Trois cris retentissent au récit de la Passion. Le cri hostile du crucificateur, le cri d’amour du crucifié, et le cri d’espérance des jeunes. Une polyphonie expliquée par le Pape François dans son homélie lors de la messe du dimanche des Rameaux et de la Passion du Seigneur, sommet de l’année liturgique, qu’il a célébrée place Saint-Pierre à Rome.
Le récit est autant radieux que douloureux. La lecture de la Passion du Christ, «ses histoires de joie et de souffrances, d’erreurs et de succès», sont à rapprocher de nos existences propres.

Ombres et lumières d’une fragile humanité
Tout comme Judas ou Pierre, femmes et hommes de notre temps, nous sommes capables «d’aimer autant que de haïr»…, conflit permanent qui sévit au sein de l’homme.
D’un côté, l’homme est capable «de courageux sacrifices», de l’autre, il sait «se laver les mains» au moment opportun ; d’un côté il est capable «de fidélité», de l’autre de «grands abandons et de grandes trahisons».
Parmi de telles batailles intérieures, différents cris résonnent. Un arsenal de sonorités qui laisse entendre «le cri de celui dont la voix ne tremble pas pour hurler: ‘’Crucifie-le !’’»
Ce cri issu du vacarme hiérosolymitain accompagnant l’entrée du Christ dans la ville, n’est assurément pas spontané, avance le Souverain Pontife, proposant une réflexion sur «l’arrogance, l’autosuffisance et l’orgueil de la calomnie», associée à ce mauvais cri.
Le poison des réalités truquées
«Crucifie-le», cet ordre lapidaire venu de la foule, est «artificiel, construit, fait de mépris, de calomnie et de faux témoignages suscités». Une voix manipulatrice et sans scrupules qui présente des réalités truquées pour défigurer les visages, en l’occurrence celui du Christ, et les transformer en «malfaiteurs.»
Des intrigues fabriquées et préfabriquées qui tuent les rêves, détruisent l’espérance, suppriment la joie. Résultat: les cœurs se blindent, la charité se refroidit, la solidarité s’endort, les idéaux s’éteignent. Un tableau bien sombre auquel seule la Croix peut redonner des couleurs.
«Le meilleur antidote, c’est de regarder la croix du Christ» pour demeurer dans la joie. Une joie, «motif de gêne et d’agacement pour certains», parce qu’un jeune joyeux est «difficile à manipuler».
«La décision de crier appartient aux jeunes»
Ainsi se distingue un troisième cri, après celui du crucificateur et du crucifié: le cri des jeunes, empreint d’un ton prophétique s’appuyant sur saint Luc: «Si eux se taisent, les pierres crieront» (Lc 19, 39-40).
Le Pape tient particulièrement à réveiller une jeunesse parfois «endormie ou anesthésiée» -contre ou de son plein gré-. L’objectif est d’éviter de tomber dans la vocifération du crucificateur, fausse et manipulatrice. «Tous les jeunes doivent donc se décider à crier» a dit le Pape qui à l’issue de la messe a reçu des mains d’un jeune le document final de la réunion pré-synodale tenue à ce sujet toute la semaine à Rome.
Ce sursaut doit se faire «avant que les pierres ne crient». «Si les autres se taisent, si nous, les aînés et les responsables, sommes silencieux, si le monde se tait et perd la joie, je vous le demande : vous, est-ce que vous crierez ?»