Tous les articles par P. Jean-Daniel Planchot

Ne perdons pas la capacité de nous sentir aimés

La parabole des invités à la noce et du grand festin
La parabole des invités à la noce et du grand festin

Dans l’Évangile de ce jour (Lc 14,15-24), Jésus est interpellé par un homme qui s’exclame: «Heureux celui qui participera au repas dans le royaume de Dieu!» Le Seigneur lui répond alors par une parabole, conseillant à qui organise un repas d’inviter ceux qui ne peuvent donner de contrepartie.

Dans cette parabole, un homme donne un grand dîner et y invite beaucoup de gens. Mais les premiers invités refusent d’y aller car ils se désintéressent du dîner, des gens, de l’invitation du Seigneur : ils sont pris par leurs propres intérêts, plus grands que l’invitation. Certains évoquent des paires de bœufs à essayer, un champ à aller voir, un mariage récent.

Ils se demandent ce qu’ils ont à y gagner. Ils sont «affairés», attachés à leurs intérêts au point d’un «esclavage de l’Esprit», c’est-à-dire d’être «incapables de comprendre la gratuité de l’invitation».

«Si on ne comprend pas la gratuité de l’invitation de Dieu, alors on ne comprend rien. L’initiative de Dieu est toujours gratuite. Mais pour aller à ce banquet, combien faut-il payer? Mais le billet d’entrée est d’être malade, d’être pauvre, d’être pécheur! Voilà ce qui te laisse passer, voilà le billet d’entrée: être dans le besoin, que ce soit un besoin corporel ou un besoin de l’âme. Mais pour la guérison, avoir besoin d’amour».

Accueillir la gratuité «sans limite» de Dieu

Il y a donc deux sortes de comportements. D’un côté celui de Dieu, qui ne fait rien payer et dit ensuite aux serviteurs de faire venir des pauvres, des estropiés, des bons et des méchants. Il s’agit d’une gratuité «sans limites», Dieu «reçoit tout le monde».

D’un autre côté, il y a l’attitude des premiers invités, qui à l’inverse ne comprennent pas la gratuité. Ils sont comme le frère ainé de la parabole du fils prodigue, qui ne veut pas aller au banquet organisé par son père pour son frère qui était parti: il ne comprend pas.

«’Mais il a dépensé tout l’argent, il a dépensé l’héritage en vices, en péchés, et toi tu lui organises une fête ?» Celui-ci ne comprend pas la gratuité du salut, pense que le salut et le fruit du ‘je paye et tu me sauves’. Je paye avec ça, je paye avec ça, je paye avec ça… Non : le salut est gratuit! Et si tu n’entres pas dans cette dynamique de la gratuité, tu n’as rien compris. Le salut est un don de Dieu auquel on répond par un autre don, le don de mon cœur.»

«Le salut ne s’achète pas»

Le Seigneur «ne demande rien en échange»: «juste de l’amour, de la fidélité, tout comme lui est amour et fidèle», «le salut ne s’achète pas». «Heureux celui qui participera au repas dans le royaume de Dieu» : voilà le salut. À l’inverse, quand on leur parle de dons, ils pensent tout de suite à la «contrepartie» : «je vais faire ça», et lui, ensuite, «en une autre occasion, il me le rendra».

Ceux qui ne sont pas prêts à venir au banquet, «se sentent en sécurité», «sauvés par leurs propres moyens, loin du banquet». «Ils ont perdu le sens de la gratuité, le sens de l’amour. Ils ont perdu une chose plus grande et plus belle encore et c’est très mauvais: ils ont perdu la capacité de se sentir aimer.»

«Et quand tu perds, non pas la capacité d’aimer, qui se récupère, mais la capacité de te sentir aimé, il n’y a plus d’espérances, tu as tout perdu. Cela fait penser à ce qui est écrit sur la porte de l’enfer de Dante:  ‘Laissez l’espérance’, tu as tout perdu»

Prions le Seigneur pour qu’il nous garde de perdre la capacité de se sentir aimés.

Le Pape François, durant la messe ce mardi 7 novembre 2017 en la chapelle de la maison Sainte-Marthe au Vatican
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Chacun de nous est un élu de Dieu

Abraham et Sarah
Abraham et Sarah

Lors de la messe célébrée ce lundi 6 novembre 2017, en la chapelle de la maison Sainte-Marthe au Vatican, le Pape François a développé une réflexion sur «les dons gratuits de Dieu et son appel sans repentance» en prenant appui sur la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains. Quand Dieu nous fait un don, ce don est irrévocable : il ne nous le donne pas aujourd’hui pour nous l’ôter demain.

Quand Dieu appelle, cet appel perdure toute la vie. Les dons et les appels du Seigneur à son peuple dans l’histoire du Salut sont au nombre de trois: «le don de l’élection, de la promesse et de l’alliance». «Tous sont irrévocables», car le Seigneur est fidèle. Ce fut ainsi pour Abraham et il en est de même pour nous.

«Chacun d’entre nous est un élu, un élu de Dieu. Et chacun de nous fait des alliances avec le Seigneur. Chacun de nous peut les faire, peut ne pas les faire, chacun de nous est libre. Mais c’est un fait. Et cela comporte aussi une question: comment est-ce que je ressens l’élection, est-ce que je me sens chrétien par hasard ? Comment est-ce que je vis la promesse, une promesse de Salut dans mon cheminement, et comment suis-je fidèle à l’alliance ? Comment Lui est-il fidèle ?»

Ainsi, face à la «fidélité même» qui est Dieu, il ne nous reste plus qu’à nous interroger : Sentons-nous Sa «caresse», sentons-nous qu’Il «prend soin» de nous, sentons-nous qu’«Il nous cherche» quand nous nous éloignons ? L’apôtre Paul revient à «quatre reprises» sur les paroles «désobéissance» et «miséricorde». Là où l’une est présente, l’autre l’est également.

«Cela signifie que dans le cheminement de l’élection, vers la promesse et l’alliance il y aura des péchés, il y aura la désobéissance, mais face à cette désobéissance, il y a toujours la miséricorde. C’est comme la dynamique de notre cheminement vers la maturité : il y a toujours de la miséricorde, car le Seigneur est fidèle, Il ne révoque jamais ses dons parce que face à nos faiblesses, à nos péchés il y a toujours la miséricorde, et quand Paul parvient à cette réflexion, il fait un pas de plus: non pas dans l’explication, mais dans l’adoration».

Adoration et louange silencieuse donc, face à ce «mystère de la désobéissance et de la miséricorde qui nous rend libres», et face à «cette beauté des dons irrévocables que sont l’élection, la promesse et l’alliance». Réfléchissons à «notre élection, à la promesse faite par le Seigneur, à la façon dont nous vivons l’alliance avec Lui», mais aussi à la façon dont nous nous laissons imprégner de Sa miséricorde.

 

Avoir horreur de l’orgueil et de la vanité

Avoir « horreur de l’orgueil et de la vanité »,
c’est l’invitation du pape François à l’angélus de midi ce 5 novembre 2017,  place Saint-Pierre à Rome.

PAPE FRANÇOIS

ANGÉLUS

Place Saint Pierre
Dimanche 5 novembre 2017


Chers frères et sœurs, bonjour !

Jésus critique les scribes et les pharisiens
Jésus critique les scribes et les pharisiens

L’Évangile d’aujourd’hui (Mt 23, 1-12) se déroule dans les derniers jours de la vie de Jésus à Jérusalem; des jours pleins d’attentes et même de tensions. D’une part, Jésus adresse des critiques sévères aux scribes et aux pharisiens, d’autre part il laisse des consignes importantes aux chrétiens de tous les temps, à nous donc aussi.

Il dit à la foule: « Sur la chaire de Moïse enseignent les scribes et les pharisiens . Pratiquez et observez donc tout ce qu’ils disent. » Ça signifie qu’ils ont l’autorité d’enseigner ce qui est conforme à la Loi de Dieu. Cependant immédiatement après, Jésus ajoute: « Mais n’agissez pas selon leurs œuvres, car ils disent et ne font pas » (v. 2-3).

Frères et sœurs, un défaut fréquent chez ceux qui ont autorité, soit civile soit ecclésiastique, est d’exiger des autres des choses, même justes, qu’ils ne mettent pas en pratique en premier. Ils mènent une double vie. Jésus dit: «Ils lient des fardeaux pesants et difficiles sur les épaules des gens, mais ils ne veulent pas les remuer même avec un doigt» (v. 4).

Cette attitude est un mauvais exercice de l’autorité, qui devrait plutôt avoir sa force première par le bon exemple. L’autorité provient d’un bon exemple, pour aider les autres à pratiquer ce qui est juste et approprié, en les soutenant dans les épreuves rencontrées sur le chemin du bien.

L’autorité est une aide, mais si elle est mal exercée , elle devient oppressante, elle ne laisse pas les gens grandir, crée un climat de méfiance et d’hostilité, et conduit même à la corruption.

Jésus dénonce ouvertement certains comportements négatifs des scribes et des pharisiens: « Ils aiment les places d’honneur dans les repas, les premières places dans les synagogues et les salutations sur les places publiques » (vv.6-7). C’est une tentation qui correspond à la prétention humaine et qu’il n’est pas toujours facile de vaincre. C’est l’attitude de vivre seulement pour l’apparence.

Puis Jésus donne les consignes à ses disciples: « Ne vous faites pas appeler « rabbis », parce qu’un seul est votre Maître et que vous êtes tous frères. […] Et ne vous faites pas appeler « maîtres », parce qu’un seul est votre maître, le Christ. Le plus grand parmi vous sera votre serviteur « (vv 8-11).

Nous, disciples de Jésus, nous ne devons pas chercher des titres d’honneur, d’autorité ou de suprématie. Je vous dis que cela personnellement me désole de voir des gens qui vivent psychologiquement en courant derrière la vanité des honneurs. Nous, les disciples de Jésus, ne devons pas le faire, car il doit y avoir une attitude simple et fraternelle parmi nous.

Nous sommes tous frères et nous ne devons en aucun cas accabler les autres et les regarder de haut. Nous sommes tous des frères. Si nous avons reçu de telles qualités du Père céleste, nous avons besoin de les mettre au service des autres, et non d’en profiter pour notre satisfaction et notre intérêt personnel.

Nous ne devons pas nous considérer comme supérieurs aux autres, la modestie est essentielle pour une existence qui veut être en conformité avec l’enseignement de Jésus, lui qui est doux et humble de cœur et est venu non pour être servi mais pour servir.

Que la Vierge Marie, « humble et élevée plus qu’aucune autre créature » (Dante, Le Paradis, XXXIII, 2), nous aide par son intercession maternelle, à fuir l’orgueil et la vanité, et à être doux et dociles à l’amour qui vient de Dieu, pour le service de nos frères et pour leur joie, qui sera aussi la nôtre.