Souvenir, passion et réconfort du Cœur de Jésus

Souvenir, passion et réconfort du Cœur de Jésus

Alors que nous commémorons avec gratitude le don de ce siège de l’Université catholique, je voudrais partager quelques réflexions sur son nom. Il est dédié au Sacré-Cœur de Jésus, auquel ce jour, le premier vendredi du mois, est dédié. En contemplant le Cœur du Christ, nous pouvons nous laisser guider par trois mots : souvenir, passion et réconfort.

 Le Sacré-Coeur de Paris
Le Sacré-Cœur de Paris

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Je me souviens. Se souvenir signifie « retourner au cœur, revenir avec le cœur ». Se souvenir. A quoi le Cœur de Jésus nous fait-il revenir ? A ce qu’il a fait pour nous : le Cœur du Christ nous montre Jésus qui s’offre : c’est le condensé de sa miséricorde.

En le regardant – comme le fait Jean dans l’Évangile (19 : 31-37) – il est naturel de se souvenir de sa bonté, qui est gratuite, ne peut être achetée ni vendue, et inconditionnelle, ne dépend pas de nos œuvres, elle est souveraine. Et ça bouge.

Dans la précipitation d’aujourd’hui, parmi mille courses et soucis continus, nous perdons la capacité de nous émouvoir et de ressentir de la compassion, car nous perdons ce retour au cœur, c’est-à-dire la mémoire, la mémoire, le retour au cœur. Sans mémoire, les racines sont perdues et sans racines, vous ne pouvez pas grandir. Cela nous fait du bien de nourrir la mémoire de ceux qui nous ont aimés, soignés, soulagés.

Aujourd’hui, je voudrais renouveler mon « merci » pour les soins et l’affection que j’ai reçus ici. Je crois qu’en cette période de pandémie cela nous fait du bien de nous souvenir même des périodes les plus subies : pour ne pas nous attrister, mais pour ne pas oublier, et pour nous guider dans nos choix à la lumière d’un passé très récent.

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Je me demande : comment fonctionne notre mémoire ? En simplifiant, nous pourrions dire que nous nous souvenons de quelqu’un ou de quelque chose lorsqu’il touche notre cœur, lorsqu’il nous lie à une affection particulière ou à un manque d’affection. Eh bien, le Cœur de Jésus guérit notre mémoire parce qu’il la ramène à l’affection fondatrice. La racine sur la base la plus solide.

Cela nous rappelle que peu importe ce qui nous arrive dans la vie, nous sommes aimés. Oui, nous sommes des êtres aimés, des enfants que le Père aime toujours et en tout cas, des frères pour lesquels bat le Cœur du Christ. Chaque fois que nous scrutons ce Cœur, nous nous découvrons « enracinés et fondés dans la charité », comme l’a dit l’Apôtre Paul dans la première lecture d’aujourd’hui (Ep 3 :17).

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Nous cultivons cette mémoire, qui se renforce lorsque nous sommes face au Seigneur, surtout lorsque nous nous laissons regarder et aimer par lui dans l’adoration. Mais nous pouvons aussi cultiver l’art du souvenir entre nous, chérir les visages que nous rencontrons. Je pense aux jours fatigants à l’hôpital, à l’université, au travail.

Nous risquons que tout se passe sans laisser de trace ou qu’il ne nous reste que beaucoup de fatigue et de lassitude. Cela nous fait du bien, le soir, de revoir les visages rencontrés, les sourires reçus, les bons mots. Ce sont des souvenirs d’amour qui aident notre mémoire à se retrouver : que notre mémoire se retrouve.

Quelle importance ces souvenirs dans les hôpitaux ! Ils peuvent donner un sens à un jour de maladie. Une parole fraternelle, un sourire, une caresse sur le visage : ce sont des souvenirs qui guérissent intérieurement, qui font du bien au cœur. N’oublions pas la thérapie de la mémoire : elle fait tant de bien !

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La passion est le deuxième mot. La passion. Le premier est la mémoire, le souvenir ; le second est la passion. Le Cœur du Christ n’est pas une pieuse dévotion pour sentir un peu de chaleur à l’intérieur, ce n’est pas une image tendre qui suscite l’affection, non, ce n’est pas cela. C’est un cœur passionné – il suffit de lire l’Évangile -, un cœur blessé par l’amour, déchiré pour nous sur la croix.

Nous avons entendu comment l’Évangile en parle : « Une lance le frappa au côté, et aussitôt il en sortit du sang et de l’eau » (Jn 19,34). Percé, il donne ; mort, nous donne la vie. Le Sacré-Cœur est l’icône de la passion : il nous montre la tendresse viscérale de Dieu, sa passion amoureuse pour nous, et en même temps, surmonté de la croix et entouré d’épines, il montre combien de souffrances a coûté notre salut.

Dans la tendresse et la douleur, ce Cœur révèle en somme quelle est la passion de Dieu. L’homme, nous. Et quel est le style de Dieu ? Proximité, compassion et tendresse. C’est le style de Dieu : proximité, compassion et tendresse.

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Qu’est-ce que cela suggère? Que, si nous voulons vraiment aimer Dieu, nous devons être passionnés par l’homme, par tout homme, spécialement celui qui vit la condition dans laquelle s’est manifesté le Cœur de Jésus, c’est-à-dire la douleur, l’abandon, le rejet ; surtout dans cette culture du jetable que nous vivons aujourd’hui. Lorsque nous servons ceux qui souffrent, nous consolons et réjouissons le Cœur du Christ.

Un passage de l’Évangile est frappant. L’évangéliste Jean, au moment même où il parle du côté transpercé, d’où coulent le sang et l’eau, rend témoignage parce que nous croyons (cf. v. 35). C’est-à-dire que saint Jean écrit qu’à ce moment-là le témoignage a lieu. Parce que le Cœur déchiré de Dieu est éloquent. Parler sans paroles, car c’est la miséricorde à l’état pur, l’amour qui blesse et donne la vie.

Il est Dieu, avec proximité, compassion et tendresse. Combien de mots disons-nous sur Dieu sans laisser transparaître l’amour ! Mais l’amour parle par lui-même, il ne parle pas de lui-même. Nous demandons la grâce d’être passionnée par l’homme qui souffre, d’être passionnée par le service, afin que l’Église, avant d’avoir des mots à dire, garde un cœur qui bat d’amour. Avant de parler, qu’il apprenne à garder le cœur amoureux.

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Le troisième mot est réconfort. Le premier était la mémoire, le second la passion, le troisième le réconfort. Il indique une force qui ne vient pas de nous, mais de ceux qui sont avec nous : la force vient de là. Jésus, le Dieu-avec-nous, nous donne cette force, son Cœur donne du courage dans l’adversité.

Tant d’incertitudes nous effraient : en cette période de pandémie nous nous sommes retrouvés plus petits, plus fragiles. Malgré tant de belles avancées, on le voit aussi dans le domaine médical : que de maladies rares et méconnues ! Quand je trouve, dans les auditions, des gens – surtout des garçons, des filles – et que je leur demande : « Tu es malade ? » – [ils répondent] « Une maladie rare ».

Combien il y en a aujourd’hui ! Qu’il est difficile de suivre les pathologies, les structures de soins, les soins qui sont vraiment comme il se doit, pour tous. Nous pourrions nous décourager. Pour cela, nous avons besoin de réconfort – le troisième mot -. Le Cœur de Jésus bat pour nous en battant toujours ces mots : « Courage, courage, n’aie pas peur, je suis là ! »

Courage sœur, courage frère, ne te décourage pas, le Seigneur ton Dieu est plus grand que tes maux, il te prend par la main et te caresse, il est près de toi, il est compatissant, il est tendre. Il est ton réconfort.

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Si nous regardons la réalité avec la grandeur de son Cœur, la perspective change, notre connaissance de la vie change car, comme nous l’a rappelé saint Paul, nous connaissons « l’amour du Christ qui surpasse toute connaissance » (Ep 3,19). Encourageons-nous avec cette certitude, avec la consolation de Dieu et demandons au Sacré-Cœur la grâce de pouvoir à notre tour consoler.

C’est une grâce qu’il faut demander, alors que nous nous engageons courageusement à nous ouvrir, à nous entraider, à porter les fardeaux les uns des autres. Cela vaut aussi pour l’avenir de la santé, en particulier de la santé « catholique » : partager, s’entraider, avancer ensemble.

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Que Jésus ouvre le cœur de ceux qui prennent soin des malades à la collaboration et à la cohésion. À ton Cœur, Seigneur, nous confions la vocation de soigner : fais-nous sentir comme précieux à toute personne qui s’approche de nous dans le besoin. Amen.

60e ANNIVERSAIRE DE L’INAUGURATION DE LA FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE CHIRURGIE DE L’UNIVERSITÉ CATHOLIQUE DU SACRÉ-CŒUR – HOMÉLIE DU SAINT-PÈRE FRANÇOIS Polyclinique « Agostino Gemelli » (Rome) – Vendredi 5 novembre 2021


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Texte traduit et présenté par l’Association de la Médaille Miraculeuse

Apprendre l’art d’attendre le Seigneur

Apprendre l’art d’attendre le Seigneur

Dans la première lecture, nous avons entendu cette invitation : « Il est bon d’attendre en silence le salut du Seigneur » (Lm 3,26). Cette attitude n’est pas un point de départ, mais un point d’arrivée. En fait, l’auteur y arrive au bout d’un chemin, un chemin cahoteux, qui l’a fait mûrir. Il en vient à comprendre la beauté de faire confiance au Seigneur, qui ne manque jamais à ses promesses.

Mais la confiance en Dieu ne naît pas d’un enthousiasme momentané, ce n’est pas une émotion ou même juste un sentiment. Au contraire, elle vient de l’expérience et mûrit dans la patience, comme cela arrive à Job, qui passe d’une connaissance de Dieu « par ouï-dire » à une connaissance vivante et expérientielle.

Attende Domine
Attende Domine

Et pour cela, il faut une longue transformation intérieure qui, à travers le creuset de la souffrance, conduit à savoir attendre en silence, c’est-à-dire avec une patience confiante, avec une âme douce. Cette patience n’est pas de la résignation, car elle se nourrit de l’attente du Seigneur, dont la venue est certaine et ne déçoit pas.

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Chers frères et sœurs, combien il est important d’apprendre l’art d’attendre le Seigneur ! L’attendant docilement, confiant, chassant les fantômes, les fanatismes et les clameurs ; préservant, surtout en temps d’épreuve, un silence plein d’espérance.

C’est ainsi que nous nous préparons à la dernière et plus grande épreuve de la vie, la mort. Mais il y a d’abord les épreuves du moment, il y a la croix que nous avons maintenant, et pour laquelle nous demandons au Seigneur la grâce de pouvoir attendre là, là, son salut à venir.

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Chacun de nous doit mûrir dans ce domaine. Face aux difficultés et aux problèmes de la vie, il est difficile d’avoir de la patience et de rester calme. L’irritation s’installe et souvent le découragement arrive.

Il peut ainsi arriver d’être fortement tenté par le pessimisme et la résignation, de voir tout noir, de s’habituer à des tons découragés et plaintifs, semblables à ceux de l’auteur sacré qui dit au début : « Ma gloire a disparu, l’espoir qu’elle me venait du Seigneur » (v. 18).

Dans l’épreuve, même les bons souvenirs du passé ne peuvent pas consoler, car l’affliction conduit l’esprit à s’attarder sur des moments difficiles. Et cela augmente l’amertume, il semble que la vie soit une chaîne continue de malheurs, comme l’auteur l’admet encore : « Le souvenir de ma misère et de mon errance est comme du poison » (v. 19).

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À ce stade, cependant, le Seigneur donne un tournant, précisément au moment où, tout en continuant à dialoguer avec lui, il semble toucher le fond. Dans l’abîme, dans l’angoisse du non-sens, Dieu s’approche pour sauver, à ce moment-là. Et quand l’amertume atteint son paroxysme, l’espoir refleurit soudain.

C’est mal d’atteindre la vieillesse avec un cœur amer, avec un cœur déçu, avec un cœur critique des choses nouvelles, c’est très dur. « J’ai l’intention de rappeler cela à mon cœur – dit la personne qui prie dans le Livre des Lamentations -, et pour cela je veux regagner l’espérance » (v. 21). Reprenez espoir dans le moment d’amertume.

Au milieu de la douleur, celui qui est proche du Seigneur voit qu’il dévoile la souffrance, l’ouvre, la transforme en une porte par laquelle entre l’espérance. C’est une expérience pascale, un passage douloureux qui ouvre à la vie, une sorte de travail spirituel qui dans l’obscurité nous fait revenir à la lumière.

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Ce tournant ne se produit pas parce que les problèmes ont disparu, non, mais parce que la crise est devenue une mystérieuse occasion de purification intérieure. La prospérité, en effet, nous rend souvent aveugles, superficiels, fiers. C’est ainsi que nous conduit la prospérité.

D’autre part, le passage de l’épreuve, s’il est vécu dans la chaleur de la foi, malgré sa dureté et ses larmes, nous fait renaître, et nous nous retrouvons différents du passé. Un Père de l’Église a écrit que « rien de plus que la souffrance ne conduit à découvrir de nouvelles choses » (Saint Grégoire de Naziance, Ep. 34).

L’épreuve se renouvelle, car elle fait tomber beaucoup de déchets et nous apprend à regarder au-delà, au-delà des ténèbres, à toucher de première main que le Seigneur sauve vraiment et qu’il a le pouvoir de tout transformer, même la mort. Il nous laisse traverser les goulets d’étranglement non pas pour nous abandonner, mais pour nous accompagner.

Oui, car Dieu accompagne, surtout dans la douleur, comme un père qui fait bien grandir son fils en restant près de lui dans les difficultés sans le remplacer. Et avant de pleurer sur notre visage, l’émotion a déjà rougi les yeux de Dieu le Père. Il pleure le premier, j’ose dire.

La douleur reste un mystère, mais dans ce mystère nous pouvons découvrir d’une manière nouvelle la paternité de Dieu qui nous visite dans l’épreuve, et venir dire, avec l’auteur des Lamentations : « Bon est le Seigneur avec ceux qui espèrent en lui, avec celui qui le cherche » (v. 5).

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Aujourd’hui, face au mystère de la mort rachetée, nous demandons la grâce de regarder l’adversité avec des yeux différents. Nous demandons la force de savoir vivre dans le silence doux et confiant qui attend le salut du Seigneur, sans se plaindre, sans grommeler, sans se laisser attrister. Ce qui semble être une punition se révélera être une grâce, une nouvelle démonstration de l’amour de Dieu pour nous.

Savoir attendre en silence – sans bavarder, en silence – le salut du Seigneur est un art, en route vers la sainteté. Cultivons-le. Elle est précieuse à l’époque que nous vivons : plus que jamais, nul besoin de crier, d’éveiller des clameurs, de s’aigrir ; chacun a besoin de témoigner de la foi, qui est une attente docile et pleine d’espérance de sa vie. La foi, c’est ça : une attente docile et pleine d’espoir.

Le chrétien ne diminue pas la gravité de la souffrance, non, mais il regarde vers le Seigneur et sous les coups de l’épreuve il se confie en lui et prie : il prie pour ceux qui souffrent. Il garde les yeux rivés sur le Ciel, mais ses mains sont toujours étendues sur le sol, pour servir concrètement son prochain. Même dans le moment de tristesse, d’obscurité, le service.

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Dans cet esprit, prions pour les cardinaux et les évêques qui nous ont quittés l’année dernière. Certains d’entre eux sont morts du Covid-19, dans des situations difficiles qui ont aggravé la souffrance. Que nos frères goûtent maintenant la joie de l’invitation évangélique, celle que le Seigneur adresse à ses fidèles serviteurs : « Venez, bénis de mon Père, héritez du royaume qui vous est préparé depuis la création du monde » (Mt 25 : 34)

MESSE AU SUFFRAGE DES CARDINAUX ET ÉVÊQUES DÉCÉDÉE AU COURS DE L’ANNÉEHOMÉLIE DU SAINT-PÈRE FRANÇOISBasilique Saint-Pierre Jeudi 4 novembre 2021


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Texte traduit et présenté par l’Association de la Médaille Miraculeuse

Marcher selon l’Esprit, un itinéraire d’amour fraternel

Marcher selon l’Esprit, un itinéraire d’amour fraternel

Lors de l’audience générale de ce mercredi 3 novembre, Le Pape François a poursuivi son commentaire de la lettre de saint Paul aux Galates. l’Apôtre y exhorte les chrétiens à «marcher selon l’Esprit». Une voie qui exige de faire place à la grâce et à la charité.
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PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Salle Paul VI
Mercredi 3 novembre 2021

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Catéchèse sur la Lettre aux Galates – 14. Marcher selon l’Esprit

Résumé de la catéchèse du Saint-Père :

Frères et Sœurs, Saint Paul exhorte les chrétiens à marcher selon l’Esprit Saint. En effet, croire en Jésus c’est aller à sa suite, à l’exemple des premiers disciples. L’Esprit nous guide sur ce chemin, nous donnant d’en haut la force pour ne pas nous arrêter devant les difficultés ni les impulsions de l’égoïsme et de l’orgueil que l’Apôtre appelle les désirs de la chair.

Le mal est présent dans le monde, mais Dieu est plus fort que nos résistances et plus grand que nos péchés. Cette marche selon l’Esprit n’est pas individuelle, elle concerne toute la communauté. Construire cette communauté est souvent difficile : la grâce et la charité sont nécessaires.

Saint Paul recommande à chacun d’avoir souci des difficultés des autres, mais en évitant de les juger si nous sommes appelés à les corriger, et en nous souvenant de notre propre fragilité. La règle suprême de la correction fraternelle est l’amour que donne l’Esprit et qui nous inspire douceur et solidarité. Marchons avec patience et avec joie dans cette voie en nous laissant guider par le Saint Esprit.

CATÉCHÈSE

Chers frères et sœurs, bonjour !

Dans le passage de la Lettre aux Galates que nous venons d’écouter, saint Paul exhorte les chrétiens à marcher selon l’Esprit Saint (cf. 5,16.25). Il existe un style : marcher selon le Saint-Esprit. En effet, croire en Jésus signifie le suivre, aller derrière sur son chemin, comme l’ont fait les premiers disciples.

Et en même temps, cela signifie éviter le chemin opposé, celui de l’égoïsme, de la recherche de son propre intérêt, que l’Apôtre appelle « le désir de la chair » (v. 16). L’Esprit est le guide de cette marche sur le chemin du Christ, un cheminement merveilleux mais aussi fatigant qui commence au baptême et dure toute la vie.

Pensons à une longue randonnée en haute montagne : elle est fascinante, l’objectif nous attire, mais requiert beaucoup d’efforts et de ténacité.

Cette image peut nous être utile pour entrer dans le mérite des paroles de l’Apôtre : « marcher selon l’Esprit », « se laisser guider » par Lui. Ce sont des expressions qui indiquent une action, un mouvement, un dynamisme qui nous empêche de nous arrêter aux premières difficultés, mais nous pousse à faire confiance à la « force qui vient d’en haut » (Pasteur d’Hermas, 43, 21).

En suivant ce chemin, le chrétien acquiert une vision positive de la vie. Cela ne signifie pas que le mal présent dans le monde a disparu, ni que les impulsions négatives de l’égoïsme et de l’orgueil ont disparu ; cela signifie plutôt croire que Dieu est toujours plus fort que nos résistances et plus grand que nos péchés. Et ceci est important : croire que Dieu est plus grand, toujours. Plus grand que nos résistances, plus grand que nos péchés.

En exhortant les Galates à suivre cette voie, l’Apôtre se met à leur niveau. Il abandonne le verbe à l’impératif – « marchez » (v. 16) – et il utilise le « nous » à l’indicatif: « marchons selon l’Esprit » (v. 25). Comme pour dire : marchons sur la même ligne et laissons-nous guider par l’Esprit Saint.

C’est une exhortation, un mode exhortatif. Cette exhortation Saint Paul la ressent également comme nécessaire pour lui-même. Bien qu’il sache que le Christ vit en lui (cf. 2,20), il est également convaincu qu’il n’a pas encore atteint le but, le sommet de la montagne (cf. Ph 3,12).

L’Apôtre ne se place pas au-dessus de sa communauté, il ne dit pas : « Je suis le chef, vous êtes les autres ; j’ai atteint le sommet de la montagne et vous êtes en chemin » – il ne dit pas cela -mais il se place au milieu du cheminement de tous, pour donner l’exemple concret de la nécessité d’obéir à Dieu, en répondant toujours plus et toujours mieux à la direction de l’Esprit.

Et comme c’est beau quand on trouve des pasteurs qui marchent avec le [il dit : son] peuple, qui ne se séparent pas ; « Non, je suis plus important, je suis un pasteur ».  Toi … », « Je suis prêtre », « Je suis évêque », avec le nez en l’air. Non : des pasteurs qui marchent avec le peuple. C’est tellement beau. Ça fait du bien à l’âme.

Cette « marche selon l’Esprit » n’est pas seulement une action individuelle : elle concerne aussi la communauté dans son ensemble. En effet, construire la communauté en suivant le chemin indiqué par l’Apôtre est enthousiasmant, mais exigeant.

Les « convoitises de la chair », « les tentations » – pour ainsi dire – que tous nous avons, c’est-à-dire les envies, les préjugés, les hypocrisies et les ressentiments continuent à se faire sentir, et le recours à des préceptes rigides peut être une tentation facile, mais ce faisant, on s’écarterait du chemin de la liberté et, au lieu de monter au sommet, on retournerait vers le bas.

Suivre le chemin de l’Esprit exige tout d’abord que nous fassions de la place à la grâce et à la charité. Faire place à la grâce de Dieu. Ne pas avoir peur. Après avoir fait entendre sa voix de manière sévère, Paul invite les Galates à prendre en charge les difficultés des uns et des autres et, si quelqu’un devait commettre une erreur, à faire preuve de douceur (cf. 5,22).

Écoutons ses paroles :  » Frères, si quelqu’un est pris en faute, vous, les spirituels, remettez-le dans le droit chemin en esprit de douceur ; mais prenez garde à vous-mêmes : vous pourriez être tentés, vous aussi. Portez les fardeaux les uns des autres : ainsi vous accomplirez la loi du Christ. » (6,1-2).

Une attitude très différente de celle qui consiste à jaser quand on voit quelque chose, jacasser contre cela, n’est-ce pas ? Éplucher [cancaner sur] son prochain. Non, cela n’est pas selon l’Esprit. Selon l’Esprit, c’est avoir cette douceur avec notre frère pour le corriger et veiller sur nous-mêmes pour ne pas tomber dans ces péchés, c’est l’humilité.

En effet, lorsque nous sommes tentés de mal juger les autres, comme c’est souvent le cas, nous devons d’abord réfléchir à notre propre fragilité. Comme il est facile de critiquer les autres ! Mais il y a des gens qui semblent avoir un diplôme en commérage. Tous les jours, ils critiquent les autres. Mais regarde-toi toi-même !

Il est bon de se demander ce qui nous pousse à corriger un frère ou une sœur, et si nous ne sommes pas en quelque sorte coresponsables de son erreur. L’Esprit Saint, en plus de nous faire le don de la douceur, nous invite à la solidarité, à porter les fardeaux des autres. Combien de fardeaux existent-ils dans la vie d’une personne : maladie, manque de travail, solitude, douleur… !

Et tant d’autres épreuves qui nécessitent la proximité et l’amour de nos frères et sœurs ! Les paroles de Saint Augustin peuvent également nous aider lorsqu’il commente ce même passage :  » Ainsi donc, frères, si quelqu’un est pris en défaut, […] corrigez-le de cette manière, avec douceur, avec douceur. Et si vous élevez la voix, aimez intérieurement.

Soit que tu encourages, que tu te montres paternel, soit que tu reprennes, que tu sois sévère, aime » (Sermons 163/B 3). Aime toujours. La règle suprême de la correction fraternelle est l’amour : vouloir le bien de nos frères et sœurs. Et il s’agit aussi de tolérer les problèmes des autres, les défauts des autres en silence dans la prière, pour ensuite trouver la méthode adéquate pour l’aider à se corriger. Et ce n’est pas facile.

Le moyen le plus simple c’est le bavardage. Raconter des ragots sur l’autre personne [l’éplucher] comme si moi j’étais parfait. Et on ne devrait pas faire comme cela. Douceur. Patience. Prière. Proximité.

Marchons joyeusement et patiemment sur ce chemin, en nous laissant guider par l’Esprit Saint. Merci.


Je salue cordialement les fidèles de langue française, en particulier les jeunes confirmés du Diocèse de Séez, et tous les pèlerins venus de France. Nous nous souvenons ces jours-ci de nos chers défunts. Que l’Esprit Saint nous aide à marcher vigilants dans la prière et fidèles à la parole de Jésus, en attendant de les retrouver un jour dans la joie du ciel. Que Dieu vous bénisse !

Je salue les visiteurs anglophones qui participent à l’audience d’aujourd’hui, en particulier ceux d’Angleterre et des États-Unis d’Amérique, ainsi que le groupe d’aumôniers militaires américains réunis à Rome ces jours-ci. Sur vous tous et vos familles, j’invoque la joie et la paix du Seigneur. Que Dieu vous bénisse!

Je salue cordialement les fidèles germanophones. Rappelons-nous que la communion de l’Église inclut non seulement nos frères et sœurs de ce monde, mais aussi nos proches décédés. Marchant dans l’Esprit, accomplissons donc l’œuvre de miséricorde spirituelle en priant pour eux afin qu’ils puissent bientôt atteindre le but de la vision éternelle de Dieu.

Je salue cordialement les pèlerins hispanophones. Je vous invite à vous laisser interpeller par les paroles de saint Paul : Marchons-nous selon l’Esprit ou restons-nous enfermés dans des désirs mondains ? Si nous nous laissons guider par l’Esprit, nous sommes aussi appelés à accompagner ceux qui souffrent le plus, à prier pour eux, à les aider concrètement. Je vous encourage à continuer sur cette voie avec patience et joie. Que Dieu vous bénisse. Merci beaucoup.

Chers frères et sœurs de langue portugaise : hier, nous nous sommes souvenus de tous nos chers disparus. N’oublions pas que pour arriver au but, au bout du chemin de cette vie terrestre, il faut se laisser guider par l’Esprit. Sur vous tous et vos proches, j’invoque la bénédiction de Dieu.

Je salue les fidèles arabophones. L’Esprit Saint, en plus de nous faire don de la douceur, nous invite à la solidarité, à porter les fardeaux des autres, et nous exhorte à les corriger. De là nous comprenons que la règle suprême de la correction fraternelle est l’amour : vouloir le bien de nos frères et sœurs. Que le Seigneur vous bénisse tous et vous protège toujours de tout mal !

Je salue cordialement tous les Polonais. Hier, célébrant la commémoration de tous les fidèles disparus, nous avons confié nos proches à la Miséricorde Divine et, en particulier, ceux qui attendent notre aide priante pour entrer dans la joie de la vie éternelle.

La prière pour les morts, soutenue par l’espérance que nous donne le Christ ressuscité, n’est pas la célébration du culte de la mort, mais c’est un acte de charité envers nos frères et sœurs et un port des fardeaux les uns des autres. Je vous bénis de tout cœur !

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J’adresse un salut cordial aux pèlerins de langue italienne, en particulier au groupe Amici dello Sport de Falconara Marittima et aux fidèles de la paroisse de Bellagio (Côme). Je vous exhorte à témoigner dans chaque environnement de l’amour infini dont Dieu entoure chaque homme.

Enfin, mes pensées vont, comme d’habitude, aux personnes âgées, aux malades, aux jeunes et aux jeunes mariés.

La solennité de la Toussaint et la commémoration des Fidèles Morts, que nous avons célébrées récemment, nous offrent l’occasion de réfléchir, une fois de plus, sur le sens de l’existence terrestre et sa valeur pour l’éternité. Que ces journées de réflexion et de prière soient une invitation pour tous à imiter les saints, qui sont restés fidèles au dessein divin tout au long de leur vie.

Ma bénédiction à chacun de vous.


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