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EUCHARISTIE MÉDITÉE 21

EUCHARISTIE MÉDITÉE 21

Chute et secours.

Il n’éteindra pas la mèche encore fumante, il ne foulera pas le roseau à demi brisé. Mt 12, 20 ; cf Isaïe 42, 3

Eucharistie- Motif sculpté sur porte d'église - Bruxelles
Eucharistie- Motif sculpté sur porte d’église – Bruxelles

21e ACTION DE GRÂCES.

Abîmé dans le profond sentiment de mon indignité, je vous adore dans le fond de mon cœur, ô Jésus, Dieu de miséricorde et d’amour, vous que j’ai si souvent abandonné et qui ne dédaignez pas de descendre jusqu’à moi, de vous unir cœur à cœur, âme à âme.

Ah ! j’adore, Seigneur, avec une profonde reconnaissance, la bonté, l’infinie miséricorde de votre cœur adorable, de ce cœur sacré que je sens palpiter auprès du mien et qui fut toujours pour moi celui du père le plus tendre, du frère le plus dévoué, de la mère la plus aimante.

Le souvenir de mes fautes, vous le savez, ô Jésus, me cause une vive, une poignante douleur, mais cette douleur n’altère pas ma confiance en vous. Je gémis de mes égarements, de mes fautes, je les déteste, je les pleure à vos pieds ; mais j’en espère le pardon, bien plus je crois fermement que déjà vous me l’avez accordé, puisque vous avez daigné m’admettre à votre Table sainte.

Je crois que vous avez ratifié dans le ciel, l’absolution que votre ministre a prononcé sur moi. Oh ! qu’il est bien vrai, Seigneur, que votre miséricorde surpasse votre justice, et vous l’avez fait surabonder en moi cette miséricorde, parce que l’iniquité y avait abondé.

Mais, laissez-moi vous le dire, ô Jésus, votre générosité, votre bonté m’accablent; plus vous vous montrez miséricordieux envers moi,  plus vous multipliez vos pardons et les témoignages de votre amour, mieux je comprends mon ingratitude, et plus je me lare-proche.

Oui, je me repens, ô Jésus, de vous avoir offensé, parce que vous êtes infiniment bon et que je vous aime, et c’est parce que vous êtes assez bon pour me pardonner mes fautes. Jusqu’à mon dernier soupir, le cri de mon repentir s’élèvera vers vous avec celui de ma reconnaissance et de mon amour.

Vous avez été réellement pour moi le bon Pasteur, ô Jésus, loin d’abandonner la brebis ingrate et infidèle qui, oublieuse de vos bienfaits, de votre amour, vous fuyait pour aller chercher loin de vous des jouissances mensongères, et mendier auprès des créatures un bonheur qu’elles étaient impuissantes à lui donner.

Vous vous êtes mis à sa poursuite, vous l’avez appelée, cherchée., attendue, avec une infatigable patience, sans vous rebuter de ses délais, de ses résistances, de ses dédains.

Et quand abreuvée d’amertume, de déceptions, de douleurs, vous l’avez vue tomber épuisée et mourante sur cette voie qu’elle avait cru si douce et toujours semée de fleurs, mais où elle avait rencontré tant d’épines et de ronces qui avaient déchiré ses pieds et blessé son cœur.

Quand vous avez vu son regard éteint se tourner vers vous, vous êtes accouru, et malgré ce péché dont elle était souillée, malgré les plaies dont elle était couverte, vous ne l’avez point méconnue.

Et de même qu’une mère reconnaît son enfant sous les haillons de l’indigence et défiguré par les ravages de la maladie, que non seulement elle le reconnaît et n’en a pas horreur, mais qu’elle sent ses entrailles émues d’une tendre compassion, et son cœur plein d’une douloureuse pitié pour celui que la souffrance et la misère semblent lui rendre plus cher encore.

De même, Jésus, vous n’avez pas en horreur les souillures de mon âme. Sa misère ne vous a inspiré qu’une tendre et douloureuse compassion, et loin de l’accabler de vos reproches, de vos mépris, vous vous êtes penché vers elle avec une tendre pitié.

Votre cœur ne lui a fait entendre que des paroles d’espérance et de consolation, puis vous avez pansé ses plaies, et la touchant avec la délicatesse et les précautions d’une mère qui touche le corps endolori de son enfant blessé, vous l’avez prise entre vos bras, ou plutôt, ô mon bien-aimé Sauveur, vous l’avez reçue dans l’ouverture de votre cœur cette pauvre âme, vous l’avez cachée dans ce divin asile, et vous l’avez-ainsi rapportée au bercail.

Et puis, ô mon Sauveur, vous vous êtes réjoui de son retour, comme si cette âme ingrate eût été en quelque sorte nécessaire à votre bonheur, comme si le peu d’amour qu’elle est capable de vous donner pouvait ajouter à votre gloire et étancher cette soif de l’amour de l’homme qui consume votre cœur adorable.

Puis, aussi libéral que vous êtes miséricordieux, vous lui avez rendu les biens dont elle s’était volontairement dépouillée, et qu’elle avait follement dépensés loin de vous.

Bien plus, vous l’avez de nouveau admise à votre table, non pas seulement une fois pour fêter son retour, mais aussi souvent qu’elle éprouve le besoin de venir s’y asseoir, et si ce besoin se fait sentir tous les jours, tous les jours vous l’y recevez, et toujours vous l’accueillez avec la même tendresse, avec le même amour.

Par quels chants, par quelles hymnes, ô Jésus, pourrai-je dignement exalter et célébrer votre infinie miséricorde ? Quelles actions de grâces, quelles louanges pourront suffire à ma reconnaissance? Ah ! je suis impuissant à le faire, ô aimable Sauveur, mais votre cœur est uni à mon cœur, et c’est sa voix que j’ose emprunter, la voix de son amour, la voix de ses louanges, pour bénir l’éternelle miséricorde incarnée dans ce cœur adorable.

Ma reconnaissance, Seigneur, durera autant que ma vie, et aidée du secours puissant de votre sainte grâce, j’espère vous la prouver par ma fidélité et un amour qui ne se démentiront plus, mais je n’oublierai pas que si vous avez oublié en ma faveur les droits de votre justice, pour ne vous souvenir que de ceux de votre miséricorde, je me souviendrai que j’ai contracté envers elle une dette immense que je dois m’efforcer d’acquitter par les expiations d’une pénitence proportionnée à mes fautes.

Je me l’imposerai courageusement et avec joie, cette pénitence, ô Jésus, selon la mesure de mes forces, et si dans la prévoyance de ma lâcheté, il vous plaît de me l’imposer vous-même en m’envoyant des épreuves, des afflictions et des souffrances, je les accepterai non seulement sans plaintes, sans murmure, mais avec reconnaissance; je les supporterai avec une humble résignation.

Quelque grand que soit le châtiment, il sera toujours au-dessous de mes fautes, et quand votre main me frappera, quand elle s’appesantira sur mon corps par les douleurs de la maladie, sur mon cœur par l’amertume des chagrins, j’adorerai encore votre miséricorde qui ne me frappera dans le temps que pour m’épargner dans l’éternité.

Et puis, ô mon Sauveur, instruit par une triste expérience, le souvenir de ma faiblesse me rendra plus défiant de moi-même et m’inspirera une vigilance plus active et plus constante. Je veillerai sur mes sens, sur mon imagination, sur mon cœur, j’éviterai avec soin toutes les occasions qui pourraient être pour moi une source de fautes.

Mais, ô Jésus, je vous prierai surtout, je vous prierai sans cesse, je vous conjurerai, et je vous conjure dès ce moment de veiller sur moi, de me protéger, de me défendre contre le monde, contre le démon, contre moi-même, de me défendre surtout contre ma propre faiblesse, et me confiant en vous avec une humble et filiale confiance.

Mon âme, vous le savez, est plus faible que le frêle roseau qui plie et s’incline au souffle de tous les vents , et elle peut encore, si vous n’êtes vous-même sa force et sa constance, tous offenser et vous trahir.

Enfin, ô mon Sauveur, le double souvenir de mes fautes et de votre miséricorde me rendra compatissant et indulgent pour ceux de mes frères que je verrai faillir. Loin de les condamner, de les mépriser, de leur jeter la pierre, je les jugerai moins coupables, moins ingrats que je ne l’ai été moi-même ; je penserai que s’ils eussent reçu les mêmes grâces que moi, ils n’en eussent pas abusé comme je l’ai fait.

Je les plaindrai, je vous prierai pour eux, et s’il m’est possible de leur tendre la main, je le ferai avec une fraternelle affection, et je m’estimerais mille fois heureux, si en retour de ce que vous avez fait pour moi, je pouvais consoler votre divin cœur en aidant quelques âmes égarées à revenir à vous.

Mais je le sens, ô mon Sauveur, l’amour seul peut m’acquitter envers vous, c’est mon amour que vous me demandez pour prix de tout ce que vous avez fait pour moi. Ah ! n’est-il pas juste que je vous aime en proportion de ce que vous m’avez pardonné, et que je répare par un redoublement d’amour tant de jours, de mois, d’années peut-être, écoulées sans vous aimer.

Je vous le dois cet amour, ô Jésus, je veux, je désire vous le donner tout entier et sans partage ; mais hélas ! mon indigence est si grande, que je dois encore vous demander de me donner ce que je dois vous rendre, ce que je désire vous offrir.

Donnez-moi donc votre amour, ô mon aimable Sauveur, mais un amour fort, généreux, constant, un amour qui ne consiste pas seulement en paroles et dans ces sentiments qui attendrissent le cœur, mais qui se prouve par les œuvres, qui croît dans les épreuves, et ne recule devant aucun sacrifice.

O Marie, douce mère du Dieu des miséricordes, refuge assuré des pauvres pécheurs, vous qui les aimez malgré leurs erreurs et leurs égarements, vous avez eu, comme Jésus, pitié de nos misères, et malgré la grandeur de nos fautes, votre regard maternel ne s’est pas détourné de moi. Ah ! tendre Mère, qu’il me suive dans toutes mes voies, qu’il s’abaisse sur mon lit de mort et protège mon dernier soupir. Ainsi soit-il.

Léonie Guillebaut

EUCHARISTIE MÉDITÉE 20

EUCHARISTIE MÉDITÉE 20

L’Orage.

Seigneur, sauvez-nous, nous périssons. Mt. 8, 25 ;  Mc 4, 38 ; Lc 8, 24

Eucharistie- Motif sculpté sur porte d'église - Bruxelles
Eucharistie- Motif sculpté sur porte d’église – Bruxelles

20e ACTION DE GRÂCES.

Environné de périls, qui me pressent de toutes parts, où fuir, où me réfugier, ô Jésus, si ce n’est vers vous qui êtes seul mon appui, mon protecteur et ma force? Ayez pitié de moi, Seigneur, selon toute l’étendue de votre grande, de votre infinie miséricorde. Voyez ma faiblesse, ô mon aimable Sauveur. Mon âme est votre bien, elle vous appartient, elle est le prix de votre sang, ne souffrez pas qu’ils vous la ravissent.

Sauvez-la, armez-vous pour sa défense, confondez ceux qui veulent sa perte et faites-leur sentir la force de votre bras. Ouvrez, ô Jésus, ouvrez à cette âme haletante et fatiguée de luttes et de combats, l’asile sacré de votre divin cœur ; laisse-la se reposer en lui, y reprendre des forces et du courage pour soutenir les assauts qui l’attendent encore.

Mais, Seigneur, peut-être n’ai-je pas résisté avec assez d’énergie et de courage, peut-être me suis-je laissé séduire par le charme de la tentation, et voyez-vous le cœur que j’ai osé unir au vôtre. Ah ! cette pensée  et remplit mon âme de tristesse et de crainte.

Vous le savez, ô Jésus, le seul nom de la communion indigne me pénètre d’une indicible horreur et je préférerais me servir du don de votre amour, du plus grand de vos bienfaits. Vous le savez, Seigneur, telle n’a jamais été, telle ne sera jamais ma volonté, et si mon âme ne vous offre pas toute la pureté requise pour la réception de cet auguste sacrement, si vous découvrez en elle quelque tache inconnue, pardonnez à mon ignorance, ô miséricordieux Sauveur.

Lavez dans votre sang adorable les fautes que je connais et celles que je ne connais pas, faites-le couler sur chacune des blessures de mon âme. Soyez pour elle le charitable samaritain qui pense et guérisse ses plaies; que ce sang divin versé pour elle avec tant de profusion et que vous lui donnez avec tant d’amour dans votre Eucharistie, la lave, la purifie, et lui rende à vos yeux sa première beauté.

C’est en vous, en vous seul que je me confie, ô Jésus, je connais ma faiblesse, je la redoute, et je sais que, livré à moi-même, à mes propres forces, je ne puis rien que vous offenser et vous trahir; mais je sais aussi qu’uni à vous, aidé, soutenu de votre grâce, je puis tout, et comme le grand apôtre je puis dire quand je vous sens vivre en moi par la sainte communion : Je puis tout en celui qui me fortifie. Ce n’est plus moi qui vis, c’est Jésus-Christ qui vit en moi.

Aidé et soutenu par sa grâce, rien ne pourra me séparer de lui et arracher son amour de mon cœur. Que Satan redouble ses efforts, que le monde s’efforce de me séduire par ses menaces, que l’orage gronde autour et au-dedans de moi, Jésus est avec moi, il est le garant de ma fidélité, c’est dans son divin cœur que j’ai déposé mes promesses, c’est lui que j’ai constitué le protecteur de ma faiblesse, il saura bien m’en garantir, et il ne permettra pas que je sois infidèle.

Oui, c’est en vous seul que j’espère, ô Jésus, c’est en votre amour, en votre bonté que je me confie. C’est en vain que vous paraissez sourd à mes cris de détresse, à mes humbles et pressantes supplications, c’est en vain que vous semblez dormir au fond de cette frôle barque de mon âme, que la tempête ballotte et que les flots de la tentation sont prêts à submerger.

J’espérerai, s’il le faut, contre toute espérance, je redoublerai mes cris et mes prières, et mon espérance ne sera point confondue. Oui, quand le vent de l’orgueil semblera élever jusqu’au ciel mon frêle esquif, ou que le calme du découragement s’efforcera de le précipiter jusqu’au fond de l’abîme, vous serez mon humilité, ô Jésus, vous serez mon courage, vous me rappellerez que vous faites tout servir au bien de vos élus, et que la tentation repoussée courageusement n’est pas un mal, mais une source de mérites.

Si c’est par le courant de plaisirs malsains que mon âme est prête à se laisser entraîner,  je me réfugierai au pied de votre croix, ô mon Sauveur, je m’y attacherai par toutes les puissances de mon âme, et le souvenir de vos souffrances, de votre mort et de votre sang versé pour moi avec tant d’amour, amortira en moi l’attrait du plaisir et m’obtiendra la grâce de la victoire.

Oui, ô Jésus, j’en ai la confiance, votre sommeil n’est qu’apparent, votre cœur veille sur moi, et vos délais à me secourir ne sont qu’une nouvelle épreuve à laquelle vous soumettez ma foi et ma fidélité; mais bientôt vous ferez cesser cette épreuve, vous vous éveillerez, vous vous lèverez, vous commanderez avec autorité aux vents et à la mer, et vous rendrez à cette âme qui espère en vous et qui vous aime, le calme et la paix.

Ne permettez pas, Seigneur, que me confiant en vous, je me confie aussi en mes propres forces, et que par une imprudente et téméraire présomption, je m’expose volontairement au péril. Ce serait alors courir à ma perte, car vous n’avez pas promis le secours de votre grâce à celui qui cherche le danger et qui l’aime.

Ah ! pénétrez profondément mon âme du sentiment de sa faiblesse, ô Jésus, ne permettez pas qu’elle oublie jamais sa misère, le triste penchant qui l’incline si fortement au mal. Que le souvenir du passé, de tant de circonstances où elle a fait la triste expérience de l’inconstance et de la faiblesse de sa volonté, la rende prudente pour l’avenir et lui inspire une sage défiance d’elle-même.

Faites, ô Jésus, que je sois aussi vigilant à veiller, je dois et je veux veiller sur mes sens qui sont comme les portes par lesquelles la mort peut s’insinuer dans mon âme. Je veux surtout veiller sur mon cœur, sur ce cœur si insensible pour vous, ô mon Dieu, mais  si facile à se laisser séduire par les charmes trompeurs.

Mais je le sens, ô Jésus, quelle que soit ma vigilance, elle sera vaine, si vous ne veillez avec moi, pour moi et sur moi. Ah ! vous êtes entré dans mon âme, ô vigilant pasteur, elle vous appartient, elle est votre bien, votre héritage, votre conquête, vous l’avez acquise au prix de votre sang, rachetée  par vos souffrances et votre mort sur la croix, à tous les titres elle est à vous, mais elle est encore à vous par sa propre volonté.

Ne s’est-elle pas mille fois donnée à vous, ô Jésus, entièrement, volontairement et pour toujours? Veillez donc sur elle, comme sur votre héritage, veillez sur mes sens, et s’il faut la souffrance pour les assujettir à votre loi, je la bénirai et l’accepterai avec joie.

Veillez sur ce cœur dont vous voulez l’entière possession, cachez-le dans le vôtre, échauffez-le, embrasez-le au contact de ce cœur adorable. Concentrez en vous seul toute sa puissance d’aimer, et ne permettez pas qu’il vous dérobe la moindre de ses affections.

O Marie, vierge immaculée, Reine, protectrice et modèle des vierges, vous qui êtes terrible au démon comme une armée rangée en bataille, vous qui ayez foulé de votre pied vainqueur la tête de l’ennemi du genre humain, et dont le nom seul met en fuite et fait trembler les puissances infernales, étendez sur moi votre main maternelle, couvrez-moi de votre toute-puissante protection, et qu’elle soit pour moi un bouclier contre lequel viennent s’émousser et se briser tous les traits de mes ennemis.

C’est à votre cœur que je fais appel, ô Marie ; ce cœur est un cœur de mère, et le cri d’angoisse de votre enfant ne saurait le laisser insensible. Souvenez-vous, ô Vierge sainte, que c’est sur le Calvaire que vous êtes devenue ma mère, que j’ai reçu ce titre de votre enfant qui m’assure à jamais votre protection et votre amour.

Ah ! si mon âme est le prix du sang de votre bien-aimé Jésus, elle est aussi celui de vos larmes, de vos douleurs au pied de sa croix, ne la laissez donc pas périr ; défendez-la. Après Jésus, vous êtes, ô Marie, mon unique espérance. Oui, j’espère en votre bonté, en votre maternel amour, et mon espérance, j’en ai la douce confiance, ne sera pas confondue. Ainsi soit-il.

Léonie Guillebaut

EUCHARISTIE MÉDITÉE 19

EUCHARISTIE MÉDITÉE 19

Les Brouillards.

Seigneur, faites que je voie. Mc 10, 51

Eucharistie- Motif sculpté sur porte d'église - Bruxelles
Eucharistie- Motif sculpté sur porte d’église – Bruxelles

19e ACTION DE GRÂCES.

Je vous ai près de moi, ô adorable Sauveur, et cependant la foi seule me révèle votre divine présence ; des ténèbres me cachent la lumière de votre visage, mon esprit est troublé, mon cœur sans sentiment, sans force, sans énergie, et mon âme, pleine de tristesses et d’angoisses, lutte avec peine contre le découragement et se sent prête à défaillir.

Où êtes-vous, Seigneur? Où vous cachez-vous donc? Où faut-il vous chercher, si je ne vous trouve plus là où si souvent vous vous êtes révélé à mon âme avide de vous avoir, où tant de fois vous l’avez enivrée des joies de votre amour et de l’abondance de vos divines consolations? Hélas ! je vous cherche, je vous appelle en vain, vous paraissez sourd à la voix de mon humble prière comme au cri de ma douleur.

M’avez-vous donc abandonnée, ô Jésus, avez-vous rejeté pour toujours cette âme qui n’aspire qu’à vous, qui ne veut que vous et qui ne trouve qu’en vous sa joie, sa force, son bonheur et sa vie! Oh! vous le voyez, Seigneur, malgré vos rigueurs, malgré cette soustraction de votre présence qui fait couler ses larmes, sa volonté est toujours à vous, et si elle ne peut plus sentir votre amour, elle veut toujours vous aimer.

Mais ce sont mes infidélités, ô Jésus, et mon ingratitude qui vous ont forcé à vous éloigner de moi. J’ai abusé de vos grâces, j’ai blessé votre cœur par ma lâcheté à me vaincre, et à vous offrir les légers sacrifices que votre amour semblait me demander. Peut-être même n’ai-je pas reculé devant des fautes volontaires, parce qu’elles me semblaient légères.

J’ai blessé ainsi la délicatesse de votre amour, j’ai abreuvé votre divin cœur d’amertume et de douleur, et je le reconnais en gémissant, c’est ma seule malice qui a élevé entre vous et moi le nuage qui me cache la splendeur de votre face.

Pardonnez-moi, ô adorable Sauveur. Vous avez promis de ne pas repousser le cœur contrit et humilié, ne repoussez donc pas le mien ; voyez la sincérité de son repentir, l’amertume de sa douleur et sa ferme résolution de vous servir désormais avec plus de fidélité et de générosité.

Rien ne vous est caché, Seigneur, votre œil pénètre les replis les plus secrets de notre conscience et de notre cœur, et vous voyez que ce qui fait couler mes larmes, ce qui remplit mon âme d’une douleur si vive et si profonde, c’est bien plus le regret de vous avoir déplu, qu’un châtiment que vous m’imposeriez.

Ô bien-aimé Sauveur, mes misères sont grandes, mais votre miséricorde est plus grande encore, et jusque dans les rigueurs de votre justice, j’entrevois la tendresse de votre miséricordieux amour.

Oui, Seigneur, je crois à votre amour, j’espère en lui, malgré mon indignité ; vous avez trop fait pour mon âme pour l’abandonner et pour la perdre, et vos miséricordes passées me sont un gage de vos miséricordes à venir. C’est vous que j’ai offensé, ô mon Sauveur, c’est à vous que j’ai eu le malheur de déplaire, et cependant c’est en vous seul que j’espère, c’est à vous seul que j’ai recours au jour de mon affliction.

Si j’avais blessé le cœur d’un ami, d’un frère, d’un père, d’une mère même, je pourrais craindre de ne pas obtenir mon pardon, mais votre amour, je le sais, est plus grand, plus indulgent, plus généreux que ne le sont tous les amours de la terre, et quelque coupable que je sois, je sais que vous êtes plus miséricordieux encore que je ne suis coupable, et que votre bonté surpasse ma malice.

Aussi, ô Jésus, j’espère en vous, je veux espérer, s’il le faut, contre toute espérance, et dussiez-vous me  montrer toujours un visage sévère ou irrité, ma confiance n’en serait pas altéré; et rempli de la sainte audace qu’elle inspire, j’irais me cacher jusque dans les profondeurs de votre divin cœur.

Ah! laissez-moi, Seigneur, laissez-moi dès cet instant, chercher un refuge dans ce cœur adorable. N’est-il pas l’asile que vous avez ouvert et que vous offrez à tous, aux pécheurs comme aux justes? Je viens y chercher un refuge, y abriter mon âme triste et désolée ; laissez-moi m’abîmer dans cet océan d’amour et de miséricorde.

En vous donnant tout à moi, ô Jésus, vous me donnez tout ce que vous êtes, tout ce que vous possédez. Vous me donnez vos mérites, votre sang adorable, non pas seulement un peu de ce sang qui a payé la rançon de mon âme et celle de tous les pécheurs, mais vous me le donnez tout entier.

Je puis dire avec vérité en ce moment où je vous possède par la sainte communion : Il est pour moi le sang divin de Jésus, qui a jailli des plaies de son corps adorable, déchiré de verges dans le prétoire ; il est pour moi le sang qu’ont fait couler les épines de sa douloureuse couronne. Ils sont pour moi les ruisseaux de sang qui ont jailli de son divin cœur percé par la lance d’un soldat romain.

Ah ! puisque votre amour dans son infinie libéralité m’a mis en possession d’un trésor dont la valeur est plus que suffisante pour racheter le monde, souffrez que je l’offre à votre Père et que je lui dise en lui offrant ce trésor inestimable : De moi-même, ô mon Dieu, je suis insolvable, mais votre divin Fils m’a rendu riche,  que cette divine offrande attire votre miséricorde sur moi, sur le monde entier, et en particulier sur les âmes  que j’ai confiées à la tendre sollicitude du cœur de Jésus.

O Marie, ma sainte Mère, vous la plus pure et cependant la plus affligée des créatures, par la douleur dont fut percé votre cœur maternel lorsque vous avez perdu Jésus, par vos larmes et vos angoisses pendant les trois jours où vous l’avez cherché, je vous conjure maintenant d’avoir pitié de ma peine, de me venir en aide, de m’initier à vos sentiments d’humilité, de patience, de rendre ma volonté entièrement conforme à celle de Jésus. Ainsi soit-il.

D’après Léonie Guillebaut