Après la pause du mois de juillet, le Pape François a repris les audiences générales du mercredi. Devant les pèlerins réunis en salle Paul VI, le Saint-Père a poursuivi son cycle de catéchèses sur l’espérance chrétienne. Revenant sur le rite du baptême, il a exhorté les fidèles à porter la lumière du Christ dans le monde.
«Que veut dire être chrétien ? C’est regarder la lumière, continuer à professer la foi en la lumière, même quand le monde est enveloppé par la nuit et les ténèbres». Ces paroles, le Pape François les a illustrées en rappelant les rites antiques du baptême, quand les catéchumènes, regardant vers l’occident, renonçaient à Satan ; avant de se tourner vers l’abside, en direction de l’Orient où le soleil se lève, pour professer leur foi en la Trinité.
Par la grâce du baptême, les chrétiens «ne croient pas en l’obscurité, mais en la clarté du jour; ne succombent pas à la nuit, mais espèrent en l’aurore; ne sont pas défaits par la mort, mais aspirent à ressusciter».
«La vie de l’Église est contagion de lumière»
«Nous sommes ceux qui croient que Dieu est Père (…), que Jésus est descendu parmi nous (…), que l’Esprit Saint œuvre sans arrêt pour le bien de l’humanité et du monde»: «voilà la lumière, voilà l’espérance qui nous réveille chaque matin !»
Cette lumière est appelée à se propager, comme le cierge pascal le jour de Pâques mais aussi à chaque baptême, lorsqu’on y allume la bougie remise aux parents ou au catéchumène. «La vie de l’Église est contagion de lumière», demandons-nous si l’histoire retiendra «que nous avons été capable d’espérance, ou que nous avons mis notre lumière sous le boisseau.»
Pour toujours se souvenir de transmettre cette lumière d’espérance, un conseil : trouver et «se rappeler la date de notre baptême!»
1 Le Psaume 124 fait partie du recueil intense et suggestif appelé « Psaumes des montées », livret idéal de prières pour le pèlerinage à Sion en vue de la rencontre avec le Seigneur dans le temple (cf. Ps 119-133).
Ce que nous allons méditer à présent brièvement est un texte sapientiel (Ps 124, 1-5), qui suscite la confiance dans le Seigneur et contient une brève prière (cf. Ps 124, 4).
La première phrase proclame la stabilité de celui « qui s’appuie sur Yahvé », la comparant à la stabilité « rocheuse » et sûre du « mont Sion », qui, de façon évidente, est due à la présence de Dieu qui est « mon roc et ma forteresse, mon libérateur […] mon rocher, mon bouclier et ma force de salut », comme l’affirme un autre Psaume (Ps 17, 3).
Même lorsque le croyant se sent isolé et entouré par les risques et l’hostilité, sa foi doit être sereine. Car le Seigneur est toujours avec nous. Sa force nous entoure et nous protège.
Le prophète Isaïe atteste lui aussi avoir entendu de la bouche de Dieu ces paroles destinées aux fidèles: « Voici que je vais poser en Sion une pierre; une pierre de granit, pierre angulaire, précieuse, pierre de fondation bien assise: celui qui s’y fie ne sera pas ébranlé » (28, 16).
2 Mais, continue le Psalmiste, la confiance du fidèle possède un appui supplémentaire: le Seigneur entoure en quelque sorte son peuple pour le défendre, précisément comme les montagnes qui entourent Jérusalem, faisant d’elle une ville fortifiée par des bastions naturels (cf. Ps 124, 2). Dans une prophétie de Zacharie, Dieu dit de Jérusalem: « Quant à moi, je serai pour elle une muraille de feu tout autour et je serai sa gloire » (2,9).
Dans ce climat de confiance radicale, qui est l’atmosphère de la foi, le Psalmiste rassure « les justes », les croyants. Leur situation peut être, en soi, préoccupante à cause de la violence des impies qui veulent imposer leur domination.
Il existe également la tentation, pour les justes, de devenir les complices du mal pour éviter de graves inconvénients, mais le Seigneur les protège de l’oppression: « Jamais un sceptre impie ne tombera sur la part des justes » (Ps 124, 3); dans le même temps, il les préserve de la tentation « que ne tende au crime la main des justes » (ibid.).
Le Psaume diffuse donc dans l’âme une profonde confiance. Il aide puissamment à affronter les situations difficiles, lorsqu’à la crise extérieure de l’isolement, de l’ironie, du mépris à l’égard des croyants, on associe la crise interne faite de découragement, de médiocrité, de lassitude. Nous connaissons cette condition, mais le Psaume nous dit que si nous avons confiance, nous sommes plus forts que ces maux.
3 Le final du Psaume contient une invocation adressée au Seigneur en faveur des « gens de bien » et de ceux qui « ont au coeur la droiture » (cf. v. 4) et une annonce de malheur contre « les tortueux, les dévoyés » (v. 5).
D’une part, le Psalmiste demande que le Seigneur se manifeste comme un père bienveillant envers les justes et les fidèles qui tiennent haute la flamme de la droiture de vie et de la bonne conscience. D’autre part, on s’attend à ce qu’il se révèle comme le juge juste à l’égard de ceux qui ont marché sur le chemin tortueux du mal, dont l’issue finale est la mort.
Le Psaume est scellé par le salut traditionnel de shalom, de « paix sur Israël », un salut rythmé par assonance sur Jerushalajim, sur Jérusalem (cf. v. 2), la ville symbole de paix et de sainteté. C’est un salut qui devient un vœu d’espérance. Nous pouvons l’expliciter à travers les paroles de saint Paul: « Et à tous ceux qui suivront cette règle paix et miséricorde, ainsi qu’à l’Israël de Dieu » (Ga 6, 16).
4 Dans son commentaire à ce Psaume, saint Augustin oppose « ceux qui s’engagent sur des voies tortueuses » à « ceux au cœur droit qui ne s’éloignent pas de Dieu ». Si les premiers seront unis par « le destin réservé aux hommes qui commettent l’iniquité », quel sera le sort de ceux « au cœur droit »?
Dans l’espoir de participer lui aussi, avec ses fidèles, à l’heureux destin de ces derniers, l’évêque d’Hippone se demande: « Que posséderons-nous? Quel sera notre héritage? Quelle est notre patrie? Quel est son nom? ».
Et il répond lui-même, en indiquant son nom – je fais miennes ces paroles -: « La Paix. C’est par la paix que nous vous saluons, c’est la paix que nous vous prêchons, la paix que reçoivent les montagnes, et les collines la justice (cf. Ps 71, 3). Cette paix est le Christ: « Car c’est lui qui est notre paix » (Ep 2, 14) » (Discours sur les Psaumes, IV; Nuova Biblioteca Agostiniana, XXVIII, Roma 1977, p. 105).
Saint Augustin conclut par une exhortation qui est, dans le même temps, également un voeu: « Soyons Israël, embrassons la paix, puisque Jérusalem est la vision de la paix et que nous sommes Israël, que la paix soit sur Israël » (ibid., p. 107). Et la paix est le Christ.
BENOÎT XVI AUDIENCE GÉNÉRALE mercredi 3 août 2005 BENOÎT XVI
le Christ dans sa dimension cosmique – cathédrale de Monreale – Sicile
« Que toutes ses œuvres sont aimables, comme une étincelle qu’on pourrait contempler […] Nous pourrions nous étendre sans épuiser le sujet; en un mot: « Il est toutes choses » […} Il est le Grand, au-dessus de toutes ses œuvres » (Si 42, 22; 43, 27-28). Ces paroles magnifiques de l’Ecclésiastique résument le chant de louange, élevé en toute époque et sous tous les cieux, au Créateur, qui se révèle à travers l’immensité et la beauté de ses œuvres.
Bien que sous une forme encore imparfaite, de très nombreuses voix ont reconnu dans le créé la présence de son Artisan et Seigneur. Un roi antique et poète égyptien, s’adressant à sa divinité solaire, s’exclamait: « Comme tes œuvres sont nombreuses: elles sont cachées à ton visage; toi, Dieu unique, en dehors duquel personne n’existe, tu as créé la terre selon ta volonté, lorsque tu étais seul » (Hymne à Aton, cf. J.B. Pritchard [ed], Ancient Near Estearn Texts, Princeton 1969, pp. 369-371).
Quelques siècles plus tard, un philosophe grec célèbre également à travers un hymne admirable la divinité qui se manifeste dans la nature et en particulier dans l’homme: « Nous venons de ta souche, et nous possédons la parole comme reflet de ton esprit, seuls parmi tous les êtres animés qui ont vie et mouvement sur la terre » (Cleante, Hymne à Zeus, vv. 4-5). L’apôtre Paul recueillera cette élévation en la citant dans son discours à l’aréopage d’Athènes (cf. Ac 17, 28).
2. L’écoute de la parole que le Créateur a confiée aux œuvres de ses mains est exigée également du fidèle musulman: « O hommes, adorez votre Seigneur qui vous a créés, ainsi que ceux qui sont venus avant vous, et craignez Dieu, qui a fait pour vous un tapis de la terre et un château du ciel et a fait descendre du ciel l’eau à travers laquelle il tire de la terre les fruits qui sont votre nourriture quotidienne » (Coran II, 21-23).
La tradition juive, fleurie sur le terrain fertile de la Bible, découvrira la présence personnelle de Dieu en tout angle du créé: « Partout où je vais, Toi! Partout où je m’arrête, Toi! Toi seul! encore Toi, toujours Toi!… Ciel, Toi, terre, Toi, au-dessus, Toi, au-dessous, Toi! Où que j’aille, quoi que j’admire, Toi seul, encore Toi, toujours Toi! » (M. Buber, Les récits des Chassidim, Milan, 1979, p. 276).
3. La Révélation biblique s’insère bien dans cette vaste expérience de sens religieux et de prière de l’humanité, en y plaçant le sceau divin. En nous communiquant le mystère de la Trinité, celle-ci nous aide à cueillir dans la création elle-même non seulement la trace du Père, source de tout être, mais également celle du Fils et de l’Esprit.
C’est vers la Trinité tout entière que se tourne désormais le regard du chrétien, lorsqu’il contemple les cieux avec le Psalmiste: « Par la Parole de Yahvé, – c’est-à-dire de son Verbe éternel – les cieux ont été faits, par le souffle de sa bouche, – c’est-à-dire de son Esprit Saint – toute leur armée » (Ps 33 [32], 6).
Les « cieux » donc « racontent la gloire de Dieu et l’œuvre de ses mains, le firmament l’annonce. Le jour au jour en publie le récit et la nuit à la nuit transmet la connaissance. Non point récit, non point langage, nulle voix qu’on puisse entendre, mais pour toute la terre en ressortent les lignes et les mots jusqu’aux limites du monde » (Ps 19[18], 2-5).
Il faut avoir l’oreille de l’âme libérée de tout bruit pour saisir cette voix divine qui résonne dans l’univers. Auprès de la Révélation proprement dite contenue dans les Écritures Saintes, il existe donc une manifestation divine dans l’éblouissement du soleil et la tombée de la nuit. La nature est elle aussi, en un certain sens, le « livre de Dieu ».
4. Nous pouvons nous demander comment peut se développer, dans l’expérience chrétienne, la contemplation de la Trinité à travers la création, en y découvrant non seulement de façon générique le reflet de l’unique Dieu, mais également la trace des personnes divines.
S’il est vrai, en effet, que « le Père, le Fils et l’Esprit Saint ne sont pas trois principes de la création, mais un seul principe » (Concile de Florence, DS 1331), il est également vrai toutefois que « chaque personne divine opère l’œuvre commune selon sa propriété personnelle » (C.E.C., n. 258).
Lorsque, alors, nous contemplons admiratifs l’univers dans sa grandeur et sa beauté, nous devons louer la Trinité tout entière, mais notre pensée va de façon spéciale au Père dont tout jaillit, comme la source de plénitude de l’être lui-même.
Si nous nous arrêtons, ensuite, sur l’ordre qui soutient le cosmos et que nous admirons la sagesse avec laquelle le Père l’a créé en le dotant de loi qui en règlementent l’existence, nous remontons spontanément au Fils éternel, que l’Écriture nous présente comme Parole (cf Jn 1, 1-3) et Sagesse divine (cf. 1 Co 1, 24.30).
Dans l’admirable chant que la Sagesse entonne dans le livre des Proverbes et qui a été proposé au début de notre rencontre, celle-ci apparaît « dès l’éternité, […] établie dès le principe » (Pr 8, 23). La Sagesse est présente au moment de la création « comme architecte » prête à placer ses délices « parmi les enfants des hommes » (cf. Pr 8, 30.31).
Sous ces aspects, la tradition chrétienne a vu en elle le visage du Christ, « image du Dieu invisible, Premier-Né de toute créature […] tout a été créé par lui et pour lui. Il est avant toutes choses et tout subsiste en lui » (Col 1, 15-17; cf. Jn 1, 3).
5. A la lumière de la foi chrétienne, la création évoque ensuite de façon particulière l’Esprit Saint dans le dynamisme qui distingue les rapports entre les choses, à l’intérieur du macrocosme et du microcosme, et qui se manifeste surtout là où naît et se développe la vie.
En vertu de cette expérience, également dans des cultures éloignées du christianisme a été perçue d’une certaine façon la présence de Dieu comme « esprit » qui anime le monde. Dans ce sens, l’expression de Virgile est célèbre: « spiritus intus alit », « l’esprit est alimenté de l’intérieur » (Enéide, VI, 726).
Le chrétien sait bien qu’une telle évocation de l’Esprit serait inacceptable, si elle se réfère à une sorte d' »anima mundi » entendue dans un sens panthéiste. Mais, excluant cette erreur, il reste vrai que toute forme de vie, d’animation, d’amour, renvoie en dernière analyse à l’Esprit, dont la Genèse dit qu’il « tournoyait sur les eaux » (Gn 1, 2) à l’aube de la création et dans lequel les chrétiens, à la lumière du Nouveau testament, reconnaissent une référence à la Troisième Personne de la Très Sainte Trinité.
En effet, la création, dans son concept biblique, « comporte non seulement l’appel à l’existence de l’être même du cosmos, c’est-à-dire le don de l’existence, mais aussi la présence de l’Esprit de Dieu dans la création, c’est-à-dire le commencement du don que Dieu fait de lui-même pour leur salut aux choses qu’il a créées. Cela vaut avant tout pour l’homme, qui a été créé à l’image et à la ressemblance de Dieu » (Dominum et vivificantem, n. 12).
Face au déploiement de la révélation cosmique, nous annonçons l’œuvre de Dieu à travers les paroles du Psalmiste: « Tu envoies ton souffle, ils sont créés, tu renouvelles la face de la terre » (Ps 104 [103], 30).
JEAN-PAUL II AUDIENCE GÉNÉRALE mercredi 2 Août 2000