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deuxième journée du Pape au Chili

Pour la deuxième journée de son voyage apostolique, le Pape François s’est envolé pour le sud du Chili, plus précisément dans la ville de Temuco en plein territoire mapuche. Les Mapuches sont des autochtones du sud de l’Amérique latine qui se battent pour récupérer leurs terres ancestrales depuis plus d’un siècle.

Ce mercredi 17 janvier, environ 400 000 personnes à Temuco ont assisté à la messe du Pape François à 10h30 heure chilienne. La ville se trouve dans la région d’Araucuna, dans le sud du Chili qui est une des plus pauvres du pays où vivent la majorité des Mapuches.

Ces derniers attendent avec impatience l’intervention du Saint-Père. Ils attendent beaucoup de la visite du Pape François, notamment de voir leurs revendications territoriales appuyées par le Souverain pontife.

Dans l’Araucuna, les Mapuches occupaient un vaste territoire à l’arrivée des conquistadors espagnols au Chili en 1541, mais en sont aujourd’hui en grande partie dépossédés. Ainsi, depuis plus d’un siècle, les autochtones exigent de l’État chilien, mais également de multinationales forestières et de grands propriétaires terriens de récupérer leurs terres ancestrales.

On estime que près de 90% de leur territoire leur a été enlevé, en vertu de normes administratives, par les gouvernements chiliens successifs ou, illégalement, par l’industrie du bois.

au sanctuaire de Maipu, la Vierge du Carmel, sainte patronne du Chili
au sanctuaire de Maipu, la Vierge du Carmel, sainte patronne du Chili

En fin d’après-midi ce mercredi 17 janvier, de retour à Santiago du Chili, le Pape François a rencontré plusieurs dizaines de milliers de jeunes, rassemblés au sanctuaire de Maipu, où est vénérée depuis 200 ans la Vierge du Carmel, la sainte patronne du Chili.

Dans un discours en partie improvisé, et dans une atmosphère très chaleureuse, le Pape a invité les jeunes à rester «connectés» au Seigneur, qui recharge les batteries d’une façon inépuisable.

«La foi provoque chez les jeunes des sentiments d’aventure qui invitent à passer par des paysages incroyables, jamais faciles, jamais tranquilles…» «Vous aimez les aventures et les défis» et «vous vous ennuyez quand vous n’avez pas de défis qui vous stimulent. Cela se voit clairement par exemple, chaque fois qu’arrive une catastrophe naturelle : vous avez une capacité énorme pour vous mobiliser, qui parle de la générosité de vos cœurs»,

Il faut aimer sa patrie comme on aime sa mère : le Pape a invité les jeunes Chiliens à assumer vis-à-vis de leur patrie une fierté d’ordre . Il les a aussi exhortés à refuser le cynisme des adultes. Être «spirituellement majeur», cela ne doit pas signifier se convertir au cynisme..

Le Pape François a évoqué la préparation du Synode sur la jeunesse qui se tiendra à l’automne prochain au Vatican. «L’Église doit avoir un visage jeune, plein de vie», s’est exclamé François, qui a rappelé que des jeunes d’autres croyances seront également impliqués dans ce Synode.

Rester connecté au Christ

Filant la métaphore du téléphone portable, le Pape François a insisté sur l’importance de savoir recharger sa batterie, car parfois, si nous perdons la connexion avec Jésus, «nous finissons par noyer nos idées, nos rêves, notre foi, et nous nous remplissons de mauvaise humeur».

Il faut se demander comment Jésus agirait à notre place, dans les lieux de notre vie quotidienne, par exemple face à des cas de harcèlement dont nous sommes témoins à l’école, ou au travail. Être chrétien, ce n’est pas seulement suivre un enseignement religieux, mais c’est chercher à vivre comme Jésus aurait vécu.

Reprenant une méditation d’un ancien archevêque de Santiago, le Pape François a invité à s’identifier aux personnages rencontrés par Jésus dans les Évangiles, en étant des jeunes samaritains qui n’abandonnent jamais un homme allongé sur le chemin, en étant comme «Zachée, qui transforme son cœur matérialiste en un cœur solidaire», ou encore comme la jeune Marie-Madeleine, «en recherche passionnée de l’amour, qui rencontre seulement en Jésus les réponses dont elle a besoin».

Même au milieu du désert, du chemin, de l’aventure, il y aura toujours une «connexion», il y aura un «chargeur». Nous ne serons pas seuls. Nous bénéficierons toujours de la compagnie de Jésus, de sa Mère et d’une communauté.

la première journée du Pape à Santiago

mi paz les doy - ma paix, le la donne
mi paz les doy – ma paix, le la donne

À la prison pour femmes de Santiago, le plaidoyer du Pape pour la dignité

Devant 600 détenues du centre pénitencier de Santiago dédié à San Joaquin, le Pape s’est livré à un vibrant plaidoyer pour la dignité humaine et pour la réinsertion des populations carcérales, qui «privées de liberté», ne doivent pas pour autant «renoncer aux rêves ni aux espérances». «Être privé de liberté, ce n’est pas la même chose que d’être privé de dignité».

Le Saint-Père a articulé son discours autour de trois mots-clés porteurs d’espoir: «mères, enfants et fleurs». Ce triptyque a d’abord permis au Saint-Père d’évoquer longuement cette dignité que doivent garder à l’esprit les détenues afin de ne pas sombrer dans la résignation ou le désespoir: «La dignité on n’y touche pas, la dignité on la caresse, personne ne peut en être privé».

Ainsi survient la nécessité de lutter «contre tout type de carcan, d’étiquettes selon lesquels on ne peut pas changer, ou que cela ne vaut pas la peine, ou que tout revient au même. Non ! Tout ne revient pas au même».

Le Pape pleure avec un groupe de victimes d’abus sexuels au Chili

Le Pape François a rencontré des victimes d’abus sexuels commis par des membres du clergé, ce mardi 16 janvier, à la nonciature à Santiago du Chili.

La rencontre s’est déroulée dans un cadre strictement privé. Personne n’était présent, hormis le Pape et un petit groupe» de victimes. Ils se sont retrouvés à la nonciature de Santiago, après le déjeuner. Il fallait permettre aux personnes abusées par des prêtres de raconter leur souffrance. Le Pape les a écoutées, il a prié et pleuré avec elles.

Plus tôt à la Moneda, le palais présidentiel, devant les autorités chiliennes, des membres de la société civile et les corps diplomatique, le Pape a exprimé «sa douleur et sa honte (…) face au mal irréparable fait à des enfants par des ministres de l’Église». Il a dit vouloir s’unir à ses frères dans l’épiscopat, «car s’il est juste de demander pardon et de soutenir avec force les victimes, il nous faut en même temps nous engager pour que cela ne se reproduise pas.»

Dans l’après-midi, devant les séminaristes, prêtres et religieux, le Pape a de nouveau évoqué ce «grave et douloureux mal». François a évoqué avant tout la douleur des victimes et leurs familles «qui ont vu trahie la confiance qu’elles avaient placée dans les ministres de l’Église», et parlé de «la souffrance des communautés ecclésiales» sous le coup d’une «suspicion» générale. Il a appelé «les hommes et les femmes d’église à avoir le courage de demander pardon».

Le programme de vie du Pape pour l’Église chilienne

Quatrième moment fort de cette première journée du Pape François au Chili: la rencontre avec les prêtres, consacrés et les séminaristes, qui, venus en nombre, ont rempli la cathédrale de Santiago, réservant un accueil très chaleureux au Pape.

C’est un véritable programme de vie qu’a proposé le Pape au clergé, aux religieux et aux consacrés de l’Église chilienne. Pour ce faire, François s’est basé sur l’Évangile proclamé lors de la liturgie de la Parole, qui relate la pêche miraculeuse et l’apparition de Jésus ressuscité à ses disciples sur le lac de Tibériade (Jn 21, 1-19); un passage que le Pape a partagé en trois moments-clés et symboliques: Pierre/communauté abattue, Pierre/communauté bénéficiaire, et Pierre/communauté transfigurée, expliquant que l’expérience d’apôtre relève toujours d’un double aspect, personnel et communautaire.

messe pour la paix et la justice à Santiago

Le Pape François a célébré en espagnol une messe pour la paix et la justice au parc O’Higgins de Santiago au Chili, le 16 janvier 2018. L’intégralité de l’homélie du Pape lors de la messe .

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« Voyant les foules » (Mt 5, 1). En ces premières paroles de l’Évangile, nous trouvons dans quelle attitude Jésus veut venir à notre rencontre, cette même attitude par laquelle Dieu a toujours surpris son peuple (cf. Ex 3, 7).

La première attitude de Jésus est de voir, c’est de regarder le visage des siens. Ces visages suscitent l’amour viscéral de Dieu. Ce ne sont pas des idées ou des concepts qui font agir Jésus… ce sont les visages, ce sont les personnes ; c’est la vie qui crie vers la Vie que le Père veut nous transmettre.

        En voyant les foules, Jésus regarde le visage des personnes qui le suivaient et le plus beau, c’est de constater qu’en retour ils trouvent dans le regard de Jésus l’écho de leurs quêtes et aspirations. De cette rencontre naît la liste des béatitudes qui sont l’horizon vers lequel nous sommes invités et les défis à affronter.

Les béatitudes ne naissent pas d’une attitude passive face à la réalité, ni ne peuvent non plus trouver leur origine dans un spectateur devenant un triste auteur de statistiques de ce qui se passe. Elles ne proviennent pas de prophètes de malheur qui se contentent de semer de la désillusion. Ni non plus de mirages qui nous promettent le bonheur avec un ‘‘clic’’, le temps d’ouvrir et de fermer les yeux.

Par contre, les béatitudes naissent du cœur compatissant de Jésus qui rencontre le cœur d’hommes et de femmes qui veulent et désirent une vie bénie ; d’hommes et de femmes qui savent ce qu’est la souffrance ; qui connaissent le désarroi et la douleur qu’on éprouve quand ‘‘tout s’affaisse sous vos pieds’’ ou que ‘‘les rêves sont noyés’’ et que le travail de toute une vie s’écroule ; mais qui sont davantage tenaces et davantage combatifs pour aller de l’avant ; qui sont davantage capables de reconstruire et de recommencer.

        Que le cœur chilien est capable de reconstruire et de recommencer ! que vous êtes capables de vous lever après de nombreuses chutes ! C’est à ce cœur que Jésus fait appel ; c’est à ce cœur que sont destinées les béatitudes.

        Les béatitudes ne naissent pas d’attitudes critiques ni de ‘‘bavardages à bon marché’’ de ceux qui croient tout savoir mais ne veulent s’engager ni à rien ni avec personne, et finissent ainsi par bloquer toute possibilité de créer des processus de transformation et de reconstruction dans nos communautés, dans nos vies.

Les béatitudes naissent du cœur miséricordieux qui ne se lasse pas d’espérer. Et il fait l’expérience que l’espérance « est le jour nouveau, l’extirpation d’une immobilité, la remise en cause d’une prostration négative » (PABLO NERUDA, El habitante y su esperanza, p. 5).

        En disant heureux le pauvre, celui qui pleure, la personne affligée, le malade, celui qui a pardonné…, Jésus vient extirper l’immobilité paralysante de celui qui croit que les choses ne peuvent pas changer, de celui qui a cessé de croire au pouvoir régénérateur de Dieu le Père et en ses frères, spécialement en ses frères les plus fragiles, en ses frères rejetés.

Jésus, en proclamant les béatitudes, vient remettre en cause cette prostration négative appelée résignation qui nous fait croire que nous pouvons vivre mieux si nous esquivons les problèmes ou nous enfermons dans nos conforts, si nous nous endormons dans un conformisme tranquillisant (Cf. Exhort. Ap. Evangelii gaudium, n. 2).

Cette résignation qui nous conduit à nous isoler de tout le monde, à nous diviser, à nous séparer ; à devenir aveugles face à la vie et à la souffrance des autres.

        Les béatitudes sont ce jour nouveau pour tous ceux qui continuent de miser sur l’avenir, qui continuent de rêver, qui continuent de se laisser toucher et pousser par l’Esprit de Dieu.

        Qu’il nous fait du bien de penser que Jésus, depuis le Cerra Renca ou Puntilla vient nous dire : heureux… ! Oui, heureux vous et vous ; heureux vous qui vous laissez contaminer par l’Esprit de Dieu et qui luttez et travaillez pour ce jour nouveau, pour ce Chili nouveau, car le royaume des cieux vous appartiendra. « Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu » (Mt 5, 9).

        Face à la résignation qui, comme une méchante rumeur, compromet les relations vitales et nous divise, Jésus nous dit : heureux ceux qui œuvrent pour la réconciliation. Heureux ceux qui sont capables de se salir les mains et de travailler pour que d’autres vivent en paix. Heureux ceux qui s’efforcent pour ne pas semer de la division.

Ainsi, la béatitude fait de nous des artisans de paix ; elle nous invite à nous engager pour que l’esprit de réconciliation gagne de l’espace parmi nous. Veux-tu l’épanouissement ? Veux-tu le bonheur ? Heureux ceux qui œuvrent pour que les autres puissent avoir une vie épanouie. Veux-tu la paix ? Travaille pour la paix.

        Je ne peux m’empêcher d’évoquer ce grand pasteur de Santiago, quand lors d’un Te Deum il disait : « Si tu veux la paix, travaille pour la justice… Et si quelqu’un nous demande ‘‘qu’est-ce que la justice ?’’ ou si au contraire elle consiste simplement à ‘‘ne pas voler’’, nous lui dirons qu’il existe une autre justice : celle qui exige que chaque homme soit traité comme homme » (Card. Raúl SILVA HENRÍQUEZ, Homélie lors du Te Deum Œcuménique, 18 septembre 1977).

        Semer la paix par la proximité, dans le voisinage ! En sortant de sa maison et en regardant les visages, en allant à la rencontre de celui qui est dans une mauvaise passe, qui n’a pas été traité comme une personne, comme un digne enfant de ce pays. C’est pour nous l’unique façon de tisser un avenir de paix, de recoudre une réalité qui peut s’effilocher.

L’artisan de paix sait qu’il faut souvent vaincre de grandes ou de petites mesquineries et des ambitions, qui trouvent leur origine dans la prétention de grandir et de ‘‘se faire un nom’’, de gagner du prestige au détriment des autres. L’artisan de paix sait qu’il ne suffit pas de dire : je ne fais de mal à personne, puisque comme disait saint Albert Hurtado : « C’est très bien de ne pas faire de mal, mais il est très difficile de faire du bien » (Meditación radial, avril 1944).

        Construire la paix est un processus qui nous place en face d’un défi et stimule notre créativité à créer des relations permettant de voir dans mon voisin non pas un étranger, un inconnu, mais un enfant de ce pays.

        Confions-nous à la Vierge Immaculée qui depuis le Cerra San Cristobal protège et accompagne cette ville. Qu’elle nous aide à vivre et à désirer l’esprit des béatitudes ; pour que partout dans cette ville on entende comme un susurrement : « Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu » (Mt 5, 9).

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