Après un peu plus de deux heures de vol depuis Santiago, l’avion du Souverain pontife s’est posé sur la piste de l’aéroport international de Lima ce jeudi 18 janvier 2018, point de départ d’une visite de trois jours en terre péruvienne.
Accueilli par le président de la République, par l’archevêque de Lima, par l’évêque de Callao, ainsi que par le président de la conférence épiscopale du Pérou, l’archevêque de Ayacucho, le Saint-Père a ensuite rallié la nonciature apostolique dans le centre de Lima, où il doit passer trois nuits.
Aux abords de la nonciature, des centaines de personnes dont beaucoup de jeunes étaient rassemblés, agitant le drapeau jaune et blanc du Vatican et chantant l’hymne du voyage. Le Pape a remercié les nombreuses personnes pour leur accueil chaleureux, a prié un Ave Maria et béni la foule.
L’Amazonie, première étape
Son voyage est entré dans le vif du sujet ce vendredi 19 janvier, puisqu’il était attendu dans l’Amazonie péruvienne, à Puerto Maldonado, près de la frontière avec la Bolivien pour aller à la rencontre des peuples indigènes qui vivent dans des conditions très difficiles, marquées par la destruction de la plus grande forêt de la planète.
Les habitants de Puerto Maldonado ont réservé un accueil triomphal et chaleureux au Pape François ; avec eux, de nombreuses personnes venues des recoins de l’Amazonie péruvienne, mais aussi des pays voisins comme le Brésil ou la Bolivie.
«Quelle belle image de l’Église qui ne connaît pas de frontières et dans laquelle tous les peuples peuvent trouver place !» leur a dit le Pape, qui a rappelé la beauté du nom de cette région, dont Puerto Maldonado est la capitale: «Madre de Dios», «Mère de Dieu».
Et c’est justement l’exemple de la Vierge Marie que le Pape a proposé à ces populations. Marie, un témoin à regarder, mais surtout une mère. «Et s’il y a une mère, il y a des enfants, il y a une famille, une communauté» ; «cette terre n’est pas orpheline ! Elle a une mère.»
La terre et les hommes, victimes de la culture du rejet
Or, «il est regrettable de constater comment certains veulent éteindre cette certitude et transformer Mère de Dieu en une terre anonyme, sans enfants, une terre stérile, facile à vendre et à exploiter».
Une nouvelle fois, le Pape a mentionné cette culture du rejet, laquelle, non contente d’écarter, progresse, «faisant taire, en ignorant et en écartant tout ce qui ne sert pas ses intérêts».
«C’est une culture anonyme, sans liens, sans visages», «qui ne veut que consommer», et dont les effets s’avèrent particulièrement prégnants sous ses latitudes tropicales. «La terre est traitée dans cette logique: les forêts, les fleuves et les ravins sont usés, utilisés jusqu’à la dernière ressource et ensuite abandonnés, inoccupés et inutiles», à l’instar des personnes qui la peuplent.
Le Pape a repris le cantique de Saint François d’Assise, «Loué sois-tu», titre de son encyclique sur la sauvegarde de la maison commune. « Loué sois-tu Seigneur pour cette œuvre merveilleuse de tes peuples amazoniens et pour toute la biodiversité que ces terres renferment. ».
Mais une nouvelle fois il a déploré les nombreuses meurtrissures infligées à cette terre luxuriante: «les peuples autochtones amazoniens n’ont probablement jamais été aussi menacés sur leurs territoires qu’ils le sont présentement.»
«Nous devons rompre avec le paradigme historique qui considère l’Amazonie comme une réserve inépuisable des États sans prendre en compte ses populations » «La défense de la terre n’a d’autre finalité que la défense de la vie. »
«Pour nous, il est nécessaire que les peuples autochtones modèlent culturellement les Églises locales amazoniennes.» «C’est avec ses évêques et ses missionnaires que vous pourrez façonner une Église avec un visage amazonien et une Église avec un visage indigène.»
Non à la culture machiste
Puis le Pape François a évoqué le thème douloureux de la traite des personnes, assimilable, selon lui, à de l’esclavage. Et les exemples de cette exploitation mortifère sont légion sur cette terre, pourtant confiée à la Mère de Dieu.
Le Pape a notamment mentionné les violences et outrages infligés aux femmes, -surtout adolescentes-, fustigeant avec force une «culture machiste qui ne prend pas en compte le rôle important de la femme dans nos communautés.»
Les multiples possibilités offertes par l’Amazonie ont attiré de nombreuses personnes en quête d’une vie meilleure, séduites par «l’éclat prometteur de l’exploitation de l’or». Mais l’or peut devenir un «faux dieu qui exige des sacrifices humains.»
Aimer la terre, en prendre soin comme d’un trésor
Pour affronter ces situations problématiques, le Pape a donc encouragé les habitants de cette région à s’organiser en mouvements et communautés ecclésiales.
«Notre Père regarde les personnes concrètes, avec leurs visages et leurs histoires. Toutes les communautés chrétiennes doivent être le reflet de ce regard, de cette présence qui crée des liens, qui crée une famille et une communauté. Des communautés, où chacun se sent partie prenante, se sent appelé par son nom et encouragé à être artisan d’une vie pour les autres, sont une manière de rendre visible le Royaume des cieux. »
«Aimez cette terre (…)! Flairez-la, écoutez-la, émerveillez-vous en! Tombez amoureux de cette Mère de Dieu, engagez-vous et sauvegardez-la !» Cette terre est comme d’un trésor, «à faire prospérer et à transmettre à vos enfants».
L’ode du Pape François au «précieux trésor qu’est l’enfance»
le Pape François a visité le foyer pour enfants «Le Petit Prince», à Puerto Maldonado, au cœur de l’Amazonie péruvienne, délivrant un lumineux message d’espoir.
«L’Enfant Jésus est notre trésor, et vous, les enfants, vous êtes son reflet. Vous êtes aussi notre trésor, le trésor de nous tous, le trésor le plus précieux que nous devons protéger.»
«Chers enfants du Foyer Le Petit Prince, et vous les jeunes des autres maisons d’accueil, je sais que certains d’entre vous sont parfois tristes la nuit. Je sais que vous manquent le papa ou la maman qui ne sont pas là, et je sais aussi qu’il y a des blessures qui vous font beaucoup souffrir.»
«Les enfants ont besoin de regarder en avant et de trouver des modèles positifs : ‘‘je veux être comme lui ou comme elle’’. Tout ce que vous les jeunes pouvez faire, comme venir jouer avec eux, passer du temps avec eux, est important».
«Soyez pour eux, comme disait le Petit Prince: les petites étoiles qui éclairent dans la nuit (cf. Antoine de Saint-Exupéry, XXIV; XXVI).»
«Ne renoncez pas à l’héritage de vos grands-parents, à votre vie ni à vos rêves» «Nous avons besoin de vous comme moteur, qui impulse.» Le Pape leur recommande «d’écouter leurs grands-parents, de valoriser leurs traditions, de ne pas réfréner leur curiosité,… de chercher leurs racines, en même temps qu’ouvrir leurs yeux à la nouveauté.»
«Vous apportez à l’humanité une alternative de vie vraie(…), un style de vie basé sur la sauvegarde et non sur la destruction de tout ce qui s’oppose à notre cupidité», a conclu le Saint-Père, remerciant chaleureusement et personnellement le père Xavier Arbex de Morsier, pour avoir crée ce lieu de tendresse et de famille.