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sur un aspect de spiritualité : Christ, Vierge Marie, Église dans le monde…

Écouter, discerner, vivre l’appel du Seigneur

55e journée mondiale de prière pour les vocations
55e journée mondiale de prière pour les vocations

Depuis plus de 50 ans – à l’initiative de la France qui fut la première à créer un Service national des vocations en 1959 et à suggérer au Pape Paul VI d’instaurer une Journée Mondiale de prière pour les vocations – la journée du 4ème dimanche de Pâques rappelle l’importance de prier pour les vocations. Elle est par conséquent une journée mobile dans le calendrier.

C’est une journée d’invitation à la réflexion : quand on parle de vocation, on parle de ce qui touche l’être humain au plus intime de sa liberté. C’est aussi une journée d’invitation à la prière : pour qu’une liberté humaine découvre son chemin, elle a besoin d’être éclairée et stimulée. C’est le rôle du Saint Esprit.

Message du Saint-Père
pour la 55e Journée mondiale de prière pour les vocations :
Écouter, discerner, vivre l’appel du Seigneur.

Chers frères et sœurs,

En octobre prochain, se déroulera la XVème Assemblée Générale ordinaire du Synode des Évêques, qui sera consacrée aux jeunes, en particulier au rapport entre jeunes, foi et vocation.

A cette occasion, nous aurons la possibilité d’approfondir comment, au centre de notre vie, il y a l’appel à la joie que Dieu nous adresse et comment cela est « le projet de Dieu pour les hommes et les femmes de tout temps » (Synode des Évêques, XVème Assemblée Générale Ordinaire, Les jeunes, la foi et le discernement vocationnel, Introduction).

Il s’agit d’une bonne nouvelle qui nous est annoncée avec force par la 55ème Journée mondiale de Prière pour les Vocations : nous ne sommes pas plongés dans le hasard, ni entraînés par une série d’évènements désordonnés, mais, au contraire, notre vie et notre présence dans le monde sont fruits d’une vocation divine !

Même dans nos temps inquiets, le Mystère de l’Incarnation nous rappelle que Dieu vient toujours à notre rencontre et il est Dieu-avec-nous, qui passe le long des routes parfois poussiéreuses de notre vie et, accueillant notre poignante nostalgie d’amour et de bonheur, nous appelle à la joie.

Dans la diversité et dans la spécificité de chaque vocation, personnelle et ecclésiale, il s’agit d’écouter, de discerner et de vivre cette Parole qui nous appelle d’en-haut et qui, tandis qu’elle nous permet de faire fructifier nos talents, nous rend aussi instruments de salut dans le monde et nous oriente vers la plénitude du bonheur.

Ces trois aspects – écoute, discernement et vieservent aussi de cadre au début de la mission de Jésus, qui, après les jours de prière et de lutte dans le désert, visite sa synagogue de Nazareth, et là, se met à l’écoute de la Parole, discerne le contenu de la mission que le Père lui a confiée et annonce qu’il est venu pour la réaliser “aujourd’hui” (cf. Lc 4, 16-21).

Écouter

L’appel du Seigneur – il faut le dire tout de suite – n’a pas l’évidence de l’une des nombreuses choses que nous pouvons sentir, voir ou toucher dans notre expérience quotidienne. Dieu vient de manière silencieuse et discrète, sans s’imposer à notre liberté. Aussi, on peut comprendre que sa voix reste étouffée par les nombreuses préoccupations et sollicitations qui occupent notre esprit et notre cœur.

Il convient alors de se préparer à une écoute profonde de sa Parole et de la vie, à prêter aussi attention aux détails de notre quotidien, à apprendre à lire les évènements avec les yeux de la foi, et à se maintenir ouverts aux surprises de l’Esprit.

Nous ne pourrons pas découvrir l’appel spécial et personnel que Dieu a pensé pour nous, si nous restons fermés sur nous-mêmes, dans nos habitudes et dans l’apathie de celui qui passe sa propre vie dans le cercle restreint de son moi, perdant l’opportunité de rêver en grand et de devenir protagoniste de cette histoire unique et originale que Dieu veut écrire avec nous.

Jésus aussi a été appelé et envoyé ; pour cela, il a eu besoin de se recueillir dans le silence, il a écouté et lu la Parole dans la Synagogue et, avec la lumière et la force de l’Esprit Saint, il en a dévoilé la pleine signification, référée à sa personne-même et à l’histoire du peuple d’Israël.

Cette attitude devient aujourd’hui toujours plus difficile, plongés comme nous le sommes dans une société bruyante, dans la frénésie de l’abondance de stimulations et d’informations qui remplissent nos journées.

Au vacarme extérieur, qui parfois domine nos villes et nos quartiers, correspond souvent une dispersion et une confusion intérieure, qui ne nous permettent pas de nous arrêter, de savourer le goût de la contemplation, de réfléchir avec sérénité sur les évènements de notre vie et d’opérer, confiants dans le dessein bienveillant de Dieu pour nous, un discernement fécond.

Mais, comme nous le savons, le Royaume de Dieu vient sans faire de bruit et sans attirer l’attention (cf. Lc 17, 21), et il est possible d’en accueillir les germes seulement lorsque, comme le prophète Élie, nous savons entrer dans les profondeurs de notre esprit, le laissant s’ouvrir à l’imperceptible souffle de la brise divine (cf. 1 R 19, 11-13).

Discerner

En lisant, dans la synagogue de Nazareth, le passage du prophète Isaïe, Jésus discerne le contenu de la mission pour laquelle il a été envoyé et il le présente à ceux qui attendaient le Messie : « L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés, annoncer une année favorable accordée par le Seigneur » (Lc 4, 18-19).

De la même manière, chacun de nous peut découvrir sa propre vocation seulement à travers le discernement spirituel, un « processus grâce auquel la personne arrive à effectuer, en dialoguant avec le Seigneur et en écoutant la voix de l’Esprit, les choix fondamentaux, à partir du choix de son état de vie (Synode des Évêques, XVème Assemblée Générale Ordinaire, Les jeunes, la foi et le discernement vocationnel, II, 2).

Nous découvrons en particulier, que la vocation chrétienne a toujours une dimension prophétique. Comme nous témoigne l’Écriture, les prophètes sont envoyés au peuple dans des situations de grande précarité matérielle et de crise spirituelle et morale, pour adresser au nom de Dieu des paroles de conversion, d’espérance et de consolation.

Comme un vent qui soulève la poussière, le prophète dérange la fausse tranquillité de la conscience qui a oublié la Parole du Seigneur, discerne les évènements à la lumière de la promesse de Dieu et aide le peuple à apercevoir des signes d’aurore dans les ténèbres de l’histoire.

Aujourd’hui aussi, nous avons grand besoin du discernement et de la prophétie ; de dépasser les tentations de l’idéologie et du fatalisme et de découvrir, dans la relation avec le Seigneur, les lieux, les instruments et les situations à travers lesquels il nous appelle. Chaque chrétien devrait pouvoir développer la capacité à “lire à l’intérieur” de sa vie et à saisir et à quoi le Seigneur l’appelle pour continuer sa mission.

Vivre

Enfin, Jésus annonce la nouveauté de l’heure présente, qui enthousiasmera beaucoup et durcira d’autres : les temps sont accomplis et c’est Lui le Messie annoncé par Isaïe, oint pour libérer les prisonniers, rendre la vue aux aveugles et proclamer l’amour miséricordieux de Dieu à toute créature. Vraiment « aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre » (Lc 4, 20), affirme Jésus.

La joie de l’Évangile, qui nous ouvre à la rencontre avec Dieu et avec les frères, ne peut attendre nos lenteurs et nos paresses ; elle ne nous touche pas si nous restons accoudés à la fenêtre, avec l’excuse de toujours attendre un temps propice ; elle ne s’accomplit pas non plus pour nous si nous n’assumons pas aujourd’hui même le risque d’un choix.

La vocation est aujourd’hui ! La mission chrétienne est pour le présent ! Et chacun de nous est appelé – à la vie laïque dans le mariage, à la vie sacerdotale dans le ministère ordonné, ou à la vie de consécration spéciale – pour devenir témoin du Seigneur, ici et maintenant.

Cet “aujourd’hui” proclamé par Jésus, en effet, nous assure que Dieu continue à “descendre” pour sauver notre humanité et nous rendre participants de sa mission. Le Seigneur appelle encore à vivre avec lui et à marcher derrière lui dans une relation de proximité particulière, à son service direct.

Et s’il nous fait comprendre qu’il nous appelle à nous consacrer totalement à son Royaume, nous ne devons pas avoir peur ! C’est beau – et c’est une grande grâce – d’être entièrement et pour toujours consacrés à Dieu et au service des frères.

Le Seigneur continue aujourd’hui à appeler à le suivre. Nous ne devons pas attendre d’être parfaits pour répondre notre généreux “me voici”, ni nous effrayer de nos limites et de nos péchés, mais accueillir avec un cœur ouvert la voix du Seigneur. L’écouter, discerner notre mission personnelle dans l’Église et dans le monde, et enfin la vivre dans l’aujourd’hui que Dieu nous donne.

Que Marie la très Sainte, la jeune fille de périphérie, qui a écouté, accueilli et vécu la Parole de Dieu faite chair, nous garde et nous accompagne toujours sur notre chemin.

Pape François,  du Vatican, 3 décembre 2017,  premier dimanche de l’Avent

Pain de vie et Parole qui sauve

Ce vendredi 20 avril, le Saint-Père effectue une visite pastorale dans le sud-est de l’Italie,  pour rendre hommage à un évêque italien décédé il y a vingt-cinq ans et  très populaire dans le Pouilles, Mgr Tonino Bello qui se distingua en raison de son engagement pour la paix et auprès des plus pauvres.
Don Tonino Bello
Don Tonino Bello

Le Pape François s’est recueilli sur la tombe de don Antonino, louant ses mérites dans son diocèse de naissance, avant de rejoindre en hélicoptère sa terre de mission dans le diocèse de Molfetta-Ruvo-Giovinazzo-Terlizzi, dont il fut le premier évêque. Le Pape a célébré la messe dans le port de Molfetta, réaffirmant l’importance pour les chrétiens du «Pain de vie et de la Parole qui sauve», deux éléments clé de la vie chrétienne.

L’Eucharistie n’est pas un rite

Jésus s’offre à nous comme «Pain de vie» en nous disant «mangez ma chair et buvez mon sang». Cela signifie qu’il est essentiel pour les chrétiens d’entrer dans une relation vitale, personnelle avec Lui. L’Eucharistie n’est pas «un beau rite, mais une communion la plus intime, la plus concrète et le plus surprenante qu’on puisse imaginer avec Dieu : une communion d’amour tellement réelle qu’elle prend la forme de nourriture.»

C’est de là que la vie chrétienne repart chaque jour. «Sans ce Pain de vie, tous les efforts de l’Église sont vains», et le pape cite Mgr Bello : «les œuvres de charité ne suffisent pas, s’il manque la charité aux œuvres.»

Le rêve d’une Église affamée du Christ, intolérante à la mondanité

Qui se nourrit du Pain assimile la mentalité du Seigneur. Il devient comme Lui, du «Pain rompu qui ne se gonfle pas d’orgueil mais qui se donne aux autres», ce que fit don Antonino, un  «évêque-serviteur». Il rêvait d’une église «affamée du Christ et intolérante à toute mondanité» qui «faisait voir le corps du Christ dans les tabernacles incommodes de la misère, de la souffrance et de la solitude.»

Pour don Antonino, l’eucharistie n’était pas sédentaire. Si on ne se levait pas de table, elle restait un sacrement incomplet, jugeait-il. Il fallait donc agir. Et l’évêque des Pouilles se mobilisa pour la paix. Pour lui, la paix ne peut advenir si chacun mange dans son coin. La paix est «convivialité », «un visage à découvrir, contempler et caresser».

Quitter la perplexité

Avec le Pain, la Parole qui sauve. Le Pape met en garde contre les personnes qui sont paralysées par des discussions sans fin sur les paroles de Jésus, au lieu d’être prêts à accueillir le changement de vie qu’Il demande.

Pour don Tonino, la période de Pâques était d’ailleurs propice aux fidèles pour qu’ils passent des paroles aux actes. Il encourageait ainsi les «spécialistes de la perplexité » et autres « comptables pédants des pro et antis». Et en effet on ne répond pas à Jésus selon des calculs et convenances momentanées, mais avec un «si» pour toute la vie. «Il ne cherche pas nos réflexions mais notre conversion.»

Pour reprendre l’expression de Mgr Bello, le Christ nous demande de nous relever, et ne sortir de nos espaces rassurants pour se mettre au service des autres, et devenir malgré nos incertitudes et nos problèmes des «sirènes de la joie», porteurs de l’espérance pascale, sans jamais se résigner, docilement.

C’est ce que fait la Parole de Dieu, conclut le Pape François, «elle libère, redresse, fait aller de l’avant, humbles et courageux à la fois. Elle ne fait pas de nous des protagonistes affirmés et des champions de notre propre bravoure, mais des témoins authentiques de Jésus dans le monde.»

l’évangélisation ne se fait pas dans un fauteuil

C’est l’Esprit Saint qui pousse les chrétiens à l’évangélisation qui se bâtit sur trois verbes-clés : lève-toi, approche-toi et pars de la situation concrète.

 

Tous les chrétiens ont «l’obligation» et la «mission» d’évangéliser, en demandant la grâce d’être des «auditeurs de l’Esprit» pour «être en sortie», démontrant leur « proximité envers les gens» en partant non de la théorie mais de leur situation. C’est le sens de l’homélie du Pape François lors de la messe ce jeudi 19 avril à la Maison Sainte-Marthe au Vatican.

Léon Gérome (1824–1904) Dernière prière de Chrétiens Martyrs (détail)
Léon Gérome (1824–1904) Dernière prière de Chrétiens Martyrs (détail)

Après le martyr d’Étienne, une vague de persécutions s’abattit sur les chrétiens, poussant, au final, les disciples à aller «au-delà».

«Comme il le fait avec les graines des plantes, le vent les a pris et semé, ainsi c’est arrivé jusqu’ici: ils sont allés au delà, avec la semence de la Parole, et ils ont semé la Parole de Dieu… Ainsi, à partir d’une persécution, d’un vent, les disciples ont apporté l’évangélisation. Et ce passage des Actes des Apôtres que nous avons lu aujourd’hui est d’une grande beauté … C’est un vrai traité d’évangélisation. Ainsi le Seigneur évangélise. Ainsi annonce le Seigneur, c’est ainsi que le Seigneur veut que nous évangélisions.»

Évangélisateurs parfois jusqu’au martyre

«L’évangélisation n’est pas un plan de prosélytisme bien fait: « Allons-y et faisons tant de prosélytes, là-bas… » Non … À l’origine, c’est l’Esprit Saint qui conduit chacun des disciples. Au début il dit : lève-toi et va. Ce n’est pas une évangélisation de fauteuil.» Des hommes et des femmes ont quitté leur patrie et leur famille pour aller vers des terres lointaines porter la parole de Dieu. «Ils n’étaient pas préparés physiquement, parce qu’ils n’avaient pas les anticorps pour résister aux maladies de ces terres,» ils mouraient jeunes ou «martyrisés».

Le Pape a enfin expliqué qu’aucun «vademecum de l’évangélisation» ne sert mais qu’il faut être «proche» pour regarder ce qu’il se passe.

«Vous ne pouvez pas évangéliser en théorie. L’évangélisation est un peu un corps à corps, de personne à personne. On part de la situation, pas des théories. Et on annonce Jésus-Christ, et le courage de l’Esprit pousse à baptiser. Allez, allez, allez, jusqu’à ce que vous sentiez que votre travail soit terminé. C’est ainsi que l’évangélisation est faite. Ces trois mots sont la clé pour nous tous les chrétiens, nous devons évangéliser avec notre vie, avec notre exemple, et aussi avec notre parole. « Lève-toi, lève-toi »; « sois proche »: proximité; et « pars de la situation », le concret. Une méthode simple, mais c’est la méthode de Jésus, Jésus évangélisa ainsi. Toujours en chemin, toujours sur la route, toujours proche des gens, toujours parti de situations concrètes, du concret. Il n’est possible d’évangéliser qu’avec ces trois attitudes, mais sous la puissance de l’Esprit. Sans l’Esprit, même ces trois attitudes ne servent pas. C’est l’Esprit qui nous pousse à nous lever, à nous approcher et à partir de situations concrètes.»