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Le Pape aux Vincentiens : Conquérir le monde avec charité, concorde et disponibilité

Pour fêter les 400 ans du charisme de  Saint-Vincent-de-Paul, sur le thème « J’étais un étranger, et vous m’avez accueilli » (Mt 25,35, plus de onze mille personnes se sont retrouvées ce samedi 14 octobre place Saint-Pierre autour du Pape François.

Le Pape a reconnu que saint Vincent-de-Paul avait créé « un élan de charité qui dure dans les siècles » et a voulu partager avec l’assistance une réflexion sur trois verbes, importants pour l’esprit vincentien mais aussi pour la vie chrétienne en général : adorer, accueillir et aller.

« La prière est la boussole de tous les jours, c’est comme un manuel de vie », explique le Pape, précisant ce que prier signifie pour saint Vincent. Plus qu’un simple devoir ou « un ensemble de formule », c’est « s’arrêter devant Dieu pour être avec lui, pour se consacrer simplement à lui. .. C’est bien le sens de l’adoration à laquelle on ne peut pas renoncer une fois découverte parce qu’elle « est pure intimité avec le Seigneur qui donne paix et joie et dissout les soucis de la vie. »

« Qui adore, qui fréquente la source de la vie de l’amour, ne peut qu’en rester, pour ainsi dire, contaminé. Il commence à se comporter avec les autres comme le Seigneur fait avec lui : il devient plus miséricordieux, plus compréhensif, plus disponible, il dépasse ses propres rigidités et s’ouvre aux autres. »

Concernant le verbe « accueillir », il signifie « redimensionner son propre moi, redresser son mode de penser, comprendre que la vie n’est plus ma propriété privée et que le temps ne m’appartient pas. C’est un lent détachement de tout ce qui est mien : mon temps, mon repos, mes droits, mes programmes, mon agenda. Qui accueille renonce à son moi et fait entrer dans sa vie le toi et le nous. »

« Le chrétien accueillant est un vrai homme et femme d’Église. » L’Église étant mère et accueillant donc la vie et l’accompagnant, et le fils, ressemblant à la mère, le chrétien possède ces traits caractéristiques de l’Église.

Enfin le dernier verbe : aller. « L’amour est dynamique, il sort de lui. Qui aime ne reste pas dans son fauteuil à regarder, à attendre la venue d’un monde meilleur, mais il se lève avec enthousiasme et simplicité et s’en va », pour « enflammer le cœur des hommes, faisant ce que fit le Fils de Dieu ». Autant de choses que la famille vincentienne accomplit à travers le monde.

Voici l’accompagnement final avec lequel le Pape a quitté les Vincentiens : « Ne vous arrêtez pas au chemin entrepris dans les rues du monde, continuez à puiser l’amour de Dieu dans l’adoration et à le répandre à travers la bonne contagion de la charité, de la disponibilité et de la concorde ».

Discours du pape François – page 2

Chers frères et sœurs, bonjour !

Merci pour votre accueil chaleureux, et merci au Supérieur général d’avoir introduit notre rencontre.

Je vous salue et avec vous je remercie le Seigneur pour les 400 ans de votre charisme. Saint Vincent a généré un élan de charité qui dure dans les siècles : un élan qui est sorti de son cœur. C’est pourquoi aujourd’hui nous avons ici sa relique : le cœur de saint Vincent. Aujourd’hui je voudrais vous encourager à continuer ce chemin, en vous proposant trois simples verbes que je crois très importants pour votre esprit vincentien, mais aussi pour la vie chrétienne en général : adorer, accueillir, aller.

Adorer. Les invitations de saint Vincent à cultiver la vie intérieure et à se dédier à la prière qui purifie et ouvre le cœur sont nombreuses. Pour lui, la prière est essentielle. Elle est la boussole de tous les jours, elle est comme un manuel de vie, elle est – écrivait-il – le « grand livre du prédicateur » : c’est seulement en priant que l’on puise en Dieu l’amour à reverser sur le monde ; c’est seulement en priant que l’on touche les cœurs des personnes lorsqu’on annonce l’Évangile (cf. Lettre à A. Durand, 1658).

Mais pour saint Vincent, la prière n’est pas seulement un devoir et encore moins un ensemble de formules. La prière, c’est s’arrêter devant Dieu pour rester avec Lui, pour se dédier simplement à Lui. C’est cela la prière la plus pure, celle qui fait de la place au Seigneur et à sa louange, et à rien d’autre : l’adoration.

Une fois découverte, l’adoration devient incontournable, parce qu’elle est pure intimité avec le Seigneur, qui donne paix et joie, et libère des peines de la vie. C’est pourquoi, à quelqu’un qui était sous une pression particulière, saint Vincent conseillait aussi de rester en prière « sans tension, en se jetant en Dieu avec de simples regards, sans chercher à avoir sa présence par des efforts sensibles, mais en s’abandonnant à Lui » (Lettre à G. Pesnelle, 1659).

Voici l’adoration: se mettre devant le Seigneur, avec respect, avec calme et dans le silence, en Lui donnant la première place, en s’abandonnant, confiants. Pour ensuite lui demander que son Esprit vienne en nous et laisser nos affaires aller à Lui.

Ainsi, les personnes dans le besoin, les problèmes urgents, les situations pesantes et difficiles rentrent dans l’adoration, tant et si bien que saint Vincent demandait d’« adorer en Dieu », même les raisons que l’on peine à comprendre et à accepter (cf. Lettre a F. Get, 1659).

Qui adore, qui fréquente la source vive de l’amour ne peut qu’en rester, pour ainsi dire, “contaminé”. Et il commence à se comporter avec les autres comme le Seigneur le fait avec Lui: il devient plus miséricordieux, plus compréhensif, plus disponible, il dépasse ses rigidités et s’ouvre aux autres.

Et nous parvenons ainsi au deuxième verbe : accueillir. Quand nous entendons ce mot, nous pensons tout de suite à quelque chose à faire. Mais en réalité, accueillir est une disposition plus profonde : elle n’exige pas seulement de faire de la place à quelqu’un, mais d’être des personnes accueillantes, disponibles, habituées à se donner aux autres. Comme Dieu pour nous, ainsi nous pour les autres.

Accueillir signifie redimensionner son moi, rajuster sa façon de penser, comprendre que la vie n’est pas ma propriété privée et que le temps ne m’appartient pas. C’est un lent détachement de tout ce qui est mien : mon temps, mon repos, mes droits, mes programmes, mon agenda. Celui qui accueille renonce au moi et fait entrer dans sa vie le tu et le nous.

Le chrétien accueillant est un vrai homme et une vraie femme d’Église, parce que l’Église est mère et une mère accueille la vie et l’accompagne. Et comme un enfant ressemble à sa mère, en en portant les traits, ainsi le chrétien porte ces traits de l’Église. Alors il est un fils vraiment fidèle de l’Église qui est accueillante, qui sans se plaindre crée concorde et communion et avec générosité sème la paix, même si elle n’est pas rendue.

Saint Vincent nous aide à valoriser cet “ADN” ecclésial de l’accueil, de la disponibilité, de la communion, pour que dans notre vie « amertume, irritation, colère, éclats de voix ou insultes, (soit) éliminé …, ainsi que toute espèce de méchanceté » (Eph 4,31).

Le dernier verbe est aller. L’amour est dynamique, il sort de lui-même. Celui qui aime ne reste pas dans son fauteuil à regarder, en attendant l’avènement d’un monde meilleur, mais avec enthousiasme et simplicité il se lève et il va.

Saint Vincent l’a bien dit : « Notre vocation est donc d’aller, non pas dans une paroisse ni seulement dans un diocèse, mais par toute la terre. Et pour quoi faire ? Pour enflammer le cœur des hommes, en faisant ce que fit le Fils de Dieu, Lui qui est venu apporter le feu dans le monde pour l’enflammer de son amour » (Conférence du 30 mai 1659).

Cette vocation est toujours valide pour tout le monde. Elle pose à chacun des questions : “Vais-je à la rencontre des autres, comme le veut le Seigneur ? Est-ce que je porte où je vais ce feu de la charité ou je reste enfermé à me réchauffer devant ma cheminée ?”.

Chers frères et sœurs, je vous remercie parce que vous êtes en mouvement sur les routes du monde, comme saint Vincent vous le demanderait encore aujourd’hui. Je vous souhaite de ne pas vous arrêter, mais de continuer à puiser chaque jour dans l’adoration l’amour de Dieu et à le diffuser dans le monde à travers le bon courage de la charité, de la disponibilité, de la concorde.

Je vous bénis tous ainsi que les pauvres que vous rencontrez. Et je vous demande, s’il vous plaît, la charité de ne pas oublier de prier pour moi.

La mondanité spirituelle est une tentation diabolique

Ce vendredi 13 octobre 2017 lors de la messe matinale à la Maison Sainte-Marthe, Le Pape François a dit que seul le Christ crucifié nous sauvera des démons qui nous font «glisser lentement vers la mondanité», en nous sauvant aussi de la «bêtise» et de la «séduction». c’est à propos de l’Évangile du jour, tiré de saint Luc, dans lequel Jésus dit: «si moi je chasse les démons avec le doigt de Dieu, c’est donc que le Règne de Dieu est venu jusqu’à vous».

Il a exhorté à l’examen de conscience et donc aux œuvres de charité, «celles qui coûtent», mais qui «nous amèneront à être plus attentifs» et vigilants afin que ne viennent pas jusqu’à nous des personnages «fourbes», qui sont justement les démons.

Le Seigneur «demande d’être vigilants», pour ne pas entrer en tentation. Le chrétien est donc toujours «en veille, vigilant, il est attentif», comme une «sentinelle». L’Évangile parle de la lutte entre Jésus et le démon.

Jésus ne raconte pas une parabole, mais «dit une vérité» : quand l’esprit impur «sort de l’homme», il rôde dans des endroits déserts, en cherchant des appuis, et, n’en trouvant pas, il décide de retourner là où il était venu, là où habite l’homme libre. Alors le démon décide de prendre «sept autres esprits pires que lui», de façon à ce que «la condition de cet homme» devienne «pire qu’auparavant».

Mais les démons, souvent, entrent «en sourdine», sans trop se faire remarquer à première vue… «Ils commencent à faire partie de la vie. Avec leurs idées et leurs inspirations, ils aident cet homme à mieux vivre, et ils entrent dans la vie de l’homme, ils entrent dans son cœur, et de l’intérieur ils commencent à changer cet homme, mais tranquillement, sans faire de bruit.»

«Ce mode est différent de la possession diabolique qui est forte : ceci, c’est un peu une possession diabolique « de salon », disons cela. Et ceci est ce que le diable fait lentement, dans notre vie, pour changer les critères, pour nous pousser vers la mondanité. Il s’immisce dans notre façon d’agir, et nous nous en rendons compte difficilement. Et ainsi, cet homme devient un homme mauvais, un homme oppressé par la mondanité. Et ceci est ce que veut le diable : la mondanité.»

La mondanité, d’autre part, est «un pas en avant dans la possession du démon». C’est une «fascination», une «séduction». Parce que le diable est «le père de la séduction». Et quand le démon entre dans nos vies d’une façon «suave et éduquée», en prenant possession de nos attitudes, nos valeurs passent du service de Dieu au service de la mondanité.

C’est ainsi que l’on devient «des chrétiens tièdes, des chrétiens mondains», avec un mélange, une «macédoine», entre «l’esprit du monde et l’esprit de Dieu». Tout ceci «éloigne du Seigneur», a expliqué François, appelant à résister à ces tentations en faisant preuve de «vigilance» et de «calme», sans «s’effrayer».

«Veiller signifie comprendre ce qui se passe dans mon cœur, cela signifie m’arrêter un peu, et examiner ma vie. ‘Je suis chrétien? J’éduque plus ou moins bien mes enfants ? Ma vie est chrétienne ou elle est mondaine? Et comment je peux comprendre cela?’ Avec la même recette que pour saint Paul : regarder le Christ crucifié. La mondanité se détruit devant la croix du Seigneur. Et ceci est le sens du Crucifix devant nous : c’est n’est pas un ornement, c’est justement ce qui nous sauve de cette fascination, de ces séductions qui te mènent à la mondanité.»

Le Pape a donc exhorté à nous demander si nous regardons le «Christ crucifié», si nous faisons «le Chemin de Croix pour voir le prix du salut», non seulement des péchés, «mais aussi de la mondanité». Le Pape a insisté sur l’importance de l’examen de conscience et de la prière devant le Christ crucifié.

«Et ensuite, cela fera du bien de se faire une fracture, mais pas aux os : une fracture aux attitudes confortables. Les œuvres de charité. « Moi je me sens bien, mais je ferai ceci, qui me coûte. » Visiter un malade, donner une aide à quelqu’un qui en a besoin… je ne sais pas, une œuvre de charité. Et ceci rompt l’harmonie que cherche à faire ce démon, ces sept démons avec le chef, pour faire la mondanité spirituelle.»

 

diaspora toujours plus inquiétante des chrétiens orientaux

S’appuyant sur les lectures du jour, le Saint-Père a invité dans son homélie les fidèles des Églises, encore persécutées aujourd’hui, à se confier à Dieu dans la prière.

Rappelant le contexte de création de la Congrégation pour les Églises orientales, pendant la Première guerre mondiale, le Saint-Père a d’abord réaffirmé que nous vivons aussi aujourd’hui une guerre mondiale «par morceaux». Ce conflit touche les Chrétiens d’Orient, persécutés, provoquant une diaspora toujours plus grande.

«Cela fait surgir tant de questions, tant de pourquoi ? » Il fait alors le parallèle avec la première lecture (Mal 3, 13-20a), où le peuple se demande pourquoi les méchants profitent de la vie et restent impunis. «Combien de fois nous aussi faisons cette expérience ? Mais Dieu nous répond tous la même chose : «Dieu n’oublie pas ses fils, il se souvient des justes, de ceux qui souffrent, des oppressés qui se demandent “pourquoi? », et pourtant qui ne cessent pas d’avoir confiance dans le Seigneur.»

La prière, un acte de confiance

Le Saint-Père indique alors le moyen de se faire entendre de Dieu : la prière. Il préciser que prier est un acte de «confiance» dans l’écoute de Dieu, fort du «courage de la foi», du «courage de toquer à la porte». «Car quiconque demande reçoit; qui cherche trouve; et à qui frappe on ouvrira», nous dit l’Évangile de Luc.

Comme des parents veulent le bien de leurs enfants, Dieu répond à notre appel. En nous donnant de bonnes choses ? «Non, l’Évangile ne dit pas cela», souligne le Pape. «Par la prière, l’homme frappe à la porte de Dieu pour lui demander une grâce. Et lui, qui est Père, nous donne encore plus : il envoie l’Esprit saint». L’Esprit saint : «Voilà le vrai don du Père.»

«Apprenons à toquer au cœur de Dieu», courageusement, par la prière. «Ainsi votre engagement portera du fruit en son temps, et vous serez comme des arbres dont le feuillage ne sèche pas».

Il y a 100 ans, le 15 octobre 1917, le Pape Benoît XV créait l’Institut pontifical oriental. À l’occasion de ce centenaire, qui coïncide avec celui de la Congrégation pour les Églises orientales, le Pape a concélébré la messe à la Basilique Sainte Marie-Majeure.