Tous les articles par P. Jean-Daniel Planchot

troisième journée du Pape au Chili

Ce sera la troisième messe au pied des Andes chiliennes. Une estrade aux couleurs du Saint-Siège a été montée à même le sable, à quelques mètres de l’Océan pacifique, sur la Playa Lobito, à 20 km d’Iquique. Cette messe est célébrée en l’honneur de la Sainte Patronne du Chili, la Vierge du Mont Carmel.

À cette occasion, une statue de la Vierge a été acheminée du sanctuaire le plus proche, celui de la Tirana, un petit village au milieu des montagnes. La statue est placée à la droite de l’autel. Le Pape déposera une couronne sur le front de Marie.

Couronnement de la Vierge de la Porte à Trujillo

Mais cette messe est également célébrée en l’honneur la fraternité pour l’intégration des peuples, car la province et, encore plus, le grand port et vaste zone franche qu’est la ville d’Iquique est une terre de brassage. Un habitant du dix est un immigré venu, souvent illégalement, des pays limitrophes, la Bolivie et le Pérou, mais également de Colombie, d’Haïti ou du Venezuela en crise.

En venant à Iquique, le Pape souhaite leur exprimer sa proximité et encourager plus de fraternité au sein de la société chilienne. Plus de 500 000 étrangers vivent actuellement au Chili en situation légale, soit 3% de la population.

Des fleurs en fer blanc

L’autel est orné de quelque 12 000 fleurs en fer blanc, une tradition à Iquique, où les habitants de la région récupèrent des boîtes de conserve et d’autres objets pour fabriquer des fleurs, des couronnes et des croix qu’ils disposent sur les tombes dans les cimetières..

Les fleurs, des roses et les œillets, sont faites de cannettes, peintes dans des tons dorés et cuivrés. Elles seront insérées dans 48 tableaux, remis ensuite aux institutions et aux paroisses en témoignage de la visite du Pape François dans la ville.

L’origine des fleurs en fer-blanc remonte à l’époque de l’exploitation du salpêtre, lorsque les Anglais, voyant que les fleurs naturelles ne duraient pas en raison de l’aridité du désert, fabriquèrent des fleurs artificielles en métal.

 Joie évangélique

Dans son homélie prononcée en espagnol, François s’est appuyé sur la dimension festive de l’Évangile, souvent vécue avec une intensité particulière en Amérique latine.

Il a délivré une méditation sur la joie évangélique, s’appuyant sur le récit des noces de Cana, alors qu’il venait justement de célébrer dans l’avion entre Santiago et Iquique le mariage d’une hôtesse et d’un steward qui lui avaient demandé de bénir leur couple, uni jusqu’alors seulement civilement.

«Le message de l’Évangile est source de joie.» Le Pape a fait de cette affirmation l’un des axes centraux de son pontificat, il l’a répété aujourd’hui devant les fidèles chiliens en les remerciant de «savoir vivre la foi et la vie dans un climat de fête». Reprenant des propos de Paul VI, il a salué ceux qui savent célébrer en chantant et en dansant «la paternité, la providence, la présence amoureuse et constante de Dieu».

Ces fidèles chiliens dont la ville se situe dans le désert d’Atacama parviennent à illustrer les paroles du prophète Isaïe : «Alors le désert deviendra un verger, et le verger sera pareil à une forêt». «Cette terre, gagnée par le désert le plus sec du monde, parvient à se parer pour la fête»,.

L’attention de Marie s’exprime encore aujourd’hui

Comme elle s’inquiétait pour les invités des noces de Cana qui n’avaient plus de vin, Marie s’inquiète de notre situation, elle «nous accompagne dans nos ennuis de famille inextricables, ceux-là mêmes qui semblent nous étouffer le cœur, afin de s’approcher des oreilles de Jésus et de lui dire : « regarde, ils n’ont plus de vin » ».

En écho à cette attention de Marie, le Pape François a invité les habitants d’Iquique à assumer une «hospitalité festive, car nous savons bien qu’il n’y a pas de joie chrétienne lorsque des portes se ferment : il n’y a pas de joie chrétienne lorsqu’on fait sentir aux autres qu’ils sont de trop ou qu’ils n’ont pas leur place.»

«Comme Marie à Cana, efforçons-nous d’apprendre à être attentifs sur nos places et dans nos villages et à reconnaître ceux dont la vie ‘‘prend l’eau’’ ; qui ont perdu, ou auxquels on a volé, les raisons de célébrer», a exhorté le Pape, dans une région marquée par la présence de nombreux travailleurs migrants précaires.

Héberger Dieu parmi nous

François a appelé à ce que Jésus «transforme nos communautés et nos cœurs en signe vivant de sa présence, qui est joyeuse et festive, car nous avons fait l’expérience que Dieu-est-avec-nous, parce que nous avons appris à l’héberger parmi nous. Joie et fête contagieuses qui nous conduisent à ne laisser personne hors de l’annonce de cette Bonne Nouvelle.»

Au terme de la messe, le Pape a adressé un mot de remerciement à toutes les personnes qui ont été impliquées dans ce séjour au Chili. «Je continue mon pèlerinage vers le Pérou. Peuple ami et frère de cette grande patrie dont nous sommes invités à prendre soin. Une patrie qui trouve sa beauté dans le visage multiforme de ses peuples».

Le Pape a demandé au Seigneur de regarder la foi du peuple chilien et de lui donner «l’unité et la paix». Il a également eu un petit mot de remerciement pour ses compatriotes argentins venus le voir au Chili.

Une lettre de victimes de la dictature

Après la messe, deux victimes de la répression de Pinochet dans les années 70-80,  remettront une lettre au Pape. Et avant de partir pour le Pérou, le Saint-Père saluera des malades au sanctuaire de Notre Dame de Lourdes, toujours dans le nord chilien.

deuxième journée du Pape au Chili

Pour la deuxième journée de son voyage apostolique, le Pape François s’est envolé pour le sud du Chili, plus précisément dans la ville de Temuco en plein territoire mapuche. Les Mapuches sont des autochtones du sud de l’Amérique latine qui se battent pour récupérer leurs terres ancestrales depuis plus d’un siècle.

Ce mercredi 17 janvier, environ 400 000 personnes à Temuco ont assisté à la messe du Pape François à 10h30 heure chilienne. La ville se trouve dans la région d’Araucuna, dans le sud du Chili qui est une des plus pauvres du pays où vivent la majorité des Mapuches.

Ces derniers attendent avec impatience l’intervention du Saint-Père. Ils attendent beaucoup de la visite du Pape François, notamment de voir leurs revendications territoriales appuyées par le Souverain pontife.

Dans l’Araucuna, les Mapuches occupaient un vaste territoire à l’arrivée des conquistadors espagnols au Chili en 1541, mais en sont aujourd’hui en grande partie dépossédés. Ainsi, depuis plus d’un siècle, les autochtones exigent de l’État chilien, mais également de multinationales forestières et de grands propriétaires terriens de récupérer leurs terres ancestrales.

On estime que près de 90% de leur territoire leur a été enlevé, en vertu de normes administratives, par les gouvernements chiliens successifs ou, illégalement, par l’industrie du bois.

au sanctuaire de Maipu, la Vierge du Carmel, sainte patronne du Chili
au sanctuaire de Maipu, la Vierge du Carmel, sainte patronne du Chili

En fin d’après-midi ce mercredi 17 janvier, de retour à Santiago du Chili, le Pape François a rencontré plusieurs dizaines de milliers de jeunes, rassemblés au sanctuaire de Maipu, où est vénérée depuis 200 ans la Vierge du Carmel, la sainte patronne du Chili.

Dans un discours en partie improvisé, et dans une atmosphère très chaleureuse, le Pape a invité les jeunes à rester «connectés» au Seigneur, qui recharge les batteries d’une façon inépuisable.

«La foi provoque chez les jeunes des sentiments d’aventure qui invitent à passer par des paysages incroyables, jamais faciles, jamais tranquilles…» «Vous aimez les aventures et les défis» et «vous vous ennuyez quand vous n’avez pas de défis qui vous stimulent. Cela se voit clairement par exemple, chaque fois qu’arrive une catastrophe naturelle : vous avez une capacité énorme pour vous mobiliser, qui parle de la générosité de vos cœurs»,

Il faut aimer sa patrie comme on aime sa mère : le Pape a invité les jeunes Chiliens à assumer vis-à-vis de leur patrie une fierté d’ordre . Il les a aussi exhortés à refuser le cynisme des adultes. Être «spirituellement majeur», cela ne doit pas signifier se convertir au cynisme..

Le Pape François a évoqué la préparation du Synode sur la jeunesse qui se tiendra à l’automne prochain au Vatican. «L’Église doit avoir un visage jeune, plein de vie», s’est exclamé François, qui a rappelé que des jeunes d’autres croyances seront également impliqués dans ce Synode.

Rester connecté au Christ

Filant la métaphore du téléphone portable, le Pape François a insisté sur l’importance de savoir recharger sa batterie, car parfois, si nous perdons la connexion avec Jésus, «nous finissons par noyer nos idées, nos rêves, notre foi, et nous nous remplissons de mauvaise humeur».

Il faut se demander comment Jésus agirait à notre place, dans les lieux de notre vie quotidienne, par exemple face à des cas de harcèlement dont nous sommes témoins à l’école, ou au travail. Être chrétien, ce n’est pas seulement suivre un enseignement religieux, mais c’est chercher à vivre comme Jésus aurait vécu.

Reprenant une méditation d’un ancien archevêque de Santiago, le Pape François a invité à s’identifier aux personnages rencontrés par Jésus dans les Évangiles, en étant des jeunes samaritains qui n’abandonnent jamais un homme allongé sur le chemin, en étant comme «Zachée, qui transforme son cœur matérialiste en un cœur solidaire», ou encore comme la jeune Marie-Madeleine, «en recherche passionnée de l’amour, qui rencontre seulement en Jésus les réponses dont elle a besoin».

Même au milieu du désert, du chemin, de l’aventure, il y aura toujours une «connexion», il y aura un «chargeur». Nous ne serons pas seuls. Nous bénéficierons toujours de la compagnie de Jésus, de sa Mère et d’une communauté.

la première journée du Pape à Santiago

mi paz les doy - ma paix, le la donne
mi paz les doy – ma paix, le la donne

À la prison pour femmes de Santiago, le plaidoyer du Pape pour la dignité

Devant 600 détenues du centre pénitencier de Santiago dédié à San Joaquin, le Pape s’est livré à un vibrant plaidoyer pour la dignité humaine et pour la réinsertion des populations carcérales, qui «privées de liberté», ne doivent pas pour autant «renoncer aux rêves ni aux espérances». «Être privé de liberté, ce n’est pas la même chose que d’être privé de dignité».

Le Saint-Père a articulé son discours autour de trois mots-clés porteurs d’espoir: «mères, enfants et fleurs». Ce triptyque a d’abord permis au Saint-Père d’évoquer longuement cette dignité que doivent garder à l’esprit les détenues afin de ne pas sombrer dans la résignation ou le désespoir: «La dignité on n’y touche pas, la dignité on la caresse, personne ne peut en être privé».

Ainsi survient la nécessité de lutter «contre tout type de carcan, d’étiquettes selon lesquels on ne peut pas changer, ou que cela ne vaut pas la peine, ou que tout revient au même. Non ! Tout ne revient pas au même».

Le Pape pleure avec un groupe de victimes d’abus sexuels au Chili

Le Pape François a rencontré des victimes d’abus sexuels commis par des membres du clergé, ce mardi 16 janvier, à la nonciature à Santiago du Chili.

La rencontre s’est déroulée dans un cadre strictement privé. Personne n’était présent, hormis le Pape et un petit groupe» de victimes. Ils se sont retrouvés à la nonciature de Santiago, après le déjeuner. Il fallait permettre aux personnes abusées par des prêtres de raconter leur souffrance. Le Pape les a écoutées, il a prié et pleuré avec elles.

Plus tôt à la Moneda, le palais présidentiel, devant les autorités chiliennes, des membres de la société civile et les corps diplomatique, le Pape a exprimé «sa douleur et sa honte (…) face au mal irréparable fait à des enfants par des ministres de l’Église». Il a dit vouloir s’unir à ses frères dans l’épiscopat, «car s’il est juste de demander pardon et de soutenir avec force les victimes, il nous faut en même temps nous engager pour que cela ne se reproduise pas.»

Dans l’après-midi, devant les séminaristes, prêtres et religieux, le Pape a de nouveau évoqué ce «grave et douloureux mal». François a évoqué avant tout la douleur des victimes et leurs familles «qui ont vu trahie la confiance qu’elles avaient placée dans les ministres de l’Église», et parlé de «la souffrance des communautés ecclésiales» sous le coup d’une «suspicion» générale. Il a appelé «les hommes et les femmes d’église à avoir le courage de demander pardon».

Le programme de vie du Pape pour l’Église chilienne

Quatrième moment fort de cette première journée du Pape François au Chili: la rencontre avec les prêtres, consacrés et les séminaristes, qui, venus en nombre, ont rempli la cathédrale de Santiago, réservant un accueil très chaleureux au Pape.

C’est un véritable programme de vie qu’a proposé le Pape au clergé, aux religieux et aux consacrés de l’Église chilienne. Pour ce faire, François s’est basé sur l’Évangile proclamé lors de la liturgie de la Parole, qui relate la pêche miraculeuse et l’apparition de Jésus ressuscité à ses disciples sur le lac de Tibériade (Jn 21, 1-19); un passage que le Pape a partagé en trois moments-clés et symboliques: Pierre/communauté abattue, Pierre/communauté bénéficiaire, et Pierre/communauté transfigurée, expliquant que l’expérience d’apôtre relève toujours d’un double aspect, personnel et communautaire.