Poésie pour nous préparer au 25 mars,
jour de l’Annonce faite à Marie
LA MADONE DES CHAMPS
(A MES FILLES)
Toujours notre Madone
Est là, levant sa main,
Entre le ciel qui tonne
Et les blés du chemin :
Dans l’herbe haute assise,
Au salut des passants,
Elle n’a point d’église ,
De cierges ni d’encens.
Sous le toit d’aubépines,
Qui lui sert de palais,
L’oiseau chante matines
Dans l’arbre pur et frais.
Les enfants du village
Sont ses anges élus,
Et les bruits du feuillage
Lui sonnent l’angélus !
Son regard sans colère
Parle au cœur repentant ;
Son doux silence éclaire
L’aveugle qui l’entend ;
Un pauvre l’a trouvée
Au fond du ravin creux;
Et Dieu l’a conservée
Aux autres malheureux!
Prenez pour confidente
Sa charité sans voix ;
La voix la plus prudente
Nous trahit quelquefois :
Dans son chaste mystère,
A l’abri des regrets,
Au-dessus de la terre
Enfermez vos secrets !
Quand sur ses pieds de reine
J’ai mis mon front brûlant,
Je sens veine par veine
Couler un calme lent;
Filles de Notre-Dame ,
Dormez sur ses genoux ;
Pour élever votre âme,
Elle en sait plus que nous !
Marceline DESBORDES VALMORE
dans PAUVRES FLEURS