Pour les chrétiens, il ne faut pas céder à la tentation de l’échec.

Éprouvée par les chrétiens, la fatigue spirituelle qui « enlève tout espérance », était le thème dominant de l’homélie prononcée par le Saint-Père ce mardi matin. Une invitation à ne pas céder à la tentation de l’échec, mais à choisir plutôt de cultiver l’espérance.

Au cours de la messe célébrée à Sainte Marthe ce matin, le Pape a commenté la première lecture tirée du Livre des nombres (Nombres 21.4-9), approfondissant le thème de la «fatigue».

L’esprit d’insatisfaction conduit aux idoles

le courage de continuer - Winston Churchill
le courage de continuer – Winston Churchill

Parfois les chrétiens «préfèrent l’échec» qui ouvre la voie aux lamentations et à l’insatisfaction, terrain «parfait pour la semence du diable». «Mais en chemin, le peuple perdit courage», rapporte l’Écriture. «L’enthousiasme» et l’«espérance» des Hébreux fuyant l’esclavage semblent avoir disparu peu après leur départ d’Égypte, à tel point qu’ils récriminent «contre Dieu et contre Moïse».

«L’esprit de fatigue nous enlève l’espérance, la fatigue est sélective: elle nous fait toujours voir le mauvais côté de ce que nous sommes en train de vivre, et oublier les choses bonnes que nous avons reçues». «Et nous, quand nous sommes dans la désolation, nous ne supportons pas le voyage et nous cherchons refuge dans les idoles ou dans les murmures, ou tant d’autres choses.»

L’esprit de fatigue «nous conduit aussi à une façon de vivre insatisfait: l’esprit d’insatisfaction. Tout ne nous plaît pas, tout va mal». Jésus lui-même y fait référence lorsqu’il explique «que nous sommes comme des enfants qui jouent».

Retrouver le goût de l’espérance

Le Pape est ensuite revenu sur ces chrétiens qui ont «peur des consolations», «peur de l’espérance», «peur des caresses du Seigneur». Leur comportement est favorable aux agissements du diable. Ils en viennent à mener «une vie de pleureuses ratées».

Telle est «la vie de tant de chrétiens. Ils vivent en se lamentant, ils vivent en critiquant, ils vivent dans le murmure, ils vivent insatisfaits». Ils s’attachent «à l’échec, c’est-à-dire la désolation». Mais la désolation vient «du serpent, le serpent ancien, celui du Paradis terrestre». Le même serpent qui «avait séduit Ève, et c’est une manière de faire voir le serpent que l’on a à l’intérieur, qui mord toujours dans la désolation».

Passer sa vie à se lamenter, c’est le propre de ceux qui «ne supportent pas l’espérance», «ne supportent pas la résurrection de Jésus». «Mais en chemin, le peuple perdit courage». Regrettant que l’on soit souvent «plus attaché à l’insatisfaction, à la fatigue, à l’échec», prions pour que «le Seigneur nous libère de cette maladie».

La corruption est pire que le péché

Au croisement profondément humain entre «innocence et péché, corruption et loi», Jésus demande de toujours regarder les autres avec miséricorde, sans se faire le juge de leur cœur. «La parole de Dieu que l’Église offre aujourd’hui à notre méditation semble porter sur deux femmes surprises en délit d’adultère: un adultère faux, fictif; l’autre vrai».

Suzanne et les vieillards. Cette notice fait partie d'une série : Petrus Comestor, Bible historiale, Meermanno Koninklijke Bibliotheek, La Haye (n° 90 / 105) Datation : 1372
Suzanne et les vieillards. Cette notice fait partie d’une série : Petrus Comestor, Bible historiale, Meermanno Koninklijke Bibliotheek, La Haye (n° 90 / 105) Datation : 1372

La référence porte sur l’épisode de Suzanne, racontée dans le livre de Daniel (13, 1-9.15-17.19-30.33-62), et sur celui de la femme surprise en adultère, racontée par Jean (8, 1-11). A travers ces deux femmes donc, «le message est profond» car dans les deux lectures, «quatre personnes se donnent rendez-vous, quatre situations diverses se rencontrent».

C’est précisément «ce que l’Église veut que nous pensions, voyions aujourd’hui: on rencontre l’innocence et le péché, la corruption et la loi». En effet, de la liturgie ressort «une rencontre entre ces quatre choses: innocence, péché, corruption et loi».

Le Pape est parti de l’«innocence de cette femme, Suzanne, faussement accusée par ces deux juges âgés: elle est contrainte de choisir: ou la fidélité à Dieu et à la loi, ou sauver sa vie». Qui sait, «peut-être Suzanne avait-elle d’autres péchés, parce que nous sommes tous pécheurs».

En effet, «la seule femme qui n’ait pas péché est la Vierge; tous les autres, nous tous, avons péché». Mais «Suzanne était une femme dont les péchés n’étaient pas graves, ce n’était pas une adultère, elle était fidèle à son mari»; et cela est «l’innocence» présentée par la liturgie.

Puis voilà «le péché; l’autre femme a été surprise en train de pécher, elle avait vraiment péché, elle était adultère, elle n’avait pas été fidèle à son mari».

Puis arrive «la corruption»: celle «des juges dans les deux cas, tant avec Suzanne qu’avec la femme adultère», parce que «dans les deux cas, les juges étaient corrompus». Et enfin, il y a «la loi, la plénitude de la loi: Jésus».

En réalité, la corruption est pire que le péché. Les corrompus «croient bien faire les choses, ils se jugent avec impunité». De plus, «dans le cas de Suzanne», les deux vieillards «confessent même leur corruption» et «disent la vérité: ils étaient corrompus par les vices de la luxure».

Ils disent à Suzanne: «Les portes du jardin sont fermées, on ne nous voit pas; nous te désirons, sois consentante et viens avec nous. Autrement nous porterons contre toi ce témoignage: il y avait un jeune homme avec toi, et c’est pour cela que tu as renvoyé les jeunes filles».

En somme, ils lui disent: «ou bien tu fais cela, ou bien nous apporterons un faux témoignage». Ce n’est pas le premier cas dans la Bible où apparaissent les faux témoignages», «pensons à Jésus, qui est condamné à mort pour faux témoignage, pensons à saint Étienne».

Mais, selon le passage évangélique de Jean, «les docteurs de la loi qui apportent cette femme sont eux aussi corrompus — scribes, certains pharisiens — et ils disent à Jésus: “Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère”».

«Et il y a la quatrième personne, Jésus: la plénitude de la loi». Et «on le rencontre comme maître de la loi devant ceux qui sont maîtres de la loi: “toi, qu’en dis-tu?” lui demandent-ils».

Aux «faux juges qui accusaient Suzanne», Jésus répond ainsi «par la bouche de Daniel: “Tu es de la race de Canaan et non de Juda! La beauté t’a dévoyé et le désir a perverti ton cœur. C’est ainsi que vous traitiez les filles d’Israël, et, par crainte, elles se donnaient à vous”».

Et «à l’autre il dit: “Toi qui as vieilli dans le mal, tu portes maintenant le poids des péchés que tu as commis autrefois en jugeant injustement: tu condamnais les innocents et tu acquittais les coupables”».

Jésus est la plénitude de la loi, et Jésus juge avec miséricorde. C’est pourquoi il est opportun de se demander si «nous sommes corrompus ou pas encore». Il est bon alors de s’arrêter et de regarder «Jésus qui juge toujours avec miséricorde: “moi non plus je ne te condamne pas, va, et désormais ne pèche plus”».

PAPE FRANÇOIS – MÉDITATION MATINALE EN LA CHAPELLE DE LA MAISON SAINTE-MARTHE Lundi 3 avril 2017


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condamner ou non la femme adultère

PAPE FRANÇOIS

ANGÉLUS

Piace Saint Pierre
Ve Dimanche de Carême,
7 avril 2019


Chers frères et sœurs, bonjour!

En ce cinquième dimanche de carême, la liturgie présente l’épisode de la femme adultère (voir Jn 8, 1-11). Cela contraste avec deux attitudes: celle des scribes et des pharisiens d’une part, et celle de Jésus de l’autre.

Les premiers veulent condamner la femme, car ils se sentent les gardiens de la loi et de son application fidèle. Au lieu de cela, Jésus veut la sauver, car il personnifie la miséricorde de Dieu qui, en pardonnant, rachète, réconcilie, renouvelle.

Voyons donc l’événement. Pendant que Jésus enseigne dans le temple, les scribes et les pharisiens lui apportent une femme surprise en adultère; ils la placent au milieu et demandent à Jésus si elle doit être lapidée comme le prescrit la loi de Moïse. L’évangéliste précise qu’ils ont posé la question « pour le tester et pour l’accuser » (v. 6).

On peut supposer que leur but était le suivant – voir la méchanceté de ces personnes: le « non » à la lapidation aurait été une raison pour accuser Jésus de désobéissance à la Loi; le « oui », au contraire, le dénoncer à l’autorité romaine, qui s’était réservée les sentences et n’admettait pas le lynchage populaire. Et Jésus doit répondre.

Les interlocuteurs de Jésus sont enfermés dans l’étroitesse du légalisme et veulent enfermer le Fils de Dieu dans leur perspective de jugement et de condamnation. Mais il n’est pas venu dans le monde pour juger et condamner, mais pour sauver et offrir aux gens une nouvelle vie.

Et comment Jésus réagit-il à ce test? Tout d’abord, il reste un moment en silence et se penche pour écrire avec le doigt sur le sol, comme pour se rappeler que le seul législateur et juge est Dieu qui avait écrit la loi sur pierre. Et ensuite il dit: « Quiconque d’entre vous est sans péché, lancez-lui la pierre en premier » (v. 7).

De cette manière, Jésus fait appel à la conscience de ces hommes: ils se sentaient eux-mêmes des « champions de la justice », mais il les appelle à prendre conscience de leur condition d’hommes pécheurs, pour lesquels ils ne peuvent revendiquer le droit de vivre ou de mourir par eux-mêmes.

À ce moment-là, les uns après les autres, en commençant par les plus âgés – c’est-à-dire les plus expérimentés dans leurs propres misères – ils sont tous partis,renonçant à lapider la femme.

Laissons tomber de nos mains les pierres du dénigrement et de la condamnation, du bavardage que nous voudrions parfois lancer contre d’autres. Quand on tire sur les autres, on jette des pierres, on est comme ceux-là.

À la fin, il ne reste que la femme et Jésus, au milieu: « le misérable et la miséricorde », dit saint Augustin (dans Jean 33.5). Jésus est le seul sans faute, le seul à pouvoir lui jeter la pierre, mais il ne le fait pas, car Dieu « ne veut pas la mort du pécheur, mais qu’il soit converti et vive » (voir Ez 33.11).

Et Jésus congédie la femme avec ces mots prodigieux: « Va maintenant et ne pèche plus » (v. 11). C’est ainsi que Jésus ouvre devant elle un nouveau chemin, créé par la miséricorde, un chemin qui nécessite son engagement à ne plus pécher.

C’est une invitation valable pour chacun d’entre nous: lorsque Jésus nous pardonne, il nous ouvre toujours un nouveau chemin pour aller de l’avant. En cette période de carême, nous sommes appelés à nous reconnaître pécheurs et à demander pardon à Dieu, lequel à son tour nous réconcilie, nous donne la paix, nous fait commencer une nouvelle histoire.

Toute vraie conversion vise un nouvel avenir, une nouvelle vie, une belle vie, une vie sans péché, une vie généreuse. N’ayons pas peur de demander pardon à Jésus car il ouvre la porte à cette nouvelle vie.

Que la Vierge Marie nous aide à témoigner de tout l’amour miséricordieux de Dieu qui, en Jésus, nous pardonne et renouvelle notre existence en nous offrant toujours de nouvelles possibilités.

Je vous souhaite à tous un bon dimanche. S’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi. Merci.


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