Archives de catégorie : Méditation

sur un aspect de spiritualité : Christ, Vierge Marie, Église dans le monde…

LE MOIS DE SAINT JOSEPH – IIe JOUR

LE MOIS DE SAINT JOSEPH – IIe JOUR

Saint Joseph figuré par le patriarche Joseph dans l’Ancien Testament

I

Albert le grand

Le songe du patriarche Joseph Ancien Testament - cathédrale de Bourges
Le songe du patriarche Joseph Ancien Testament – cathédrale de Bourges

« Chaque personnage de l’Ancien Testament a une signification prophétique conforme aux traits principaux de son caractère et de sa vie. Si donc on se demande quel est celui d’entre eux qui a été la figure de saint Joseph, on peut douter, au premier abord, que ce soit le premier Joseph, fils de Jacob ; car celui-ci paraît avoir été plutôt l’image de Notre-Seigneur, comme ayant été le fils, de Rachel, né dans la vieillesse de son père, comme ayant été vendu, comme ayant été destiné à délivrer son peuple et à sauver son pays.

« Cependant, si l’on étudie de plus près les analogies des Écritures, on reconnaît qu’à une seule et même personne est attribué, dans l’Ancien Testament, des symboles divers et multiples. Ainsi, quand on raconte qu’il fut dit à Abraham : Prends ton fils, le saint patriarche était la figure de Dieu le Père, qui n’épargna pas son propre Fils ; et ailleurs, quand il lui fut ordonné de sortir de la terre de Canaan, il figurait Jésus-Christ, qui était sorti de sa patrie céleste et de sa famille, c’est-à-dire du sein de son Père, pour venir en ce monde. Enfin, quand on raconte du même Abraham qu’il s’assit sous le portique de sa tente durant la chaleur du jour, c’est qu’il figure alors les anciens patriarches, qui s’assirent à l’ombre de la loi, et attendirent avec de fervents désirs l’incarnation du Verbe.

« On peut donc admettre aussi que le premier Joseph figurait Notre-Seigneur dans sa captivité, dans sa délivrance, et dans son action de libérateur du peuple égyptien; mais dans sa fidélité, dans sa chasteté, dans la révélation qui lui fut faite des secrets divins et dans la charge qui lui fut confiée pour la conservation des fruits de la terre, il figurait le second Joseph.
Son nom de Joseph, qui veut dire progrès, lui convient d’ailleurs admirablement : il exprime la progression ascendante de ses vertus et de sa sainte renommée, la piété et le respect croissant dont il a été l’objet de la part des hommes; il exprime aussi la hauteur sublime où l’a élevé sa mission auprès du Sauveur et de la Vierge mère.
Que, si vous le comparez maintenant au grand patriarche jadis vendu sur la terre d’Égypte, vous trouverez qu’en recevant le même nom, Joseph de Nazareth fut revêtu de la même chasteté, doté de la même innocence et de la même grâce.
En effet, le patriarche Joseph, vendu et conduit en Égypte par suite de la haine que lui portaient ses frères, tout en représentant le Christ, qui devait être vendu par un traître, représente aussi saint Joseph, fuyant de son pays pour se dérober à la haine d’Hérode, et emportant le Christ en Égypte.
Le premier, repoussant de perfides suggestions, demeura fidèle à son maître ; le second, reconnaissant dans son épouse la Mère de Dieu, resta son chaste gardien et son protecteur fidèle.
L’un eut l’intelligence des songes, l’autre fut le témoin et le ministre des mystères célestes : l’un garda les blés en vue de la famine, non-seulement pour lui, mais pour tout le peuple ; l’autre reçut, pour le conserver au monde entier, le pain vivant descendu du ciel.
Oui, le fidèle et prudent serviteur du roi d’Égypte fut en réalité la figure du fidèle et prudent serviteur de Dieu, homme juste par excellence, que Jésus-Christ élut pour être le consolateur de sa Mère, le père nourricier de son humanité, et l’auxiliaire discret de ses grands desseins sur le monde.

« En étudiant la vie du premier Joseph, on voit donc combien les traits d’un tel caractère convenaient au second Joseph, à celui qui s’acquitta de sa mission protectrice envers la Mère de Dieu et son divin Fils avec la plus scrupuleuse fidélité, et qui éprouva pour eux, en remplissant ce ministère sacré, les sentiments du père le plus dévoué et de l’époux le plus tendre. »
(Albert le grand – Question sur le Messie, p. 42. Ce parallèle entre les deux Joseph, qui met en relief plusieurs traits importants de la figure de saint Joseph, a été souvent reproduit par les Pères de l’Église et par les auteurs mystiques, entre autres par saint Bernard, saint Bernardin de Sienne, saint Pierre Chrysologue, saint Augustin , etc.)

On le retrouve aussi dans le décret du Souverain Pontife. « De même, y est-il dit, que Dieu avait constitué Joseph, fils du patriarche Jacob, intendant de la terre d’Égypte, afin qu’il mit du blé en réserve pour le peuple, ainsi, au moment de la plénitude des temps où il devait envoyer sur la terre son Fils unique le Sauveur du monde, il choisit un autre Joseph dont le premier avait été la figure, il le fit maître et prince de sa maison et de son héritage, et lui donna la garde de ses principaux trésors. » Décret du 8 décembre 1870.)

II

Saint Alphonse de Liguori

« Figurons-nous donc, chrétiens, que le Seigneur, nous voyant dans la peine, nous dit à tous les paroles que Pharaon disait à son peuple pendant la famine de l’Égypte : Allez à Joseph. Allons donc à Joseph, si nous voulons être secourus et consolés. Grâce à Dieu, il n’y a maintenant au monde aucun chrétien qui n’ait de la dévotion à ce grand saint; mais ceux qui en reçoivent le plus de grâces sont ceux qui l’invoquent le plus souvent et avec le plus de confiance.
Aussi ne manquons jamais chaque jour, et plusieurs fois par jour, de nous recommander à lui, puisque sa puissance auprès de Dieu l’emporte sur celle de tous les autres saints, et n’est surpassée que par celle de la sainte Vierge. Adressons-lui habituellement quelques prières spéciales; ayons soin de les multiplier pendant sa neuvaine, et de faire avec fidélité le jeûne de sa vigile. Mais que notre culte se tourne surtout à étudier sa vie et à imiter ses vertus. » (Sermon sur saint Joseph.)

« 0 bienheureux Joseph!
nous vous appelons à notre aide dans les souffrances
de la ténébreuse Égypte,
où nous sommes exilés.
Comme l’illustre patriarche
dont la prudence conserva le pain à son peuple,
soyez notre sauveur,
et ranimez les forces de ceux qui vont mourir de faim. »

« Compatiens esto, hos heu retinet tenebrosa
Torquet et AEgyptus, sis salvator velut alter,
Egregius patriarcha Joseph frumenta recondens
Providus. O jam jamque ferme refove precantes. »
(Josephina, de Gerson.)

La charité n’est point envieuse (1 Co 13,4)

La charité n’est point envieuse (1 Co 13,4)

VENDREDI (2e semaine de Carême) : Gn 37,3…28 – Mt 21.33…46

La charité 1 Co13 4
La charité 1 Co13 4

Ses frères virent que son père l’aimait plus que tous ses autres fils, ils se mirent à le détester (Gn 37,4)

Il ne faut point s’imaginer que les pharisiens et les enne­mis de Jésus Christ fussent d’autres hommes que nous ; ni que l’envie qu’ils avaient conçue contre lui fût d’une autre espèce que celle qui nous est connue ; ni que l’orgueil qui en était le principe n’eût aucun rapport avec le nôtre.

Ils voulaient en être estimés, et l’être pour la vertu et pour la piété. Ils auraient applaudi aux miracles de Jésus Christ s’il avait voulu dépendre d’eux en quelque sorte, en s’appuyant de leur faveur, et s’il n’avait condamné leur ambition et leur hypocrisie. Ils se portèrent aux dernières extrémités contre lui, en suivant par degrés les pernicieux conseils que l’envie ne manque jamais de suggérer quand on n’y résiste pas.

Ils furent punis de leur malice par la terrible punition de la satisfaire ; et de leurs ténèbres volontaires, par un aveuglement surnaturel. Ces châtiments sont dus à l’envie, et quiconque en reçoit le poison doit craindre qu’il ne pro­duise en lui les mêmes effets, quoique les circonstances extérieures soient différentes.

Car Dieu rejette avec horreur et avec mépris les envieux, dit saint Ambroise, et leur refuse la grâce, lors même qu’ils paraissent la demander, en punition de ce qu’ils la persécu­tent dans leurs frères dont la piété les blesse et les irrite ; et il détourne d’eux les miracles de sa miséricorde, parce que c’est l’éclat même de ces miracles qui les éblouit et les offense, quand il les fait pour les autres.

L’horreur qu’une telle injustice, frappée d’une telle malé­diction, nous cause pour des moments, n’est pas le remède de l’envie, ni une preuve qu’on en soit exempt. Il faut s’en assurer par d’autres témoignages, et se demander souvent à soi-même si l’on respecte sincèrement dans les autres les dons de Dieu ;
si l’on applaudit à sa miséricorde, dès qu’on en voit des vestiges dans ceux mêmes qui paraissent moins favorables à notre égard ; si l’on en rend grâces avec eux, et pour eux ; si l’on est bien aise qu’ils soient estimés, et plus que nous ; si l’on s’afflige avec vérité et en secret de leurs fautes ;
si l’on est préparé à les couvrir lorsqu’il est inutile ou dangereux d’en donner connaissance ;
si l’on consent à n’être rien aux yeux des hommes, et si l’on con­naît la justice, aussi bien que la sûreté d’un état obscur ;
enfin si l’on est véritablement appliqué à faire valoir le mérite et les talents des autres, dans les mêmes choses, où l’on pourrait espérer, ou la préférence, ou l’égalité. On ne se trompe point à de telles marques.

Mais il faut qu’elles soient vraies, autrement l’on passe successivement d’une disposition qui paraissait tranquille à une autre pleine d’agitations et d’inquiétudes. On est content pour des moments et ensuite affligé.

On croit ne rien désirer et peu de temps après on est plein de projets et de désirs. On fait au dehors quelque bien par intervalle, par humeur, selon que l’amour-propre est satisfait ou blessé ; mais, dans le fond, tout est injuste aux yeux de Dieu : car rien n’est plus véritable que cette parole de l’apôtre saint Jacques, qu’il n’y a qu’inconstance et désordre et que tout est mauvais où règne la jalousie et l’esprit de contention.

Jacques-Joseph Duguet Explication des  différents caractères que saint Paul donne  à   la charité « La Vie Spirituelle», mars 1945, p. 175-176.

MOIS DE SAINT JOSEPH – 1er JOUR

MOIS DE SAINT JOSEPH – 1er JOUR

PIERRE D’AILLY : Exposition des douze gloires de saint Joseph.

Georges-de-la-Tour-Le-songe-de-saint-Joseph-XVIIe-siècle
Georges-de-la-Tour-Le-songe-de-saint-Joseph-XVIIe-siècle

« Si nous réunissons tout ce que les Écritures et les Évangiles rapportent de saint Joseph , nous y trouvons un sujet incomparable de louange pour ce saint homme dans les éminents privilèges dont il a été comblé. Aussi notre sainte mère l’Église célèbre-t-elle par de joyeuses fêtes les gloires qui le couronnent.

« La première gloire de saint Joseph est d’être né de la lignée de David, comme l’atteste l’Évangile, en terminant ainsi la généalogie de Jésus : « Christ, fils d’Abraham et de David : Jacob, qui engendra Joseph, époux de Marie, de laquelle est né le Christ. »

« La 2e gloire de saint Joseph est d’avoir été le véritable et proche parent de la Vierge Marie et de son divin fils Jésus-Christ; puisqu’il est prouvé, par le témoignage des Écritures, que tous les trois sont nés de la race de David, et que l’Évangéliste l’atteste non-seulement à l’occasion de saint Joseph, mais aussi de son épouse Marie.

« La 3e gloire de saint Joseph est d’avoir été uni par le mariage à la Vierge mère de Dieu, comme le rappellent souvent les Évangiles dans des textes tels que celui-ci : Une Vierge fiancée à un homme nommé Joseph, époux de Marie. Et cela non point en vertu d’un lien vulgaire, mais en vertu d’un contrat sacré et par le lien du saint amour.

« La 4e gloire de saint Joseph lui est décernée avec le titre de vierge. Assurément Joseph était l’époux de Marie lorsque l’ange Gabriel lui apparut, et lui dit : Voilà que vous concevrez et enfanterez un fils auquel vous donnerez le nom de Jésus ; et elle répondit : Comment cela se fera-t-il? car elle gardait le dessein de conserver une virginité perpétuelle, du consentement de son époux.

« La 5e gloire de saint Joseph est d’avoir été choisi pour servir non-seulement là Vierge, mais son fils Jésus ; car, outre plusieurs rai sons générales, les saints reconnaissent certaines raisons spéciales du mariage de Joseph avec Marie. Le mariage fut fait, d’après eux :
1° pour que la naissance de Jésus-Christ fût cachée au démon ;
2° pour que saint Joseph fût le témoin de cette naissance, et qu’il défendît la Vierge de tout soupçon ;
3° pour qu’elle ne fût pas sujette à subir les rigueurs de la loi mosaïque; enfin pour que la mère comme le fils eussent un protecteur et un nourricier.

« La 6e gloire de saint Joseph est que le mystère de l’Incarnation lui fut révélé comme à un dépositaire des secrets célestes par le ministère de l’ange qui lui apparut durant son sommeil, et lui dit : Ne craignez par de garder avec vous Marie votre épouse, car ce qui est né d’elle est formé non par l’œuvre humaine, mais par l’œuvre divine, et provient du souffle mystique de l’Esprit-Saint. L’ange ne révéla pas seulement à Joseph le mystère de l’Incarnation, mais aussi par ce mystère celui de la Rédemption du genre humain. Elle enfantera un fils à qui on donnera le nom d’Emmanuel ; et expliquant la signification de ce nom, ce qui veut dire Dieu avec nous.

« La 7e gloire de saint Joseph ressort de ce témoignage de l’Évangile, que Joseph était un homme juste, c’est-à-dire éprouvé dans la foi, l’espérance, la charité, et dans la pratique de toutes les vertus; car, sous le nom de justice, la sainte Écriture exprime généralement la sainteté d’une vie sans tache. C’est pourquoi Joseph était juste comme son père Abraham, qui crut en Dieu, et dont Dieu proclama la justice. Joseph, lui aussi, crut que le Messie naîtrait non4’un homme, mais du Saint-Esprit, d’une femme vierge et de la race de David ; ainsi il fut justifié par sa foi, et mérita d’être appelé juste.

« La 8e gloire de saint Joseph est que ce nom de Jésus, voulu de Dieu dans l’éternité, révélé par l’ange dans le temps, Joseph fut chargé de le communiquer solennellement aux hommes, selon l’ordre du messager céleste : Vous l’appellerez Jésus. Précepte clairement formulé et scrupuleusement exécuté ; car, après huit jours, l’enfant fut circoncis; il fut appelé Jésus, parce que l’ange l’avait ainsi nommé avant même qu’il fût conçu dans le sein de sa mère.

« La 9° gloire de saint Joseph résulte de ce que plusieurs grands mystères de notre foi se sont accomplis en sa présence. C’est en sa présence que le Christ naquit, et que les pasteurs proclamèrent ses merveilles; car, selon le témoignage de l’Évangile, ils trouvèrent Marie et Joseph, et l’enfant couché dans une crèche. C’est en sa présence que le Christ fut circoncis, et que les prémices de ce sang innocent furent répandues. Alors commençait la passion du Christ pour nous, et la compassion de Joseph pour le Christ. C’est en sa présence qu’il fut adoré par les Mages ; c’est en sa présence qu’il enseigna dans le Temple quand Marie et lui le perdirent à Jérusalem.

« La 10e gloire de saint Joseph est d’avoir été instruit non-seulement par les oracles des anciens prophètes, mais par ceux des nouveaux; car le vieillard Siméon bénit l’enfant Jésus et prédit à Joseph la passion du Christ, quand il dit à Marie, sa mère : Votre cœur sera transpercé d’un glaive de douleurs.

« La 11e gloire de saint Joseph est d’avoir été instruit non-seulement par la voix d’un prophète, mais par les entretiens familiers et intimes des anges. Car nous avons entendu quatre fois les paroles du messager céleste résonner à ses oreilles :
1° Lorsqu’il songeait à se séparer de Marie, l’ange lui dit : Ne craignez pas de garder avec vous Marie votre épouse.
2° Lorsqu’allait éclater la persécution d’Hérode : Levez-vous, hâtez-vous de prendre l’Enfant et sa mère, fuyez en Égypte.
3° Après la mort d’Hérode : Levez-vous, et retournez dans la terre d’Israël; car ceux qui en voulaient à la vie de l’Enfant sont morts.
4° Lorsque, revenant en Israël, il craignait Archélaüs, fils d’Hérode, l’ange lui ordonna de se retirer en Galilée.

« La 12e gloire de saint Joseph est que non-seulement la Mère de Dieu, la Reine et la maîtresse du ciel, mais le Fils de Dieu, mais le Roi devant lequel tout genou fléchit dans le ciel, sur la terre et dans les enfers, comme l’attestent les Écritures et l’Évangile historique, ont voulu être placés l’un et l’autre sous la dépendance de saint Joseph. Car, puisque l’homme est le chef de la femme, qui pourrait douter que la bienheureuse Vierge n’ait été soumise à son époux, et sous sa puissance ? L’Évangile témoigne aussi du Fils qu’il leur était soumis : à eux, à Marie et à Joseph. Oh ! étonnante merveille ! oh ! nouveauté admirable ! Oh ! incomparable humilité ! le Maître obéit à son serviteur, et Dieu s’abaisse devant un homme. »

Pierre d’Ailly , chancelier de l’Université de Paris, et évêque de Cambrai au XVe siècle.