une Église humble qui se laisse blesser

S’approcher de la réalité des jeunes

«Ces Journées Mondiales de la Jeunesse sont une occasion unique pour sortir à la rencontre et s’approcher davantage de la réalité de nos jeunes, pleins d’espérance et de désirs, mais aussi profondément marqués par tant de blessures. (…) Avec eux, nous pouvons imaginer comment rendre plus visible et plus crédible l’Évangile dans le monde où nous devons vivre ; ils sont comme un thermomètre pour savoir où nous en sommes comme communauté et comme société».

«Ils portent avec eux une inquiétude que nous devons valoriser, respecter, accompagner, et qui nous fait tant de bien à tous parce qu’elle nous désinstalle et nous rappelle que le pasteur ne cesse jamais d’être disciple et qu’il est en chemin. Cette saine inquiétude nous met en mouvement et nous devance.»

Le Pape  François a repris  les termes d’une homélie de Mgr Romero en 1978 : «Je vous invite donc à promouvoir des programmes et des centres éducatifs qui sachent accompagner, soutenir et renforcer vos jeunes ; des jeunes « récupérés » dans la rue, avant que la culture de mort, « en leur vendant de la fumée » et des solutions magiques, ne s’empare et ne profite de leur esprit. Et faites-le non pas avec paternalisme, du haut vers le bas, parce que ce n’est pas ce que le Seigneur nous demande, mais comme des pères, comme de frères à frères. Ils sont le visage du Christ pour nous, et nous ne pouvons pas aller au Christ du haut vers le bas, mais du bas vers le haut.» 

«Ils sont nombreux les jeunes qui ont été douloureusement séduits par des réponses immédiates qui hypothèquent la vie. Les pères synodaux nous l’ont dit : par durcissement ou par manque d’alternatives, ils se trouvent plongés dans des situations très conflictuelles qui n’ont pas de solution à court terme : violence domestique, homicides contre les femmes – quel fléau vit notre continent à ce sujet ! –, bandes armées et criminelles, trafic de drogue, exploitation sexuelle des mineurs et de non mineurs, etc., et ça fait mal de constater qu’à la racine de beaucoup de ces situations, se trouve une expérience d’orphelin, fruit d’une culture et d’une société qui est partie « dans tous les sens ».»

L’attention aux migrants

Évoquant un sujet d’une actualité brûlante pour l’Amérique centrale, le Pape a rappelé que «beaucoup de migrants ont un visage jeune, ils recherchent un bien plus grand pour leurs familles, ils n’ont pas peur de risquer et de tout laisser, afin de leur offrir le minimum de conditions qui leur garantissent un avenir meilleur. A ce sujet, il ne suffit pas seulement de dénoncer, mais nous devons annoncer concrètement une « bonne nouvelle ». L’Église, grâce à son universalité, peut offrir cette hospitalité fraternelle et accueillante, pour que les communautés d’origine et celles d’accueil dialoguent et contribuent à dépasser les peurs et les méfiances, et consolident les liens que les migrations, dans l’imaginaire collectif, menacent de rompre. « Accueillir, protéger, promouvoir et intégrer » peuvent être les quatre verbes avec lesquels l’Église, dans cette situation migratoire, conjugue sa maternité dans l’aujourd’hui de l’histoire.»

« Romero n’était pas un administrateur de ressources humaines, il ne gérait pas des personnes ni des organismes, il sentait avec l’amour d’un père, d’un ami et d’un frère. Une barre un peu haute, mais une barre dans le but d’évaluer notre cœur épiscopal, une barre face à laquelle nous pouvons nous interroger : quand est-ce que je suis affecté par la vie de mes prêtres ? Quand suis-je capable de me laisser toucher par ce qu’ils vivent, de pleurer de leurs souffrances, ainsi que de fêter leurs joies et de m’en réjouir ? Le fonctionnalisme et le cléricalisme ecclésial – si tristement répandus et qui représentent une caricature et une perversion du ministère – commencent à être évalués par ces questions.»

La disponibilité des évêques pour les prêtres

Les prêtres «sont exposés à une multitude de situations quotidiennes qui peuvent les rendre plus vulnérables et, pour cette raison, ils ont besoin également de notre proximité, de notre compréhension et de notre encouragement, de notre paternité. Le résultat du travail pastoral, de l’évangélisation dans l’Église et de la mission, ne repose pas sur la richesse des ressources et des moyens matériels, ni sur le nombre d’évènements ou d’activités que nous réalisons, mais sur la centralité de la compassion : une des plus grandes marques distinctives que nous puissions offrir comme Église à nos frères».

«Il y a beaucoup de choses que nous faisons tous les jours et que nous devrions confier à d’autres. Ce que nous ne pouvons pas confier, en revanche, c’est la capacité d’écouter, la capacité de suivre l’état de santé et la vie de nos prêtres. Nous ne pouvons pas déléguer à d’autres la porte ouverte à leur intention. Porte ouverte qui crée les conditions permettant la confiance plus que la peur, la sincérité plus que l’hypocrisie, l’échange franc et respectueux plus que le monologue disciplinaire». L’évêque doit donc être «un homme de discernement qui sache orienter et trouver des chemins concrets et praticables aux différents carrefours de chaque histoire personnelle».

Il convient de vivre avec humilité, selon cette parole de saint Ignace de Loyola : «La pauvreté est une mère et un mur». «Mère parce qu’elle nous invite à la fécondité, à engendrer, à être capables de donner, chose impossible d’un cœur avare et qui cherche à accumuler. Et un mur parce qu’elle nous protège de l’une des tentations les plus subtiles à laquelle nous sommes confrontés, nous les consacrés, à savoir la mondanité spirituelle : c’est-à-dire, revêtir de valeurs religieuses et « pieuses » l’appât du pouvoir et le fait de vouloir se mettre en avant, la vanité, y compris l’orgueil et l’arrogance», a-t-il dit, avant de réciter un Ave Maria avec les évêques.