il faut imiter les feuilles, qui sans attirer l’attention tous les jours transforment l’air sale en air pur.

Jésus veut que nous soyons des « convertisseurs de bien »: des personnes qui, plongées dans l’air lourd que chacun respire, répondent au mal par le bien (cf. Rm 12, 21). Des gens qui agissent : ils rompent le pain avec les affamés, travaillent pour la justice, élèvent les pauvres et leur rendent leur dignité, comme l’a fait ce Samaritain.

C’est beau, c’est évangélique, une Église est jeune qui sort d’elle-même et, comme Jésus, annonce la bonne nouvelle aux pauvres (cf. Lc 4, 18). Je m’arrête sur cet adjectif, le dernier : une telle Église est jeune ; jeunes pour semer l’espoir.

C’est une Église prophétique, qui par sa présence dit au cœur perdu et aux abandonnés du monde : « Courage, le Seigneur est proche, pour vous aussi il y a un été qui vient au cœur de l’hiver. Même de ta douleur l’espoir peut renaître ».

Frères et sœurs, portons ce regard d’espérance au monde. Prenons-le avec tendresse aux pauvres, avec proximité, avec compassion, sans les juger – nous serons jugés -. Car là, avec eux, avec les pauvres est Jésus ; car là, en eux, il y a Jésus, qui nous attend.


Copyright © Dicastero per la Comunicazione – Libreria Editrice Vaticana

Texte traduit et présenté par l’Association de la Médaille Miraculeuse

site officiel en France