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EUCHARISTIE MÉDITÉE 16

EUCHARISTIE MÉDITÉE 16

Le début du voyage, le bâton du voyageur.

Mon joug est doux, mon fardeau est léger. Mt. 11, 30

Eucharistie- Motif sculpté sur porte d'église - Bruxelles
Eucharistie- Motif sculpté sur porte d’église – Bruxelles

16e ACTION DE GRÂCES.

Elle est douce, ô Jésus, et remplie d’inénarrables délices la coupe que vous nous présentez parfois au banquet divin de l’Eucharistie.

Elle cause une sainte ivresse, et l’âme, après y avoir trempé ses lèvres, revient à vous toujours plus avide de ces pures jouissances dont votre Eucharistie est la source unique, jouissances qui contentent le cœur, sans le rassasier, qui irritent la soif qu’il a de s’unir à vous, jouissances enfin qui paraissent toujours nouvelles, et ne produisent jamais ni le dégoût, ni la satiété.

Je vous bénis, Seigneur, d’avoir permis à mon âme de s’enivrer parfois à cette coupe . Je bénis la main miséricordieuse qui a embelli les jours de ma jeunesse en répandant sur eux les joies de votre amour.

Je bénis, ô Jésus, la bonté de votre cœur, qui m’attirait à vous en remplissant le mien de si douces consolations, mais je le reconnais à ma honte, et j’en rougis à vos pieds; je croyais alors vous aimer, ô mon Dieu, et je n’aimais que moi ; je croyais vous chercher, et je ne cherchais que la douceur de vos consolations.

Semblable à un enfant qui vient se jeter dans les bras de sa mère pour jouir de ses caresses, je ne venais à vous, ô Jésus, que dans l’espérance de recevoir les vôtres. Et vous, Seigneur, loin de repousser cet amour si faible, si peu généreux, si intéressé, vous sembliez vous prêter à mes désirs avec une miséricordieuse bonté.

Et cependant, Seigneur, n’était-ce pas vous que j’aurais dû toujours chercher ? Devais-je préférer le bienfait au bienfaiteur ? les joies de votre amour à celui qui est lui-même la source de toute joie et de tout amour? Ah ! pardonnez à mon ignorance, ô Jésus, je ne savais pas alors ce que vous m’avez appris plus tard ; je ne comprenais pas ce que vous m’avez fait comprendre depuis.

C’était vous, ô bien unique, bien souverain que j’aurais dû chercher, et quand vous vous donniez à moi, alors même que vous ne m’aviez fait sentir ni joie, ni consolation, ce don ne devait-il pas me suffire, avec vous ne possédais-je pas tous les biens et la source de tous les biens ? N’êtes-vous pas, ô mon Dieu, la lumière, la vérité, la force, la vie?

N’est-ce pas vous qui dissipez les ténèbres de notre ignorance, qui toujours nous montrez la voie sûre qui conduit à vous, la force qui soutient notre faiblesse, la vie qui nous assure une glorieuse immortalité?

N’est-ce pas vous enfin dont la main divine relève le roseau à demi-brisé, vous qui brisez les liens des captifs et qui rendez la glorieuse liberté des enfants de Dieu à ceux qui gémissent sous le dur esclavage de Satan? Ah ! vous seul me suffisez, ô bien-aimé Sauveur, je ne veux que vous, je n’aspire qu’à vous et sans vous rien ne me suffit, rien ne saurait me contenter.

En vous donnant à moi dans votre Eucharistie, ô Jésus, vous me donnez votre corps, votre sang, votre âme, votre divinité, et après avoir reçu cet adorable sacrement, je puis dire avec vérité : Dieu est à moi ! à moi, être si petit, être d’un jour, perdu dans la foule des êtres, à moi que son souffle anime, à moi pécheur.

Je possède, je renferme en moi celui que l’univers ne peut contenir, le Créateur des mondes, celui dont la main puissante sema dans l’immensité ces milliers de globes lumineux qui roulent sur nos têtes, qui creusa le lit profond des mers et leur assigna les limites où doivent venir se briser leurs flots mugissants.

J’adore enfin en moi ce Dieu trois fois saint, qui voit des millions d’esprits célestes chanter sa gloire dans les extases de leur immortelle charité. Si vous n’étiez venu à moi que comme Dieu, ô Jésus, je tremblerais d’épouvante et me sentirais accablé sous le poids de votre infinie Majesté ; mais c’est comme Dieu et comme homme tout ensemble que vous vous êtes donné à moi.

En unissant votre divinité à la nature humaine, vous vous êtes en quelque sorte rapproché de mon néant, Vous avez voulu que nous ayons à voir en vous un frère, un ami, et que la crainte fasse place à la reconnaissance, à la confiance et à l’amour.

Non,  ô divin Emmanuel, je ne tremble plus, je ne sais plus qu’aimer quand je sens votre cœur palpiter à côté du mien, quand je possède en moi l’enfant Dieu de la crèche, l’homme Dieu du Calvaire? Ah ! je ne sais plus qu’espérer quand je puis me dire : il est à moi, tout est à moi, comme si j’étais seul à le posséder, ce Verbe incarné, cet Homme-Dieu si plein de compassion, de miséricorde, d’amour pour les hommes ses frères.

Je suis pauvre, je suis pécheur, je n’ai rien, mais avec Jésus tous ses biens sont à moi, tous les trésors de mérites qu’il a acquis pendant sa vie mortelle sont à moi, et si la dette que j’ai contractée par mes innombrables fautes envers la justice divine est immense, en puisant dans les trésors de Jésus je puis lui offrir plus encore que je ne lui dois.

Mon âme est couverte de péché; mais le sang adorable de la rédemption, ce sang divin qui inonde le monde, il m’appartient, je puis l’offrir à Dieu pour moi-même, pour celle de tous les pauvres pécheurs; pourquoi donc n’espérerais-je donc pas avec une inébranlable espérance en celui qui ne s’est révélé à moi que par des excès de miséricorde et d’amour?

O Jésus, bien-aimé Jésus, Dieu si aimant et si aimable de l’Eucharistie, si je pouvais un instant disposer de votre puissance. Ah ! laissez-moi vous le dire, je m’en servirais pour forger des chaînes si fortes qu’elles m’attacheraient à vous d’une manière indissoluble.

Mais que dis-je, Seigneur, ces chaînes, ne les avez-vous pas forgées vous-même, ce sont celles de l’amour, et l’âme qui vous aime, qui persévérera dans votre amour, n’est-elle pas unie à vous par des liens si étroits et si forts, que la mort, loin de les rompre, ne fait que leur assurer la durée de l’éternité.

Mais Seigneur, ce ne sont plus les consolations de ce divin amour que je cherche aujourd’hui dans votre Eucharistie. Il est une autre faveur à laquelle mon âme aspire avec toute l’ardeur de ses désirs et que j’ose vous supplier de ne pas me refuser, c’est celle de me faire communier à vos goûts, à vos sentiments, à vos vertus, à vos désirs, en même temps que je communie à votre chair et à votre sang adorables.

Donnez-moi, ô Sauveur, une entière conformité avec vous, gravez en mon âme votre divine ressemblance , et s’il faut que la croix soit le stylet qui l’y burine ,  qu’importe ? pourvu que votre grâce soutienne ma faiblesse , je m’estimerai heureux de souffrir pour vous qui avez enduré pour l’amour de moi tant de souffrances , d’humiliations et de douleurs.

Trop longtemps, ô mon Jésus, je n’ai cherché que moi à votre service, désormais je ne veux plus chercher que vous, ma seule ambition est de vous satisfaire, de contenter votre divin cœur, de le glorifier et je ne croirai pas acheter ce bonheur trop cher par tous les renoncements, par tous les sacrifices qu’il vous plaira d’exiger de moi.

Que d’autres, ô Jésus, boivent à longs traits à la coupe de l’Eucharistie, je veux plus approcher mes lèvres du calice de vos douleurs ; je ne dédaigne pas vos consolations, ô mon Dieu, mais je m’en reconnais indigne.

Ô Marie, mère du pur amour, obtenez-moi la grâce d’aimer votre divin Fils avec désintéressement et générosité. Ainsi soit-il !

Léonie Guillebaut

PRIÈRE DU SOIR

PRIÈRE DU SOIR

Seigneur, dans le silence de la nuit,
tu continues de poser ton regard
sur chacun de tes enfants.

Vois tous ceux qui te cherchent encore
sur une rive où tu n’es pas,
mangeant un pain qui ne rassasie pas.

Toi la vraie nourriture,
attire-nous dans les profondeurs
de l’amour.

Vois aussi ceux qui déjà
travaillent pour toi
sans le savoir.

Alors ceux qui sont loin
avec ceux qui sont proches
se réjouiront ensemble.

Ils te loueront d’avoir traversé
l’épaisseur de leur nuit
pour les entraîner dans le cœur du Père
par ta puissance de Ressuscité.

d’après Éphata

EUCHARISTIE MÉDITÉE 15

EUCHARISTIE MÉDITÉE 15

Première entrevue du guide et du pèlerin, ou le plus beau jour de la vie.

Laissez venir à moi les petits enfants. Mt 19, 14 ; Lc 18, 16 ; Mc 10 14

Eucharistie- Motif sculpté sur porte d'église - Bruxelles
Eucharistie- Motif sculpté sur porte d’église – Bruxelles

15e ACTION DE GRÂCES.

Je vous adore, ô Jésus, mon Sauveur et mon Dieu! vous qui avez réjoui les jours de mon enfance et ceux de ma jeunesse, ami toujours fidèle qui revenez encore au déclin de ma vie consoler les jours de ma vieillesse; ah! réchauffez à la chaleur de votre divin cœur ce cœur devenu de nouveau votre tabernacle et votre autel.

Je ne vous demande pas, Seigneur de renouveler en lui les joies que lui fit éprouver votre première visite ; mais rendez à ce pauvre cœur flétri par le péché et si souvent brisé par la douleur, rendez-lui l’innocence, la ferveur, l’amour avec lequel il vous reçut pour la première fois. Oubliez mes fautes, mon ingratitude, mes infi­délités, et couvrez-les toutes de votre grande, de votre infinie miséricorde.

Souffrez, Seigneur, que la voix de mon repentir se mêle à l’hymne de ma reconnaissance, et qu’en vous offrant mes humbles actions de grâces pour tous les bienfaits dont vous m’avez comblé depuis le jour à jamais béni où vous êtes venu à moi pour la pre­mière fois ; je déplore à vos pieds, mon ingratitude, ma faiblesse, mes nombreuses infidélités.

Je ne puis, ô Jésus, me rappeler sans rougir, sans que les larmes viennent mouiller mes yeux et la douleur oppresser mon cœur, mes promesses et mon inconstance. Et cependant vous le savez, Seigneur, elles étaient sincères ces promesses et faites avec l’élan d’une vive et profonde reconnaissance.

Oh ! alors il me semblait que l’amour était en moi, plus fort que la mort et que rien ne pourrait ralentir l’ardeur du feu divin dont je sentais brûler mon cœur. Hélas ! combien de fois ne vous l’ai-je pas repris ce misérable cœur ; que de fois n’ai-je pas cherché à étancher ailleurs qu’en vous cette soif de bonheur et d’amour qui dévorait mon âme et que seul vous pouviez apaiser.

Ah ! soyez béni, Seigneur, de l’avoir créée cette âme si grande et si profonde, que nul autre que vous ne peut combler le vide qui est en elle et répondre à ses aspirations qui tendent sans cesse à l’infini. Non, non rien de tout ce qui est sur la terre n’a pu et ne pourra jamais la satisfaire. C’est le ciel qu’elle demande, le ciel auquel elle aspire, et le ciel, ô Jésus, c’est vous ! N’en êtes-vous pas la gloire, la joie, le bonheur?

Soyez béni encore, ô Jésus, d’avoir permis toutes ces déceptions, qui si souvent ont fait saigner mon cœur ; mais qui l’ont forcé à se retourner vers vous et à vous rendre ce qu’il vous dérobait. Oui, je vous bénis, Seigneur, pour ces peines, pour ces épreuves, qui si souvent ont oppressé mon âme et qui toujours ont été misé­ricordieuses pour moi.

Ma route a été longue, elle a été pénible, vous le savez, ô mon Dieu, mes pieds se sont souvent meurtris aux aspérités du chemin, il n’a pas été pour moi toujours bordé de fleurs ; mais bien plus souvent encombré d’épines dont les piqûres ont fait à mon cœur de profondes et douloureuses blessures.

Je n’ai connu que  peu  des bon­heurs, des joies de la vie; mais aucune de ses douleurs ne m’a été étrangère; mes lèvres ne se sont pas seulement trempées à la coupe amère de l’affliction, je l’ai épuisée jusqu’à la lie et son amer­tume a pénétré mon âme et l’a souvent couverte de flots de tristesse et de douleur.

Mais de toutes ces épreuves, de toutes ces souffrances, de toutes ces larmes versées, je ne me plains pas, Seigneur, dans toutes je reconnais votre miséricorde et votre amour. Toutes d’ailleurs n’ont-elles pas été adoucies, con­solées par vous ? Votre Eucharistie n’a-t-elle pas été le pain qui a fortifié mon âme au jour de l’adver­sité, et l’amertume de mes larmes ne s’est-elle pas changée en douceur ?

En me reportant par la pensée, ô Jésus, à ce jour béni où pour la première fois mon cœur d’enfant devint votre tabernacle, où avec vous le Ciel descendit en lui, je sens s’éveiller en moi les plus doux sentiments de la reconnaissance. Après tant d’années écoulées, ce souvenir toujours pal­pitant des mêmes émotions de bonheur et d’amour réjouit encore mon âme.

Le passé revit à mes yeux, je me revois dans votre temple entouré de ces parents, de ces amis qui saluaient de leurs larmes de joie le jour le plus beau, le plus heureux de ma vie, je revois cette tendre mère dont les yeux baignés de pleurs m’enveloppaient d’un long regard d’amour, ce bon père dont les mains s’étaient étendues sur ma tête et qui d’une voix émue et tremblante d’émotion avait appelé sur moi vos grâces et vos bénédictions.

Hélas! Seigneur, ils rêvaient pour moi les joies, les bonheurs de la terre, ils vous demandaient pour leur enfant chéri un doux, un riant avenir. Vous n’avez pas rejeté leurs prières, ô mon Dieu, vous ne m’avez pas refusé les grâces, les bénédictions qu’ils vous demandaient pour moi ; mais votre amour plus éclairé que le leur, a choisi pour moi, non les grâces qu’ils me désiraient, mais les plus précieuses, les plus utiles, les grâces de la souffrance et de la croix.

N’ai-je pas à vous bénir, Seigneur, d’avoir choisi pour moi et de m’avoir donné ce que vous avez choisi pour vous? Ma part n’a-t-elle pas été la meilleure puisqu’elle fut la vôtre?

Et maintenant, Seigneur, elles se sont éteintes toutes ces étoiles qui brillèrent sur le ciel de ma vie pendant mes premières années ; ils ont cessé de battre, tous ces cœurs qui réchauffaient mon cœur d’enfant à la chaleur de leur amour.

Ils ne sont plus, tous ces êtres chéris dont la sollicitude et la tendresse m’étaient une si douce image de la vôtre : hélas ! je les cherche en vain; la mort les a tous moissonnés, sa main a creusé des tombes tout autour de moi, elle en a semé la route que j’ai parcourue.

Ah! pardonnez, Seigneur, mes regrets et mes larmes; je pleure, mais je bénis la main qui m’avait tout donné et qui m’a tout repris. Vous me les avez ôtés, mais pour les recueillir et me les rendre un jour. A ces pauvres exilés de la terre, vous avez ouvert les portes de la patrie, et votre main divine a essuyé leurs larmes comme un jour, je l’espère, elle essuiera les miennes.

Et si ma pensée se reporte aux jeunes convives qui pour la première fois prirent place avec moi à votre table sainte, c’est encore en vain que je les cherche et les appelle, le silence seul répond à ma voix, déjà ils ont disparu; presque tous sont tombés sous les coups de la mort; pour beaucoup le voyage n’a duré qu’un jour, et la mort n’a pas attendu l’automne et le soir de la vie pour moissonner ses fleurs naguère si brillantes de jeunesse et de fraî­cheur.

Beaucoup sont tombés sous sa faux avant de s’être entièrement épanouies. J’ai vu tout tomber, tout disparaître, tout périr autour de moi, ô mon Dieu. Dans le passé je ne vois plus que des ruines, que des espérances déçues, que des rêves de bonheur évanouis, tous les appuis sur lesquels j’ai voulu reposer mon cœur lui ont manqué, partout je n’ai trouvé que mécomptes, déceptions, douleurs.

Seul, ô Jésus, vous avez été pour moi l’ami toujours constant, l’appui qui jamais ne m’a fait défaut; seul votre amour ne m’a jamais manqué, seul il me reste ; mais aussi seul il suffît à toutes les aspirations de mon âme, il comble tous les vides qui se sont faits en elle, élève mes espérances bien plus haut que cette terre, où rien n’est stable, où tout périt; et votre Eucharistie, ô Jésus, console les jours de ma vieillesse, comme elle a réjoui les jours de ma jeunesse.

Elle adoucit la fin de mon triste pèlerinage, et je l’espère de votre bonté, ô mon Sauveur, elle sanctifiera mes derniers pas.

O Marie, ma tendre mère, obtenez que l’éternelle communion du ciel succède pour moi à la communion de la terre. Ainsi soit-il !

Léonie Guillebaut